L'entérovirus D68 au Canada
Publié par : L’Agence de la santé publique du Canada
Numéro : Volume 42-1 : Maladies infectieuses émergentes
Date de publication : 7 janvier 2016
ISSN : 1719-3109
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Volume 42-1, le 7 janvier 2016 : Maladies infectieuses émergentes
Science de la mise en oeuvre
Surveillance de l’émergence de l’entérovirus D68 au Canada : une évaluation
Reyes Domingo F1*, McMorris O1, Mersereau T1
Affiliation
1 Centre de l’immunisation et des maladies espiratoires infectieuses, Agence de la santé publique du Canada, Ottawa (Ontario)
Correspondance
Citation proposée
Reyes Domingo F, McMorris O, Mersereau T. Surveillance de l’émergence de l’entérovirus D68 au Canada : une évaluation. Relevé des maladies transmissibles au Canada 2016;42:4-9. https://doi.org/10.14745/ccdr.v42i01a01f
Résumé
Contexte : À l'automne 2014, en réponse à l'éclosion d'un pathogène des voies respiratoires émergeant, l'entérovirus D68 (EV-D68), qui a touché principalement les enfants, un projet pilote de surveillance rapide temporaire des cas d'hospitalisation a été dirigé dans sept provinces et territoires canadiens.
Objectif : Évaluer si les objectifs du projet pilote visant l'EV-D68 ont été atteints et déterminer les avantages et les leçons tirées d'un système de surveillance permettant une intervention rapide pour les agents pathogènes émergents.
Méthodologie : Une enquête d'évaluation a été créée et dirigée par l'intermédiaire d'un lien sécurisé en ligne. L'ensemble des partenaires provinciaux, territoriaux et fédéraux participant au projet pilote a été invité à réaliser une enquête par province et territoire (N = 17). Les proportions ont été calculées pour les réponses aux questions fermées et des thèmes récurrents ont été définis pour les questions ouvertes.
Résultats : Cinquante-quatre pour cent (7/13) des partenaires provinciaux et territoriaux et 50 % (2/4) des partenaires fédéraux ont réalisé l'enquête. Les quatre objectifs du projet pilote ont été atteints dans une certaine mesure. Tous les répondants ont convenu que les initiatives de surveillance rapide des agents pathogènes émergents présentaient d'importants avantages, y compris la capacité à : mieux comprendre les caractéristiques épidémiologiques et cliniques, ainsi que les risques des agents pathogènes émergents (66,7 %) pour la santé publique; servir de base aux mesures de santé publique (66,7 %); collaborer et éviter le dédoublement des travaux (11,1 %); tester et mettre en place une capacité de la province ou du territoire (11,1 %) et guider les mesures d'intervention à venir (11,1 %). La réception des résumés des cas en temps opportun (de préférence chaque semaine) a été déterminée comme étant aussi tout aussi importante pour 88 % des répondants. Quant aux leçons retenues, plus de la moitié des répondants (66,7 %) ont indiqué que les processus actuels devaient être améliorés de manière à faciliter les initiatives de surveillance rapide au sein des provinces et des territoires et à l'échelle de ces derniers, et qu'il était nécessaire d'élaborer des ententes sur le partage des données et d'avoir des protocoles préexistants. Les facteurs importants déterminés pour une plateforme de déclaration des données comprenaient : facilité d'utilisation des fonctionnalités, sécurité des données, contrôle des provinces et territoires, structure en ligne et flexibilité pour répondre aux besoins changeants en matière de surveillance.
Conclusion : Les résultats de l'évaluation découlant du projet pilote de surveillance de l'EV-D68 constitueront une aide pour les initiatives à venir de surveillance rapide. Il est important que les leçons retenues soient traitées avant l'émergence du prochain agent pathogène émergent.
