2013 TSSTC 12
Référence : Nelson Hunter c. Canada (Service correctionnel), 2013 TSSTC 12
Date : 2013-03-14
Dossier : 2009-14 et 2009-20
Rendue à : Ottawa
Entre :
Nelson Hunter, appelant
et
Service correctionnel du Canada, intimé
Affaire : Appel interjeté en vertu du paragraphe 129(7) du Code canadien du travail à l’encontre de décisions rendues par des agents de santé et de sécurité.
Décision : Les décisions voulant qu’il n’y a pas de danger sont confirmées.
Décision rendue par : M. Douglas Malanka, Agent d’appel
Langue de la décision : Anglais
Pour l’appelant : Mme Georgia Stewart, conseillère syndicale, UCCO‑SACC‑CSN
Pour l’intimé : M. Joshua Alcock, avocat, ministère de la Justice Canada, groupe du droit du travail et de l’emploi
MOTIFS DE LA DÉCISION
Contexte
[1] La présente affaire concerne deux appels que M. Nelson Hunter, un agent correctionnel (AC) travaillant à l’Établissement de Joyceville de Service correctionnel du Canada (SCC), a présentés au Tribunal en application du paragraphe 129(7) de la partie II du Code canadien du travail (le Code). L’agent d’appel Pierre Guenette a examiné les deux appels et il a indiqué aux parties, dans une lettre datée du 4 février 2010, qu’ils seraient déposés ensemble. M. Guenette a jugé que les deux appels se rapportaient à la mise en œuvre du plan de sécurité-incendie (PSI) à l’Établissement de Joyceville lors du quart du matin et de la directive 004 du commissaire intitulée Normes nationales de déploiement des agents de correction (ou les NNDAC, comme je les désigne dans la présente décision). Les deux appels sont décrits ci-après.
Appel : décision de l’agent de santé et de sécurité Bob Tomlin datée du 7 avril 2009 (dossier 2009-14)
[2] Le 25 mars 2009, l’AC Hunter a refusé de travailler en application du paragraphe 128(1) du Code. M. Hunter soutient qu’il n’y aurait pas eu assez d’employés en poste lors du quart du matin pour mettre en œuvre le PSI en cas d’incendie si SCC avait donné suite à son intention de commencer à appliquer les NNDAC à Joyceville le 6 avril 2009. Les nouvelles NNDAC qui devaient être mises en application ce jour-là auraient eu pour effet de faire passer le nombre d’AC affectés au quart du matin de onze à dix.
[3] Le 27 mars 2009, l’agent de santé et de sécurité (l’agent de SST) Tomlin s’est rendu à l’Établissement de Joyceville et y a effectué une enquête préliminaire sur le refus de travailler manifesté par M. Hunter. L’AC Hunter n’était pas présent, car il était affecté au quart du matin. L’agent de SST Tomlin a donc entrepris son enquête sans le concours de l’AC Hunter ou de son représentant désigné, et il a déterminé que le danger signalé par l’AC Hunter constituait une condition d’emploi normale. L’agent de SST Tomlin a confirmé ce constat par écrit à l’AC Hunter le 31 mars 2009.
Appel : décision de l’agent de santé et de sécurité Francesco Misuraca datée du 29 mai 2009. (Dossier 2009-20)
[4] Le 22 mai 2009, subséquemment à la mise en œuvre des NNDAC, l’AC Hunter a refusé de travailler en application du paragraphe 128.1 du Code. Il estimait que le nombre réduit d’employés affectés au quart du matin constituait un danger pour lui et pour d’autres employés et détenus.
[5] L’agent de SST Misuraca a enquêté au sujet du refus de travailler exprimé par M. Hunter le 23 mai 2009. L’AC Hunter a soumis une déclaration de refus de travailler à l’agent de SST Misuraca dans laquelle il était indiqué ce qui suit : le PSI approuvé de Joyceville était désuet depuis plusieurs années; Joyceville n’a pas créé d’organisme de sécurité-incendie tel qu’exigé en vertu des normes du Conseil du Trésor; Joyceville n’a pas nommé ni formé d’employés, y compris l’AC Hunter, pour qu’ils agissent comme agents des services de secours d’étage (ASSE) ou ASSE adjoints sur chaque étage; et il n’y avait pas assez d’employés en poste après le dénombrement de détenus effectué à 23 h pour exécuter les obligations découlant du PSI en ce qui concerne les interventions d’urgence et la surveillance des détenus souffrant d’une incapacité.
[6] L’AC Hunter a aussi dit à l’agent de SST Misuraca qu’il n’a pas pu quitter son poste pour gérer une situation d’urgence ou pour mettre en œuvre convenablement le plan de sécurité-incendie de l’étage (PSIE), car il devait pourvoir aux besoins élémentaires des détenus sous sa supervision. Il soutient que s’il avait quitté son poste, il aurait du même coup risqué d’enfreindre l’article 215 du Code criminel du Canada. Il s’est plaint du fait qu’il n’y avait pas d’ASIE en poste en tout temps à chaque étage durant le quart du matin et qu’il n’y avait pas non plus assez d’employés pour surveiller les détenus souffrant d’une incapacité selon les modalités du PSI, lequel oblige l’ASIE à prévoir au moins deux surveillants pour chaque personne souffrant d’une incapacité.
[7] Avant que l’agent de SST Misuraca fasse son enquête sur le refus de travailler exprimé par l’AC Hunter, l’employeur avait effectué sa propre enquête à ce sujet. Dans sa plainte écrite à l’employeur, l’AC Hunter affirme qu’il faudrait au moins deux AC de plus que l’effectif normal de onze pour mettre en œuvre le PSI à Joyceville. À cet égard, l’AC Hunter maintient que la situation actuelle entraîne les conséquences suivantes : il n’y a pas assez d’employés en poste lors du quart du matin pour évacuer les détenus en cas d’incendie; aucun plan de sécurité-incendie fonctionnel approuvé n’est appliqué; les secours incendie ne sont pas organisés; il n’y a pas assez d’employés en poste pour aider le service des incendies à accéder à l’Établissement; il n’y a pas assez d’employés en poste pour réagir à une alerte d’incendie déclenchée depuis une position personnelle ou fixe ou par cellulaire dans un secteur non touché par l’incendie; et il n’y a pas assez d’employés en poste pour protéger le public contre une évasion ou pour assurer la sécurité de l’Établissement lorsque des employés doivent aller gérer une situation d’urgence liée à un incendie.
[8] Subséquemment à son enquête, l’agent de SST Misuraca a jugé qu’il n’y avait aucun danger pour l’AC Hunter et le 29 mai 2009, il a écrit à l’AC Hunter et à l’employeur et confirmé sa décision.
[9] Le 9 juin 2009, l’AC Hunter en a appelé de la décision de l’agent de SST Misuraca auprès d’un agent d’appel, le tout en application du paragraphe 129(7) du Code.
[10] Avant la tenue de l’audience, SCC, la partie intimée visée par ces appels, a déposé une demande afin de les faire annuler pour le motif que l’AC Hunter ne travaillait plus à Joyceville et que les appels en question devenaient donc purement théoriques. Ma décision en ce qui concerne la requête du SCC est traitée dans la présente décision.
Question préliminaire
[11] La requête préliminaire se trouvant devant moi se rapporte à la question suivante :
- Les appels sont-ils purement théoriques, étant donné que l’AC Hunter ne travaille plus à Joyceville et que le PSI de cet établissement de Joyceville a été remplacé?
Observations des parties
A) Observations du demandeur
[12] M. Alcock affirme que le critère général pour déterminer si une question est purement théorique est énoncé par la Cour suprême dans Borowski c. Canada (Procureur général) [1989] 1 R.C.S. 342. M. Alcock note que la Cour affirme qu’un appel est purement théorique lorsqu’une décision n’a pas pour effet de résoudre une controverse ayant ou pouvant avoir des répercussions sur les droits des parties. De plus, la controverse doit se poursuivre non seulement au moment ou l’action ou la procédure est entamée, mais aussi au moment où l’on demande à la Cour de rendre une décision. Pour déterminer si le différend est purement théorique, la Cour doit trancher la question de savoir si le différend réel a toujours cours, car dans le cas contraire, le différend en cause devient, encore une fois, purement théorique.
[13] M. Alcock cite la décision David Laroche c. Procureur général du Canada, 2011 CF 1454, dans laquelle la Cour déclare au paragraphe 24 que si le différend est purement théorique, elle doit déterminer s’il est néanmoins opportun d’exercer son pouvoir discrétionnaire de trancher le différend malgré son caractère théorique. À cet égard, M. Alcock cite l’arrêt Borowski, dans lequel la Cour suprême recense les facteurs dont elle devrait tenir compte pour déterminer si elle devrait exercer son pouvoir discrétionnaire. Ces facteurs sont les suivants :
- La présence d’un contexte contradictoire;
- Un souci d’économie des ressources judiciaires; et
- La nécessité pour la Cour de prendre en considération sa fonction véritable dans l’élaboration du droit.
