L’Iran à l’ère de la guerre financière : réhabiliter les sanctions dans leur rôle d’outils de diplomatie coercitive

Le dossier de l’Iran laisse croire qu’il y a lieu de repenser le recours aux sanctions financières comme outils de diplomatie coercitive. Le fait d’avoir coupé l’Iran des entités financières internationales a laissé le champ libre à des facilitateurs corrompus, sans compter que dans les faits, les sanctions se sont étendues aux biens et aux services exemptés. L’absence de processus crédibles pour lever les sanctions et de mesures d’aide pour remédier aux effets néfastes qui perdurent a pour conséquence que les sanctions sont perçues comme une arme destructrice plutôt que comme une mesure visant à encourager la négociation.

La décision du gouvernement des États‑Unis de se retirer du Plan d’action global commun (PAGC) et de recommencer à imposer des sanctions secondaires à l’Iran a plongé Washington et Téhéran dans ce que les représentants des États-Unis décrivent comme une guerre financière. Les autres parties au PAGC se voient forcées de composer avec ce nouveau conflit, puisqu’elles s’efforcent de continuer d’offrir les avantages économiques promis dans le cadre de l’accord sur le nucléaire en dépit des sanctions imposées unilatéralement à l’étranger par les États-Unis. Toutefois, des responsables gouvernementaux de pays d’Europe, de la Chine et de la Russie (et, par extension, l’ensemble de la communauté internationale, qui continue de soutenir le PAGC dans une très grande proportion) s’interrogent déjà sur la pertinence de déployer des mesures aussi extraordinaires à l’égard de l’Iran. Après tout, même si l’administration Trump a choisi d’en faire son principal cheval de bataille en matière de politique étrangère, le dossier de l’Iran ne constitue une priorité ni pour la Russie, ni pour la Chine, ni pour les puissances européennes (sauf pour l’Union européenne elle-même, qui fait cavalier seul). Bien conscient de ce déséquilibre, le président de l’Iran, Hassan Rohani, s’est efforcé de dépeindre la politique américaine à l’égard de l’accord sur le nucléaire comme une menace pour le multilatéralisme et pour l’ensemble des relations diplomatiques. Il a récemment déclaré que la seule façon de surmonter les difficultés consistait à déployer des efforts internationaux concertés misant sur les intérêts communs, et non à accéder aux demandes à courte vue de quelques États, voire d’un seulNote de bas de page 64 .

Dans un contexte où l’accord sur le nucléaire ne tient qu’à un fil et où il est de plus en plus envisageable que l’Iran se dépêche de construire une bombe, le fait que ce soit ce pays qui exhorte au multilatéralisme est très encourageant. Cette démarche témoigne de tout le chemin qu’il a parcouru comme intervenant sur la scène internationale et de l’ampleur du recul qui pourrait survenir si la situation tournait au vinaigre. Il existe néanmoins une raison encore plus primordiale pour laquelle la communauté internationale se doit d’intervenir pour atténuer les effets des sanctions réimposées par les États‑Unis. En effet, l’aspect le plus problématique de ces sanctions ne touche pas à l’accord sur le nucléaire, mais plutôt à leur efficacité à long terme à titre d’outil de diplomatie coercitive. Ce n’est pas la nature unilatérale et extraterritoriale des sanctions qui pose problème, mais plutôt le fait qu’en l’occurrence, les sanctions aient été imposées même si des données probantes démontraient clairement qu’il serait presque impossible de les lever par la suite, si l’Iran acceptait de négocier. Par conséquent, l’administration Trump n’emploie pas ces sanctions comme outil de coercition, mais plutôt comme outil de destruction.

Un outil devenu une arme

Même si les États-Unis ont étoffé leurs pouvoirs de sanction au cours des dernières décennies, les sanctions financières demeurent un outil relativement nouveau, invoqué pour la première fois sous l’administration de George W. Bush pour lutter contre le financement de projets terroristes. Juan Zarate, qui était à l’époque vice-conseiller à la sécurité nationale chargé de la lutte contre le terrorisme, est l’un des principaux concepteurs de ce nouveau genre de sanctions. Dans l’ouvrage Treasury’s War, M. Zarate annonçait une nouvelle ère de « guerre financière », dans laquelle les sanctions financières deviendraient des outils de choix pour assurer la sécurité nationale dans les situations épineuses liées à la sécurité auxquelles les États-Unis sont aux prises sur la scène internationaleNote de bas de page 65 . M. Zarate a expliqué que, même si de nombreux pouvoirs de sanction avaient déjà été établis dans le contexte de la lutte mondiale contre le terrorisme, c’est pour contrer la menace de prolifération nucléaire par l’Iran que le département du Trésor américain, qui relevait alors du président Obama, a tenté pour la première fois de recourir à des sanctions financières dans le cadre de conflits entre États.