Introduction
L'entérovirus D68 (EV-D68) est un entérovirus non poliomyélitique souvent à l'origine de symptômes légers tels qu'un rhume ou de la fièvre; toutefois, des symptômes respiratoires plus graves, comme une difficulté à respirer ou une respiration sifflante, peuvent être signalés chez les personnes, en particulier les enfants ayant des antécédents d'asthme ou d'autres affections préexistantes Note de bas de page 1. Avant 2014, l'EV-D68 a rarement été signalé au Canada. Le Laboratoire national de microbiologie (LNM) n'a décelé que 85 isolats positifs d'EV-D68 de 1990 au début de l'année 2014 Note de bas de page 2.
Au cours de l'automne 2014, une éclosion bien plus importante du virus EV-D68 s'est produite au Canada et aux États-Unis Note de bas de page 3Note de bas de page 4. L'éclosion au Canada a provoqué de graves maladies respiratoires nécessitant une hospitalisation de plus de 200 enfants Note de bas de page 3 et a entraîné plusieurs décès Note de bas de page 5 ainsi que des cas présentant des symptômes neurologiques Note de bas de page 3Note de bas de page 5.
Surveillance nationale des infections respiratoires émergentes
Chaque province et chaque territoire sont responsables de l'administration et la prestation de services de soins de santé au Canada Note de bas de page 6; par conséquent, une collaboration fédérale, provinciale et territoriale et un partage des données sont requis pour obtenir des renseignements sur la surveillance à l'échelle nationale. L'établissement d'un système de surveillance national des agents pathogènes émergents comporte des défis. Bien que le nouveau virus de la grippe aviaire et le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) doivent désormais être déclarés à l'échelle nationale Note de bas de page 7 d'une manière générale, les mécanismes de déclaration dans le cadre de la surveillance nationale des agents pathogènes émergents ne sont ni disponibles, ni bien établis. En outre, la mise en place d'un système de surveillance nécessite des efforts et un investissement Note de bas de page 8 et cela peut s'avérer difficile lorsqu'une éclosion se produit, comme ce fut le cas lors de l'éclosion du SRAS de 2003 au Canada Note de bas de page 9.
Projet pilote de surveillance des effets graves de l'EV-D68
Avant l'éclosion de 2014, les maladies dues à l'EV-D68 étaient rares et il ne s'agissait pas d'une maladie à déclaration obligatoire à l'échelle nationale. À l'automne 2014, des préoccupations concernant les premiers signalements de maladies respiratoires graves dans les cas d'EV-D68 au Canada, associées à un manque de renseignements cliniques et épidémiologiques sur l'EV-D68 en général, a amené l'Agence de la santé publique du Canada (l'Agence), en collaboration avec certains partenaires fédéraux, provinciaux et territoriaux, à lancer un projet pilote de surveillance permettant une intervention rapide pour recueillir des données aux fins de déclaration à l'échelle nationale dans les semaines qui suivent l'éclosion. Les 13 partenaires provinciaux et territoriaux ont été invités à participer au projet pilote de surveillance rapide temporaire et sept étaient d'accord : Colombie-Britannique, Alberta, Ontario, Nouveau-Brunswick, Yukon, Territoires du Nord-Ouest et Nunavut. En outre, les cinq régions du Canada (p. ex. Atlantique, Centre, Prairies, Ouest et les territoires) et les trois des quatre provinces les plus peuplées ont été représentées. En outre, le Centre de l'immunisation et des maladies respiratoires infectieuses (CIMRI) de l'Agence, le LNM, le Programme canadien d'épidémiologie de terrain, ainsi que la direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits de Santé Canada, ont également participé au projet pilote.
