2013 TSSTC 1

Référence : NuStar Terminals Canada Partnership, 2013 TSSTC 01

Date : 2013-01-15
No. de dossier : 2012-82
Rendue à : Ottawa

Entre :

NuStar Terminals Canada Partnership, demandeur

Affaire : Demande de suspension de la mise en œuvre d’une instruction

Décision : La suspension de la mise en œuvre de l’instruction est accordée.

Décision rendue par : M. Michael Wiwchar, agent d’appel

Langue de la décision : Anglais

Pour le demandeur : M. Eric Durnford, c.r., avocat, Ritch Durnford

MOTIFS

[1]          Le 6 décembre 2012, NuStar Terminals Canada Partnership a interjeté appel en vertu du paragraphe 146(1) du Code canadien du travail (le Code) à l’encontre d’une instruction émise par M. William Gallant, agent de santé et de sécurité (l’agent de SST), le 29 novembre 2012. Était jointe à cet appel une demande de suspension de la mise en œuvre de l’instruction jusqu’à ce que l’affaire soit jugée sur le fond.

Contexte

[2]          Le 21 novembre 2012, l’agent de SST Gallant a visité le lieu de travail exploité par NuStar Terminals Canada Partnership, au 4090 Port Malcolm Road, Point Tupper (Nouvelle-Écosse), dans le but de mener une inspection. À son arrivée, l’agent de SST Gallant s’est vu refuser l’accès au lieu de travail par le directeur général de NuStar.

[3]          Suivant le refus du demandeur de lui autoriser l’accès, l’agent de SST Gallant a émis une instruction à NuStar le 29 novembre 2012. Cette instruction se lit comme suit :

DANS L’AFFAIRE DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL

PARTIE II – SANTÉ ET SÉCURITÉ AU TRAVAIL

INSTRUCTION À L’EMPLOYEUR EN VERTU DU PARAGRAPHE 145(1)

Le 21 novembre 2012, l’agent de santé et sécurité soussigné a mené une inspection dans le lieu de travail exploité par NUSTAR TERMINALS CANADA PARTNERSHIP, employeur assujetti à la partie II du Code canadien du travail, et sis au 4090 Port Malcolm Road, Point Tupper (Nouvelle-Écosse), B9A 1Z5, ledit lieu de travail étant parfois connu sous le nom de NuStar Terminals, Point Tupper. 

Ledit agent de santé et de sécurité est d’avis que les dispositions suivantes de la partie II du Code canadien du travail ont été enfreintes :

143 - Code canadien du travail, partie II,

L’agent de santé et de sécurité William Gallant s’est vu refuser l’accès à NuStar Terminals, Point Tupper, par Blaise MacDonnell, directeur général, le 21 novembre 2012.

Par conséquent, il vous est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l’alinéa 145(1)a) de la partie II du Code canadien du travail de cesser toute contravention au plus tard le 29 novembre 2012.

De plus, il vous est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l’alinéa 145(1)b) de la partie II du Code canadien du travail, de prendre, au plus tard dans le délai imparti par l’agent de santé et de sécurité, les mesures pour empêcher la continuation de la contravention ou sa répétition.

Fait à Dartmouth (Nouvelle-Écosse), ce 29e jour de novembre 2012.

[4]          Le 6 décembre 2012, le demandeur a interjeté appel devant ce Tribunal de l’instruction émise par l’agent de SST Gallant en y joignant une demande de suspension de la mise en œuvre de l’instruction.

[5]          Le 13 décembre 2012, j’ai tenu une téléconférence pour entendre la demande de suspension. Parmi les personnes présentes lors de la téléconférence, on trouvait Me Durnford, l’avocat du demandeur, et l’agent de SST Gallant, qui a été présent brièvement au début de l’appel.

[6]          Plus tard cette journée-là, j’ai rendu ma décision d’accorder la demande de suspension. Voici les motifs à l’appui de ma décision.

Analyse

[7]          Le pouvoir d’un agent d’appel d’accorder une suspension découle du paragraphe 146(2) du Code, qui se lit comme suit :

146(2) À moins que l’agent d’appel n’en ordonne autrement à la demande de l’employeur, de l’employé ou du syndicat, l’appel n’a pas pour effet de suspendre la mise en œuvre des instructions.

[8]          Afin de rendre une décision au sujet de cette demande de suspension, j’ai appliqué les trois critères suivants, lesquels ont été communiqués au demandeur avant l’audience :

1)        Le demandeur doit démontrer à la satisfaction de l’agent d’appel qu’il s’agit d’une question sérieuse à traiter et non pas d’une plainte frivole et vexatoire.