[14] M. Alcock avance que la position de l’intimé en l’espèce veut que les appels soient purement théoriques étant donné que l’appelant ne travaille plus à Joyceville; et que le PSI de l’Établissement de Joyceville visé par l’appel a subséquemment été remplacé par un nouveau PSI. M. Alcock soutient aussi que cela explique pourquoi les présents appels se distinguent de ceux dont il est question dans la décision Laroche.
[15] M. Alcock note que la Cour fédérale affirme au paragraphe 25 de la décision Laroche que les questions que l’agent d’appel devait trancher touchaient à un droit de refus de travail spécifique exercé à l’égard d’une situation donnée et qu’un changement de politique effectué subséquemment par l’employeur n’a pas eu d’incidence sur le débat relatif au droit de refus exercé par le demandeur. M. Alcock soutient que ce paragraphe, pris isolément, pourrait signifier qu’il n’y a pas de situations dans lesquelles un appel soumis au Tribunal de santé et sécurité au travail Canada (TSSTC) pourrait être considéré comme purement théorique, puisque tous les appels concernent un type précis de droit de refuser de travailler exercé à l’égard d’une situation donnée. M. Alcock soutient que ce genre de conclusion défie et le bon sens, et les principes énoncés par la Cour suprême dans Borowski. M. Alcock maintient que l’interprétation du paragraphe 25 dans Laroche doit être examinée dans le contexte de la décision.
[16] M. Alcock avance que dans Laroche, l’employeur a fait allusion au caractère théorique de l’appel après que l’agent d’appel eut rendu une décision sur le fond quant à l’affaire en cause. De plus, le changement de politique mis en cause dans Laroche fait intervenir un choix binaire qui devait être fait à l’entière discrétion de l’employeur.
[17] M. Alcock soutient qu’il peut évidemment y avoir des situations dans lesquelles un événement incident peut effectivement résoudre la controverse entre les parties à un appel entre le moment où un agent de SST détermine d’abord qu’il y a un danger et le moment de l’audition par un agent d’appel. À cet égard, M. Alcock cite l’affaire Maureen Harper c. Agence canadienne d’inspection des aliments 2011 TSSTC 19, dans le cadre de laquelle Mme Harper avait pris sa retraite durant la période intermédiaire, de sorte qu’il n’y avait plus de différend en cours.
[18] M. Alcock soutient également que dans Harper, il était inutile de poursuivre l’audience, puisque le résultat n’allait avoir aucune conséquence sur les droits des parties. Il ajoute que l’article 128 du Code crée un droit individuel; un appel au TSSTC ne peut être fait à titre représentatif.
[19] M. Alcock affirme que lorsque la Cour fédérale note, au paragraphe 26 de la décision Laroche, que l’employeur pourrait infirmer sa décision de mettre en œuvre une politique s’opposant à la fourniture d’une assistance aux corps policiers de l’extérieur, elle établit un lien avec la partie du critère découlant de Borowski qui porte sur la question de savoir si une décision « pourrait avoir » des conséquences sur les droits des parties.
[20] M. Alcock en conclut qu’on ne peut affirmer que la décision de la Cour fédérale se rapportant à l’affaire Laroche implique que le critère général du caractère théorique énoncé dans Borowski ne s’applique pas aux appels devant être jugés par un agent d’appel. Par conséquent, M. Alcock postule que la question pertinente liée à ces appels est celle de savoir si les motifs fondant l’existence d’un caractère théorique, tels qu’ils sont énoncés aux fins des présents appels, s’apparentent davantage à ceux associés à Laroche ou s’ils sont plutôt d’un type différent ressemblant à ceux énoncés dans Harper.
[21] M. Alcock soutient qu’en raison du fait que l’AC Hunter travaillait à l’Établissement de Bath depuis le 31 décembre 2010 et qu’il n’a pas travaillé à Joyceville depuis plus de 18 mois, les appels s’apparentent davantage à ceux associés à Harper qu’à ceux cités dans Laroche. M. Alcock estime que le point de vue selon lequel les préoccupations ayant incité l’AC Hunter à refuser de travailler doivent être résolues pour qu’il puisse éventuellement retourner travailler à Joyceville à une date non déterminée et y occuper un poste n’ayant pas encore été déterminé s’appuie sur la notion de « pouvant avoir des conséquences sur les droits des parties » de façon très limite.
[22] M. Alcock ajoute que le second motif invoqué veut que le PSI institutionnel visé par l’appel ait été remplacé par un PSI s’apparentant davantage à celui mis en cause dans Harper qu’à celui associé à Laroche. De plus, l’adoption du nouveau PSI ne résultait pas d’un choix entre deux options ni d’un choix effectué à la seule discrétion de l’employeur. M. Alcock note que les PSI doivent être approuvés par Ressources humaines et Développement des compétences Canada (RHDCC).
[23] M. Alcock en arrive donc à la conclusion que les appels sont purement théoriques.
[24] M. Alcock soutient que le Tribunal ne devrait pas exercer son pouvoir discrétionnaire de rendre une décision sur le fond s’il estime que les appels sont purement théoriques. Il soutient que même si des contextes contradictoires sont associés aux présents appels, les deux autres facteurs cités dans Borowski s’opposent à l’intervention du Tribunal. M. Alcock soutient également que dans le contexte du remplacement du PSI qui était en vigueur à Joyceville, il est difficile de déterminer le recours qui pourrait être accordé par le Tribunal relativement aux éléments de la plainte de l’appelant qui se rapportent expressément au PSI. Dans ce contexte, la décision du Tribunal n’aurait pas de répercussions d’ordre pratique sur les activités, puisque l’ancien PSI a déjà été remplacé.
B) Demande - Observations de l’intimé
[25] Mme Stewart soutient que les appels de l’AC Hunter ne deviennent pas purement théoriques du fait qu’il a quitté Joyceville à la suite de son refus de travailler étant donné qu’il avait des inquiétudes touchant à la sécurité. Mme Stewart affirme que si l’on refuse de trancher l’affaire sur le fond, cela reviendrait à punir l’AC Hunter.
[26] Mme Stewart affirme que le PSI en vigueur à l’époque où l’AC Hunter a refusé de travailler ne représente pas la seule question qu’il a soulevée relativement à ce refus de travailler.
[27] Mme Stewart maintient que les circonstances liées à cette affaire diffèrent de celles de l’affaire Harper étant donné que Mme Harper avait déjà quitté son poste à l’Agence canadienne d’inspection des aliments lorsque les appels ont été entendus et qu’il n’y avait donc plus de question litigieuse réelle. Mme Stewart soutient qu’il existe toujours une relation d’emploi active entre l’appelant et l’intimé. Elle affirme que l’AC Hunter souhaitera peut-être profiter d’occasions d’emploi à Joyceville, mais qu’il sera pour l’essentiel empêché de le faire tant et aussi longtemps que ses inquiétudes concernant la sécurité n’auront pas été résolues.
[28] Mme Stewart soutient que l’intimé a tort d’affirmer que les préoccupations de l’AC Hunter concernant le PSI à Joyceville avaient été résolues et que même si cela était le cas, les appels ne sont pas de ce fait purement théoriques, car l’AC Hunter n’était pas seulement préoccupé par le PSI. Mme Stewart affirme que les inquiétudes de l’AC Hunter au sujet de questions touchant à la sécurité portaient entre autres sur les niveaux de dotation en personnel pour le quart du matin, la qualité de la formation et des exercices d’évacuation, l’aspect sécuritaire d’une intervention réalisée à l’aide d’un appareil de protection respiratoire autonome (APRA) et misant sur le système intervention 2+1+1, et l’évacuation des détenus souffrant d’incapacités. Mme Stewart ajoute que les préoccupations de l’AC Hunter ne portaient pas seulement sur le PSI, mais aussi sur sa mise en application.
[29] Mme Stewart n’est pas en accord avec le fait que l’intimé a soulevé le problème du caractère théorique en tant que question préliminaire quelques jours avant qu’un agent d’appel entende les appels. Elle soutient que cela est problématique, car l’employeur savait que l’AC Hunter avait été redéployé à l’Établissement de Bath depuis le 31 décembre 2010.
[30] Mme Stewart soutient par ailleurs que si j’en arrive à la conclusion que l’affaire est purement théorique, je devrais exercer mon pouvoir discrétionnaire et entendre les appels.
Analyse
[31] Dans Borowski, la Cour suprême affirme que la démarche à suivre pour déterminer si le litige est théorique comporte une analyse en deux temps. Premièrement, il faut se demander si le différend concret requis a disparu et si la question est devenue purement théorique. Si tel est le cas, le tribunal décide alors s’il doit exercer son pouvoir discrétionnaire et entendre l’affaire.
