Chapitre 6 - L'Iran plafonne très vite en Irak et limite ses pertes en Syrie

Selon bon nombre de ses détracteurs, la République islamique d’Iran a accru son influence dans l’Irak de l’après-Saddam Hussein et en Syrie depuis 2011. Au sens strict, ce n’est pas inexact : l’Iran a fait des gains dans les deux pays. Par contre, une analyse exhaustive de ses choix mène à une évaluation plus nuancée : ses succès en Irak plafonnent très vite, tandis que le mieux qu’il puisse espérer en Syrie c’est de faire la part du feu, et non de faire des gains nets.

Tout cela est dû à une tension inhérente aux politiques de l’Iran en Irak et en Syrie : Téhéran ne peut exercer une influence dans l’un ou l’autre de ces pays que s’ils sont affaiblis. En même temps, l’instabilité et des gouvernements faibles — surtout en Irak — sont préjudiciables à sa sécurité. Inversement, un Irak renforcé et une Syrie stable après le conflit seraient positifs pour la sécurité de l’Iran, mais moins perméables à l’influence iranienne. La politique optimale pour l’Iran vise donc à atteindre un équilibre difficile entre ces incitatifs et ces pressions contradictoires. Une telle politique engendre toutefois des coûts importants; il s’agit davantage de choisir le moindre de deux maux que de trouver un idéal absolu.

L’Iran en Irak : un succès qui plafonne très vite

Dans un Irak faible, l’Iran peut asseoir son influence en infiltrant un système politique fragmenté dans lequel les acteurs locaux cherchent à l’extérieur le soutien dont ils ont grand besoin. À un moment où un autre, la situation qui permet à l’Iran de maximiser son influence — la faiblesse de l’État — devient moins avantageuse et finalement complètement désavantageuse parce que l’instabilité chez son voisin menace de plus en plus l’Iran. À une extrémité de l’éventail des scénarios se trouve une éventualité cauchemardesque : l’effondrement de l’Irak — une possibilité bien réelle depuis quelques années. Un tel scénario touche l’Iran de diverses façons : la violence peut déborder et traverser la longue frontière, il crée un espace pour les groupes opposés à l’Iran, comme l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL), et il oblige les États-Unis à prolonger leur présence militaire.

Inversement, le résultat contraire — un État irakien fort et en plein essor — réduirait peu à peu l’insécurité de l’Iran, mais aussi son influence. À un moment ou un autre, les inconvénients l’emportent là encore. Un Irak fort ne risque guère d’être un allié, mais un compétiteur et il agirait plutôt de façon à contenir la puissance iranienne. Un Irak fort aurait forcément à sa tête des dirigeants nationalistes qui, même s’ils sont chiites, ne seraient guère susceptibles de tolérer de hauts niveaux d’infiltration iranienne; le ressentiment face à l’influence de l’Iran est déjà généralisé. Tant que l’Irak est faible et ses politiciens divisés, ce ressentiment ne peut pas être canalisé. Dans un Irak qui se renforce, cependant, il se traduira probablement par une opposition nationaliste croissante à l’influence de l’Iran en Irak et finalement aux ambitions régionales de l’Iran.

L’idéal pour l’Iran est donc de parvenir à un équilibre entre les coûts et les avantages de ses choix. Le chercheur Mohammad Ali Shabani utilise l’expression « stabilité mitigée », tandis que d’autres lui préfèrent « chaos dirigé », dans un cas comme dans l’autre pour parler de l’intérêt de l’Iran pour un Irak faible, instable et fonctionnant minimalement, qu’il peut infiltrer et dont il peut orienter les résultats, mais pas instable au point de représenter une menace sérieuse pour sa propre sécurité.

Concrètement, l’Iran soumis à ces pressions contradictoires préfère un Irak décentralisé et démocratique, croyant avec justesse qu’il s’agit là de la combinaison optimale pour empêcher l’émergence d’un Irak trop fort ou trop faible, les deux extrêmes qu’il veut éviter. Ces intérêts l’incitent à employer des outils contradictoires. Il soutient le gouvernement central et la démocratisation, mais aussi des groupes non étatiques qui contestent le monopole de la violence que détient l’État. Il contribue à l’instabilité en appuyant des groupes violents, tout en se positionnant comme l’acteur indispensable capable d’arbitrer les différends.