Pour l’administration Obama, encore aux prises avec les retombées de la guerre en Irak, les sanctions économiques représentaient un outil de politique étrangère attrayant. Les États‑Unis, qui n’étaient pas arrivés à réunir une vaste coalition pour envahir l’Irak, se sont empêtrés dans un véritable bourbier. Il n’était donc plus envisageable d’avoir recours à la force pour contrecarrer les activités de prolifération de l’Iran ou y mettre un terme. Dans un discours prononcé en 2008 dans le cadre de sa campagne, M. Obama a précisé les objectifs de sa politique étrangère. Il a décrié l’approche envisagée par John McCain, qui souhaitait recourir à une solution militaire pour contrer la prolifération iranienne, la décrivant comme une politique inefficace qui avait aidé l’Iran à renforcer sa position. Il a ensuite fait valoir la sienne, progressiste, qui consistait à miser sur des solutions diplomatiques assorties de sanctions muscléesNote de bas de page 66 .

Malheureusement pour lui, le premier mandat du président Obama a coïncidé avec le deuxième mandat de l’administration Ahmadinejad, une période où les politiques nationales de l’Iran étaient établies par les ultraconservateurs. L’Iran a cherché à contrebalancer les répercussions économiques des sanctions américaines en profitant du cours avantageux du pétrole. Le président Ahmadinejad a ainsi évité d’entreprendre des négociations diplomatiques avec l’administration Obama, en partie parce que les sanctions ont eu pour effet de cristalliser le pouvoir politique et économique au sein des Gardiens de la révolution islamique. Ces derniers voyaient les échanges avec les États‑Unis comme contraires à leurs intérêts, surtout dans une période marquée par des victoires militaires en Irak et en Syrie. En 2012, les États-Unis ont cherché, en collaboration avec des alliés européens, à exercer davantage de pression sur l’Iran au moyen de nouvelles « sanctions paralysantes », qui ajoutaient des restrictions au secteur financier d’Iran et aux institutions financières internationales entretenant toujours des liens avec certaines banques iraniennesNote de bas de page 67 . Or, lorsqu’elle a imposé ces sanctions supplémentaires, l’administration Obama a cru, à tort, que le manque de collaboration de l’Iran signifiait que les sanctions n’étaient pas encore assez coercitives pour le convaincre de venir s’asseoir à la table de négociation.

Néanmoins, le fait que les nouvelles sanctions visaient le secteur financier signifiait que l’Iran n’était plus menacé par un outil coercitif, mais bien par une arme à part entière. En effet, en prenant pour cible les réseaux financiers, ce type de sanction pose des risques pour l’ensemble du système, ce qui n’est pas le cas lorsque les sanctions visent des secteurs précis de l’industrie. De plus, les banques peuvent faciliter le commerce avec l’Iran sans poser de geste commercial délibéré. En effet, une banque peut être impliquée involontairement, à son insu, en raison d’opérations courantes que réalisent des clients ou d’autres intervenants. Les agents de conformité des banques ont vite saisi les implications des nouvelles sanctions, dont les risques étaient amplifiés par de nouvelles lois (sans lien avec les sanctions, mais adoptées au cours de la même période) visant à remédier au laxisme des mesures de contrôle qui avait contribué à la crise financière mondiale. Ces nouvelles lois associaient une responsabilité criminelle personnelle à la non-conformité. Du jour au lendemain, les banques iraniennes se sont donc retrouvées coupées du réseau financier mondial. La mesure a eu l’effet escompté : l’Iran a commencé à ressentir de façon beaucoup plus aiguë les répercussions négatives des sanctions.

