Résumé du cas : Comité d’enquête concernant le décès de Robert Pickton

Avertissement

L’information qui suit traite de sujets susceptibles de provoquer de la détresse. Si vous ou une personne de votre entourage avez besoin de soutien, nous vous encourageons à parler à quelqu’un. Vous trouverez des ressources sur le site canada.ca/sante-mentale.

Titre officiel : Comité d’enquête concernant les voies de fait contre un détenu survenues le 19 mai 2024 à l’établissement de Port-Cartier, suivi de son décès à l’hôpital le 31 mai 2024

Liste des abréviations
AC 

Agent (e) correctionnelle

CE

Comité d’enquête

EN 

Enquêteure nationale

ÉPC

Établissement de Port-Cartier

OI

Observateur indépendant

SCC

Service correctionnel Canada

SGD

Système de gestion des délinquant(e)s

SQ

Sûreté du Québec

Description de l’incident

Au moment de l’incident, Robert PICKTON était un homme de 74 ans qui purgeait, depuis 2007, une sentence vie pour 6 chefs de meurtre au second degré. 20 chefs additionnels de meurtre au premier degré avaient mené à un arrêt des procédures en 2010. Les délits de M. PICKTON avaient été très médiatisés au pays et dans le monde. Le niveau de sécurité de M. PICKTON avait été maintenu à maximum depuis son évaluation initiale en 2008. Il résidait à l’Établissement de Port-Cartier (ÉPC) depuis 2018.

Le dimanche 19 mai 2024, vers 17 h 16, lors de la remise de médication en pavillon, M. PICKTON a été agressé par un autre détenu. Dès le début de l’agression, l’agente correctionnelle (AC) assignée au poste de contrôle a demandé du renfort de ses collègues AC, qui sont intervenus rapidement et ont réussi à convaincre l’instigateur d’arrêter l’agression.

Vers 17 h 18, l’instigateur a ensuite saisi un manche de balai, l’a brisé et l’a enfoncé au visage de M. PICKTON. Les AC sont de nouveau intervenus, ont réussi à obtenir la conformité de l’instigateur et ont menotté, puis l’ont escorté à l’Unité d’intervention structurée. M. PICKTON a été transporté en ambulance sous escorte vers le Centre de santé et de services sociaux de Sept-Îles vers 17 h 57. Étant donné son état critique, il a été transporté via avion-ambulance vers l’Hôpital Enfant-Jésus de Québec le lendemain, où il a été placé aux soins intensifs. Le 31 mai 2024, le décès de M. PICKTON a été constaté.

Le Service des enquêtes sur les crimes contre la personne de la Sûreté du Québec (SQ) a débuté une enquête policière. Aucune accusation criminelle n’a encore été portée dans ce dossierNote de bas de page 1  . Les rapports provenant du Bureau du coroner du Québec n’ont pas encore été reçus par le Service correctionnel Canada (SCC)Note de bas de page 2 .

Processus des enquêtes sur les incidents

La loi exige que le SCC fasse enquête en cas de décès ou de blessure grave d’une personne détenue sous sa garde. Le 5 juillet 2024, le SCC a convoqué un comité d’enquête (CE) composé de 4 membres, dont une enquêteure nationale (EN) ayant une vaste expérience opérationnelle à titre de présidente, un conseiller principal de projet, de la Direction de la sécurité préventive et du renseignement à l’administration centrale, à titre de membre du comité, et un membre expérimenté de la collectivité, à titre de membre du comité. Un observateur indépendant (OI), un fonctionnaire à la retraite comptant plus de 30 ans d’expérience dans le domaine de la sécurité nationale et du renseignement de sécurité, a également été nommé pour assurer la rigueur, l’impartialité et l’intégrité du processus d’enquête, et ce dernier a soumis son rapport pour publication par le SCC.

Pendant l’enquête, le CE a interviewé 35 membres du personnel principalement de l’ÉPC, mais aussi de l’Établissement de Donnacona et de l’unité spéciale de détention. Le CE a de plus consulté le sergent-enquêteur de la SQ responsable de l’enquête policière ainsi que les secteurs pertinents à l’administration régionale et à l’administration centrale. Les instruments habilitants ont été revus ainsi que les renseignements au dossier touchant l’unité opérationnelle concernée, l’incident et les détenus impliqués. Les bandes audio et les enregistrements des caméras de télévision en circuit fermé du jour de l’incident ont également été analysés. Le CE a visité virtuellement l’unité opérationnelle et le lieu de l’incident, et s’est servi d’outils virtuels pour obtenir de la documentation de dossier et pour mener les entrevues.

Le comité d’enquête s’est penché sur les domaines d’enquête suivantes :

Résultats de l’enquête

Principales constatations

Le comité d’enquête a relevé certaines constatations principales dans les domaines suivants : l’accessibilité à certains objets pouvant compromettre la sécurité de l’établissement, la formation des AC quant à leurs obligations liées au processus d’évaluation du progrès des détenus ainsi qu’à la collecte et le partage des informations auprès du plus proche parent.

Bien que la présence du personnel dans le secteur où s’est produit l’incident correspondait aux normes en vigueur, le CE a souligné un problème sous-jacent quant à l’accès aux manches de bois, soit l’arme utilisée dans l’incident. Le CE a été informé que les détenus avaient accès aux objets de nettoyage librement et qu’il n’y avait pas d’armoires fonctionnelles qui se verrouillaient et qui permettaient de ranger les balais ou les vadrouilles dans la rangée, ni d’inventaire de ces objets, au moment de l’incident. Lors des consultations, le CE a été en mesure de confirmer que la direction de l’ÉPC était ouverte à réviser l’accès aux objets de nettoyage et que des projets étaient en cours avec les Services techniques pour trouver des solutions.

