Éclosion d'oreillons au Manitoba, Canada, 2018 à 2019

RMTC

Volume 46–4, le 2 avril 2020 : Virus respiratoire syncytial (VRS)

Éclosion

Importante éclosion communautaire d’oreillons au Manitoba (Canada) entre septembre 2016 et décembre 2018

Yichun Wei1, Krista Wilkinson2, Richard Rusk3, Kamran Kadkhoda4,5, Carla Loeppky1,6

Affiliations

1 Épidémiologie et surveillance, Santé, Aînés et Vie active Manitoba, Winnipeg, MB

2 Santé de la population et du public, Office régional de la santé de Winnipeg, Winnipeg, MB

3 Lutte contre les maladies transmissibles, Santé, Aînés et Vie active Manitoba, Winnipeg, MB

4 Laboratoire provincial de Cadham, Winnipeg, MB

5 Laboratoire d’immunopathologie, clinique de Cleveland – campus principal, Cleveland, OH

6 Département des sciences de la santé communautaire, Université du Manitoba, Winnipeg, MB

Correspondance

joy.wei@gov.mb.ca

Citation proposée

Wei Y, Wilkinson K, Rusk R, Kadkhoda K, Loeppky C. Importante éclosion communautaire d’oreillons au Manitoba (Canada) entre septembre 2016 et décembre 2018. Relevé des maladies transmissibles au Canada 2020;46(4):80–6. https://doi.org/10.14745/ccdr.v46i04a03f

Mots-clés : oreillons, éclosion, incidence, vaccination, vaccin ROR, enquête, immunité, Manitoba

Résumé

Contexte : Après la mise en œuvre des programmes d’immunisation systématique contre les oreillons au Manitoba à la fin des années 1980, le taux d’incidence de la maladie était faible, avec zéro à neuf cas enregistrés chaque année. En septembre 2016, une éclosion d’oreillons s’est déclarée chez des étudiants universitaires pleinement vaccinés à Winnipeg, au Manitoba.

Objectifs : Nous décrivons ici l’enquête sur cette éclosion d’oreillons survenue à l’échelle provinciale entre septembre 2016 et décembre 2018. Nous présentons également de manière détaillée les mesures de santé publique mises en œuvre et les difficultés rencontrées. Nous précisons enfin les facteurs ayant pu contribuer à la transmission soutenue du virus.

Méthodes : Les cas d’oreillons probables et confirmés ont été étudiés par les services de santé publique à l’aide du formulaire d’enquête élaboré dans le cadre de cette éclosion. Les cas d’oreillons confirmés ont été liés au registre provincial d’immunisation. Une équipe d’intervention contre l’éclosion a planifié et mis en œuvre des mesures de contrôle sur l’ensemble de la province.

Résultats : L’éclosion s’est déclarée chez des étudiants universitaires vaccinés en septembre 2016 puis s’est propagée à toute la province. L’activité était élevée et soutenue dans les régions éloignées du Nord. Fin 2018, 2 223 cas avaient été confirmés. Tous les groupes d’âge étaient touchés, et l’incidence était la plus élevée chez les personnes de 18 à 29 ans. Le taux de couverture des cas confirmés avec l’administration de deux doses du vaccin contenant le virus des oreillons était proche de 70 %.

Conclusion : Cette éclosion prolongée a mis au jour une vaste population dont la vulnérabilité résultait probablement d’une sous-vaccination et d’une baisse de l’immunité conférée par la vaccination en l’absence d’une stimulation naturelle résultant d’une exposition au virus des oreillons. Il est important de maintenir un taux de couverture vaccinale élevé avec l’administration de deux doses du vaccin contenant le virus des oreillons. La possibilité d’administrer une troisième dose du vaccin contenant le virus des oreillons pourrait être envisagée lors de futures éclosions.

Introduction

Les oreillons sont une maladie causée par le virus des oreillons, qui appartient à la famille des Paramyxoviridae. Les symptômes d’une infection aux oreillons comprennent notamment la fièvre, les maux de tête, ainsi qu’une tuméfaction et une sensibilité caractéristiques de la glande parotide ou d’une autre glande salivaire. La méningite aseptique, l’encéphalite, l’orchite, l’oophorite, la surdité et la pancréatite sont de rares complications imputables à l’infection aux oreillonsNote de bas de page 1Note de bas de page 2Note de bas de page 3. Au Manitoba, les cas confirmés en laboratoire et les cas probables doivent être déclarés à Santé, Aînés et Vie active Manitoba (SAVAM), conformément à la Loi sur la santé publique du ManitobaNote de bas de page 4.