Toutefois, peu après leur imposition, divers signes ont montré que les sanctions financières avaient aussi des conséquences imprévues. Les pénuries de denrées alimentaires et de médicaments en Iran se sont multipliées, puisque les exportateurs américains et européens peinaient à trouver des circuits financiers leur permettant de faire ce commerce qu’en principe, les sanctions épargnaient. Pour contourner le problème, les intervenants ont commencé à avoir recours à des intermédiaires opaques en Turquie et aux Émirats arabes unis pour une proportion grandissante d’échanges commerciaux, ce qui laisse croire que les sanctions financières peuvent, en fait, diminuer la transparence des opérations financières de l’Iran. Par ailleurs, les sanctions des États-Unis ont eu pour effet de politiser les marchés financiers mondiaux, comme le démontre le désaccord qui a éclaté au sujet du système de paiement international par messagerie SWIFT : les États‑Unis souhaitaient que les banques iraniennes n’aient plus accès à ce système, mais pas l’Europe. À contre-cœur, les responsables du système ont fini par plier devant les pressions exercées par les États-Unis. Même les comptes bancaires de membres de la communauté iranienne en Europe ont été touchés, ce qui montre que certaines banques, qui en sont venues à voir l’Iran comme une source de problèmes, ont poussé leur souci de conformité jusqu’au zèle.

Les contrecoups de la levée des sanctions

Tous ces contrecoups — les conséquences sur le plan humanitaire, l’évasion préjudiciable, les désaccords politiques et le zèle des banques à l’égard de la conformité — étaient autant de signes avant-coureurs d’un échec stratégique bien plus profond, qui ne manquerait pas de revenir hanter l’administration Obama au moment de la mise en œuvre du PAGC. L’accord sur le nucléaire représente une réussite historique, et une grande partie de la communauté internationale estime que l’Iran a mérité la levée d’une partie des sanctions, puisqu’il a consenti à des relations diplomatiques et pris des engagements vérifiables en matière de non-prolifération. Malgré tout, dans la foulée de la mise en œuvre de l’accord, les États‑Unis ont tardé à lever les sanctions, laissant la porte ouverte à leur propre retrait. 

Pour l’Iran, la mise en œuvre de l’accord a été teintée d’amertume. La République islamique continuait de remplir ses obligations aux termes du PAGC. Les États-Unis, pour leur part, n’avaient levé les sanctions que de façon théorique : concrètement, leurs effets perduraient et entravaient la reprise du commerce et des investissements. Ensuite, le président Trump s’est retiré de l’accord, et les sanctions ont été imposées de nouveau. Dans une enquête menée en janvier 2018 auprès de cadres de multinationales qui mènent des activités en Iran, 79 % des répondants ont dit avoir retardé leurs plans d’entrée sur le marché au cours des deux années précédentesNote de bas de page 68 . Même si la complexité du contexte commercial en Iran a certainement compliqué la tâche des entreprises étrangères désireuses de profiter de nouvelles occasions d’affaires dans la foulée du PAGC, ce sont les effets persistants des sanctions qui ont représenté le plus grand obstacle.

Le caractère dérisoire de la levée des sanctions n’a pas manqué d’influencer l’opinion publique en Iran. En décembre 2016, la plupart des Iraniens considéraient que les États‑Unis, s’ils avaient levé les sanctions conformément aux dispositions du PAGC, avaient trouvé d’autres façons d’en prolonger les effets négatifs. Or, en janvier 2018, selon un sondage représentatif de l’ensemble du pays, la majorité des Iraniens croyaient que les États‑Unis n’avaient pas levé toutes les sanctions qu’ils s’étaient engagés à lever dans le cadre du PAGCNote de bas de page 69 . Ce revirement est aussi révélateur qu’inquiétant : l’incapacité de lever les sanctions à un moment donné risque de rendre un régime politique réticent à réagir de façon constructive aux pressions découlant de futures sanctions. En effet, les pays visés par des sanctions peuvent‑ils être certains qu’en modifiant leur comportement, ils verront les sanctions levées?

Depuis une dizaine d’années, les États-Unis s’affairent à transformer des sanctions qui ne représentaient au départ que des outils de diplomatie coercitive en de puissantes armes de guerre financière. Ils n’ont toutefois pas déployé autant d’efforts pour évaluer l’ampleur des dommages ainsi causés aux pays visés ni pour élaborer des instruments de politique qui pourraient faciliter la « reconstruction » lorsque la guerre financière prend fin à la suite de négociations.

