Info Source : Bulletin 42A - Sommaire des décisions des Cours fédérales
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Dans les sommaires ci‑après, vous trouverez l’expression « contrôle judiciaire ». Il s’agit d’un mécanisme permettant aux tribunaux d’examiner les décisions administratives rendues par les fonctionnaires, y compris les positions adoptées par les commissariats à l’information et à la protection de la vie privée du Canada.
Loi sur l’accès à l’information
-
Titres de la section
- Cour fédérale du Canada
- Cour d’appel fédérale
- Cour suprême du Canada
- Aucune
Cour fédérale du Canada
1. VB c. Canada (Procureur général)
Cour fédérale du Canada
Référence : 2018 CF 394
Date de la décision :
Dispositions de la Loi sur l’accès à l’information: Paragraphes 10(2) et 15(1); alinéas 16(1)a) et 16(1)c)
- Paragraphe 10(2) – Existence d’un document
- Paragraphe 15(1) – Affaires internationales et défense
- Alinéa 16(1)a) – Organismes d’enquête
- Alinéa 16(1)c) – Enquêtes
Résumé
La demande de contrôle présentée par le demandeur a été rejetée. La Cour a convenu que, s’ils existaient, on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que les dossiers d’enquête du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) concernant VB soient visés par les exceptions prévues aux paragraphes 15(1) et 16(1) de la Loi sur l’accès à l’information (LAI), car ils ont été décrits comme étant constitués « essentiellement de renseignements sensibles sur la sécurité nationale […] ». En outre, la pratique du SCRS de ne pas confirmer ou nier l’existence de documents, lorsque les renseignements demandés concernent les dossiers d’enquête, ont été considérés comme raisonnables.
Questions en litige
- Le SCRS a‑t‑il commis une erreur en concluant qu’il pouvait avoir recours aux articles 15 et 16 de la LAI pour exempter de communication les documents demandés, s’ils existaient?
- Le SCRS s’est‑il fondé de manière raisonnable sur le paragraphe 10(2) de la LAI lorsqu’il n’a pas confirmé ou nié l’existence des documents demandés?
Faits
VB a présenté au SCRS une demande en vertu de la LAI pour obtenir des documents liés à son « identité », notamment la cybersurveillance, l’historique de publications, les antécédents de voyage, l’historique de dossiers aux tribunaux ou tout autre document. Le SCRS a interprété l’objectif de la demande comme étant d’obtenir des documents de ses dossiers d’enquête. Le SCRS a répondu avoir effectué des recherches dans le fichier de renseignements personnels (FRP) CSIS PPU 045 et que, conformément au paragraphe 10(2) de la LAI, il ne confirmerait pas ou nierait l’existence de tels documents. Cependant, il a déclaré que, s’ils existaient, on pourrait raisonnablement s’attendre à ce qu’ils soient exemptés de communication, conformément au paragraphe 15(1) ou aux alinéas 16(1)a) et c) de la LAI.
VB a déposé une plainte au Commissariat à l’information du Canada (Commissariat). Le Commissariat a conclu qu’en citant le FRP dans sa réponse, le SCRS a créé une certaine confusion pour les demandeurs mais qu’il était raisonnable pour le SCRS d’invoquer le paragraphe 10(2) soit pour confirmer soit pour nier l’existence des dossiers demandés. Le SCRS a accepté de mettre fin à sa pratique de citer des FRP. VB a présenté à la Cour fédérale une demande de contrôle de la décision du SCRS et a sollicité des dommages‑intérêts, des dépens et d’autres réparations que la Cour jugeait appropriées.
Décision
La demande a été rejetée. La Cour a conclu que la décision du SCRS de ne pas confirmer ou nier l’existence des documents demandés était raisonnable.