L’Irak continuera probablement de se prêter à ces objectifs dans un avenir prévisible. Le scénario le plus probable à court et à moyen terme est que la situation reste plus ou moins la même, c’est-à-dire une insurrection sunnite contestant le gouvernement central à l’ouest, l’autonomie kurde de fait dans le nord et les sempiternelles querelles entre factions chiites. Dans ce paysage fragmenté, l’Iran continuera d’assurer un soutien à des clients dépendants.

(...) l'Iran doit se contenter de ce statu quo insatisfaisant.

Même s’il calibre habilement l’utilisation de ses nombreux outils, l’Iran ne peut éviter les contradictions inhérentes à sa politique en Irak. Plus d’influence dans un Irak faible signifie moins de sécurité; plus de sécurité à mesure que l’Irak se renforce signifie moins d’influence et un plus grand risque de retour d’un Irak ambitieux. En ce sens, se débrouiller tant bien que mal est le résultat optimal. C’est à ce niveau bien bas que plafonne le succès que l’Iran peut connaître en Irak : les gains engendrent inévitablement des coûts importants, et même le résultat optimal est loin d’être idéal. Dans un sens, l’Iran doit se contenter de ce statu quo insatisfaisant. Des changements importants ont peu de chances d’être positifs : un mouvement dans un sens ou dans l’autre — plus d’instabilité ou plus de stabilité — ferait probablement pencher la balance coûts-avantages vers des coûts plus élevés. Qui plus est, rien ne permet de penser que l’Iran a un plan — et encore moins les moyens de l’appliquer — pour sortir de ce dilemme.

En Syrie : limiter ses pertes

Sa relation avec la Syrie assure à l’Iran un moyen de réapprovisionner le Hezbollah et, de façon plus générale, d’exercer des pressions sur Israël et d’avoir de l’influence dans le Levant. À son tour, le Hezbollah facilite les liens de l’Iran avec des groupes comme le Jihad islamique palestinien ou les houthistes au Yémen. Ces liens sont les piliers essentiels du pouvoir de dissuasion de l’Iran : ils lui permettent d’annoncer qu’une attaque d’Israël ou des États-Unis pourrait amener ces groupes à exercer des représailles. Le début de la guerre en Syrie a donc été une importante source d’anxiété, parce que la chute du régime Assad serait un des plus graves coups géopolitiques pour la République islamique.

L’Iran s’oppose également à ce que la Syrie d’après le conflit soit dominée par un régime islamiste ou nationaliste sunnite qui adopterait une position anti-iranienne. Fondamentalement, comme le soutient Mohsen Milani, son objectif est de préserver l’« assadisme », un régime qui maintient un partenariat avec l’Iran, idéalement, mais pas nécessairement, avec Bachar el‑Assad à sa tête. En attendant, la prolongation de la guerre, avec Assad maître de la « Syrie utile » — les pistes d’atterrissage autour de Damas et les routes qui mènent au Liban, aux principales villes le long de la côte et au bastion traditionnel des alaouites —, sert mieux les intérêts de l’Iran qu’une transition qui éliminerait totalement ou partiellement l’assadisme. L’Iran ne le reconnaîtra pas, du moins pas avant de sérieuses négociations sur la Syrie d’après le conflit, parce que le sort d’Assad est un argument de négociation précieux. En même temps, tout cela est plus facile à dire qu’à faire : Assad s’opposera à toute entente exigeant son départ, et il n’existe pas encore de solution de rechange évidente pour remplacer Assad.

À certains égards, l’Iran n’aborde pas le conflit en Syrie de la même façon que celui en Irak. La chute d’Assad serait un coup dur, réduisant l’influence de l’Iran au Levant et affaiblissant son pouvoir de dissuasion. Néanmoins, les répercussions sur la sécurité de l’Iran seraient moins négatives que les pires des scénarios en Irak : l’instabilité en Syrie ne peut pas déborder directement en Iran, tandis qu’une Syrie agressive serait un compétiteur, mais pas une menace directe. C’est pourquoi, ce sont plus les possibilités que la menace qui poussent l’Iran à agir en Syrie, contrairement à ce qui se passe en Irak.

