Rapport sur la justice réparatrice 2018 à 2019
Possibilités de justice réparatrice - Services de médiation entre la victime et le délinquant
2018-2019
Résultats correctionnels des rencontres en personne
Contexte
L’Unité de la justice réparatrice du Service correctionnel du Canada (SCC) offre un mécanisme sûr et constructif qui permet aux victimes et aux délinquants de communiquer entre eux et de réparer les torts causés par les crimes graves. Pour cela, on utilise le programme Possibilités de justice réparatrice, déployé à l’échelle du pays.
Initialement, les demandes étaient très majoritairement faites par des employés des établissements qui ciblaient des délinquants pouvant être de bons candidats pour participer au programme. Ces dernières années, par contre, les demandes formulées par les victimes ont connu une hausse importante.
La médiation entre la victime et le délinquant (MVD) est un processus de réparation crucial qui permet de répondre aux besoins de tous les participants, tout en contribuant à la sécurité publique et à la prévention de la criminalité. Il s’agit d’une initiative financée par le SCC qui vise la réinsertion sociale en toute sécurité des délinquants, en veillant à ce qu’ils soient sensibilisés aux coûts humains infligés aux victimes de leur crime et à ce qu’ils réparent le tort qu’ils ont fait et certains des dommages causés, selon une entente entre eux et les victimes. C’est une étape essentielle pour aider les victimes, qui peuvent voir ceux qui sont directement concernés répondre à leurs questions et à leurs besoins.
Toutes les demandes sont soigneusement évaluées afin d’établir l’opportunité de l’intervention et l’état de préparation des participants à communiquer entre eux. Certaines demandes sont rejetées si l’autre partie n’est pas accessible ou ne souhaite pas participer au processus ou si la motivation de l’une ou l’autre partie est jugée inappropriée pour la participation au programme. Dans d’autres cas, on a recours aux communications indirectes : intermédiaire qui fait la navette, échange de lettres ou de bandes vidéo. Enfin, il arrive parfois que le traitement de la demande soit reporté à plus tard afin de permettre une meilleure préparation des parties.
Dans le présent rapport, on examine les demandes de MVD, les services fournis par le programme Possibilités de justice réparatrice (PJR) et les résultats correctionnels obtenus par 257 délinquants qui ont pris part à une rencontre de MVD en personne entre 1992 et le 31 mars 2018. On s’est appuyé sur une analyse des données fournies, en corrélation avec les données extraites du Système de gestion des délinquant(e)s (SGD), pour vérifier le statut des délinquants et leur dossier criminel après leur participation à la MVD.
Une évaluation qualitative effectuée en 1995 fait état d’un haut niveau de satisfaction chez les victimes et les délinquants. Les victimes signalent une meilleure maîtrise de leur sécurité et de leur vie, et affirment que le processus leur permet de tourner la page. Les délinquants parlent d'épanouissement personnel et déclarent être plus disposés à s’occuper de leurs facteurs criminogènes. Les employés interviewés ont confirmé que les délinquants sont davantage motivés à participer activement à la réalisation de leur plan correctionnel.
De plus, Rugge (2006) a examiné les effets de la participation sur la santé physique et psychologique des participants. On a remarqué que les victimes et les délinquants présentaient des résultats positifs durant leur participation au programme, par rapport à la grille d’évaluation de l’état de santé physique et à la grille d’évaluation de l’état de santé psychologique (avant et après). On a constaté une différence positive importante entre les participants qui ont assisté à une rencontre en personne entre la victime et le délinquant et ceux qui ne l’ont pas fait.
Les victimes et les délinquants qui participent au PJR donnent aussi leur avis sur leur expérience à l’Unité de la justice réparatrice. Dans l’ensemble, les participants se disent très satisfaits. Ils reçoivent un grand soutien des médiateurs, dont ils soulignent le professionnalisme, l’honnêteté et le dévouement. Les victimes ont indiqué que le processus avait répondu à leurs attentes (voire les avait dépassées). Un grand nombre de délinquants ont dit qu’ils ressentaient plus d’empathie pour leur victime et qu’ils appréciaient la compassion dont les médiateurs avaient fait preuve à leur égard.