[32] Pour déterminer si un différend réel subsiste, il demeure nécessaire de tenir compte de deux aspects importants de cette affaire. Premièrement, l’AC Hunter a été muté à l’Établissement de Bath peu de temps après avoir refusé de travailler à Joyceville et il n’était donc plus rattaché à cet établissement. Deuxièmement, l’employeur maintient que le PSI de Joyceville a été remplacé.
[33] Après avoir examiné les faits et les éléments de preuve m’ayant été présentés, je constate qu’il y a une question litigieuse ou une controverse qui subsiste relativement à la présente affaire, dont la résolution pourrait avoir des conséquences concrètes ou pratiques sur les droits des parties. J’en arrive à la conclusion que c’est le cas pour deux raisons.
[34] Premièrement, il y a toujours une relation d’emploi active entre l’AC Hunter et SCC. Pour ce motif, ce cas ne s’apparente pas à l’affaire Harper c. Agence canadienne d’inspection des aliments 2011 TSSTC 19, dans le cadre de laquelle Mme Harper avait pris sa retraite, ce qui avait mis fin à la relation d’emploi. En raison de la relation d’emploi qui se poursuit, il se peut que la décision qui sera rendue relativement à cet appel ait des conséquences pratiques sur les droits de l’employeur ou de l’employé, même si le premier n’est plus affecté à l’établissement correctionnel où il a exercé son droit de refus.
[35] Deuxièmement, les préoccupations de l’AC Hunter en matière de sécurité ne se bornaient pas au PSI et elles portaient aussi sur les niveaux de dotation en personnel pour le quart du matin, la qualité de la formation et des exercices d’évacuation, l’aspect sécuritaire de l’intervention APRA 2+1+1, et l’évacuation des détenus souffrant d’incapacités. De plus, tel que Mme Stewart l’affirme, la plainte ne portait pas seulement sur le PSI, mais aussi sur sa mise en application. Ce problème de mise en application ainsi que les autres problèmes non réglés ne concernant pas le PSI relèvent du pouvoir discrétionnaire unilatéral de l’intimé. Ces questions litigieuses subsistent dans la mesure où elles n’ont toujours pas été réglées.
[36] Pour ces motifs, j’en arrive à la conclusion que ces appels ne sont pas purement théoriques, puisque le débat concernant le droit de l’appelant de refuser d’accomplir un travail dangereux n’a pas changé. En tant que telle, la demande de rejet des appels fondée sur leur présumé caractère théorique n’est pas accueillie.
[37] Je viens donc de traiter la demande préliminaire faite dans le cadre de ces appels et je examinerai maintenant lesdits appels ensemble sur le fond.
Examen sur le fond
Question en litige
[38] La question liée aux deux appels est celle de savoir s’il y avait un danger pour l’AC Hunter et, le cas échéant, si ce danger constituait une condition d’emploi normale.
Preuve de l’appelant
[39] Ont témoigné pour l’appelant :
- L’AC Hunter, soit l’appelant lui-même;
- Mme Roxanne Campbell, AC (CX-1);
Témoignage de l’AC Hunter (CO-2)
[40] L’AC Hunter a déclaré lors de son témoignage qu’il avait travaillé durant environ 19 ans à Joyceville et qu’il avait été affecté la plupart du temps au quart du matin, lequel va de 23 h à 7 h et est souvent appelé le quart de minuit. L’AC Hunter affirme qu’avant l’adoption des NNDAC, deux CO-2 et neuf CO-1, soit, au total, 11 AC, étaient affectés au poste de la sécurité lors du quart du matin. Il précise qu’un CO-2 était affecté au bureau de la sécurité, qui remplissait le rôle d’un bureau de deuxième responsable, et que les deux autres CO-2 étaient affectés au poste principal de contrôle et de communication. L’AC Hunter affirme aussi que neuf CO-1 étaient affectés, respectivement, à l’entrée principale, aux unités résidentielles 1, 2, 3 et 4, à l’unité d’isolement, au contrôle administratif et à la patrouille de surveillance motorisée du périmètre (deux CO-1).
[41] L’AC Hunter a déclaré lors de son témoignage que l’un des agents de la patrouille mobile affectée au périmètre avait cessé d’occuper ce poste après la mise en œuvre des NNDAC. L’AC Hunter affirme aussi qu’en 2001, il y avait trois postes de remplaçants lors de chaque quart du matin qui n’étaient pas dotés lorsque les AC concernés prenaient congé. L’hiver, en règle générale, il y avait des remplaçants. Selon l’AC Hunter, les remplaçants effectuaient les opérations d’escorte ou remplaçaient des employés qui devaient réaliser ces opérations, et ils circulaient aussi dans les escaliers pour y détecter des incendies éventuels ou pour vérifier si les portes étaient verrouillées.
[42] L’AC Hunter a déclaré lors de son témoignage qu’il était de plus en plus préoccupé par les compressions de personnel et par des événements qui survenaient dans d’autres établissements où les niveaux de dotation en personnel avaient chuté. Il cite le cas de l’Établissement pour femmes de Grand Valley où un AC avait été accusé de négligence et renvoyé. L’AC Hunter soutient que l’AC courait le risque de se faire accuser aux termes du Code criminel du Canada. L’AC Hunter ajoute qu’il a commencé à s’intéresser à cette affaire lorsqu’il a appris qu’il y avait un PSI à Joyceville et qu’il s’est rendu compte qu’il avait des obligations et des responsabilités aux termes de ce programme dont on ne l’avait pas informé ou au sujet desquelles il n’avait reçu aucune formation.
[43] L’AC Hunter affirme qu’il ne savait pas quels employés seraient mobilisés si un incendie ou une autre situation d’urgence survenait aux fins duquel il faudrait gérer des avertisseurs d’incendie et des détecteurs de fumée, de la fumée et des incendies, et des urgences médicales sur les lieux de l’incendie; et administrer les premiers soins et évacuer des détenus, y compris des détenus souffrant d’une incapacité.
[44] L’AC Hunter a déclaré lors de son témoignage qu’il a reçu une formation de base au moment de son embauche en 1991 et que cette formation portait entre autres sur l’utilisation d’un appareil de protection respiratoire autonome (APRA). Il a précisé qu’on apprenait dans le cadre de ce cours à mettre et à enlever un respirateur et à l’ajuster au visage de la victime, et aussi à repérer un mannequin placé dans une chambre de fumage. On mentionnait par ailleurs aux AC qu’ils devaient travailler par deux et ne pas entrer dans un endroit enfumé sans porter d’APRA. Cette approche fut ensuite appelée « système 2+2+1 », ce système fonctionnant comme suit : deux AC munis d’APRA interviennent en réaction à une situation d’urgence liée à un incendie, deux autres AC eux aussi munis d’APRA les observent et se tiennent prêts à leur venir en appui, et un surveillant observe l’intervention afin de s’assurer qu’aucune autre aide n’est requise. L’AC Hunter ajoute que la formation comprenait de l’information sur les extincteurs d’incendie de base, y compris leurs diverses cotes et leur mode d’utilisation.
[45] L’AC Hunter a par ailleurs déclaré lors de son témoignage qu’il avait aussi reçu de la formation de base durant environ deux semaines lorsqu’il était arrivé à Joyceville, mais que cette formation ne traitait aucunement de la sécurité-incendie. L’AC Hunter affirme aussi que les AC suivent des cours de recyclage sur l’utilisation de l’APRA tous les deux ou trois ans, mais il note qu’il s’agit d’une formation donnée en groupe et très peu structurée. L’AC Hunter ajoute qu’il a participé à un exercice d’évacuation subséquemment au moment où il avait refusé de travailler.
[46] L’AC Hunter a déclaré lors de son témoignage qu’on ne l’avait jamais informé de l’existence du PSI de Joyceville, qu’il n’avait jamais reçu de formation sur ce plan et qu’il n’avait jamais non plus participé à un exercice d’évacuation. Il ne se souvient d’aucun exercice de ce genre qui aurait été tenu durant le quart du matin pendant qu’il était affecté à ce quart. L’AC Hunter affirme que l’AC de l’unité du haut ou du bas utilisait tout simplement un extincteur lorsqu’un incendie survenait. On emmenait le détenu dans l’aire commune jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de fumée dans sa cellule. L’AC Hunter ajoute que l’AC ne portait habituellement pas d’APRA.
[47] L’AC Hunter affirme qu’au moment où un AC arrive pour travailler durant le quart du matin, il vérifie le registre pour déterminer s’il y a des détenus qui font l’objet d’une surveillance étroite après avoir fait montre de tendances suicidaires. L’AC Hunter précise qu’en cas d’urgence médicale ou autre, le GC en est informé et voit à prendre des mesures telles qu’une escorte médicale. Lorsque cela se produit, l’AC Hunter affirme que la routine change. L’AC Hunter a déclaré lors de son témoignage qu’avant l’adoption des NNDAC, un agent supplémentaire ou un 2e agent mobile était désigné pour remplacer l’agent qui avait été mandaté pour escorter les agents redéployés ailleurs dans l’établissement.