Motifs
Norme de contrôle
La Cour a fait remarquer que l’examen de la décision d’une institution fédérale de ne pas communiquer le document demandé en vertu de la LAI et de la Loi sur la protection des renseignements personnels (LPRP) implique un processus en deux étapes. Premièrement, la Cour doit décider si les renseignements sont visés par l’exception sur laquelle l’institution fédérale se fonde. Cette décision est contrôlée en fonction de la norme de la décision correcte. Si la Cour décide que l’institution fédérale s’est fondée correctement sur l’exception demandée, elle doit examiner si l’institution fédérale a exercé de manière appropriée son pouvoir discrétionnaire en ne communiquant pas le document demandé. Cet examen est effectué en fonction de la norme de la décision raisonnable.
La Cour a également souligné qu’une décision visant à adopter une politique générale afin de ne pas confirmer ou nier l’existence d’un document implique l’exercice du pouvoir discrétionnaire et, par conséquent, l’exercice du même pouvoir discrétionnaire doit également être examiné en fonction de la norme de la décision raisonnable.
Le SCRS a‑t‑il commis une erreur en concluant qu’il pouvait avoir recours aux articles 15 et 16 de la LAI pour exempter de communication les documents demandés, s’ils existaient?
La Cour a confirmé que le paragraphe 15(1) de la LAI prévoit une exception discrétionnaire fondée sur le préjudice à l’égard de l’information qui risquerait, de manière raisonnable, de vraisemblablement porter préjudice à la conduite des affaires internationales, à la défense du Canada ou d’États alliés ou associés avec le Canada ou à la détection, à la prévention ou à la répression d’activités hostiles ou subversives. Le SCRS doit démontrer que : (1) tout renseignement demandé est visé par l’exception; et (2) après avoir démontré que l’exception est disponible, conclure raisonnablement que la communication des renseignements, s’il y a eu, pourrait être préjudiciable.
L’alinéa 16(1)c) de la LAI prévoit également une exception discrétionnaire fondée sur le préjudice à l’égard de l’information qui risquerait, de manière raisonnable, de porter vraisemblablement préjudice à l’application de la loi ou au déroulement d’enquêtes licites. L’alinéa 16(1)a) prévoit une exception discrétionnaire fondée sur la qualification à l’égard de documents obtenus ou préparés par un organisme d’enquête. En se fondant sur cette exception, le SCRS doit : (1) démontrer que les documents qu’il a exemptés de communication, s’il y a eu, contiennent des renseignements visés par la catégorie définie; et (2) après l’avoir fait, il doit décider de manière raisonnable de ne pas communiquer les renseignements.
Les documents reliés aux dossiers d’enquête du SCRS ont été décrits comme étant constitués « essentiellement de renseignements sensibles sur la sécurité nationale […] ». Le contenu de ce type d’information, dans le contexte de la LPRP, correspond à la description des exceptions invoquées. Par conséquent, la Cour a souscrit à l’argument selon lequel si des dossiers d’enquête du SCRS liés à VB existent, on pourrait raisonnablement s’attendre à ce qu’ils soient visés par les exceptions prévues par les paragraphes 15(1) et 16(1) de la LAI. La Cour a également conclu que le SCRS n’a pas agi de manière déraisonnable en concluant, sur une base hypothétique, qu’il se fonderait sur les exceptions des paragraphes 15(1) et 16(1) pour refuser de communiquer les renseignements demandés si de tels documents existaient.
Le SCRS s’est‑il fondé de manière raisonnable sur le paragraphe 10(2) de la LAI lorsqu’il n’a pas confirmé ou nié l’existence des documents demandés?
La Cour a examiné la décision Ruby c. Canada (Solliciteur général), [2000] 3 C.F. 589 (C.F.A.), où la Cour d’appel fédérale s’est penchée sur le paragraphe 16(1) de la LPRP, une disposition parallèle au paragraphe 10(2) de la LAI. La Cour d’appel fédérale a conclu dans Ruby que: (i) le paragraphe 16(2) de la LPRP permet à l’institution fédérale d’adopter une politique pour ne pas confirmer ou nier l’existence de renseignements qui sont d’un type ou nature en particulier; (ii) l’adoption d’une telle politique implique l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire; et (iii) le pouvoir discrétionnaire doit être exercé de manière raisonnable. De plus, la pratique du SCRS de ne pas confirmer ou nier l’existence de documents, lorsque les renseignements demandés concernant les dossiers d’enquête ont été constamment considérés comme raisonnables étant donné que les renseignements ont été demandés en vertu de la LPRP. Le fait de confirmer l’existence de tels renseignements serait contraire à l’intérêt national, puisqu’il informerait des personnes qui représentent de manière potentielle un risque de sécurité si elles sont ciblées par une enquête du SCRS. La Cour a conclu que la conclusion de la Cour d’appel rendue conformément à la LPRP peut s’appliquer aussi à la LAI.