Quel est le bilan de la politique de l’Iran en Syrie depuis 2011? Dans la colonne des gains, l’augmentation de son influence est ce qu’il y a de plus remarquable. L’Iran a profondément infiltré la Syrie : il a intégré des officiers à tous les niveaux de l’armée syrienne et il a aussi profondément pénétré l’économie de guerre syrienne. Combien d’influence a-t-il ainsi gagné? Assad a besoin de soutien, mais il est adroit pour empêcher cette dépendance de faire de lui la marionnette de l’Iran ou de la Russie. Il est conscient que Téhéran et Moscou ont besoin de lui et il semble convaincu qu’ils ne réduiront pas plus que légèrement leur appui s’il n’obtempère pas à leurs demandes. Deuxièmement, le Hezbollah acquiert énormément d’expérience des combats en Syrie et reçoit de l’armement perfectionné de l’Iran et de la Syrie depuis 2011. Troisièmement, la consolidation des Forces de défense nationale (FDN, milice pro-Assad entraînée et équipée par l’Iran) assure aussi des gains à long terme. Quel que soit le résultat de la guerre, les FDN resteront vraisemblablement un moyen pour Téhéran de protéger certains de ses intérêts. Pour donner un caractère officiel à son influence à long terme, l’Iran pourrait reproduire le modèle du Hezbollah et encourager les FDN à fournir des services sociaux et à former un parti politique.

(...) ce sont plus les possibilités que la menace qui poussent l'Iran à agir en Syrie, contrairement à ce qui se passe en Irak.

Malgré ces gains, l’Iran accumule les pertes. Fondamentalement, Assad ne reconquerra pas toute la Syrie par les armes. Même s’il survit, il sera considérablement affaibli et devra traiter avec un gouvernement d’unité nationale et les insurrections constantes de l’EIIL, d’al‑Qaïda ainsi que des Kurdes. À ce titre, la guerre réduit la capacité de l’Iran d’exercer une influence dans le Levant et affaiblit son pouvoir de dissuasion.

Un des partenariats les plus précieux de l’Iran doit aussi être inscrit dans la colonne des pertes. Lorsque la Syrie a sombré dans la guerre civile, le Hamas s’est rangé du côté de l’opposition et par conséquent contre ses commanditaires iraniens et syriens, incitant l’Iran à lui retirer son soutien. L’Iran n’a plus comme partenaire dans les Territoires palestiniens que le Jihad islamique, un groupe plus petit qui se concentre surtout sur le militantisme violent et moins sur les activités sociopolitiques. Sa capacité d’exercer des pressions sur Israël est donc plus limitée et moins impressionnante.

La guerre a aussi été coûteuse pour le Hezbollah. Des centaines de ses combattants sont morts en Syrie, dont des personnages importants. Dans les pires scénarios de la chute de l’assadisme, en outre, il deviendrait très difficile de réapprovisionner le Hezbollah. Il serait risqué d’utiliser la voie maritime : Israël a une forte présence navale dans l’est de la Méditerranée, et la coalition dirigée par les États-Unis est aussi très présente le long des routes qui mènent des ports de l’Iran vers le Liban.

L’influence croissante de la Russie en Syrie profite à l’Iran, mais les gains des Russes se font aussi en partie aux dépens de l’influence de l’Iran auprès de Damas. À plus long terme, il existe des possibilités de tension, les deux pays cherchant à se positionner comme l’acteur externe dominant en Syrie. La vision iranienne d’une Syrie fragmentée, plus particulièrement, dans laquelle des acteurs favorables à la mollarchie conservent des centres de pouvoir autonomes, risque d’être incompatible avec la préférence de la Russie pour un gouvernement central fort.

La République islamique essaie depuis 1979 de se positionner à l’avant-garde de la résistance contre les politiques américaines et israéliennes. Sa capacité de transcender son identité perse et chiite a toujours été plus rhétorique que réelle. Néanmoins, l’Iran peut effectivement compter sur l’appui d’Arabes et de musulmans, surtout en temps de crise. Toutefois, son soutien d’un régime qui essaie d’écraser une opposition majoritairement sunnite entrave sérieusement sa capacité de mettre à profit sa puissance douce. Il fait également du tort à son discours de résistance, étant donné que l’Iran et le Hezbollah concentrent maintenant surtout leurs efforts sur la survie du régime Assad et non sur l’opposition à Israël.