Les objectifs du projet pilote visant l'EV-D68 consistaient à : a) recueillir des données anonymisées sur les cas graves d'infection par l'EV-D68 au Canada ayant nécessité une hospitalisation; b) décrire certaines caractéristiques cliniques et épidémiologiques des cas graves d'infection par l'EV-D68 en temps quasi réel ainsi qu'à la fin de la période de surveillance; c) fournir aux provinces et territoires participants des options pour créer des rapports sommaires en temps réel (c.-à-d. sommaires des données nationales ou propres à une province ou un territoire) et d) mettre en place un outil de déclaration en ligne sécurisé qui pourrait être adapté aux futurs besoins en matière de surveillance. Les données sur les cas hospitalisés confirmés en laboratoire d'EV-D68 ont été recueillies de septembre à octobre 2014. Un résumé de la surveillance des cas pédiatriques (< = 18 ans) pour le mois de septembre 2014 a été publié en février 2015 Note de bas de page 3. Une évaluation du projet pilote a ensuite été réalisée. Les objectifs généraux de l'évaluation du projet pilote lié à l'EV-D68 consistaient à : a) évaluer si les objectifs du projet pilote visant l'EV-D68 ont été atteints, b) déterminer les avantages d'un système de surveillance permettant une intervention rapide pour les agents pathogènes émergents et c) déterminer les leçons importantes découlant du projet pilote afin d'établir des mesures de surveillance à l'avenir.
Méthodologie
L'Agence a dirigé une évaluation qualitative du projet pilote sur l'EV-D68 au printemps 2015. Les questions de l'enquête ont été élaborées par les auteurs et établies pour déterminer tout particulièrement si les objectifs du projet pilote sur l'EV-D68 ont été atteints, pour déterminer les avantages et les leçons tirées en définissant ce qui a fonctionné et ce qui n'a pas fonctionné, y compris les obstacles ou les limites observées tout au long du projet pilote de surveillance, et ce qui pourrait être fait pour y remédier. (L'enquête au complet est disponible sur demande auprès de l'auteur-ressource.) L'enquête a fait l'objet d'un essai pilote par deux personnes du CIMRI qui n'ont pas participé au projet pilote sur l'EV-D68 pour vérifier sa clarté et son intelligibilité. Il a été rappelé aux répondants à quels objectifs du projet pilote les questions précises de l'enquête s'appliquaient et ils ont reçu des renseignements complémentaires aux fins de référence (p. ex. lien vers le rapport final du projet pilote, rappel des événements ou des circonstances qui se sont produites). L'enquête était disponible en anglais et en français, et gérée par l'intermédiaire de FluidSurveysMC Note de bas de page 10.
Les enquêtes ont été transmises aux responsables de la surveillance des agents pathogènes émergents dans l'ensemble des provinces et des territoires (n = 13) et quatre directions générales et centres au sein des deux ministères fédéraux participant au projet pilote. Les provinces et les territoires ont été encouragés à répondre à une enquête, mais les receveurs initiaux pouvaient envoyer l'enquête à d'autres personnes au besoin. Les répondants de l'enquête ont été informés que si de multiples réponses à l'enquête par province ou territoire étaient reçues, ces réponses feraient l'objet d'une pondération de manière appropriée afin de ne pas fausser les résultats. Les personnes participant à la planification et à la gestion de l'évaluation et celles du Réseau canadien de renseignements sur la santé publique (RCRSP) qui ont créé la plateforme de déclaration des données, n'ont pas participé à l'enquête, car elles ne faisaient pas partie de la population cible.
Des rappels ont été faits, deux par courriel et deux verbalement, pour accroître le taux de participation à l'enquête.
Un type varié de questions (p. ex. choix multiples, sélectionnez toutes les réponses qui s'appliquent, questions ouvertes) ont été posées pendant l'enquête. Les proportions ont été calculées pour les réponses aux questions fermées; des thèmes récurrents ont été définis pour les questions ouvertes, pour lesquelles des réponses semblables ont été regroupées et auxquels des pourcentages ont été appliqués en conséquence. Les réponses uniques ont été résumées et énumérées sous forme qualitative dans les résultats.