Même si cela n’a pas changé la conclusion de la Cour à l’effet que le recours au paragraphe 10(2) était raisonnable, le recours aux FRP dans la réponse du SCRS dans le contexte de la LAI a créé une certaine confusion pour le demandeur. Pour cette raison, aucuns dépens n’ont été adjugés.
La décision peut être consultée à partir du site Web des décisions de la Cour fédérale, à VB c. Canada (Procureur général), 2018 CF 394.
Cour d’appel fédérale
2. Husky Oil Operations Limited c. Office Canada Terre‑Neuve‑et‑Labrador des hydrocarbures extracôtiers
Cour d’appel fédérale
Référence : 2018 CAF 10
Date de la décision :
Dispositions de la Loi sur l’accès à l’information : Paragraphe 19(1), alinéa 19(2)b)
- Paragraphe 19(1) – renseignements personnels, exception
- Alinéa 19(2)b) – renseignements personnels, cas où la divulgation est autorisée
Dispositions de la Loi sur la protection des renseignements personnels : Article 3
- Article 3 – renseignements personnels, définition
Résumé
Le présent appel soulève la même question que dans l’affaire connexe Suncor Energy Inc. c. Canada‑Newfoundland and Labrador Offshore Petroleum Board, 2008 CAF 11.
La demande de contrôle judiciaire de Husky Oil Operations Limited (Husky) pour obtenir une ordonnance afin que les noms et les titres des employés de Husky soient caviardés des documents en question a été rejetée, car Husky n’avait pas présenté les éléments de preuve suffisants pour s’acquitter du fardeau de démontrer que la décision en vertu de l’alinéa 19(2)b) de la Loi sur l’accès à l’information (LAI) était déraisonnable.
Pour arriver à cette conclusion, deux des trois juges ont jugé qu’il n’était pas nécessaire de déterminer si les renseignements en cause était des « renseignements personnels ». Un des juges a conclu que les noms et les titres des employés de Husky, dans le contexte des documents demandés, n’étaient pas visés par la définition de « renseignements personnels » contenue dans la Loi sur la protection des renseignements personnels (LPRP) puisque les renseignements qui seraient transmis dans les documents ne révéleraient aucun renseignement étroitement lié à la vie privée des employés ou qu’ils auraient normalement voulu garder confidentiel.
Questions en litige
- Quelle est la norme de contrôle applicable?
- Les noms et les titres des employés d’Husky, dans le contexte des documents demandés, constituent‑ils des « renseignements personnels » visés au paragraphe 19(1) de la LAI?
- L’Office a‑t‑il conclu à tort que le public avait accès aux « renseignements personnels » en cause et a‑t‑il exercé à mauvais droit son pouvoir discrétionnaire d’en donner communication en vertu du paragraphe 19(2) de la LAI?
Faits
L’Office Canada‑Terre‑Neuve‑et‑Labrador des hydrocarbures extracôtiers (l’Office) a reçu une demande d’accès à l’information visant des documents portant sur des demandes antérieures de renseignements pour des données géophysiques et géologiques présentées par des sociétés à l’Office, dont Husky. L’Office a trouvé certains documents en réponse à la demande d’accès, a fourni des copies des documents demandés à Husky, en application de l’article 27 de la LAI, et a sollicité son consentement à la communication des renseignements.