Enfin, le soutien de l’Iran à Assad coûte cher. Les chiffres varient selon la source, mais s’élèvent à des milliards de dollars par année. Pour une économie mise à rude épreuve, il s’agit d’un engagement important. Il est vrai que la population de l’Iran n’est pas descendue dans la rue pour le dénoncer. Cependant, comme la population est de plus en plus frustrée parce que la croissance économique à laquelle elle s’attendait à la suite de la conclusion de l’accord sur le nucléaire tarde, cela pourrait devenir un autre sujet de préoccupation, quoique secondaire, pour Téhéran.

Le meilleur scénario pour l’Iran est que le régime Assad survive. Mais même s’il survivait, il serait affaibli. Il protégerait les intérêts iraniens fondamentaux, mais ne redeviendrait pas l’allié qu’il était avant 2011. C’est, de fait, le scénario auquel l’Iran fait face dans un avenir prévisible, étant donné que la guerre risque de durer encore des années. Le deuxième meilleur scénario est « l’assadisme sans Assad ». Mais ce scénario serait plus négatif que le premier. Un tel régime syrien après la guerre protégerait certains des intérêts iraniens fondamentaux, mais serait plus faible et plus divisé et ferait face à des insurrections constantes. Le troisième scénario est le pire des scénarios possibles : la chute d’Assad et de l’assadisme, qui entraînerait des pertes importantes. Bref, le mieux que l’Iran puisse espérer en Syrie, c’est de limiter ses pertes, d’essayer de protéger ce qu’il a et de limiter ses coûts futurs.

La montée de l’EIIL modifie-t-elle cette évaluation?

L’émergence de l’EIIL a été une arme à deux tranchants : elle a élargi les possibilités de l’Iran, mais elle a aussi accru son insécurité. Elle a donc renforcé la dynamique existante : les gains sont inévitablement accompagnés de coûts actuels ou futurs.

L’essor de l’EIIL en 2014 a ouvert des possibilités à l’Iran. En Irak, Téhéran a rapidement renforcé son soutien aux milices chiites, à l’armée irakienne et aux groupes kurdes. Ainsi, il aurait envoyé des drones et commencé à livrer de l’équipement militaire quelques jours à peine après la chute de Mossoul. Il a aussi commencé à livrer des armes aux milices kurdes irakiennes longtemps avant que la coalition dirigée par les États-Unis lance son propre programme d’entraînement et d’équipement pour les peshmergas.

L’EIIL ne représente pas une menace directe pour l’Iran. Même s’il est venu à quelques dizaines de kilomètres de la frontière iranienne en 2014, il n’est pas assez fort pour monter des incursions soutenues en territoire iranien et il n’y a pas établi d’importants circuits de contrebande. L’Iran a aussi évité les flots de réfugiés qui se déversent dans d’autres pays de la région. Téhéran lui-même estimerait que le risque d’une présence menaçante de l’EIIL en Iran est limité. En théorie, il est possible que l’EIIL pénètre en Iran : les secteurs baloutches du sud-est ont une frontière commune avec le Pakistan, tandis que les secteurs kurdes du nord-ouest en ont une avec l’Irak. Ces deux régions comptent une minorité sunnite désillusionnée, comprennent des groupes de criminels et d’insurgés qui ont de bonnes relations en Irak et au Pakistan et ont accès à des armes.

Malgré cette menace interne limitée, la progression de l’EIIL coûte cher à l’Iran. Elle augmente, là encore, le risque d’effondrement de l’Irak. Un État sunnite de fait ou de droit dans un Irak brisé serait probablement hostile à l’Iran. S’il n’était pas dirigé par des extrémistes, il serait probablement allié à l’Arabie saoudite. Même si les pires des scénarios pouvaient être évités, l’essor de l’EIIL a mis en évidence la faiblesse des alliés irakiens de l’Iran. Il a également entraîné le retour de l’armée américaine en Irak.

(...) l'essor de l'EIIL a mis en évidence la faiblesse des alliés irakiens de l'Iran. Il a également entraîné le retour de l'armée américaine en Irak.