En mai 2013, une Analyse préliminaire de l’incidence du programme Possibilités de justice réparatrice a été réalisée par la Direction de la recherche du SCC. Elle révèle que le programme semble prometteur pour réduire la récidive. La tendance indique qu’un an après leur mise en liberté, les délinquants ayant participé aux rencontres en personne étaient moins souvent réincarcérés, malgré un potentiel de réinsertion sociale et des taux de motivation plus faibles.
À la suite de l’analyse préliminaire, la Direction de la recherche a mené une Analyse préliminaire de l’incidence du programme Possibilités de justice réparatrice sur les taux de révocation. Les résultats de l’étude confirment les avantages de la participation au programme Possibilités de justice réparatrice (PJR), particulièrement lorsque les rencontres sont tenues dans la collectivité. Selon les résultats, la participation au programme PJR pendant l’incarcération peut également donner lieu à une réduction des taux de révocation au fil du temps.
STATISTIQUES RELATIVES AUX DEMANDES
Demandes annuelles, 1998-2019
Depuis 1992, le programme PJR reçoit les demandes de victimes, de représentants de victimes directement et indirectement, ainsi que de délinquants. Les délinquants sous responsabilité fédérale qui purgent leur peine au SCC et qui assument la responsabilité de leurs actes peuvent informer un membre du personnel de leur désir de participer au programme. Dans le présent rapport, ces demandes sont appelées « demandes provenant de l’établissement ».
Même si le service de médiation entre la victime et le délinquant (MVD) est disponible depuis 1992, le graphique ci-dessous montre les demandes reçues depuis 1998. Entre 1992 et 1997, la collecte de données sur les demandes reçues n’était pas uniformisée et les demandes de MVD n’étaient pas enregistrées.
Texte équivalent - Demandes annuelles 1997-2019
Année fiscale | Numéro de demandes |
---|---|
1997-1998 | 7 |
1998-1999 | 21 |
1999-2000 | 11 |
2000-2001 | 26 |
2001-2002 | 12 |
2002-2003 | 22 |
2003-2004 | 48 |
2004-2005 | 68 |
2005-2006 | 75 |
2006-2007 | 72 |
2007-2008 | 129 |
2008-2009 | 111 |
2009-2010 | 147 |
2010-2011 | 201 |
2011-2012 | 195 |
2012-2013 | 178 |
2013-2014 | 173 |
2014-2015 | 145 |
2015-2016 | 169 |
2016-2017 | 149 |
2017-2018 | 144 |
2018-2019 | 140 |
Ces cinq dernières années, 150 demandes ont été reçues en moyenne. Le nombre de demandes reçues durant l’exercice 2010-2011 demeure le plus élevé depuis la création du programme PJR. Un petit nombre de présentations et de séances d'information sur le programme organisées en personne de 2007-2008 à 2010-2011 ont donné lieu à une augmentation du nombre de demandes, tandis que les années où l’Unité de la justice réparatrice n’a pas pu organiser de présentations indiquent le contraire. La légère hausse en 2015-2016 est peut-être attribuable aux communications entourant l’entrée en vigueur de la Charte canadienne des droits des victimes, qui donne aux victimes le droit d’obtenir des renseignements sur les programmes de justice réparatrice.
Provenance des demandes, 1992-2019
Demandes provenant des victimes | 806 | 33 % |
Demandes provenant de l’établissement | 1 447 | 58 % |
Autre/inconnuNote de bas de page 1 | 221 | 9 % |
Total | 2 474 | 100 % |
Le nombre de demandes provenant des établissements continue de dépasser le nombre des demandes provenant des victimes. La région du Québec est la seule région où les demandes des victimes dépassent celles des établissements. Cette différence est possiblement attribuable à la collaboration que la région du Québec entretient entre les organismes d’aide aux victimes, les services sociaux et le système de justice pénale. C’est dans la région du Pacifique que le nombre de demandes provenant des établissements est le plus élevé.
Aperçu régional, 1992-2019
La région du Pacifique offre les services de MVD depuis plus longtemps que les quatre autres régions, ce qui explique pourquoi elle compte le nombre de cas le plus élevé.