Les raisons de la non-participation au projet pilote ont été regroupées tout au long du projet pilote auprès des provinces et des territoires qui ont refusé de participer (verbalement pendant les téléconférences prévues concernant le projet pilote sur l'EV-D68, lors des téléconférences mensuelles sur la surveillance des maladies respiratoires ou par courriel).
Résultats
Participation
Cinquante-quatre pour cent (7/13) des partenaires provinciaux et territoriaux et 50 % (2/4) des partenaires fédéraux ont réalisé l'enquête d'évaluation. Parmi les répondants, toutes les provinces et tous les territoires, à l'exception d'un, ont participé au projet pilote de surveillance. Les répondants incluaient, sans s'y limiter : les quatre provinces et territoires comportant les plus grandes populations du Canada et, par la suite, les mêmes provinces et territoires qui ont déclaré le plus de cas d'EV-D68 à l'automne 2014, les administrations fédérales et territoriales responsables des populations nordiques et autochtones et une province de la région de l'Atlantique. Les trois provinces qui n'ont pas réalisé l'enquête et qui n'ont pas participé au projet pilote ont transmis leurs raisons par courriel.
Ces provinces ou territoires et ces organisations qui ont participé au projet pilote l'ont fait, car elles souhaitaient déterminer le fardeau que représente l'EV-D68 à l'échelle nationale (87,5 %), le virus constituait un agent pathogène émergent présentant un intérêt pour la santé publique (25 %) ou elles souhaitaient mieux comprendre les processus et les relations de travail entre les partenaires pluri-gouvernementaux lorsque de nouvelles maladies transmissibles apparaissent (25 %). Un répondant à l'enquête a indiqué qu'il n'a pas participé au projet pilote, car l'EV-D68 n'est pas une maladie à déclaration obligatoire. Les trois provinces qui n'ont pas répondu à l'enquête et qui n'ont pas participé au projet pilote ont indiqué par courriel que la raison principale de leur non-participation était due à la capacité et aux ressources limitées au sein de leur province. À cette période, certains laboratoires provinciaux de santé publique n'avaient pas la capacité nécessaire pour effectuer des tests sur l'EV-D68, ou avaient trop peu de ressources humaines pour participer.
Expérience générale
Le projet pilote a officiellement débuté trois semaines après que l'Agence a été informée du premier cas d'EV-D68 au Canada. Lorsque la question leur a été posée, 75 % des répondants ont indiqué qu'ils étaient « satisfaits » ou « très satisfaits » de la durée nécessaire pour mettre en œuvre le projet pilote et commencer la surveillance.
La période de surveillance active a duré de six à huit semaines et incluait une constatation rétrospective des cas pour le mois de septembre. Les grandes administrations ont déclaré la majorité des cas d'EV-D68, tandis que les petites administrations n'en ont déclaré que quelques-uns, voire pas du tout. Malgré les variations dans les efforts requis par province ou territoire pour recueillir des données de cas, 62,5 % ont trouvé que la durée et les efforts nécessaires pour participer au projet pilote étaient « relativement raisonnables » et 25 % les ont jugés « très raisonnables ». Dans l'ensemble, 62,5 % ont indiqué que la participation au projet pilote était « relativement satisfaisante ». Tous les répondants ont indiqué que leur gouvernement ou leur organisme a été régulièrement informé de l'avancement tout au long du projet pilote.
Objectifs du projet pilote de surveillance
Le premier objectif visait à recueillir des données anonymisées sur les cas graves d'infection par l'EV-D68 au Canada ayant nécessité une hospitalisation. L'ensemble des provinces et des territoires participants (n = 7) ont accepté d'utiliser le formulaire de déclaration de cas fourni. Une plateforme de déclaration électronique en ligne annexe (établie par le Réseau canadien de renseignements sur la santé publique [RCRSP]) a été utilisée pour recueillir des données. Toutefois, seuls quatre des provinces et des territoires ont pu identifier au moins un cas répondant à la définition de cas et, par conséquent, seuls ces quatre provinces et territoires ont pu déclarer des données de cas.