L’administration d’une dose unique du vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR) aux enfants âgés de douze mois a été ajoutée au calendrier de vaccination systématique des enfants au Manitoba en 1983. L’administration d’une seconde dose du vaccin ROR aux enfants âgés de quatre à six ans a été ajoutée au calendrier de vaccination systématique en 1996Note de bas de page 5. Ces pratiques sont conformes à la dernière recommandation formulée par le Comité consultatif national de l’immunisation (CCNI) en 2007, au sujet du vaccin contenant le virus des oreillons. Après avoir étudié les éclosions d’oreillons survenues au Canada et dans le reste du monde, le CCNI a recommandé l’administration systématique de deux doses du vaccin contre les oreillons chez les nourrissons et les enfants, ainsi que chez certains groupes d’adultes à risque élevé, notamment les étudiants du secondaire et du postsecondaire, le personnel militaire et les travailleurs de la santéNote de bas de page 6.

L’incidence des oreillons a continuellement été faible au Manitoba, avec zéro à neuf cas recensés chaque année entre 2000 et 2015, soit, en moyenne, 0,3 cas pour 100 000 personnesNote de bas de page 7. La maladie touche surtout la tranche des 18 à 45 ans. Le taux d’incidence moyen des oreillons au Canada était de 0,3 cas pour 100 000 personnes entre 2011 et 2015Note de bas de page 8.

Le 18 octobre 2016, les services de surveillance de routine ont détecté une série de six cas d’oreillons dont les symptômes sont apparus entre le 25 septembre et le 12 octobre 2016, à Winnipeg, la capitale du Manitoba. Il s’agissait de six étudiants de l’Université du Manitoba âgés de 18 à 24 ans. Trois d’entre eux faisaient partie des équipes sportives de l’université. Tous ces étudiants avaient reçu deux doses du vaccin ROR dans leur enfance, preuves à l’appui. SAVAM a déclaré une éclosion d’oreillons et constitué une équipe d’intervention contre l’éclosion dans la même journée. Cinq bureaux régionaux sanitaires fournissent des services de santé dans les cinq secteurs géographiques financés par les fonds publics au Manitoba: une région urbaine, l’Office régional de la santé de Winnipeg, et quatre régions rurales, l’Office régional de la santé d’Entre-les-Lacs et de l’Est, Southern Health-Santé Sud, Santé de Prairie Mountain et l’Office régional de la santé du NordNote de bas de page 9. Tous les offices régionaux de la santé ont rejoint l’équipe d’intervention.

Nous décrivons dans ce rapport l’enquête sur cette éclosion d’oreillons survenue à l’échelle provinciale entre septembre 2016 et décembre 2018. Nous présentons également de manière détaillée les mesures de santé publique mises en œuvre et les difficultés rencontrées. Nous précisons enfin les facteurs ayant pu contribuer à la transmission soutenue du virus.

Méthodes

Une éclosion provinciale d’oreillons a été déclarée le 18 octobre 2016, et sa fin a été confirmée le 31 décembre 2018, lorsque le niveau d’activité est revenu à la normale. Cette éclosion s’est déclarée chez une population universitaire, mais s’est rapidement répandue jusqu’à atteindre un niveau soutenu à l’échelle de toute la province. L’équipe d’intervention contre l’éclosion a planifié et mis en œuvre des mesures de contrôle, notamment la recherche rapide des contacts, la recommandation d’auto-isolement après l’apparition des symptômes, la communication (dont la diffusion d’une documentation pédagogique) et la mise à disposition du vaccin ROR aux contacts réceptifs.