Le CE a analysé les registres d’intervention inscrits pour les 2 détenus impliqués au Système de gestion des délinquant(e)s (SGD) des 6 derniers mois avant l’incident. Dans les deux cas, les inscriptions structurées aux 45 jours n’avaient pas été effectuées en conformité avec la politique, malgré leur importance dans le processus d’évaluation du progrès des détenus, ce qui a amené le CE à se questionner quant aux suivis effectués en la matière par les gestionnaires et la direction à l’ÉPC. Les informations qui ont été recueillies en entrevue et lors des consultations ont révélé qu’il est nécessaire de revoir la formation qui existe actuellement pour les agents correctionnels afin d’effectuer des tâches telles que ces inscriptions structurées. Par conséquent, le CE a recommandé que le SCC veille à ce que les agents correctionnels (nommés et intérimaires) soient outillés afin qu’ils puissent s’acquitter de leurs obligations, conformément aux politiques.

Finalement, le comité d’enquête a soulevé des préoccupations quant aux pratiques de collecte et de partage d’information à la suite d’une situation particulière avec l’appel effectué au plus proche parent du détenu. Ce dernier, qui était documenté au SGD depuis 2011, a été avisé du décès du détenu le jour même. Néanmoins, quelques jours plus tard, le personnel de l’ÉPC a découvert que l’individu initialement contacté au sujet du décès n’était pas le plus proche parent du détenu. Le CE n’a pas pu déterminer si le détenu savait que son plus proche parent avait changé de coordonnées comme celles-ci ne figuraient pas au SGD et que le personnel n’avait pas été informé d’un tel changement. Le CE n’a également pas pu déterminer si l’information erronée au sujet du plus proche parent transmise par le SCC au centre hospitaliser avait entraîné des répercussions quelconques dans son cas. Actuellement, le rappel de mise à jour de cette information se trouve dans les inscriptions structurées aux 45 jours qui, comme indiqué auparavant, font souvent l’objet de non-conformités. Compte-tenu des risques associés à la collecte et le partage de ces renseignements, le CE a fait une recommandation pour adresser cette situation.

Recommandations et plans d’action

Le comité d’enquête a formulé au total 3 recommandations visant à améliorer les pratiques opérationnelles et à aborder les constatations du comité d’enquête, afin d’éviter que des incidents semblables ne se reproduisent à l’avenir. Le SCC a élaboré des plans d’action pour donner suite à chacune de ces recommandations :

  1. Que l’Établissement de Port-Cartier établisse un plan d’action afin de réduire l’accessibilité aux objets qui sont utilisés ou transformés à des fins qui compromettent la sécurité de l’établissement.

    Plan d’action : Un projet est en cours afin de sécuriser les portes de cagibis des nettoyeurs dans les salles communes des unités afin de mieux contrôler l’accès aux articles de nettoyage. Par ailleurs, un rappel a été fait pour une surveillance particulière, sur le quart de nuit pour le matériel dans les salles communes des unités. Enfin, un inventaire des articles se trouvant dans les salles communes est en place dans chaque salle commune de l’Établissement de Port-Cartier.

  2. Que le secteur des Opérations et programmes correctionnels s’assure que les agents correctionnels II soient outillés pour s’acquitter de leurs obligations liées au processus d’évaluation du progrès des détenus.

    Plan d’action : L’équipe de la Division des opérations de sécurité, appuyée par le Groupe de travail sur la responsabilisation des détenus, a procédé à des modifications du Système de gestion des délinquant.e.s afin d’accroître et améliorer l’échange d’informations sur les délinquants au sein de l’équipe de gestion de cas et de renforcer nos indicateurs d’efficience en fournissant les données exigées. L’écran de registre au 45 jours a été modifié pour les AC-II dans le SGD afin d’intégrer les prérequis de la politique au système et orientera l’AC dans l’écriture de ceux-ci. De plus, les AC-II devront obligatoirement ajouter un texte afin de pouvoir l’enregistrer. À ce titre, un bulletin de sécurité a été rédigé et est maintenant disponible dans le Hub. Par ailleurs, comme stipulé à la Matrice des responsabilités d’intervention des Lignes directrices, il revient toujours aux gestionnaires correctionnels de faire un contrôle de qualité des documents produits par les AC-II, ce qui comprend les Registres des interventions pour les entrevues structurées aux 45 jours.

  3. Que le secteur des Politiques évalue le risque organisationnel auquel le SCC s’expose en vertu des pratiques actuelles de collecte et de partage des renseignements au sujet du plus proche parent d’un détenu.

    Plan d’action : Le secteur des Politiques, en collaboration avec le secteur des Opérations et programmes correctionnels, examinera les pratiques actuelles en ce qui a trait à la façon dont les établissements collectent et partagent des renseignements concernant et/avec les plus proches parents des détenus afin d’en déterminer la conformité avec les exigences prescrites dans la Loi sur la protection des renseignements personnels, la Directive sur les pratiques relatives à la protection de la vie privée ainsi que dans les directives de la Commissaire. Selon les résultats de cet examen, les modifications nécessaires seront apportées aux directives de la Commissaire touchées afin de corriger et/ou atténuer les risques identifiés et celles-ci seront communiqués aux employés touchés. 

Détails de la page

2025-07-04