Le deuxième objectif consistait à décrire certaines caractéristiques cliniques et épidémiologiques des cas graves d'infection par l'EV-D68 en temps quasi réel ainsi qu'à la fin de la période de surveillance. Un résumé épidémiologique des cas a été fourni à la fin de la période de surveillance. Un rapport sommaire de surveillance publié incluait des données de cas fournies par trois des sept provinces et territoires participants et était limité aux cas pédiatriques hospitalisés (< = 18 ans) qui ont été confirmés en laboratoire au cours du mois de septembre Note de bas de page 3. Malgré le fait que les analyses sont limitées aux données provenant d'un petit nombre de provinces ou territoires et qu'elles visent les enfants, 62,5 % des répondants ont jugé le rapport sommaire fourni « utile » ou « très utile ». Pour ceux qui l'ont trouvé moins utile (37,5 %), la raison principale était que ce rapport n'était pas représentatif de la situation nationale, particulièrement en raison des limites dans la répartition géographique et de l'âge des cas inclus.
Le troisième objectif consistait à fournir aux provinces et territoires participants des options pour créer des rapports sommaires en temps réel au moyen du RCRSP (p. ex. sommaires des données nationales ou propres à une province ou un territoire). Ces derniers n'ont pas été fournis, car, parmi les provinces et les territoires ayant déclaré au moins un cas (n = 4; elles ont toutes répondu à l'enquête), seuls 50 % ont utilisé le formulaire de déclaration de cas et seuls 25 % ont utilisé la plateforme du RCRSP pour déclarer des renseignements sur les cas à l'échelle nationale.
Le quatrième objectif consistait à mettre en place un outil de déclaration en ligne sécurisé qui pourrait être adapté aux futurs besoins en matière de surveillance. Même si la plateforme du RCRSP avait la capacité de fournir aux provinces ou aux territoires participants des options leur permettant de créer des rapports sommaires en temps réel, qu'elle était sécurisée et en ligne, et qu'elle avait la flexibilité nécessaire pour s'adapter aux besoins des utilisateurs (p. ex. permettre un chargement des données par lots plutôt qu'une saisie manuelle des données pour chaque cas, ajout ou suppression de champs de données), son adoption pendant le projet pilote était faible. Certaines provinces ou certains territoires n'ont pas utilisé le formulaire de déclaration de cas ou la plateforme du RCRSP, car ils utilisaient leurs propres formulaires ou bases de données liés à leurs administrations ou ils ne souhaitaient pas placer un fardeau supplémentaire sur des ressources limitées en santé publique.
Avantages d'une initiative de surveillance rapide des agents pathogènes émergents
Tous les répondants ont indiqué que des initiatives de surveillance rapide des agents pathogènes émergents étaient nécessaires. Leurs raisons étaient qu'ils souhaitaient mieux comprendre les caractéristiques épidémiologiques et cliniques, ainsi que les risques des agents pathogènes émergents (66,7 %) pour la santé publique, servir de base aux mesures de santé publique (66,7 %), collaborer avec les partenaires et éviter le dédoublement des travaux (11,1 %), tester et mettre en place une capacité de la province ou du territoire (11,1 %), et parce que les leçons retenues peuvent guider les efforts de préparation et d'intervention à venir (11,1 %).
Leçons tirées
Plus de la moitié des répondants (66,7 %) ont indiqué que les processus actuels devraient être améliorés afin de favoriser des initiatives de surveillance rapide au sein des provinces et territoires, et à l'échelle de ces derniers. Plus particulièrement, il devrait y avoir plus d'occasions de participer à des initiatives de surveillance rapide, ou de les diriger. Les processus d'approbations éthiques devraient être accélérés pour permettre une collecte de données opportune; et les formats et les mécanismes de déclaration des données devraient être flexibles pour éviter les efforts et l'utilisation inutiles des ressources ou en empêcher la duplication.