La principale réaction de l’Iran a été d’accroître son appui aux milices chiites. Il peut ainsi acquérir de l’influence, mais à un coût de plus en plus élevé. Ce soutien alimente le discours sectaire de l’EIIL, qui dispose ainsi d’un puissant outil de recrutement. L’appui de l’Iran aux milices chiites (et à Assad) exacerbe aussi le ressentiment des sunnites en Irak et ailleurs au Moyen-Orient, ce qui porte préjudice à la puissance douce de la République islamique.

L’accord sur le nucléaire modifie-t-il cette évaluation?

D’après ses détracteurs, une des lacunes de l’accord sur le nucléaire est que la manne qu’apportera la levée des sanctions permettra à l’Iran de se comporter avec plus d’assurance et d’accroître son soutien à Assad, au Hezbollah, aux milices pro-Assad en Syrie et aux milices chiites en Irak. Cette évaluation est cependant exagérée.

Premièrement, la manne est limitée et il est peu probable qu’elle augmentera rapidement. Bon nombre des sanctions imposées unilatéralement par les États-Unis demeurent, créant des obstacles pour les banques européennes et autres qui sont réticentes à traiter avec les banques iraniennes. Qui plus est, une croissance économique soutenue nécessite aussi une réforme économique, ce qui ne s’est pas encore produit. Tant que la corruption, un climat rude pour l’investissement étranger, une bureaucratie hypertrophiée et la concentration de la richesse entre les mains d’entités favorables au régime perdureront, les perspectives de croissance demeureront bien en deçà de ce qu’elles pourraient être. Par conséquent, même si les estimations des biens iraniens gelés variaient de 50 à 150 milliards de dollars américains avant la conclusion de l’accord, l’Iran n’avait récupéré que quelques milliards de dollars au milieu de 2016.

Deuxièmement, le régime a décidé de négocier l’accord sur le nucléaire d’abord et avant tout à cause des difficultés économiques croissantes que connaissait le pays. La plupart des avantages économiques (aussi limités soient-ils) serviront donc probablement à répondre aux besoins économiques intérieurs.

Troisièmement, il n’y a pas de lien manifeste entre les finances de l’État iranien et le soutien qu’il assure aux groupes militants. L’Iran était riche lorsque les prix du pétrole étaient élevés, de 2005 à 2010. Si ces années ont été marquées par une participation active de l’Iran dans toute la région, l’accès à des fonds était au mieux un facteur secondaire de son assurance. De même, rien n’indique que l’Iran ait réduit son appui aux groupes partenaires lorsqu’il s’est retrouvé de plus en plus étranglé par les sanctions après 2010.

Quatrièmement, les États arabes sunnites penchent de plus en plus contre l’Iran. Ils se sont résignés à voir l’accord sur le nucléaire devenir réalité, mais ils veulent s’opposer plus fermement à l’Iran sur la scène régionale. Dans ce contexte, l’Arabie saoudite a encouragé d’autres États arabes à se joindre à elle dans son opposition à l’Iran en Syrie, au Yémen et ailleurs. Riyad a notamment réussi à briser le partenariat de longue date entre l’Iran et le Soudan, en convainquant le Soudan de se joindre à la campagne contre les houthistes au Yémen (ou plutôt, en le soudoyant).

Bref, l’Iran d’après l’accord est peu susceptible d’augmenter considérablement ses investissements en Irak et en Syrie, certainement pas suffisamment pour avoir plus qu’une influence marginale sur l’équilibre des forces dans l’un ou l’autre pays. Il ne profite pas d’une manne miraculeuse à la suite de la levée des sanctions et, si tant est qu’il reçoive des ressources additionnelles, il est probable qu’il en investira la majeure partie dans son économie.

Conclusion

L’Iran est plus influent dans les États déliquescents ou en voie de déliquescence et pourtant, même dans ces pays, il se heurte à des contraintes importantes. Ses gains sont coûteux et sa sécurité est précaire. Les limites de l’influence de l’Iran sont claires : l’Irak et la Syrie sont des cas cruciaux, parce qu’ils sont les pays (avec le Liban) où il investit le plus et où l’environnement est le plus perméable — et pourtant même là il ne connaît qu’un succès limité.

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