Enquête épidémiologique

Les définitions de cas étaient tirées du Protocole provincial de gestion des maladies transmissibles applicable aux oreillonsNote de bas de page 10. Un cas probable était caractérisé par l’apparition de symptômes compatibles avec les oreillons (apparition brutale d’une tuméfaction unilatérale ou bilatérale, douloureuse, spontanément résolutive de la glande parotide ou d’une autre glande salivaire) pendant deux jours ou plus, et ce, le ou après le 1er septembre 2016. Un cas confirmé était caractérisé par une confirmation en laboratoire d’une infection récente aux oreillons dans un cas probable ou un cas probable ayant un lien épidémiologique avec un cas confirmé en laboratoire, et en l’absence de l’administration récente du vaccin contenant le virus des oreillons. Le Protocole de gestion des maladies transmissibles de SAVAM recommande aux enquêteurs de consulter la version actuelle du Guide canadien d’immunisation pour se renseigner sur les réactions et les délais propres à chaque tranche d’âge et ainsi déterminer si les symptômes pouvaient être imputables à l’administration récente du vaccin contenant le virus des oreillons.

Un formulaire d’enquête sur l’éclosion a été élaboré pour recueillir des renseignements sur les caractéristiques démographiques, la profession, les symptômes, les complications et leur gravité, la situation vaccinale et les activités effectuées durant la période d’incubation (douze à vingt-cinq jours avant l’apparition de la parotidite) et la période de transmissibilité (sept jours avant et jusqu’à cinq jours après l’apparition de la parotidite). Les offices régionaux de la santé ont immédiatement lancé une enquête sur l’éclosion et mis en œuvre des mesures de contrôle. Des infirmières régionales de la santé publique ont interrogé les sujets atteints et rempli les formulaires d’enquête avant de les soumettre à SAVAM.

SAVAM a coordonné les activités de collecte et de saisie des données. Des renseignements généraux sur l’ensemble des signalements de cas d’oreillons ont été saisis dans la base de données de surveillance de routine. Une base de données réservée aux éclosions a été créée pour y consigner les renseignements issus des formulaires d’enquête sur l’éclosion. En raison du nombre élevé de signalements de cas d’oreillons, seuls les cas confirmés ont été saisis dans la base de données. Les cas confirmés ont été liés au registre provincial d’immunisation afin de calculer le taux de couverture vaccinale. Nous avons entrepris une analyse descriptive pour déterminer les caractéristiques épidémiologiques et géographiques de l’éclosion. La mise en relation et l’analyse des données ont été effectuées à l’aide de SAS Enterprise Guide, version 7.1 (SAS Institute Inc., Gary, Californie du Nord, États-Unis).

Analyses en laboratoire

Le Laboratoire provincial de Cadham à Winnipeg a réalisé des analyses cliniques standards sur des échantillons, notamment des analyses visant à dépister les anticorps de l’immunoglobine M (IgM) et de l’immunoglobine G (IgB) contre le virus des oreillons dans les échantillons de la phase aiguë et de la phase de convalescence à environ sept à dix jours d’écart; des analyses visant à détecter l’acide ribonucléique du virus des oreillons au moyen de la technique de transcription inverse suivie de réaction en chaîne de la polymérase (RT-PCR); et des essais visant à isoler le virus des oreillons dans un milieu de culture. Les échantillons de cultures positives ont été envoyés au Laboratoire national de microbiologie (LNM) aux fins de génotypage viral.

Couverture vaccinale

Les données de vaccination ont été extraites du registre provincial d’immunisation de la population à partir du Système de gestion de l’information sur la santé publique (SGISP). Ce registre a été mis en place en 1988 pour consigner les vaccinations des personnes nées au Manitoba à partir du 1er janvier 1980. Les vaccinations effectuées en dehors du Manitoba ne sont pas consignées sans document officiel à l’appui. De ce fait, les dossiers de vaccination sont généralement plus complets chez les personnes de moins de trente ans ou nées après 1986 qui ont grandi au Manitoba.

Interventions

Les mesures de contrôle comprenaient notamment la recherche rapide des contacts, les infirmières régionales de la santé publique étant chargées d’assurer la gestion des cas et des contacts. L’auto-isolement pendant cinq jours suivant l’apparition des symptômes était recommandé pour les cas symptomatiques. Les contacts susceptibles d’avoir été exposés durant la période de transmissibilité ont été avertis. Ils ont également été sensibilisés sur les oreillons, notamment sur les premiers signes et symptômes de la maladie, et ont été invités à consulter un professionnel de la santé dans le cas où ces symptômes se manifesteraient.