La moitié des répondants ont indiqué que des ententes de partage des données ou des protocoles devraient être établis préalablement à une éclosion. Par exemple, il est important de veiller à ce que les agents pathogènes émergents présentant des caractéristiques épidémiques ou inhabituelles constituent des maladies à déclaration obligatoire en vertu des règlements provinciaux et territoriaux sur les maladies transmissibles, que des ententes de partage des données soient en place, qu'elles encouragent le partage de données et qu'elles soutiennent les occasions de collaboration. Des protocoles nationaux doivent également être en place aux fins de coordination de l'intervention auprès de ces agents pathogènes. Enfin, 33,3 % des répondants ont indiqué qu'en vue de faciliter des initiatives de surveillance rapide au sein des provinces et des territoires et à l'échelle de ces derniers, les administrations doivent s'assurer que suffisamment de ressources et de personnel (p. ex. capacité d'intensification) sont disponibles pour intervenir devant une nouvelle menace pour la santé publique.
La majorité des répondants (88 %) ont indiqué que la réception des résumés des cas en temps opportun transmis par l'Agence tout au long du projet pilote était importante; cependant, des mises à jour hebdomadaires étaient préférables. Des occasions de discuter régulièrement des résultats liés aux éclosions et de toute préoccupation avec les participants au projet pilote ont été proposées.
D'après les répondants, les caractéristiques suivantes sont importantes dans la plateforme de déclaration des données : facilité d'utilisation des fonctionnalités (100 %); sécurité du stockage des données et de l'accès aux données (87,5 %); capacité de téléchargement de données en lot (87,5 %); capacité à maintenir un contrôle, par les provinces et les territoires, de l'accès aux données et de leur déclaration (87,5 %); structure en ligne (75 %) et flexibilité pour créer rapidement des formulaires de rapport de cas pour les nouvelles initiatives de surveillance (62,5 %).
Enfin, 40 % des participants ont proposé d'identifier les obstacles et d'y remédier avant l'émergence d'une épidémie. Par exemple, les provinces ou les territoires devraient établir des mécanismes permettant de recueillir et de déclarer rapidement des données, y compris des données sur les maladies qui ne sont pas nécessairement à déclaration obligatoire. De même, 40 % des répondants ont indiqué que des protocoles devraient être établis, avec des rôles et des responsabilités clairement définis pour les processus de surveillance pluri-gouvernementaux. Parmi les répondants, 20 % ont avancé qu'un groupe intergouvernemental pourrait évaluer le besoin d'établir un nouveau système de surveillance et décider d'aller de l'avant ou non avec ce projet. Une proportion semblable de répondants a indiqué que, dès le départ, les provinces ou les territoires devraient accorder la priorité à la mise en place d'une déclaration agrégée des données de surveillance pour veiller au caractère opportun de la déclaration de données, car, dans le cadre de la déclaration de données sur les cas, il faut tenir compte de la protection de la vie privée, ce qui requiert du temps et des ressources supplémentaires.
Les principaux résultats d'évaluation sont résumés dans le Tableau 1.
Les objectifs du projet pilote de surveillance sur l'EV-D68 ont-ils été atteints? |
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Quels ont été les avantages de diriger une initiative de surveillance rapide des agents pathogènes émergents? |
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Quelles ont été les leçons tirées du projet pilote de surveillance de l'EV-D68? |
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Discussion
Les principaux résultats de l'évaluation du projet pilote de surveillance de l'EV-D68 étaient les suivants : les quatre objectifs du projet pilote ont été atteints malgré quelques problèmes, la réalisation d'une surveillance des agents pathogènes émergents présente d'importants avantages et certaines leçons précieuses retenues pourraient contribuer aux initiatives de surveillance futures des agents pathogènes émergents au Canada. Les résultats de l'enquête ont mis en évidence les facteurs de réussite importants suivants : processus et mécanismes de déclaration préétablis; capacité adéquate en ressources (en particulier la capacité d'intensification des ressources humaines pour les demandes de surveillance supplémentaires). Parce que les obstacles à la surveillance et à la déclaration de renseignements pertinents liés aux cas ont entraîné des retards ou ont empêché les provinces et les territoires de participer, on recommande de déterminer et d'aplanir les obstacles avant l'apparition ou la réapparition des pathogènes des voies respiratoires pour assurer le caractère opportun de la mise en place de tels systèmes.