Dans un discours sur l’évolution des sanctions, le secrétaire au Trésor de l’époque, Jack Lew, a fait remarquer ce qui suit : « Comme l’objectif des sanctions est de pousser les intervenants mal intentionnés à changer leur politique, nous devons être en mesure de les lever une fois que nous sommes arrivés à nos fins. Si nous ne respectons pas l’entente, notre crédibilité diminue, tout comme notre capacité d’utiliser des sanctions pour provoquer des changements dans les politiques. » Il faisait peut-être allusion à l’échec qui a dû alimenter sa réflexion : il n’était pas arrivé à convaincre les institutions financières de rétablir des liens avec l’Iran dans la foulée de la levée des sanctions. Selon M. Lew, le département du Trésor croyait que, pour respecter sa part de la mise en œuvre du PAGC, il lui suffirait de communiquer avec les autres membres de la communauté internationale afin d’aider les gouvernements et les entreprises à comprendre en quoi consisterait la levée des sanctionsNote de bas de page 70 . Ces mesures n’ont pas été efficaces, notamment parce que les responsables chargés, quelques mois plus tôt, de décourager les rapports commerciaux avec l’Iran se sont alors vu demander d’encourager ce même commerce.

La contradiction entre le message et le messager a notamment provoqué la colère de Stuart Levey, sous-secrétaire au renseignement financier et à la lutte contre le terrorisme sous George W. Bush, qui est ensuite devenu directeur des services juridiques de la banque internationale HSBC. À la suite d’une rencontre entre le secrétaire d’État John Kerry et les agents de vérification de la conformité des banques à Londres en 2016, M. Levey a souligné que les représentants des États‑Unis encourageaient les banques étrangères à commercer avec l’Iran, mais que les États-Unis n’étaient jamais revenus sur leurs déclarations précédentes, qui contenaient des mises en garde contre les risques de crimes financiers. De plus, aucune garantie n’était offerte quant à la façon dont les activités avec l’Iran seraient perçues à l’avenir par les organismes américains de réglementation et d’application de la loiNote de bas de page 71 . M. Levey a déclaré sans ambages que la HSBC s’abstiendrait de faire affaire avec l’Iran, et il semble que la plupart des agents de vérification de la conformité du secteur financier aient l’intention de faire de même.

En 2018, d’anciens fonctionnaires du département d’État et du département du Trésor ont uni leur voix pour dénoncer l’utilisation mal avisée des sanctions par l’administration Trump. Ils étaient principalement préoccupés par le fait que cet outil perdrait toute efficacité si son application minait les mesures multilatérales et incitait par le fait même les pays visés à redoubler d’efforts pour créer des structures et des instructions de rechange dans le système financier international afin de réduire la prédominance des États-Unis. Beaucoup moins d’attention a été accordée à la question de la levée des sanctions, qui semble pourtant, à bien des égards, représenter le problème le plus urgent. Même si d’autres facteurs viennent renforcer les moyens liés au multilatéralisme et à la prédominance des États-Unis dans le réseau financier mondial, de sorte que les sanctions entraîneront inévitablement une certaine part de détresse économique, il reste que leur efficacité quant à l’obtention de résultats stratégiques positifs est absolument indissociable de la question de leur levée en réaction à un changement du comportement du pays visé. Or, les instruments dont dispose actuellement la communauté internationale pour lever les sanctions sont très loin de suffire à la tâche.