Le vaccin ROR a été proposé aux contacts réceptifs (personnes nées entre 1970 et 1984 auxquelles aucune dose de vaccin contenant le virus des oreillons n’a été officiellement administrée et personnes nées après 1984 auxquelles moins de deux doses ont été officiellement administrées) conformément aux critères d’admissibilitéNote de bas de page 11 du Manitoba et à la dernière recommandation du CCNINote de bas de page 6. Les établissements de santé étaient encouragés à s’assurer que tous leurs effectifs étaient vaccinés. Dans les établissements correctionnels touchés par des cas d’oreillons, des séances de vaccination ont été organisées à l’intention du personnel et des détenus réceptifs.

SAVAM a diffusé une documentation pédagogique auprès des universités, des écoles et du grand public. Une série de courriers ont été envoyés aux universités, aux écoles, aux garderies et aux organismes sportifs du Manitoba pour sensibiliser davantage le public. SAVAM a également répondu aux demandes de renseignements des médias et publié des communiqués pour faire le point sur l’éclosion et souligner l’importance de la vaccination. Des mises à jour hebdomadaires ont été publiées sur un site Web public géré par SAVAM. Des courriers ont été envoyés aux fournisseurs de soins de santé pour orienter les pratiques de prévention et de contrôle. SAVAM a diffusé des alertes de santé publique par l’intermédiaire du Réseau canadien de renseignements sur la santé publique (RCRSP) pour avertir ses homologues provinciaux et fédéraux du secteur de la santé publique.

En janvier 2018, l’équipe d’intervention contre l’éclosion a envisagé la possibilité de proposer une troisième dose du vaccin ROR dans la région de l’Office régional de la santé du Nord, après que le Comité consultatif sur les pratiques d’immunisation (ACIP) des États-Unis ait publié ses nouvelles recommandationsNote de bas de page 12. L’Office régional de la santé du Nord fournit des services à environ 75 000 résidents du Nord manitobain, la région la moins peuplée sur les cinq que compte la province, mais qui occupe la plus grande surface géographique. De nombreux habitants vivent dans des collectivités éloignées et isolées, dont certaines ne sont accessibles que par voie aérienne ou maritime. SAVAM a décidé de ne pas recommander l’administration d’une troisième dose du vaccin ROR en raison de la faisabilité opérationnelle d’une telle mesure dans les régions du Nord. Comme le virus circulait dans la région depuis un certain temps, il n’était pas possible de définir une population admissible qui aurait bénéficié d’une troisième dose.

Résultats

Épidémiologie descriptive

Cette éclosion d’oreillons s’est déclarée chez des étudiants universitaires de la région de l’Office régional de la santé de Winnipeg. Cette région abrite environ 57 % des 1,4 million de résidents du Manitoba. Trois pics survenus durant les premiers mois de l’éclosion correspondaient à trois évènements importants en matière d’exposition : nombreuses célébrations de retrouvailles à l’Université du Manitoba (du 19 au 25 septembre 2016); fin de semaine de l’Action de grâces (du 8 au 10 octobre), au cours de laquelle les personnes contagieuses ont pu voyager; et Halloween (31 octobre) (figure 1a). Durant cette période, les personnes touchées étaient de jeunes adultes de Winnipeg ayant des liens avec des universités, des écoles, des manifestations sportives ou des vacances.

Figure 1a : Cas confirmés d’oreillons (N = 65) selon la date d’apparition des symptômes et la région sanitaire, au Manitoba, du 25 septembre au 26 novembre 2016

Figure 1a : Cas confirmés d’oreillons (N = 65) selon la date d’apparition des symptômes et la région sanitaire, au Manitoba, du 25 septembre au 26 novembre 2016

Text description: Figure 1a

Figure 1a : Cas confirmés d’oreillons (N = 65) selon la date d’apparition des symptômes et la région sanitaire, au Manitoba, du 25 septembre au 26 novembre 2016