Bien que les objectifs du projet pilote de surveillance aient été atteints, l'évaluation a permis de mettre en lumière les facteurs qui ont influé sur le niveau de réussite atteint pour chaque objectif. Par exemple, bien qu'une plateforme de déclaration de surveillance ayant la capacité de fournir des rapports sommaires en temps réel ait été créée et mise à la disposition des provinces et des territoires, l'adoption de la plateforme était sous-optimale en raison des préférences dans l'utilisation des formulaires et des plateformes propres aux provinces et aux territoires. À l'échelle fédérale, il est important de comprendre les facteurs qui permettent aux provinces et aux territoires de participer à une initiative de surveillance nationale et quels facteurs soutiennent la déclaration à l'échelle nationale. Par exemple, l'Agence pourrait fournir des formulaires et des mécanismes de déclaration afin de minimiser les efforts inutiles des ressources provinciales et territoriales déjà limitées.
Les résultats de l'évaluation devraient être interprétés avec prudence en raison de plusieurs limites. Tout d'abord, près de la moitié des provinces et des territoires n'ont pas participé au projet pilote de surveillance ou répondu à une enquête d'évaluation; par conséquent, seule une information minimale a pu être obtenue sur l'utilité de réaliser une surveillance des agents pathogènes émergents tels que l'EV-D68 dans ces provinces ou territoires. Une bonne partie des réponses ou des résultats ont été fournis par les provinces ou les territoires ayant participé au projet pilote et, selon que certaines questions s'appliquent ou non à une province ou un territoire, les dénominateurs servant aux calculs des pourcentages étaient encore plus petits (c.-à-d. inférieurs à cinq). Bien que les provinces ou territoires n'ayant pas participé aient dû en fournir la raison, dans l'ensemble, les commentaires formulés par les provinces ou les territoires qui n'ont pas participé se faisaient rares. Par la suite, l'évaluation a été menée cinq mois après la réalisation du projet pilote pour coïncider avec un ralentissement de l'activité du virus des voies respiratoires dans le pays, de façon à ne pas imposer de fardeau aux provinces et aux territoires avec la tâche supplémentaire consistant à répondre à l'enquête pendant la période de surveillance active des maladies respiratoires. Des commentaires plus complets et plus informatifs auraient pu être obtenus si l'enquête avait été dirigée dans les semaines qui suivent la réalisation du projet pilote plutôt que dans les mois qui le suivent.
À l'automne 2014, l'éclosion d'EV-D68 s'est déroulée sur une courte période et a entraîné un petit nombre de décès et de cas présentant des manifestations neurologiques. Néanmoins, le projet pilote de surveillance de l'EV-D68 a fourni à l'Agence et aux provinces et territoires participants l'occasion de tester les capacités en ressources ainsi que les processus de surveillance des pathogènes des voies respiratoires émergents, et d'être mieux préparés pour entreprendre des initiatives de surveillance rapide dans l'avenir.
Remerciements
Les auteurs souhaitent remercier l'ensemble des provinces et des territoires et les ministères fédéraux qui ont participé et contribué au projet pilote de surveillance de l'EV-D68, ainsi que ceux qui ont répondu ou contribué à l'évaluation.
Conflit d’intérêts
Aucun.
Financement
Aucun.
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