Texte équivalent - Demandes par région, de 1992 à 2019
Région | Numéro de demandes |
---|---|
Atlantique | 191 |
Ontario | 647 |
Pacifique | 845 |
Prairies | 450 |
Québec | 336 |
SERVICES DE MÉDIATION ENTRE LES VICTIMES ET LES DÉLINQUANTS, EXERCICE 2018-2019
Types de dialogues organisés en 2018-2019
Le programme de justice réparatrice (JR) offre des services de médiation entre les victimes et les délinquants faisant intervenir différents processus de JR ou types de dialogues. Ceux-ci varient selon les besoins des participants. Il peut s’agir de rencontres en personne, de correspondance, de cercles de discussion ou d’échanges de messages vidéo. Le médiateur peut également relayer des messages entre les deux participants (médiation « navette »). Pendant l’exercice 2018-2019, les médiateurs du programme de justice réparatrice ont organisé principalement des échanges de lettres et des rencontres en personne.
Texte équivalent - Types de dialogues organisés
Type de dialogues organisés | Numéro de dialogues |
---|---|
En personne | 21 |
Correspondance | 27 |
Autre | 1 |
Médiation navette | 3 |
Messages vidéo | 1 |
RENCONTRES EN PERSONNE, 1992-2019
Rencontres en personne, par année
Entre 1992 et le 31 mars 2017, 267 délinquants ont participé à 438 rencontres en personne. Ces cinq dernières années, en moyenne 20 rencontres en personne ont été organisées par année.
Texte équivalent - Nombre de rencontres en personne entre des victimes et des délinquants par année
Année fiscale | Nombre de rencontres en personne |
---|---|
1991-1992 | 3 |
1992-1993 | 7 |
1993-1994 | 7 |
1994-1995 | 6 |
1995-1996 | 7 |
1996-1997 | 12 |
1997-1998 | 14 |
1998-1999 | 1 |
1999-2000 | 8 |
2000-2001 | 8 |
2001-2002 | 9 |
2002-2003 | 10 |
2003-2004 | 10 |
2004-2005 | 16 |
2005-2006 | 21 |
2006-2007 | 19 |
2007-2008 | 26 |
2008-2009 | 16 |
2009-2010 | 12 |
2010-2011 | 19 |
2011-2012 | 26 |
2012-2013 | 28 |
2013-2014 | 28 |
2014-2015 | 20 |
2015-2016 | 14 |
2016-2017 | 19 |
2017-2018 | 19 |
2018-2019 | 21 |
Nombre de rencontres en personne, par délinquant
Sur 267 délinquants :
1 rencontre | 2 rencontres | 3 rencontres | 4 rencontres | 5 rencontres | 6 rencontres et plus |
---|---|---|---|---|---|
181 (68 %) | 55 (21 %) | 15 (6 %) | 6 (2 %) | 4 (1 %) | 6 (2 %) |
APERÇU DES DÉLINQUANTS PARTICIPANTS
Âge
- Les délinquants qui ont participé à une rencontre en personne avaient de 15 à 77 ans au moment de leur infraction, et la moyenne était de 38 ans.
- Au moment de leur première rencontre en personne, ils étaient âgés de 19 à 85 ans, et la moyenne était de 48 ans.
Le délai entre l’infraction et la MVD en personne variait de 10 mois à 47 ans, et le délai moyen était de 11 ans.
Sexe
- 94 % des délinquants participants étaient des hommes et 6 % étaient des femmes.
- Ces proportions sont semblables à celles de la population générale des délinquants purgeant une peine de ressort fédéral :
Statut des délinquants sous responsabilité fédérale | Femmes | % | Hommes | % | Total |
---|---|---|---|---|---|
Incarcérés et en liberté | 1 432 | 6,1 | 22 032 | 93,9 | 23 464Note de bas de page 2 |
Représentation autochtone
Seize pour cent (16 %) des participants se disent autochtones. Ce taux est inférieur à celui des Autochtones dans la population carcérale purgeant une peine de ressort fédéral, qui s’élève à 24 %Note de bas de page 3 .