Figure 1a : Cas confirmés d’oreillons (N = 65) selon la date d’apparition des symptômes et la région médicale, au Manitoba, du 25 septembre au 26 novembre 2016
Mois en 2016 Nombre de cas confirmés Office régional de la santé de Winnipeg Santé Prairie Mountain Southern Health-Santé Sud Interlake-Eastern Regional Health
Septembre 25 1 0 0 0
27 0 0 0 0
29 0 0 0 0
Octobre 1 0 0 0 0
3 1 0 0 0
5 0 0 0 0
7 1 0 0 0
9 3 1 0 0
11 3 0 0 0
13 2 0 0 0
15 1 0 0 0
17 2 0 0 0
19 1 0 1 0
21 2 0 0 0
23 3 0 0 1
25 4 1 0 0
27 5 0 0 0
29 4 0 0 0
31 4 0 0 0
Novembre 2 2 0 0 0
4 0 0 0 0
6 0 0 0 0
8 1 0 1 0
10 1 0 0 0
12 2 0 0 0
14 4 0 0 0
16 6 0 0 0
18 3 0 0 1
20 0 0 1 0
22 2 0 0 0
24 0 0 0 0

Plus de 80 % des étudiants universitaires nés au Manitoba s’étaient vu administrer deux doses du vaccin contenant le virus des oreillons (données non illustrées).

Fin novembre 2016, l’éclosion s’était propagée à trois régions sanitaires rurales, à savoir la région de l’Office régional de la santé d’Entre-les-Lacs et de l’Est, la région de Southern Health-Santé Sud et la région de Santé de Prairie Mountain, ainsi qu’aux établissements correctionnels situés dans ces régions. En janvier 2017, l’éclosion s’était propagée à la région la plus rurale du Manitoba, celle de l’Office régional de la santé du Nord. Le nombre de cas d’oreillons dans cette région a continué d’augmenter tout au long de l’année, jusqu’à atteindre un pic à la mi-septembre 2017. En comparaison avec les autres régions sanitaires, le taux de morbidité associé aux oreillons dans la région de l’Office régional de la santé du Nord était élevé et soutenu. Malgré l’isolement géographique des collectivités, l’éclosion a continué à se propager dans toute la région, au point de contaminer près de 2 % de sa population.

Après septembre 2017, le nombre de cas d’oreillons au Manitoba a commencé à baisser, en grande partie en raison de la diminution des cas dans la région de l’Office régional de la santé du Nord. SAVAM a annoncé la fin de l’éclosion à la fin 2018, quand il apparut clairement que le niveau d’activité du virus était revenu à la normale (figure 1b).

Figure 1b : Cas confirmés d’oreillons (N = 2 223) selon le mois d’apparition des symptômes et la région sanitaire, au Manitoba, entre septembre 2016 et décembre 2018

Figure 1b : Cas confirmés d’oreillons (N = 2 223) selon le mois d’apparition des symptômes et la région sanitaire, au Manitoba, entre septembre 2016 et décembre 2018

Text description: Figure 1b

Figure 1b : Cas confirmés d’oreillons (N = 2 223) selon le mois d’apparition des symptômes et la région sanitaire, au Manitoba, entre septembre 2016 et décembre 2018

Figure 1b : Cas confirmés d’oreillons (N = 2 223) par mois d’apparition des symptômes et la région médicale, au Manitoba, de septembre 2016 à décembre 2018
Année Mois Winnipeg Interlake-Eastern Santé Prairie Mountain Southern Health-Santé Sud Nord Nombre total de cas
2016 Août 0 0 0 0 0 -
Septembre 1 0 0 0 0 1
Octobre 33 1 2 1 0 37
Novembre 28 1 0 3 0 32
Décembre 33 3 0 9 1 46
2017 Janvier 14 8 7 22 11 62
Février 20 6 14 10 14 64
Mars 23 8 31 5 54 121
Avril 9 21 2 4 92 128
Mai 7 20 6 2 91 126
Juin 6 4 9 3 90 112
Juillet 6 4 1 1 126 138
Août 10 1 8 7 152 178
Septembre 21 1 11 9 166 208
Octobre 17 0 5 2 168 192
Novembre 22 2 2 6 128 160
Décembre 17 1 1 2 103 124
2018 Janvier 14 1 3 2 104 124
Février 12 0 0 0 80 92
Mars 10 0 0 4 65 79
Avril 26 0 1 1 48 76
Mai 20 1 1 2 42 66
Juin 12 0 0 1 20 33
Juillet 3 0 0 0 8 11
Août 0 2 0 0 2 4
Septembre 3 0 0 1 0 4
Octobre 1 0 0 0 1 2
Novembre 1 0 0 0 0 1
Décembre 1 0 0 1 0 2
Total 370 85 104 98 1 566 2 223

L’enquête sur l’éclosion a permis de confirmer 2 223 cas d’oreillons (1,6 cas pour 1 000 personnes). Sur ces 2 223 cas d’oreillons, 1 566 (70,4 %) ont été déclarés dans la région de l’Office régional de la santé du Nord et 370 (16,6 %) dans la région de l’Office régional de la santé de Winnipeg. Les femmes représentaient 48,8 % (n = 1 084) de tous les cas provinciaux (tableau 1).