De nouveaux instruments pour la reconstruction

La communauté internationale s’efforce encore de composer avec les conséquences du retrait des États‑Unis du PAGC. À cet égard, une mesure a particulièrement retenu l’attention : l’Europe tente de mettre sur pied un mécanisme de troc (INSTEX) qui permettrait le commerce entre l’Europe et l’Iran en dépit des sanctions secondaires, notamment en aidant le pays à s’affranchir, pour ce qui est du commerce, des opérations financières directes entre les banques européennes et iraniennes. En ce sens, le mécanisme représente pour l’Iran une solution prometteuse pour stimuler la reprise économique tant attendue à l’issue de l’accord sur le nucléaire. Il constitue par ailleurs la première tentative concertée de gouvernements de créer des instruments qui aideront à garantir que les sanctions puissent véritablement être levées, en dépit de problèmes comme le zèle dont certaines banques font preuve en matière de conformité et les éventuelles divergences entre les politiques préconisées par d’anciens partenaires quant aux sanctions multilatérales. Qu’importe le degré de succès du mécanisme, il incombe à la communauté internationale de trouver de nouveaux instruments pour arriver à lever les sanctions de façon plus efficace, et ce, avant de chercher à conclure un nouvel accord avec l’Iran et d’imposer des sanctions à d’autres pays. Pour qu’elles demeurent un outil efficace de coercition multilatérale non militaire, il faut créer des instruments permettant de résoudre les problèmes liés à la levée des sanctions dans deux secteurs importants.

Tout d’abord, la communauté internationale doit mettre à la disposition des pays visés des ressources qui les aideront à réduire l’incidence des sanctions sur les institutions, plus précisément sur les moyens réduits dont ils disposent pour relancer le commerce et les investissements après des années d’isolement économique. Cette diminution des capacités découle de changements dans l’économie politique du pays visé, comme la concentration des actifs chez les membres de l’élite qui ont des relations dans le milieu politique, et la modification des cadres institutionnels, par exemple l’augmentation de la corruption chez les fonctionnaires. Même si leurs effets négatifs sont bien définis, aucune mesure n’a encore été prise pour veiller à ce que la levée des sanctions soit assortie d’un soutien technique pour aider à y remédier. L’expérience vécue par l’Iran lorsqu’il a tenté de respecter le plan d’action élaboré par le Groupe d’action financière (GAFI) illustre bien la nature du problème. Washington a refusé de fournir un soutien technique direct pour aider Téhéran à se conformer au GAFI (aider à former les équipes responsables du renseignement financier en Iran, par exemple), en partie parce que le Congrès s’y serait probablement opposé. De son côté, l’Europe souhaitait offrir du soutien technique à l’Iran, mais ses efforts ont été freinés par le manque de clarté des consignes des États-Unis, qui ne balisaient pas clairement la possibilité d’offrir ce genre d’aide. De telles mesures d’aide sont également essentielles pour combattre les préjugés à l’égard des pays et des organisations qui ont déjà fait l’objet de sanctions.

Ensuite, à l’instar des conflits militaires, les guerres financières peuvent entraîner des dépendances à l’échelle de la société. Dans le cas de l’Iran, la classe moyenne fait preuve d’une résilience remarquable à l’égard des sanctions et est en mesure de se remettre rapidement lorsque la situation macroéconomique s’améliore. Toutefois, les sanctions nuisent aux perspectives d’avenir des Iraniens pauvres, qui subissent les contrecoups des faibles niveaux de croissance économique et qui dépendent des programmes sociaux. Nécessairement intangibles, les répercussions des sanctions sont le plus souvent ignorées et ne font pas l’objet de mesures d’aide au développement, comme ce serait le cas après un conflit militaire. Une politique sur les sanctions responsable devrait comporter une aide directe pour les pauvres. Une telle forme d’aide ne porterait pas tellement à controverse et s’inscrirait en bonne partie dans les considérations humanitaires des politiques sur les sanctions.

Conclusion

Il existe un risque croissant que l’imposition réussie de sanctions unilatérales à l’Iran par l’administration américaine l’encourage à y avoir aussi recours contre la Russie, la Turquie et d’autres pays si les conflits venaient à dégénérer. Au gré des désaccords politiques, il se peut que l’Europe, le Canada et d’autres alliés traditionnels des États-Unis doivent se prononcer quant à leur participation aux campagnes de sanctions proposées. Tant que la guerre financière perdure entre Washington et Téhéran, les États devraient faire preuve de prudence avant d’imposer des sanctions à de nouvelles cibles, tout en tempérant les attentes relatives au pouvoir qu’ont les sanctions d’amener les pays visés à la table de négociation. Pour résoudre la crise en Iran, tout particulièrement en ce qui a trait aux sanctions, il faudra arriver à en refaire des outils de diplomatie coercitive. C’est là un objectif qui mérite des efforts exceptionnels.

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