Confession religieuse
Parmi les 267 délinquants, 197 ont indiqué qu’ils pratiquaient une religion ou qu’ils avaient des croyances spirituelles. Parmi ces 197 délinquants, dix ont dit qu’ils pratiquaient une forme de spiritualité autochtone. Les autres n’ont pas indiqué qu’ils pratiquaient une religion ou ont déclaré qu’ils étaient athées.
Risque et besoins
Chez les délinquants dont le risque et les besoins ont été évalués à l’admission, la majorité présentait un risque élevé et des besoins moyens.
Risque
53 % : risque élevé
37 % : risque moyen
10 % : risque faible
Besoins
40 % : besoins élevés
47 % : besoins moyens
13 % : besoins faibles
INFRACTIONS À L’ORIGINE DE LA PEINE
Type d’infraction
Voici les types d’infractions ayant donné lieu à des rencontres de MVD :
- Meurtres, homicides involontaires coupables ou tentatives de meurtre : 50 %
- Infractions sexuelles : 27 %
- Vols qualifiés ou introductions par effraction : 7 %
- Infractions relatives à la conduite d’un véhicule ayant causé la mort : 6 %
- Voies de fait : 5 %
- Négligence criminelle ayant causé la mort : 4 %
- Enlèvement et séquestration : 1 %
- Menaces et harcèlement criminel : 1 %
Cela est comparable aux pourcentages des types d’infractions pour lesquelles les victimes s’inscrivent auprès du SCC; plus particulièrement en ce qui concerne les deux premiers types d’infractions énumérés ci-dessus.
STATISTIQUES RELATIVES AUX MISES EN LIBERTÉ SOUS CONDITION RÉUSSIES
Statut des participants au moment de la rencontre en personne
Texte équivalent - Statut au moment de la rencontre
Statut des participants | Nombre des rencontres |
---|---|
Incarcérés | 188 |
Après la peine | 10 |
Surveillés | 69 |
Statut actuel des délinquants participants
Sur les 267 délinquants ayant participé à des rencontres, 66 sont incarcérés à l’heure actuelle, 187 ont atteint la date d’expiration de leur mandat ou sont en liberté, neuf sont décédés et quatre ont été expulsés du pays.
Peine purgée | Incarcérés | Surveillés | Décédés | Expulsés |
---|---|---|---|---|
123 (46 %) | 66 (25 %) | 64 (24 %) | 9 (4 %) | 4 (1 %) |
Récidive après une MVD en personne
Récidive
Parmi les 212 délinquants qui étaient en liberté lorsqu’ils ont participé à une MVD en personne ou qui ont été mis en liberté par la suite :
- 98 % n’avaient pas récidivé un an après la rencontre en personne;
- 90 % n’avaient pas récidivé 5 ans après la rencontre en personne;
- après 10 ans, 89 % n’avaient pas récidivé.
Infractions commises après la MVD
Sur les 267 délinquants qui ont participé à des rencontres en personne (cela inclut tous les délinquants depuis 1992 qui étaient en liberté au moment de ces rencontres, ceux qui ont été mis en liberté par la suite et ceux qui étaient incarcérés à la date de publication du présent rapport) :
- 241 délinquants (90 %) n’avaient pas commis de nouvelle infraction;
- 26 délinquants (10 %) avaient commis une nouvelle infraction.
Type d’infractions commises après la MVD
Parmi les 26 délinquants qui ont commis une nouvelle infraction après la MVD :
- 7 ont été accusés de vol qualifié comme infraction principale;
- 2 ont été accusés d’agression sexuelle comme infraction principale;
- 6 ont été accusés de voies de fait;
- 2 ont été accusés de harcèlement criminel;
- 2 ont été accusés d’introductions par effraction;
- 1 ont été accusés de possession d’une substance en vue d’en faire le trafic;
- 1 ont été accusés en vertu d’une loi provinciale;
- 1 ont été accusés de possession d’une arme à feu à autorisation restreinte;
- 1 ont été accusés d’enlèvement;
- 1 ont été accusés d’action indécente avec l’intention d’insulter quelqu’un.
Soulignons que parmi les nouvelles accusations, 18 (69 %) visaient des infractions moins graves que les infractions ayant donné lieu aux demandes de médiation.
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