Tableau 1 : Caractéristiques des cas d’oreillons confirmés par l’office régional de la santé, au Manitoba, au Canada, entre septembre 2016 et décembre 2018
Caractéristiques Office régional de la santé Total
Nord Winnipeg Prairie Mountain Southern Health-Santé Sud Entre-les-Lacs et Est
Incidence cumulativeNote a de Tableau 1 20,4 0,5 0,6 0,5 0,7 1,6
Cas (nombre) 1 566 370 104 98 85 2 223
  • Pourcentage du nombre total de cas
70,4 16,6 4,7 4,4 3,8 100
Femme (nombre) 809 164 40 28 43 1 084
  • Pourcentage
51,7 44,3 38,5 28,6 50,6 48,8
Âge médian (années) 26 24 26 24 27 25
  • Quartile 1
15 18 19 18 18 17
  • Quartile 3
36 33 36 38 40 36
Non vaccinéNote b de Tableau 1 (nombre) 51 20 3 5 4 83
  • Pourcentage
5,9 11,4 6,4 10,9 8,3 7
Partiellement vaccinéNote c de Tableau 1 (nombre) 200 42 10 9 17 278
  • Pourcentage
23,1 24 21,3 19,6 35,4 23,5
Pleinement vaccinéNote d de Tableau 1 (nombre) 616 113 34 32 27 822
  • Pourcentage
71 64,6 72,3 69,6 56,3 69,5

Dans l’ensemble, l’incidence était la plus élevée (3,4 cas pour 1 000 personnes) chez les personnes de 18 à 29 ans (figure 2). Dans la région de l’Office régional de la santé du Nord, l’incidence chez les personnes de 30 à 45 ans (32,5 cas pour 1 000 personnes) était similaire à celle des personnes de 18 à 29 ans (32 cas pour 1 000 personnes). L’incidence dans la région de l’Office régional de la santé du Nord (20,4 cas pour 1 000 personnes) était largement plus élevée que dans toutes les autres régions (0,5 à 0,7 cas pour 1 000 personnes).

Figure 2 : Taux d’incidence cumulative de cas d’oreillons pour 1 000 personnes, selon le groupe d’âge et l’office régional de la santé, au Manitoba, au Canada, entre septembre 2016 et décembre 2018

Figure 2 : Taux d’incidence cumulative de cas d’oreillons pour 1 000 personnes, selon le groupe d’âge et l’office régional de la santé, au Manitoba, au Canada, entre septembre 2016 et décembre 2018

Text description: Figure 2

Figure 2 : Taux d’incidence cumulative de cas d’oreillons pour 1 000 personnes, selon le groupe d’âge et l’office régional de la santé, au Manitoba, au Canada, entre septembre 2016 et décembre 2018

Figure 2: Cumulative incidence rate per 1,000 of mumps cases by age group and health region, Manitoba, Canada, September 2016–December 2018
Office régional de la santé Groupe d’âge (années) Taux
Interlake-Eastern 0 à 4 0,4
Interlake-Eastern 5 à 17 0,7
Interlake-Eastern 18 à 29 1,9
Interlake-Eastern 30 à 45 0,9
Interlake-Eastern 46 et plus 0,2
Nord 0 à 4 5,6
Nord 5 à 17 22,8
Nord 18 à 29 32,0
Nord 30 à 45 32,5
Nord 46 et plus 7,0
Santé Prairie Mountain 0 à 4 0,2
Santé Prairie Mountain 5 à 17 0,5
Santé Prairie Mountain 18 à 29 1,7
Santé Prairie Mountain 30 à 45 1,0
Santé Prairie Mountain 46 et plus 0,1
Southern Health-Santé Sud 0 à 4 0,3
Southern Health-Santé Sud 5 à 17 0,4
Southern Health-Santé Sud 18 à 29 1,1
Southern Health-Santé Sud 30 à 45 0,7
Southern Health-Santé Sud 46 et plus 0,1
Winnipeg 0 à 4 0,3
Winnipeg 5 à 17 0,6
Winnipeg 18 à 29 1,3
Winnipeg 30 à 45 0,5
Winnipeg 46 et plus 0,1

Un cas d’orchite et un cas de méningite, probablement imputables à l’infection aux oreillons, ont été déclarés à SAVAM. Aucun décès n’a été signalé.