[48] L’AC Hunter a déclaré lors de son témoignage qu’il n’avait jamais été appelé à gérer un cas de suicide, mais que cela demeurait une possibilité étant donné que certains détenus s’auto-infligent des blessures. L’AC Hunter soutient que le matin est habituellement le moment privilégié par les détenus qui veulent tenter de s’évader. Il se souvient de quatre incidents lors desquels des détenus avaient tenté de s’évader et divers indices avaient révélé qu’un plan d’évasion avait été établi pour certaines de ces tentatives.
[49] L’AC Hunter affirme aussi que certains détenus tendent à déclencher des incendies pour détourner les AC de leurs activités ou pour combattre l’ennui, particulièrement en période de confinement aux cellules. L’AC Hunter a déclaré lors de son témoignage que les avertisseurs d’incendie sont la cible de détenus qui tentent de les désactiver, et que des systèmes de gicleurs ont été manipulés et mis hors tension. L’AC Hunter ajoute qu’il lui était arrivé à deux reprises de se présenter dans une cellule avec un autre AC afin d’y éteindre un incendie à l’aide d’un extincteur. Il confirme qu’il n’avait jamais participé à une opération d’évacuation des détenus.
[50] L’AC Hunter note que les serrures des portes fonctionnent manuellement et qu’il faudrait donc plus de temps pour évacuer une rangée. Il affirme que les détenus ont accès à une aire commune et qu’ils mangent et prennent leur douche dans la rangée.
[51] L’AC Hunter affirme que les employés du service d’incendie municipal n’entrent pas dans l’Établissement de Joyceville avant que les détenus aient été confinés à un lieu sécuritaire, et il soutient qu’aucun agent ne supervise les évacuations ni n’est mandaté pour diriger le service des incendies vers les lieux d’un incendie. Il soutient aussi qu’il serait difficile de rendre l’établissement sécuritaire étant donné qu’il n’y avait personne de disponible à côté de la cour pour apporter de l’aide dans l’éventualité où l’on devrait évacuer les détenus se trouvant dans les aires communes des rangées.
[52] L’AC Hunter confirme qu’il est indiqué dans un document de Joyceville intitulé « Fire Orders » que l’ASIE d’une aire doit être désigné et qu’il doit s’agir de l’agent affecté à l’étage. L’AC Hunter soutient que cela pose problème durant le quart du matin, car il n’y a pas d’agent en permanence sur l’étage durant ce quart-là.
[53] L’AC Hunter cite les PSI Training Manuals de Joyceville sur le PSI datés de décembre 2008 (version 1) et de janvier 2011 (version 1.1). Il confirme que la procédure servant à amorcer une intervention APRA a été modifiée dans l’édition de décembre 2008 et qu’on est passé d’un système 2+2+1 à un système 2+1+1. En vertu de cet arrangement, un seul agent muni d’un APRA agirait comme remplaçant pour les deux premiers intervenants qui utilisent ce type d’appareil. L’AC Hunter a déclaré lors de son témoignage que cela s’opposait à ce qu’il avait appris dans le cadre de la formation en matière de sécurité et qu’on ne lui avait jamais montré comment utiliser le nouveau système ni comment superviser son utilisation. Il ajoute qu’il n’avait jamais été initié à la procédure d’évacuation structurée des détenus.
[54] L’AC Hunter a déclaré lors de son témoignage qu’il était allé travailler à l’Établissement de Bath, car il craignait pour sa santé et sa sécurité. Lorsqu’on lui a demandé s’il retournerait un jour à Joyceville, l’AC Hunter a répliqué qu’il faudrait d’abord que les problèmes de sécurité de l’Établissement soient réglés.
[55] Lors de son contre-interrogatoire, l’AC Hunter a reconnu qu’il n’aurait pas eu d’objection à sortir de sa rangée pour aller effectuer des rondes de surveillance, mais qu’il ne l’aurait pas fait de l’autre côté de l’Établissement et que les remplaçants dont il avait parlé ne participaient pas au PSI.
[56] L’AC Hunter a déclaré lors de son témoignage qu’il était présent lorsqu’un détenu avait tenté d’organiser une évasion durant le quart du matin. Or l’employeur a pour sa part déclaré qu’aucune tentative d’évasion n’avait eu lieu à Joyceville de 1995 à 2011. L’AC Hunter a déclaré lors de son témoignage qu’il se trouvait à l’extérieur avec le directeur adjoint.
[57] L’AC Hunter confirme qu’à sa connaissance, trois incendies avaient eu lieu durant le quart du matin à Joyceville pendant les 19 années où il a travaillé à cet endroit. Il confirme aussi que les détenus impliqués avaient été envoyés dans une pièce commune durant quatre ou cinq minutes, soit le temps requis pour éteindre l’incendie et qu’il n’était pas nécessaire de procéder à une évacuation générale des détenus lorsqu’un incendie survenait.
[58] L’AC Hunter confirme qu’il n’avait jamais porté d’APRA pendant les 19 années où il a travaillé à Joyceville, mais qu’il était passé près de le faire lors d’un incendie dans la salle des essais pilotes. L’AC Hunter est d’accord avec M. Alcock lorsque celui-ci mentionne que cela était le quatrième incident lié à un incendie qui n’avait pas été signalé.
[59] L’AC Hunter confirme qu’il craignait que sa responsabilité soit mise en cause sur le plan criminel s’il quittait son poste pour aller éteindre un incendie, prodiguer des soins médicaux d’urgence ou effectuer une patrouille conjointe. L’AC Hunter ajoute qu’il craignait également qu’un autre AC préoccupé par la même question décide de ne pas venir l’aider durant une situation d’urgence.
[60] Lors de son contre-interrogatoire, l’AC Hunter a aussi confirmé que le poste de la sécurité pour les visiteurs était doté en personnel, mais il a soutenu que l’agent est tenu de demeurer à ce poste pour accueillir les représentants de la police et du service des incendies.
Témoignage de Mme Roxanne Campbell, CO-1
[61] L’AC Campbell a déclaré lors de son témoignage qu’elle s’était jointe au personnel de Joyceville en octobre 1999 et qu’elle avait reçu sa formation de base en août de la même année. Elle a aussi déclaré lors de son témoignage que durant la formation de base, un commissaire-enquêteur aux incendies est venu en soirée et a donné de la formation durant une à deux heures. Selon l’AC Campbell, les participants ont alors appris à mettre et à enlever un APRA, à effectuer une intervention 2+2+1 en cas d’incendie et à confirmer les responsabilités de chaque membre de l’équipe d’intervention 2+2+1. L’AC Campbell affirme que les participants ont aussi été initiés à l’utilisation de boyaux et que la séance s’est terminée par une simulation de maison de fumage.
[62] L’AC Campbell a déclaré lors de son témoignage que dans le cadre d’une intervention 2+2+1, deux personnes portent un APRA et interviennent directement, deux autres portent aussi un APRA et se tiennent à proximité et prêtes à aider les premiers intervenants si un problème survient, et une cinquième personne observe les actions de ces quatre agents. L’AC Campbell affirme qu’à l’époque de son embauche, SCC utilisait ce système en cas d’incendie.
[63] L’AC Campbell a déclaré lors de son témoignage que SCC avait transformé l’intervention 2+1+1 en 2008 et que cette intervention était enseignée durant des cours de recyclage. Quoi qu’il en soit, l’AC Campbell précise qu’il est indiqué dans les éditions de 2008 et de janvier 2011 du Fire Safety Training Manual de SCC que les agents doivent toujours travailler par paires. L’AC Campbell soutient que cela est en accord avec la formation qu’elle a reçue au départ. L’AC Campbell ajoute qu’on n’explique pas dans le cadre du cours de recyclage en quoi consiste les tâches du troisième agent non jumelé à un autre agent et portant un APRA pour ce qui est de la procédure à suivre lorsque les premiers intervenants ont besoin d’aide.
[64] L’AC Campbell a déclaré lors de son témoignage qu’elle agissait comme représentante en matière de sécurité et de santé à Joyceville lorsque l’AC Hunter a refusé de travailler le 22 mai 2009 et qu’elle a participé à l’enquête de l’employeur à ce sujet. Elle affirme qu’à la suite du refus exprimé par l’AC Hunter, on a tenu une réunion pour discuter d’une simulation d’intervention en cas de déclenchement d’avertisseurs d’incendie lors du quart du matin. Selon un courriel que M. Vermette a envoyé à l’agent de SST Tomlin le lundi 6 avril 2009 (à 14 h 37), M. Trevor McQuaig (titre non indiqué) a assisté à cette réunion et a confirmé que les agents de Joyceville sont avisés durant leur formation que la politique du SCC consiste à utiliser le système 2+2+1. L’AC Campbell soutient que dans ce courriel, M. McQuaig confirme aussi que les agents de Joyceville apprennent à travailler par paires pour des raisons de sécurité, en conformité avec la politique de la National Fire Prevention Association et qu’ils n’ont jamais été initiés à un mode d’intervention misant sur le système 2+1+1. On a aussi mentionné que si les portes de cellules sont munies de serrures manuelles, il faudra plus de temps pour intervenir en cas d’incendie.