Husky, invoquant le paragraphe 19(1) de la LAI, s’est opposée à la divulgation des noms, titres et coordonnées des deux employés qui étaient les auteurs des documents en question. L’Office a accepté de caviarder les coordonnées, mais a déterminé que le nom et le lien d’emploi des deux employés étaient du domaine public puisqu’on pouvait les trouver par une simple recherche sur Internet. L’Office a conclu qu’il y avait lieu d’exercer le pouvoir discrétionnaire que lui confère le paragraphe 19(2) de la LAI et de communiquer les documents demandés sans caviarder les noms et les titres. Husky a demandé un contrôle judiciaire de la décision de l’Office de communiquer ces renseignements.
La Cour fédérale a rejeté la demande de contrôle judiciaire d’Husky après avoir conclu que l’entreprise n’avait « produit aucune preuve ni analyse quant aux raisons pour lesquelles l’Office ne devrait pas divulguer » cette information. Husky a interjeté appel de la décision de la Cour fédérale.
Décision
La Cour d’appel fédérale a rejeté l’appel car Husky n’a pas présenté les éléments de preuve suffisants afin de s’acquitter du fardeau de démontrer, en vertu du paragraphe 19(2) de la LAI, que la décision de communiquer les renseignements était déraisonnable.
Motifs
Quelle est la norme de contrôle applicable?
La Cour d’appel a déclaré que la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable, tel qu’énoncé dans l’affaire Agraira c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36.
Les noms et les titres des employés d’Husky, dans le contexte des documents demandés, constituent‑ils des « renseignements personnels » visés au paragraphe 19(1) de la LAI?
Alors que l’un des juges (le juge de Montigny) a expliqué pourquoi les informations en cause n’étaient pas des informations personnelles, les deux autres juges (les juges Gauthier et Woods) ne pensaient pas qu’une telle détermination était nécessaire pour résoudre l’appel.
La juge Gauthier (motifs concordants de la juge Woods) était d’avis qu’il faut faire particulièrement attention, dans les affaires mettant en cause des renseignements personnels et/ou des interprétations des dispositions applicables de la LAI et de la LPRP, de ne pas s’aventurer dans des questions qui ne sont pas strictement nécessaires pour trancher en appel. Chacune de ces affaires doit être abordée au cas par cas, sans tenter de définir une approche générale autre que celle établie dans les dispositions législatives applicables.
Le juge de Montigny, d’autre part, a exposé les raisons pour lesquels les renseignements en question ne sont pas des « renseignements personnels » tels que définis dans la LPRP. Le nom d’une personne, en soi et sans contexte, n’est pas un renseignement personnel puisqu’il doit concerner un individu identifiable pour être considéré tel. En fin de compte, pour l’application du second volet de l’alinéa 3i) de la LPRP, il doit cependant être révélateur d’un fait important au sujet d’une personne, sans quoi la protection conférée aux renseignements personnels perd tout son sens. Les renseignements qui seraient transmis au sujet des employés de l’appelant advenant la divulgation de leurs noms du fait qu’ils figurent dans les documents demandés importent peu et ne constituent sans doute pas le type de renseignements qui font partie intégrante de leur dignité ou de leur identité, dont ils souhaiteraient conserver le contrôle et à l’égard desquels ils auraient une attente raisonnable en matière de vie privée. Les documents ne révèlent rien au sujet des employés ayant demandé l’information à l’Office autre que le fait que les demandes ont été présentées dans le cadre de leur emploi.
L’Office a‑t‑il conclu à tort que le public avait accès aux « renseignements personnels » en cause et a‑t‑il exercé à mauvais droit son pouvoir discrétionnaire d’en donner communication en vertu du paragraphe 19(2) de la LAI?
La Cour d’appel fédérale a conclu que Husky n’a pas présenté les éléments de preuve suffisants pour démontrer que l’Office avait exercé son pouvoir discrétionnaire de manière déraisonnable. Cela était suffisant pour rejeter l’appel.
Il manquait des éléments factuels cruciaux dans le dossier dont disposait la Cour d’appel sur la question de savoir si la correspondance limitée avec les identifiants ne révèle pas plus de renseignements personnels sur les employés que ceux qui étaient déjà accessibles au public, ce qui était une question mixte de fait et de droit. Bien que Husky ait soutenu que l’Office a divulgué plus de renseignements personnels sur ces employés que ce qui était accessible au public en exerçant son pouvoir discrétionnaire de divulguer les renseignements, il n’y avait pas suffisamment de preuves devant la Cour d’appel pour le déterminer.