Résultats de laboratoire

La majorité des cas confirmés (97,1 %) ont été confirmés en laboratoire, dont 87,8 % par la technique de RT-PCR, 9,2 % par sérologie et 0,1 % par culture virale. De plus, 2,8 % des cas de patients symptomatiques ont été confirmés par l’existence d’un lien épidémiologique avec des cas confirmés en laboratoire.

Les échantillons ont d’abord été transmis au LNM en vue de leur génotypage. Après que le nombre d’échantillons ait dépassé les capacités du LNM, environ 10 % d’échantillons choisis au hasard ont été cultivés et génotypés. Sur ces 243 échantillons, 229 (94,2 %) se sont révélés appartenir au génotype G, le génotype endémique du virus des oreillons en circulation au Canada et aux États-UnisNote de bas de page 12. Les échantillons restants n’ont pas pu être séquencés.

Situation vaccinale

Les antécédents de vaccination des personnes de moins de 30 ans qui vivent au Manitoba depuis leur naissance étaient accessibles dans le registre provincial d’immunisation de la population. D’après le registre, sur les 1 183 (53,2 %) personnes de 5 à 29 ans admissibles à deux doses du vaccin contenant le virus des oreillons au Manitoba et enregistrées auprès de SAVAM avant l’âge de deux mois, 822 (69,5 %) avaient reçu au moins deux doses (tableau 1). Le taux de couverture des cas d’oreillons avec l’administration de deux doses du vaccin contre les oreillons allait de 56,3 % dans la région d’Entre-les-Lacs et de l’Est à 72,3 % dans la région de Prairie Mountain. Sur les 822 personnes qui ayant reçu au moins deux doses du vaccin contenant le virus des oreillons, l’intervalle médian entre l’administration de la dernière dose et l’apparition des symptômes était de 11,3 années.

Discussion

SAVAM a dirigé une enquête lors d’une éclosion d’oreillons qui a touché la province entre septembre 2016 et décembre 2018. Selon la Division de la surveillance et de l’épidémiologie de l’Agence de la santé publique du Canada, en janvier 2019, cette éclosion était, au vu du nombre de cas signalés, la plus importante que le Canada ait connue au cours des 20 dernières années. Cette éclosion s’est déclarée chez des étudiants universitaires qui présentaient une couverture vaccinale élevée, avec l’administration de deux doses du vaccin contre les oreillons, puis s’est étendue à d’autres collectivités du Manitoba, la propagation ayant sans doute été facilitée par des événements sociaux. Le niveau d’activité était particulièrement élevé et soutenu dans la région de l’Office régional de la santé du Nord, la région la plus rurale du Manitoba où se trouvent de nombreuses collectivités isolées.

Cette éclosion a mis au jour une vaste population sensible malgré la disponibilité, depuis trente ans, d’un programme de vaccination contre les oreillons financé par les fonds publics. Le faible taux de couverture vaccinale contre les oreillons a probablement contribué à cette éclosion, bien que l’ampleur de cette contribution ait varié d’une région à l’autre. La couverture vaccinale contre les oreillons au Manitoba est restée inférieure au taux de 92 % nécessaire pour assurer et préserver l’immunité collectiveNote de bas de page 13. Selon le registre provincial d’immunisation, en 2017, 90 % des personnes de 17 ans ayant vécu au Manitoba sans interruption depuis leur naissance s’étaient vu administrer deux doses du vaccin contenant le virus des oreillons, contre 31 % des personnes de 17 ans n’ayant pas vécu au Manitoba de manière continue depuis leur naissance, une situation qui s’explique en partie par le caractère incomplet des données du registre sur les résidents qui ne sont pas nés au ManitobaNote de bas de page 14.