[65] L’AC Campbell cite le Fire Safety Manual du SCC daté du 01-12-2005 et l’édition plus récente du 24-09-2009, et note que l’exigence suivante est énoncée au numéro 6 de la section 4 : « Correctional staff shall receive training on fire safety and the use of equipment in accordance with the duties expected of them under normal or emergency conditions, prior to post assignment. » On y lit aussi ce qui suit : « Personal shall receive refresher training on the use of fire equipment every three years. » L’AC Campbell a déclaré lors de son témoignage qu’elle n’a jamais reçu de formation d’appoint. Elle ajoute que cette formation comprend celle se rapportant à la procédure d’intervention d’urgence 2+1+1.
[66] L’AC Campbell a déclaré lors de son témoignage que le 4 mai 2009, M. Howard Page, représentant en matière de sécurité et de santé de UCCO SACC CSN pour la région de l’Ontario, a envoyé un courriel à l’agent de SST Tomlin relativement à une réunion du comité conjoint de santé et de sécurité (CCSS) de Joyceville lors de laquelle on allait discuter des problèmes de sécurité cités à l’appui du refus de travailler exprimé par M. Hunter. M. Page a écrit que lors de cette réunion, les personnes présentes ont déclaré à l’unanimité qu’il était dangereux pour un agent d’intervenir seul.
[67] L’AC Campbell a déclaré lors de son témoignage qu’il y avait un autre problème en ce qui concerne la politique sur les interventions 2+1+1 effectuées lors du quart du matin. Elle affirme que les AC doivent évacuer un côté complet de l’Établissement pour réaliser une intervention d’urgence 2+1+1. Comme tous les autres agents seraient occupés à gérer les autres détenus, il n’y aurait personne pour aider au besoin l’équipe d’intervention.
[68] L’AC Campbell a témoigné au sujet des problèmes d’incendie à Joyceville. Elle affirme que les détenus ont accès à des allumettes malgré l’interdiction de fumer, et que l’on sait que certains détenus provoquent la production d’étincelles ou court-circuitent des prises électriques pour allumer des feux dans leur cellule.
[69] L’AC Campbell a déclaré lors de son témoignage qu’elle n’avait jamais participé à un exercice d’évacuation même si de tels exercices doivent être effectués tous les trois mois.
[70] L’AC Campbell cite le « Agreement of Institution Emergency Staff Response Fire Evacuation » des Établissements de Joyceville et de Pittsburgh et elle note aussi que cette entente confirme ce qui suit : « At no time the Pittsburgh Officer will have to take over any duties relating to APRA. »
[71] L’AC Campbell a déclaré lors de son témoignage que le syndicat local est présent à Joyceville et qu’elle se demande donc si l’entente de Pittsburgh est assujettie à des exigences opérationnelles dans cette ville, et si tous les postes à Joyceville sont munis d’APRA, étant donné que les agents de Pittsburgh n’ont pas reçu la formation nécessaire ou ne sont pas autorisés, en vertu de l’entente, à assumer des responsabilités liées à l’APRA. L’AC Campbell soutient que les agents de Pittsburgh ne sont pas en mesure d’aider une équipe qui réalise une intervention d’urgence liée à un incendie et misant sur le système 2+1+1.
[72] L’AC Campbell affirme que les versions antérieures du PSI de Joyceville ne prévoyaient aucune directive quant à l’endroit où rassembler les détenus durant une situation d’urgence liée à un incendie et que cela constituait un problème pour les AC. L’AC Campbell ajoute qu’elle a des doutes au sujet des plans prévus à cette fin dans la version du PSI n’ayant toujours pas été approuvée, lesquels plans font état de la marche à suivre pour rassembler les détenus dans la cour, les aires communes et le secteur avoisinant l’unité d’isolement.
Preuve de l’intimé
[73] Ont témoigné pour l’intimé :
- M. Randy Gaw, Manager Fire Safety Program, Technical Services Branch, SCC;
- M. Mike Velichka, Manager, Deployment Standards et Scheduling;
- M. Dave Finucan, directeur de l’Établissement de Joyceville.
Témoignage de M. Randy Gaw
[74] M. Gaw a déclaré lors de son témoignage qu’il travaille au SCC depuis 25 ans et qu’il est responsable de l’élaboration et du suivi des politiques et procédures relatives à l’équipement de formation concernant la sécurité-incendie.
[75] M. Gaw affirme qu’il a entre autres agi comme commissaire aux incendies durant trois ans à la Saskatoon Fire Commission et qu’il est membre de la National Fire Protection Association (NFPA) et de divers comités de la CSA. Il ajoute qu’il est l’auteur d’une dissertation intitulée Fire and Life Safety Issues in a Correctional Environment, qu’il a présentée lors de l’édition 2003 du congrès international de la NFPA.
[76] M. Gaw a déclaré lors de son témoignage que la prévention des incendies englobe aussi la détection et le confinement des incendies, et que la prévention est l’élément le plus important, surtout dans un milieu correctionnel. Il affirme qu’il est nécessaire de pouvoir compter sur des détecteurs et des systèmes d’extinction ainsi que sur un personnel diligent. Il ajoute qu’il est nécessaire d’évacuer les détenus et d’éteindre l’incendie directement ou indirectement à l’aide de systèmes d’extinction lorsqu’un incendie survient.
[77] M. Gaw a déclaré lors de son témoignage que l’Établissement de Joyceville avait été construit en 1950 et qu’il était fait de béton et d’acier. Il affirme qu’il y a une protection contre les incendies entre les cellules individuelles et que celles-ci sont toutes dotées de systèmes de gicleurs et de détecteurs de fumée et d’incendie. M. Gaw ajoute qu’il y a une bonne distance entre les parties de l’Établissement et que celles-ci sont aussi séparées par des portes, et que l’on retrouve des extincteurs d’incendie, des bornes-fontaines et des boyaux d’incendie dans des secteurs fonctionnels tels que les ateliers et les unités résidentielles.
[78] M. Gaw affirme que Joyceville limite et contrôle la charge d’incendie de matières inflammables se trouvant dans les cellules et qui pourrait servir de carburant lors d’un incendie. Par exemple, on limite la quantité de livres et de pièces de mobilier et on utilise des matelas traités avec un produit ignifuge. M. Gaw affirme que la charge d’incendie est surveillée dans le cadre d’inspections de cellules tous les 30 jours.
[79] M. Gaw affirme que les systèmes de gicleurs fournissent une protection contre les incendies lorsque les pompiers ne peuvent se présenter sur les lieux dans un court délai, et que ces gicleurs sont reliés au panneau d’alerte. Il soutient que les systèmes de gicleurs contrôlent et éteignent les incendies et qu’ils assurent la sécurité des occupants et des biens. Il ajoute que le rôle des employés consiste à enquêter au sujet de l’ampleur et de l’étendue des incendies et à tenter d’éteindre un incendie gérable avec un extincteur ou un boyau d’incendie tout en utilisant des APRA.
[80] M. Gaw a déclaré lors de son témoignage que la directive du commissaire (DC) 345, intitulée Sécurité-incendie, fait état des orientations politiques globales et qu’il y est prévu que les postes doivent être attribués selon des modalités précises. M. Gaw ajoute que le Safety Manual de SCC est un document d’appoint relatif à la DC 345 et que les pratiques exemplaires et les procédures à suivre y sont décrites de façon plus détaillée.
[81] M. Gaw confirme que SCC recueille de l’information sur les incendies qui surviennent dans des établissements par l’entremise du Système de gestion des délinquants de SCC et que cela comprend les circonstances dans lesquelles l’incendie s’est déclaré et les dommages causés.
[82] M. Gaw a déclaré lors de son témoignage qu’il avait vérifié combien d’incendies étaient survenus à Joyceville durant le quart du matin et qu’il avait constaté qu’un seul incendie avait été signalé.
[83] M. Gaw confirme que le Programme de formation correctionnelle (PFC) de SCC englobe la formation initiale sur l’utilisation de l’APRA et que les cours de recyclage correspondants sont offerts au niveau des établissements.
[84] M. Gaw cite le Fire Safety Training Manual daté de janvier 2011 (version 11) et il a par ailleurs déclaré lors de son témoignage que l’on indique clairement aux participants au PFC qu’ils doivent trouver, lire et comprendre l’information propre à chaque établissement en ce qui concerne l’aménagement de l’établissement en cause, le profil des détenus et la nature et les conséquences du niveau de sécurité de cet établissement. M. Gaw affirme que les AC doivent bien comprendre ce qu’ils sont tenus de faire en situation d’urgence.