Ayant conclu que les renseignements en cause ne constituent pas des « renseignements personnels », le juge de Montigny a déterminé que, même s’il n’y a pas lieu de se prononcer sur l’exception prévue à l’alinéa 19(2)b) de la LAI applicable aux renseignements personnels dans les cas où le public y a accès, il se devait de le faire parce qu’il s’agit du principal motif sur lequel la Cour fédérale a fondé sa décision. Il n’est pas contesté que le public avait accès, sur le site Web, au nom des employés et au fait qu’ils travaillaient chez Husky, au moment où l’Office a informé Husky de son intention de divulguer ces renseignements en vertu de la LAI.
La décision peut être consultée à partir du site Web des décisions de la Cour d’appel fédérale, à Husky Oil Operations Limited c. Office Canada‑Terre‑Neuve‑et‑Labrador des hydrocarbures extracôtiers, 2018 CAF 10.
3. Suncor Énergie Inc. c. Office Canada‑Terre‑Neuve des hydrocarbures extracôtiers
Cour d’appel fédérale
Référence : 2018 CAF 11
Date de la décision :
Dispositions de la Loi sur l’accès à l’information : Articles 19 et 44
- Paragraphe 19(1) – renseignement personnel, exclusion
- Alinéa 19(2)b) – renseignement personnel, lorsque la divulgation est permis
- Article 44 – révision du tiers, révision par la Cour fédérale
Dispositions de la Loi sur la protection des renseignements personnels : Article 3
- Article 3 – renseignement personnel, définition
Résumé
Le présent appel soulève la même question que le pourvoi connexe Husky Oil c Office Canada‑Terre‑Neuve des hydrocarbures extracôtiers, 2018 CAF 10 (Husky Oil).
La Cour d’appel fédérale a déclaré que Suncor ne s’était pas acquittée de son fardeau en vertu de l’alinéa 19(2)b) de la Loi sur l’accès à l’information (LAI) de démontrer que la décision de communiquer les renseignements était déraisonnable.
Deux des trois juges ont refusé de se prononcer sur la question de savoir si les renseignements en cause constituaient des « renseignement personnel ». Toutefois, un des juges a conclu que les noms et les titres des employés de Suncor contenus dans les documents demandés n’étaient pas visés par la définition de « renseignements personnels » de la Loi sur la protection des renseignements personnels (LPRP), car les renseignements transmis ne révéleraient aucun renseignement étroitement lié à leur vie privée qu’ils auraient normalement voulu garder confidentiel.
Questions en litige
- La Cour fédérale a‑t‑elle erré dans son interprétation de ce qui constitue un « renseignement personnel » aux termes du paragraphe 19(1) de la LAI?
- L’Office a‑t‑il commis une erreur en exerçant son pouvoir discrétionnaire de divulguer un renseignement personnel en vertu de l’alinéa 19(2)b) de la LAI?
Faits
L’Office Canada‑Terre‑Neuve‑et‑Labrador des hydrocarbures extracôtiers (l’Office) a reçu une demande en vertu de la LAI visant des documents rattachés à des demandes antérieures pour des données géophysiques et géologiques qu’il avait reçues de la part de différentes entreprises. En vertu de l’article 27 de la LAI, l’Office a donné un avis écrit à Suncor concernant les documents identifiés en réponse à la demande et a invité Suncor à lui indiquer si les informations relatives à Suncor devaient être soustraites à la communication et pour quel motif.
Suncor était d’avis que la communication des documents demandés était interdite par le paragraphe 19(1) de la LAI parce qu’ils révélaient des renseignements personnels, soit les noms et les titres de certains employés ayant communiqué avec l’Office pour demander des renseignements pour le compte de leur employeur. Trois des employés de Suncor dont le nom apparaissait dans les documents demandés avaient des profils LinkedIn révélant au public leur lien d’emploi avec Suncor. Suncor soutenait malgré tout que les noms de ses employés, dans la mesure où ils permettaient l’identification des employés ayant communiqué avec l’Office, constituaient des renseignements personnels qui n’étaient pas accessibles au public.