2)        Le demandeur doit démontrer que le refus par l’agent d’appel de suspendre la mise en œuvre de l’instruction lui causera un préjudice important.

3)        Le demandeur doit démontrer que dans l’éventualité où la suspension était accordée, des mesures seraient mises en place pour assurer la santé et la sécurité des employés ou de toute autre personne admise dans le lieu de travail.

La question à juger est-elle sérieuse plutôt que frivole ou vexatoire?

[9]          Lors de la téléconférence, j’ai indiqué au demandeur qu’à partir de mon évaluation initiale de la présente cause, j’étais d’avis que la question qui devait être tranchée était en fait sérieuse. Par conséquent, j’ai conclu que je suis convaincu que les exigences du premier critère ont été satisfaites.

Le demandeur subirait-il un préjudice important si l’instruction n’est pas suspendue?

[10]      Dans ses observations écrites et plus tard lors de la téléconférence, Me Durnford a fait valoir que si NuStar est tenue, en attendant l’appel, de donner accès aux autorités fédérales, l’entreprise subirait un préjudice d’une manière qui ne peut être compensée par des dommages-intérêts. De l’avis de Me Durnford, permettre l’accès au lieu de travail à un agent de santé et de sécurité fédéral pourrait entraîner des décisions qui sont incompatibles avec les décisions qui pourraient être prises plus correctement par les autorités provinciales. Par conséquent, il pourrait y avoir un dédoublement des procédures par les deux autorités de réglementation, et cela pourrait entraîner des frais inutiles et porter à confusion.

[11]      Compte tenu du fait que la province de la Nouvelle-Écosse exerce déjà son pouvoir de réglementation en matière de santé et de sécurité au travail sur les activités du demandeur, je suis convaincu que le dédoublement des compétences dans ce cas pourrait fort bien être source d’une confusion grave. Je suis d’avis que les perturbations et les conséquences négatives qui peuvent résulter de la décision de permettre à des organismes exerçant une autorité provenant de deux territoires différents d’inspecter et de prendre des décisions et d’émettre des instructions sont considérables et pourraient causer des dommages importants au demandeur. En outre, j’estime que les conflits de compétence qui peuvent survenir si l’instruction n’est pas suspendue pourraient avoir un effet négatif sur la protection de la santé et la sécurité des employés du demandeur. Je conclus donc que le demandeur a satisfait au deuxième critère.

Quelles mesures seront mises en place pour protéger la santé et la sécurité des employés ou de toute personne admise sur le lieu de travail si la suspension est accordée?

[12]           En ce qui concerne le troisième critère, Me Durnford a fait valoir dans ses observations écrites que ce facteur ne s’applique évidemment pas dans la cause qui nous intéresse. Lors de la téléconférence, il a en outre indiqué que, si un problème de sécurité se produit, il ne fait aucun doute que les autorités provinciales agiraient puisque la société s’est engagée activement auprès des autorités provinciales. Il a ajouté que NuStar a toujours été très respectueuse de la réglementation et dispose d’un bon dossier de sécurité.

[13]           Me Durnford a également indiqué qu’il ne s’agit pas d’une situation où une circonstance particulière s’est produite qui nécessiterait que certaines mesures soient mises en place pour éliminer un danger. Au début de la téléconférence, j’ai demandé à M. Gallant si sa visite du lieu de travail de NuStar était en réponse à une situation particulière ou s’il s’agissait tout simplement d’une inspection de routine. Il a confirmé que le but de sa visite était de procéder uniquement à une inspection de routine.

[14]           Sur ce point, il est clair pour moi que l’objet même de l’instruction n’était pas de traiter d’une infraction à une obligation en matière de santé et de sécurité au travail énoncée dans le Code et dans ses règlements. Étant donné qu’il s’agit d’une question d’accès au lieu de travail, et compte tenu du fait que l’agent de SST Gallant a confirmé que sa visite avait tout simplement pour but de mener une inspection de routine et non de répondre à un incident particulier, j’estime que des mesures supplémentaires ne sont pas justifiées dans le contexte de la présente intervention. Je conclus donc que le demandeur a satisfait au troisième critère.

Décision

[15]           La demande de suspension de la mise en œuvre de l’instruction émise par l’agent de SST William Gallant le 29 novembre 2012 est accordée jusqu’à ce que l’appel soit instruit au fond.

Michael Wiwchar
Agent d’appel

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