[85] M. Gaw explique que lorsque l’APRA a été présenté aux AC en 1985, SCC a adopté (en tant qu’exigence) l’intervention d’urgence 2+1+1 afin de se conformer à la norme CSZ Z94.4 de l’Association canadienne de normalisation. M. Gaw a dit qu’on a eu recours à l’intervention 2+1+1 durant 25 ans jusqu’à ce que le Fire Safety Manual de SCC soit modifié en 2005. À cette époque, il était prévu dans ce manuel que l’on devait opter pour ce type d’intervention afin de se conformer avec la norme de la NFPA standard.
[86] M. Gaw explique le raisonnement qu’ont fait les représentants du SCC pour en arriver à décider de rétablir l’ancien mode d’intervention misant sur le système 2+1+1. Il a déclaré lors de son témoignage que les autorités correctionnelles aux États-Unis n’exigent pas de détecteurs ni de systèmes d’extinction d’incendie (systèmes de gicleurs dans les cellules, etc.). Par conséquent, la NFPA assume un risque accru d’incendie structurel, ce type d’incendie obligeant généralement ceux qui le combattent à s’exposer à des températures élevées et à revêtir une tenue de feu. Puisque les établissements du SCC sont munis de détecteurs d’incendie et de fumée à des fins de détection hâtive et qu’ils sont aussi dotés de systèmes d’extinction d’incendie, y compris des systèmes de gicleurs, SCC a déterminé qu’il n’était pas nécessaire de recourir au mode d’intervention 2+2+1. M. Gaw ajoute que ce mode d’intervention 2+1+1 est sécuritaire compte tenu du fait que les établissements du SCC sont habituellement dotés d’une structure de béton et d’acier, que la charge d’incendie est surveillée et contrôlée dans les cellules et que celles-ci sont munies de détecteurs de fumée et d’incendie ainsi que de systèmes de gicleurs.
[87] M. Gaw a déclaré lors de son témoignage que le contenu des manuels de formation sur la sécurité-incendie est en accord avec celui des manuels correspondants traitant des procédures d’intervention 2+1+1 et que tous les membres d’une équipe utilisant l’APRA doivent quitter les lieux de l’incendie si le surveillant perd le contact visuel avec eux ou qu’un membre s’est blessé ou se trouve dans un état de détresse.
[88] M. Gaw a cité le Fire Safety Manual 345 daté du 24‑09‑2009 et a déclaré lors de son témoignage que la section intitulée Response to Fire Alarms traite de l’exigence voulant que l’intervention doive être réalisée en deux minutes et que cette exigence soit la même que celle prévue dans les éditions antérieures du Manuel. Aux fins de l’intervention de deux minutes, les employés doivent évaluer la validité d’une alerte et commencer au besoin à appliquer les procédures d’évacuation dans les deux minutes suivant la réception de cette alerte. M. Gaw a déclaré lors de son témoignage que la formulation modifiée figurant dans les plus récents manuels est attribuable au fait que SCC a installé des détecteurs de fumée et d’incendie ainsi que des systèmes de gicleurs dans chaque cellule, grâce auxquels un incendie ne pourrait atteindre le stade de l’embrasement instantané. On peut maintenant lire ce qui suit dans le Manuel : staff shall acknowledge and begin validating the fire alarm within 2 minutes in accordance with local procedures. M. Gaw soutient qu’en raison de la détection plus rapide des incendies, ceux-ci dégagent potentiellement moins de chaleur et le délai d’intervention est par ailleurs réduit. SCC précise que l’évacuation doit être amorcée dès que l’on a déterminé qu’elle est nécessaire.
[89] M. Gaw a déclaré lors de son témoignage qu’aux fins d’une intervention 2+1+1, trois agents transportent des APRA et travaillent en équipe. Deux agents pénètrent dans la zone de risque seulement lorsqu’un troisième agent est présent et ce dernier, qui est muni d’un APRA, se joint à eux seulement s’ils ont besoin d’aide. Le quatrième AC, l’observateur, se tient à l’écart de la zone de risque et maintient un contact visuel et radio avec l’équipe et fait venir de l’aide au besoin. M. Gaw affirme que tous les membres de l’équipe doivent sortir de la zone de risque si le surveillant perd le contact visuel qu’il avait avec eux ou si un membre de l’équipe est blessé ou en détresse.
[90] M. Gaw confirme que le personnel sait que les détenus tentent de trafiquer les appareils de détection et d’extinction d’incendie dans leur cellule. M. Gaw confirme aussi qu’il faudrait plus de temps pour évacuer des cellules dont la serrure doit être utilisée manuellement et qu’il incombe entièrement aux AC d’évacuer les détenus, peu importe le degré de gravité de l’incendie.
Témoignage de M. Mike Velichka
[91] M. Velichka, Manager, Deployment Standards and Scheduling, a déclaré lors de son témoignage qu’il a supervisé l’élaboration des NNDAC. Il affirme que le groupe qui a fixé ces normes a examiné le volume de travail à accomplir et les risques propres aux établissements durant le quart du matin. Il note que les détenus sont confinés à leur cellule durant ce quart et que la tâche première des AC consiste à faire des rondes de surveillance. M. Velichka affirme que des données sur les incidents ont été prises en considération pour tous les quarts et qu’elles ont permis d’établir qu’il y a peu de risques durant le quart du matin. M. Velichka a déclaré lors de son témoignage qu’il y a aussi moins d’incidents durant ce quart étant donné que les détenus sont confinés à leur cellule et qu’ils ont moins d’occasions de circuler et de se rassembler. M. Velichka a examiné les données relatives aux incendies survenus durant le quart du matin à Joyceville et il affirme qu’elles se situaient tout à fait dans la norme pour les établissement à sécurité moyenne.
[92] M. Velichka cite le Security Bulletin 2010-13 de SCC daté du 29-11-2010 et intitulé Mobilization of Security Staff on the Morning Shift‑Fire Response, et il affirme qu’on y préconise une intervention en équipe de type 2+1+1 en cas d’incendie conformément au Fire Safety Manual.
[93] M. Velichka a déclaré lors de son témoignage que s’il était nécessaire d’effectuer une intervention d’urgence 2+1+1 pour lutter contre un incendie lors du quart du matin, le Bulletin prévoit que les agents correctionnels qui réaliseront cette intervention seront l’AC affecté à l’unité en cause, deux agents multifonctionnels et un AC de l’autre unité résidentielle. M. Velichka affirme que n’importe lequel de ces agents peut agir comme surveillant et qu’il devra peut-être, à ce titre, porter un APRA si les circonstances l’exigent. M. Velichka soutient que SCC ne s’inquiétait pas de la possibilité qu’un AC quitte son poste dans une autre unité résidentielle pour aller participer à une intervention 2+1+1, car chaque cellule est dotée d’un bouton d’appel permettant de joindre les agents d’unités ou le PPCC, ou qui sont reliés à des avertisseurs d’incendie, le tout afin d’assurer la sécurité des détenus.
[94] M. Velichka cite à nouveau le Bulletin et note que le gestionnaire correctionnel doit mettre en œuvre sur-le-champ le Augment Recall Plan (décrit plus loin) afin d’accroître la capacité de l’intervention APRA initiale. M. Velichka note aussi qu’il est indiqué dans le Bulletin que l’on peut suspendre les patrouilles dans toutes les unités durant une courte période en situation d’urgence jusqu’à ce d’autres agents arrivent sur les lieux pour aider les intervenants.
[95] M. Velichka a déclaré lors de son témoignage que la Threat Risk Assessment Joyceville Institution datée d’octobre 2010 confirme que le nombre de gestes violents posés par des détenus à l’endroit d’employés était moins élevé que celui enregistré dans d’autres établissements.
[96] En ce qui concerne les serrures manuelles de cellules à Joyceville, M. Velichka reconnaît qu’il faudrait plus de temps pour ouvrir les portes de cellules, mais cela éviterait aussi aux AC d’être débordés par la libération rapide des détenus qui sont dans leur cellule.
Témoignage du directeur Dave Finucan
[97] Le directeur Finucan a déclaré lors de son témoignage qu’il est responsable de la gestion de l’ensemble des activités de Joyceville. Il confirme qu’il travaille au SCC depuis environ 24 ans, et qu’il est en poste à Joyceville depuis à peu près 5 ans. Il a été nommé directeur de cet établissement en 2010.
[98] Le directeur Finucan a déclaré lors de son témoignage qu’il arrive fréquemment à Joyceville que l’on affecte deux agents correctionnels par groupe de 38 détenus. Le directeur Finucan décrit le déroulement du quart du matin et affirme que tous les détenus sont confinés à leur cellule à 23 h et dénombrés avant le départ des employés qui travaillent le jour. Durant le quart du matin, les AC observent les détenus et effectuent leur dénombrement. Le directeur Finucan affirme que si un détenu ne se sent pas bien, le gestionnaire correctionnel en est informé et il doit déterminer si la situation peut être gérée jusqu’à l’arrivée des employés du quart du matin étant donné qu’une infirmière est affectée à ce quart. Si cela est nécessaire, le GC doit rassembler des employés pour qu’ils sortent le détenu de sa cellule afin qu’on lui prodigue des soins médicaux.
