L’organisme Work 2 Give aide les délinquants autochtones à donner en retour à leurs collectivités
Juin 20, 2025

En 2021, Movember Canada, un organisme à but non lucratif axé sur la santé mentale, a communiqué avec le Service correctionnel du Canada (SCC) pour lui présenter une proposition unique : établir un partenariat pour fabriquer des produits destinés aux collectivités autochtones.
L’initiative allait donner l’occasion aux délinquants, plus particulièrement aux hommes autochtones, d’acquérir de précieuses compétences tout en donnant en retour aux collectivités autochtones dans le besoin, dans l’esprit de la réconciliation.
L’idée est venue d’un partenariat de moins grande envergure que Movember avait noué avec le SCC dans le cadre d’un projet pilote au cours des années précédentes. C’est dans ce contexte que Sonia Prevost-Derbecker, directrice mondiale des programmes pour Autochtones chez Movember, a entendu des personnes autochtones purgeant une peine de ressort fédéral raconter que donner en retour à leurs collectivités était favorable à leur autonomie et à leur guérison. Sonia a su qu’il y avait là une possibilité d’élargir la collaboration.
« Ça me rejoint énormément, car mon père est allé en prison trois fois », dit Sonia. « Je suis tout à fait convaincue, comme tout le monde, je crois, que les gens ont la capacité de changer. Mais on sait tous qu’on ne peut pas changer si on ne se sent pas bien dans sa peau. »
True North Aid, un organisme de bienfaisance autochtone qui se consacre à l’autonomisation des collectivités autochtones, s’est joint au partenariat pour aider Movember et le SCC à cibler les besoins des collectivités et à obtenir les matières premières.
C’est là que l’initiative Work 2 Give a vu le jour.
Robert Rittwage, le responsable du projet Work 2 Give au SCC, se rappelle que le projet initial consistait à fabriquer 40 tables à pique-nique pour la Première Nation Taykwa Tagamou et la Nation Apitipi Anicinapek, qui en recevraient 20 chacune. Aujourd’hui, Work 2 Give dirige des ateliers dans quatre établissements dans la région de l’Ontario et du Nunavut : les établissements de Collins Bay, de Joyceville, de Beaver Creek et de Bath. De plus, il prévoit élargir ses activités à l’Établissement de Warkworth cet été.
Avec l’aide de True North Aid, Robert rend visite aux collectivités autochtones et rencontre les membres du conseil de bande. Ceux-ci déterminent les produits nécessaires, et Work 2 Give les fabrique.
« Je leur remets une offrande traditionnelle, je leur donne du tabac, et après avoir reçu l’approbation des membres du conseil, je travaille avec le personnel et la collectivité en général pour déterminer les besoins », dit-il.



Robert dit que les besoins varient. Il y a de la demande pour des minimaisons, des tables à pique-nique, des plates-bandes, des niches, et même des boîtes à plumes, des tambours à main et d’autres articles cérémoniaux autochtones.
Work 2 Give s’emploie particulièrement à faire équipe avec les collectivités dont les participants sont originaires. Ainsi, ils ont non seulement le sentiment général de donner en retour, mais aussi celui de rendre à cette collectivité ce qu’ils pourraient lui avoir pris par leurs actes. Sonia dit que l’exercice peut s’avérer très inspirant pour les délinquants, notamment quand ils voient que les produits qu’ils fabriquent aident directement leurs collectivités.
« Le plus extraordinaire est de voir les hommes se réapproprier qui ils sont, leur identité d’hommes autochtones, d’hommes autochtones vulnérables dégagés des erreurs qu’ils ont commises », dit-elle.
Une fois les produits fabriqués, Robert les donne à la collectivité lors d’une cérémonie d’offrande.
Robert se rappelle avoir assisté à une cérémonie de ce type sur le territoire non cédé de Wiikwemkoong. Au cours de cette dernière, on a offert un dortoir aux services d’aide à la famille de Wiikwemkoong dans le but de rassembler les familles et de favoriser la réconciliation. Un jeune homme en situation d’itinérance a dit qu’il habiterait dans un dortoir comme celui-là s’il le pouvait. C’est à ce moment-là que Work 2 Give s’est mis à construire des minimaisons, qui constituent aujourd’hui le village de minimaisons de Miikaan naa aki à Wiikwemkoong.
Bien que tous les partenariats aient été fructueux, leur caractère unique apporte son lot de défis.
Robert dit que le soutien de la haute direction du SCC et des dirigeants de la collectivité les a énormément aidés à surmonter ces obstacles.
« La priorité de Kevin [Snedden, sous-commissaire régional de l’Ontario et du Nunavut] est de mener à bien le programme, car il a lui-même été témoin du changement qui s’est opéré au sein de l’établissement et de la collectivité », dit Robert.
Kevin dit que ce qui rend Work 2 Give si spécial est entre autres sa capacité à aider les délinquants à acquérir des compétences et à se réhabiliter tout en transformant des vies dans les collectivités autochtones.
« Work 2 Give est un programme tellement positif. Il donne l’occasion aux hommes de donner en retour aux collectivités autochtones, ce qui en fait des milieux plus sains. Ce faisant, ils acquièrent des compétences professionnelles et un savoir-faire, apprennent à se connaître eux-mêmes, et voient leurs efforts porter leurs fruits dans la fabrication de produits qui changent positivement la vie des autres », dit Kevin.
« En participant au programme et en fabriquant des dons, les délinquants franchissent une étape concrète vers la guérison, tout comme le fait la collectivité qui en bénéficie. »
Robert dit que les participants autochtones approuvent entièrement du programme et souhaitent continuer à incarner le changement positif, même après la date d’expiration de leur mandat. Voilà qui témoigne de la force du programme Work 2 Give.
« Les participants de Work 2 Give disent du programme qu’il change leur vie », dit-il. « L’un d’eux dit que le programme lui a donné l’impression que les murs avaient disparu, que les clôtures n’étaient plus là, et qu’il le rapprochait le plus possible de l’extérieur. »
Sonia explique que Work 2 Give permet aux délinquants de renouer avec leurs collectivités. Elle nourrit l’espoir que ce rapprochement facilitera leur réinsertion sociale.
Le SCC a prolongé son protocole d’entente initial avec Movember pour continuer à offrir le programme au moins jusqu’en 2027, et même, espérons-le, plus longtemps encore.
Movember travaille actuellement à déterminer les collectivités autochtones du Canada dans lesquelles seront mises en place plusieurs de leurs initiatives visant à combler les lacunes et à répondre aux besoins. Sonia dit que Work 2 Give jouera un rôle central dans ce projet.
« Ces différents services ont tous le même objectif, soit le bien-être émotionnel et social des hommes autochtones. On croit qu’en offrant autant d’options positives, on fait forcément pencher la balance en ce sens, ce qui change les résultats de manière généralisée », dit-elle.
Robert dit que pour l’avenir, il souhaite tirer parti du travail qu’ils ont déjà été en mesure d’accomplir.
« Nous prévoyons renforcer nos partenariats avec les Premières Nations pour concrètement changer la vie des gens et parvenir à assurer une réconciliation véritable et authentique. »

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