L’Office a jugé que les noms des employés de Suncor seraient communiqués parce qu’il s’agissait de renseignements personnels accessibles au public, mais a cependant caviardé la plupart des autres coordonnées de ces employés. Suncor a présenté un recours en révision judiciaire de cette décision.
La Cour fédérale a reconnu que les noms, les coordonnées et les titres des employés de Suncor correspondaient à la définition de « renseignements personnels » de la LPRP. Elle a conclu que l’Office n’avait pas agi de façon raisonnable en décidant d’exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas caviarder le nom d’un employé de Suncor dont le lien avec l’entreprise n’était pas accessible au public.
Concernant le nom des trois employés de Suncor qui avaient un profil LinkedIn, la Cour fédérale a conclu que cette information était de toute évidence accessible au public et que, pour cette raison, il était raisonnable de la part de l’Office de la communiquer. Suncor a interjeté appel de cet aspect de la décision de la Cour fédérale.
Décision
La Cour d’appel fédérale a rejeté l’appel car Suncor n’a pas présenté les éléments de preuve suffisants afin de s’acquitter du fardeau de démontrer, en vertu du paragraphe 19(2) de la LAI, que la décision de communiquer les renseignements était déraisonnable.
Motifs
Norme de contrôle applicable
La Cour d’appel fédérale a déclaré que la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable, tel qu’énoncé dans l’affaire Agraira c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36.
La Cour fédérale a‑t‑elle erré dans son interprétation de ce qui constitue un « renseignement personnel » aux termes du paragraphe 19(1) de la LAI?
La Cour d’appel fédérale a conclu qu’il n’était pas nécessaire en l’espèce de trancher la question de savoir si les noms des employés de Suncor et leur lien avec leur employeur sont visés par la définition de « renseignements personnels » de la LPRP. Si on tient compte du jugement de la Cour fédérale, qui a ordonné le caviardage des renseignements des employés qui n’étaient pas accessibles au public, la question de savoir si les noms des employés de Suncor et leur lien avec leur employeur sont visés par la définition de « renseignements personnels » de la LPRP ne fait pas partie du jugement visé par l’appel, même si les parties se sont entendues pour dire que les renseignements caviardés étaient des renseignements personnels.
Toutefois, un des juges (le juge de Montigny) n'était pas d’accord sur ce point et a estimé que les noms et les titres des employés de Suncor, ainsi que les renseignements révélant le rôle joué par les employés de Suncor dans l’obtention de certaines données géophysiques auprès de l’Office, n’étaient pas visés par la définition de « renseignements personnels » et, par conséquent, qu’ils ne tombaient pas sous le coup de l’application du paragraphe 19(1).
L’Office a‑t‑il commis une erreur en exerçant son pouvoir discrétionnaire de divulguer un renseignement personnel en vertu de l’alinéa 19(2)b) de la LAI?
La Cour d’appel fédérale a conclu qu’il n’y avait pas d’éléments de preuve suffisants pour démontrer que les renseignements contestés révélaient des faits au sujet des employés qui allaient au‑delà des renseignements déjà accessibles au public. Rien ne prouve vraiment que les renseignements contenus dans la correspondance révèlaient quoi que ce soit de plus au sujet de leur travail chez Suncor, et la Cour ne sait pas vraiment à quel point leurs profils sur Internet étaient détaillés. Il aurait fallu connaître le rôle de ces employés au sein de Suncor auquel ils étaient publiquement associés et la Cour n’a pas reçu de renseignement à cet effet de la part ou au sujet de ces employés.
La décision peut être consultée, en anglais seulement, à partir du site Web des décisions de la Cour d’appel fédérale, à Suncor Energy Inc. v. Canada‑Newfoundland and Labrador Offshore Petroleum Board, 2018 FCA 11 (anglais seulement).
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