[99] Le directeur Finucan a déclaré lors de son témoignage que depuis l’adoption des NNDAC, il y a 10 AC et un gestionnaire correctionnel en fonction à Joyceville lors du quart du matin, lequel débute à 23 heures et se termine à 7 heures. Ces AC sont répartis comme suit dans l’Établissement : quatre sont affectés aux rangées d’unités résidentielles ou de cellules; un autre est affecté à l’unité d’isolement; un AC multifonctionnel est affecté au kiosque du contrôle de l’administration; un autre AC multifonctionnel est affecté au bureau du 2e responsable ; un AC est affecté au poste principal de contrôle et de communication (PPCC); un autre AC est affecté à l’entrée principale; et un dernier AC est affecté au périmètre. Le directeur Finucan confirme que deux AC étaient jadis affectés au périmètre de Joyceville lors du quart du matin avant la mise en application des NNDAC.
[100] Il a aussi déclaré lors de son témoignage que dans le cas d’une situation d’urgence liée à un incendie, l’intervention pourrait mettre à contribution sept AC, comme suit : quatre seraient affectés aux rangées, un à l’unité d’isolement; l’AC multifonctionnel serait affecté au kiosque de contrôle de l’administration; et un autre AC multifonctionnel serait affecté au poste du 2nd IC (in command). Le directeur Finucan ajoute que dans certaines circonstances, le gestionnaire correctionnel en fonction pourrait prendre la relève de l’AC à l’entrée principale de l’Établissement afin de lui permettre de participer à l’intervention.
[101] Il confirme que les données sur les incendies signalés à Joyceville démontrent qu’un seul incendie a été rapporté en 16 ans. Le directeur Finucan estime que le nombre d’incendies dans des cellules signalées est peu élevé en raison du fait que les détenus savent qu’ils sont confinés à leur cellule et donc vulnérables à un incendie, et par conséquent, seul un détenu suicidaire est porté à déclencher un incendie dans sa cellule. Il affirme qu’il sait que certains détenus allument des incendies lors du quart de jour ou de soir parce qu’ils ne s’entendent pas bien avec d’autres détenus et qu’ils espèrent qu’on les incarcérera dans une autre cellule. Le directeur Finucan soutient que le risque d’incendie n’est pas aussi élevé que celui révélé par les données correspondantes. Il ajoute que la sécurité active est efficace pour repérer les problèmes et pour prendre des mesures rapidement afin d’intervenir ou de prévenir une situation problématique. Si le GC détermine qu’il y a un risque élevé qu’un détenu s’inflige des blessures, le GC peut, en vertu de la politique de SCC, embaucher des AC supplémentaires et demander à un AC de se tenir près de la cellule du détenu concerné jusqu’à ce qu’il puisse être évalué par le psychiatre le matin.
[102] Le directeur Finucan confirme que l’on n’a enregistré aucune tentative d’évasion pendant le quart du matin durant la période allant de 1995 à 2011.
[103] Le directeur Finucan a témoigné au sujet du Augment Recall Plan qui a été mis en œuvre à Joyceville afin de permettre à la direction de rappeler des employés au travail en cas d’urgence. Il précise que le GC affecté au quart du matin, qui agit comme gestionnaire intérimaire, peut mettre le plan en application et faire venir des AC supplémentaires en cas d’urgence. Le directeur Finucan affirme qu’on a donné des directives aux GC pour qu’ils agissent rapidement et décident ensuite s’il est nécessaire d’évacuer les lieux.
[104] Le directeur Finucan a déclaré lors de son témoignage que si un incendie survient lors d’un quart du matin pendant lequel les avertisseurs d’incendie seront vérifiés, le GC peut rappeler plus d’employés pour évacuer le ou les détenus vers une aire commune dans une autre unité, y compris l’unité d’isolement.
[105] Il affirme que s’il y a beaucoup de fumée et qu’il faut évacuer tous les détenus ou certains d’entre eux, un AC doit vérifier l’ampleur de l’incendie et faire un rapport à ce sujet au GC; des AC doivent isoler et confiner l’incendie avec le concours de l’équipe d’intervention d’urgence 2+1+1; le GC doit déterminer combien d’employés il faut mobiliser pour faire sortir un ou plusieurs détenus et il doit aussi déterminer où ils seront transférés; et il doit aussi déterminer s’il y a lieu de mettre en œuvre le Augment Recall Plan.
[106] Le directeur Finucan a déclaré lors de son témoignage que si un incendie se déclare à un endroit donné et qu’un incident survient dans un autre endroit, le PPCC peut informer le GC des deux événements et ce dernier déterminera quel événement doit être géré en premier et décidera aussi du mode d’intervention qui sera utilisé. Il a aussi déclaré que la préservation de la vie est l’objectif premier.
[107] Le directeur Finucan a déclaré lors de son témoignage qu’on a envisagé divers scénarios durant la formation pour déterminer où l’on emmènerait les détenus lorsqu’un incendie survient. Il affirme que les détenus du niveau 2A seraient transférés dans l’aire commune du niveau 2B. Ce travail sera accompli par les quatre agents des unités résidentielles ou s’ils ne sont pas disponibles, par les agents de l’unité d’isolement, par ceux de l’entrée ou par les AC multifonctionnels (dans cet ordre-là). Le directeur Finucan a déclaré lors de son témoignage que les agents travailleront systématiquement en se déplaçant le long de la rangée pour faire sortir les détenus de leur cellule. Ceux-ci seront séparés en deux groupes selon qu’ils sont dociles ou non. À ce stade-là, le GC pourra demander au besoin de faire venir des employés supplémentaires.
[108] Le directeur Finucan aborde la question du protocole d’entente entre l’Établissement de Joyceville et l’Établissement de Pittsburgh. Il affirme que ce protocole visait à permettre Joyceville de pouvoir compter sur au moins un AC de Pittsburgh en cas d’urgence. Le directeur Finucan affirme que les AC de Pittsburgh ont reçu une formation de base, mais qu’ils n’ont pas été initiés à l’utilisation de l’APRA et qu’ils ne peuvent faire partie d’une équipe d’intervention d’urgence de type 2+1+1.
[109] Le directeur Finucan mentionne que les AC craignent de se faire accuser d’avoir quitté leur poste et de ne pas avoir protégé les détenus lorsqu’on leur demande d’aller aider d’autres agents en situation d’urgence. À cet égard, le directeur Finucan cite le bulletin de sécurité du SCC 2010-13 daté de 2010 et intitulé Mobilization of Security Staff on the Morning Shift‑Fire Response. Il soutient qu’il est rare que ces bulletins contiennent de l’information aussi précise relativement à ce que les AC sont censés faire en situation d’urgence, et que ces derniers n’engagent pas leur responsabilité personnelle à proprement parler lorsqu’ils interviennent.
[110] Le directeur Finucan précise que le document déposé par l’appelant en ce qui concerne le nombre d’exercices d’évacuation effectués d’avril 2009 à mars 2010 était incomplet et que le nombre d’exercices qui y est indiqué est inexact. Il a lui-même soumis une version corrigée de ce document obtenue auprès de l’Administration et dans lequel on peut lire qu’un exercice a été effectué lors du quart du matin le 26 septembre 2009. Le directeur Finucan affirme que cette erreur est imputable au bureau régional.
[111] Il a déclaré lors de son témoignage que les attributions des agents de secours incendie d’étage étaient énoncées à la dernière page du PSI de Joyceville révisé le 9 mars 2000.
[112] Le directeur Finucan a témoigné au sujet de la Institutional Operational Procedure #345 de Joyceville datée du 10 août 2011 et intitulée Fire Safety – Monitors for the Disabled. Le directeur Finucan concède que cette politique n’était pas claire lorsqu’il l’a lue subséquemment au refus de travailler exprimé par l’AC Hunter. Il affirme que la population de Joyceville change environ deux fois par an et qu’il faut donc recourir à un système pour identifier les détenus souffrant d’une incapacité. Le directeur Finucan précise que cette tâche a été confiée à l’unité des soins de santé. Lorsqu’un détenu est identifié, le GC se rend dans l’unité résidentielle et informe le détenu de la politique. L’information est ensuite entrée dans le système d’information du bureau et un babillard est tenu à jour dans le corridor du GC agissant comme conservateur. Le directeur Finucan a déclaré lors de son témoignage que l’information est affichée aux deux endroits à des fins de planification et d’intervention. Le directeur Finucan a confirmé dans le cadre de son témoignage que les AC sont tenus en vertu de leur description d’emploi de connaître à fond la consigne de poste se rapportant à leur propre poste.
[113] Le directeur Finucan a déclaré lors de son témoignage qu’il revient au GC de désigner les surveillants qui s’occuperont des détenus souffrant d’incapacités et que cela est fait selon la quantité de fumée et le nombre d’AC requis pour transférer un détenu.