Les personnes touchées étaient notamment de jeunes adultes vaccinés, ce qui laisse croire que la baisse de l’immunité conférée par la vaccination a sans doute contribué davantage à cette éclosion. Près de trois-quarts (70 %) des personnes dont les données de vaccination étaient consignées dans le registre provincial étaient totalement immunisées. Cependant, dans le cas des personnes qui se sont vu administrer, preuves à l’appui, au moins deux doses du vaccin contenant le virus des oreillons, une durée médiane de plus de onze années s’était écoulée depuis l’administration de la dernière dose. Cela concorde avec les autres rapports faisant état d’une baisse de l’immunité conférée par la vaccination contre les oreillonsNote de bas de page 15Note de bas de page 16Note de bas de page 17.

Cette baisse de l’immunité pourrait être imputable à l’absence de stimulation naturelle résultant d’une exposition au virus sauvage des oreillonsNote de bas de page 18Note de bas de page 19. Contrairement aux autres provinces et territoires canadiens qui signalent des éclosions d’oreillons de moindre envergure depuis les années 1980, les signalements de cas d’oreillons ont toujours été rares au ManitobaNote de bas de page 7. Dans le Nord manitobain, où la densité de population est faible et la couverture vaccinale élevée, la stimulation naturelle résultant d’une exposition au virus a encore moins de chance de survenir que dans les autres régions du Manitoba.

De plus, la souche du virus des oreillons dans le vaccin nord-américain (Jeryl-Lynn) est de génotype A. Le remplacement du virus des oreillons de génotype A, à une époque où le vaccin n’existait pas, par le virus des oreillons de génotype G, actuellement endémique au Canada et aux États-Unis, pourrait également contribuer à la baisse de l’immunitéNote de bas de page 20.

Le nombre de complications signalées en lien avec cette éclosion d’oreillons était faible, ce qui pourrait traduire des lacunes dans la surveillance de la santé publique, car l’étude des cas pourrait avoir été effectuée avant que les complications se manifestent. Il est possible que la vaccination précédente contre les oreillons ait conféré une certaine protection contre les maladies gravesNote de bas de page 21Note de bas de page 22. Étant donné que les complications étaient rarement signalées, il n’a pas été possible d’analyser l’efficacité du vaccin contre les complications graves liées aux oreillons.

Limitations

Les antécédents de vaccination de certaines personnes n’étaient pas disponibles dans le registre provincial d’immunisation. Il se peut donc que le taux de couverture vaccinale des cas d’oreillons ait été supérieur. Le cas échéant, un faible taux de couverture vaccinale pourrait moins avoir contribué à cette éclosion que la baisse de l’immunité conférée par la vaccination. Dans une prochaine étude, l’équipe de recherche envisage d’examiner la relation entre le moment où la dernière dose du vaccin contenant le virus des oreillons a été administrée et celui où la maladie des oreillons s’est manifestée.

Conclusion

Un effort de santé publique important et soutenu a été nécessaire tout au long de cette éclosion, qui s’est déclarée chez des étudiants universitaires puis s’est propagée à toute la province. Cela souligne la nécessité d’atteindre et de maintenir un taux de couverture élevé dans la population, avec l’administration de deux doses du vaccin contenant le virus des oreillons. En raison de la baisse de l’immunité conférée par la vaccination, il se peut que la population compte encore un vaste groupe de personnes sensibles. La possibilité d’administrer une troisième dose du vaccin contenant le virus des oreillons pourrait être envisagée lors de futures éclosions pour stimuler l’immunité conférée par la vaccination dans le cas où les données épidémiologiques le justifieraient.

Déclaration des auteurs

  • Y. W. — Conceptualisation, méthodologie, enquête, analyse formelle, rédaction – rédaction de la version préliminaire – révision et édition
  • K. W. — Conceptualisation, méthodologie, rédaction – révision et édition
  • R. R. — Méthodologie, rédaction – révision et édition
  • K. K. — Méthodologie, rédaction – révision et édition
  • C. L. — Supervision, rédaction – révision et édition

Conflit d’intérêts

Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts potentiel.

Remerciements

Nous tenons à remercier les personnes suivantes pour leur contribution : N. Casaclang, D. Race, I. Hossack, T. Hilderman de Santé, Aînés et Vie active Manitoba; K. Dust du Laboratoire provincial de Cadham (Manitoba); D. MacDonald et M. Roy de l’Agence de la santé publique du Canada.

Financement

Aucun financement externe n’a été obtenu pour la réalisation de ce rapport.

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