[114] Le directeur Finucan reconnaît que le Responding to Alarms Protocol qui était en vigueur à Joyceville en 2009 confirme que la patrouille mobile des CO-1 pourrait intervenir en cas d’urgence si le GC le lui demande. Le directeur Finucan ajoute que la situation avait maintenant été clarifiée. Le directeur Finucan affirme que la consigne de poste intitulée Officer in Charge, Correctional Manager – Morning Shift, number A1 - Midnights et datée d’avril 2009 confirme qu’un CO-1 doit diriger l’opération si aucun CO-2 n’est disponible pour le faire.
[115] Le directeur Finucan affirme que les AC de l’unité d’isolement peuvent être mis à contribution en cas d’urgence pourvu que les détenus se trouvant dans cette unité soient confinés à leur cellule et qu’ils se comportent normalement. Il ajoute que deux AC seraient affectés à l’unité d’isolement si un détenu suicidaire faisait l’objet d’une surveillance.
[116] Le directeur Finucan a déclaré lors de son témoignage qu’il n’est pas indiqué expressément dans le CSC Security Bulletin 2010-13 intitulé Mobilization of Security Staff on the Morning Shift‑Fire Response que les employés pourraient engager leur responsabilité s’ils quittaient leur poste pour aller effectuer une intervention d’urgence. On y précise plutôt ce que les AC sont censés faire en cas d’urgence, tel que cela a été établi par SCC. Le directeur Finucan a déclaré lors de son témoignage que le Bulletin n’était pas transmis par courriel à tous les AC, mais qu’il était envoyé à tous les usagers du SCC et qu’on s’attendait à ce que tous les employés le lisent.
Arguments des parties
A) Arguments de l’appelant
[117] Mme Stewart soutient que la définition de danger dans le Code englobe toute situation ou tâche ou tout risque existant ou éventuel. Elle soutient également que, puisque le Code renvoie à toute tâche ou situation ou à tout risque « éventuel », cette définition ne se limite donc pas à une situation factuelle précise qui existait au moment où l’employé a refusé de travailler. Mme Stewart cite la décision que j’ai rendue dans l’affaire Cole et Coleman c. Air Canada TSSTC 4 2006, et soutient que cette décision fournit une approche valable pour déterminer s’il existe du danger pour un employé. Le paragraphe 70 de la décision Cole et Coleman se lit comme suit :
[70] Compte tenu des dispositions déjà mentionnées du Code et des conclusions des juges Tremblay-Lamer et Gauthier, j’estime qu’il y a danger quand l’employeur n’a pu, dans une mesure raisonnable :
- éliminer un danger, une situation ou une activité;
- contrôler un danger, une situation ou une activité dans une mesure raisonnable de sécurité;
- s’assurer que ses employés sont personnellement protégés contre un danger, une situation ou une activité; et qu’on établit :
- que les circonstances dans lesquelles le danger, la situation ou l’activité qui subsistent pourraient raisonnablement être susceptibles de causer des blessures ou des maladies pour une personne qui y serait exposée avant que le danger, la situation ou l’activité puissent être éliminés ou modifiés;
- qu’il existe une possibilité raisonnable que les circonstances se produisent à l’avenir par opposition à une simple possibilité ou à une forte probabilité.
[118] Mme Stewart précise qu’avant la mise en œuvre des NNDAC, l’effectif standard du quart du matin à Joyceville (23 h à 7 h) comprenait 11 employés (neuf CO-1 et deux CO-2). Elle soutient que l’AC Hunter et d’autres employés étaient déjà préoccupés par les niveaux de dotation en personnel pour le quart du matin et que l’AC Hunter avait commencé à s’informer au sujet des exigences prévues dans le Code national de prévention des incendies du Canada (le Code de prévention des incendies) relativement aux PSI et aux procédures. Mme Stewart affirme qu’après avoir consulté ce code, l’AC Hunter en était arrivé à la conclusion que l’employeur ne remplissait pas ses obligations à cet égard et qu’il (l’AC Hunter) s’exposait à un danger lorsqu’il travaillait dans les conditions qui avaient cours à l’époque. Mme Stewart résume comme suit la preuve relative aux conditions dans lesquelles le risque pour la santé et la sécurité devient un danger :
Plan de sécurité-incendie
[119] Mme Stewart mentionne que l’AC Hunter a déclaré lors de son témoignage qu’il n’avait jamais reçu d’exemplaire du PSI, qu’il ne connaissait pas le contenu de ce plan et qu’il ne savait donc pas qu’il avait été nommé ASSE ou ASSE adjoint aux termes de ce même plan. Mme Stewart soutient aussi que l’AC Hunter n’avait jamais reçu de formation sur le plan ou sur les obligations et responsabilités qui lui revenaient aux termes de ce plan.
[120] Mme Stewart maintient que le PSI prévoit qu’il doit y avoir assez de surveillants en poste dans les installations de détention et les centres de soins à Joyceville pour répondre aux exigences découlant du PSI et que les niveaux de dotation en personnel ne devaient pas être établis en fonction d’un éventuel rappel d’employés en cas d’urgence.
Évacuation des détenus
[121] Mme Stewart soutient que la preuve démontre que le PSI qui était en vigueur au moment où l’AC Hunter a refusé de travailler ne traite que de l’évacuation des détenus et ne contient pas de détails sur les questions suivantes : comment le service des incendies peut-il accéder à l’Établissement; où doit-on placer les détenus après l’évacuation des cellules; comment doit-on effectuer les dénombrements de détenus après une évacuation; quels employés ou titulaires doivent agir comme surveillants pour les détenus souffrant d’incapacités; et qui est responsable d’aider ces détenus?
Intervention APRA 2+1+1
[122] Mme Stewart affirme que l’appelant a déclaré lors de son témoignage que l’on s’attend à ce que les AC effectuent des interventions APRA 2+1+1, et tant l’AC Hunter que l’AC Campbell ont confirmé que c’est la seule méthode à laquelle ils avaient été initiés. Mme Stewart maintient qu’aux fins d’une intervention 2+2+1, deux personnes portant un APRA doivent se tenir prêtes à intervenir. Mme Stewart note que les membres du comité conjoint de la santé et de la sécurité de Joyceville avaient convenu à l’unanimité lors d’une réunion tenue d’urgence qu’il n’était pas sécuritaire pour un agent d’agir seul aux fins d’une intervention APRA 2+1+1A dans le contexte d’une situation d’urgence.
[123] Mme Stewart maintient qu’il existe une possibilité raisonnable qu’un intervenant portant un APRA ait besoin d’aide médicale puisque la présence de fumée dans une cellule ou un autre lieu confiné impliquerait qu’une situation d’urgence de nature médicale pourrait très bien survenir. Mme Stewart soutient que le troisième intervenant devrait entrer seul dans les lieux de l’incendie, contrairement à ce qu’il a appris dans le cadre de sa formation, muni seulement d’une radio, si la première paire d’intervenants portant un APRA éprouvait des difficultés. Mme Stewart s’inquiète aussi du fait que la quatrième personne participant à une intervention d’urgence liée à un incendie et misant sur le système 2+1+1, soit l’observateur, n’est pas tenue de demeurer dans le champ visuel des autres intervenants.
Urgences multiples (incendie, évasion potentielle, etc.)
[124] Mme Stewart soutient qu’en raison du fait que Joyceville héberge en tout temps de quatre à cinq cents détenus, il y a une possibilité raisonnable que plusieurs urgences surviennent en même temps et que ce scénario n’est pas prévu dans le PSI. L’appelant soutient que le PSI et les NNDAC ne traitent pas adéquatement du risque que plusieurs urgences surviennent en même temps (une tentative d’évasion pourrait avoir lieu pendant un incendie, par exemple, ou une opération d’escorte).
[125] Mme Stewart soutient que la présence de détecteurs de fumée, d’avertisseurs d’incendie et de systèmes de gicleurs n’est pas suffisante étant donné que les détenus ont tendance à trafiquer les appareils de ce genre et à provoquer des diversions en allumant des incendies ou en déclenchant des avertisseurs d’incendie. Mme Stewart affirme que l’AC Hunter a aussi fini par croire que la situation n’était pas conforme à ce qui est prévu à l’article 2.8.2.2 du Code de prévention des incendies, lequel prévoit qu’il doit y avoir suffisamment de surveillants en fonction.
Serrures
[126] Mme Stewart soutient qu’il faut plus de temps pour évacuer une rangée étant donné que les portes de toutes les cellules sont verrouillées manuellement et qu’il n’existe pas de mécanisme de commande électronique centralisé pour contrôler ces portes.
La cour
[127] Mme Stewart soutient que l’aménagement de la cour de l’Établissement a son importance, car Joyceville est un établissement à sécurité moyenne de quatre étages dans lequel les rangées se déploient autour d’une cour centrale. Le risque lié à cet aménagement réside dans le fait que les détenus évacués doivent être confinés à un autre endroit dans l’Établissement avant que les camions d’incendie puissent entrer dans les lieux.
Quitter son poste
[128] L’appelant était préoccupé par les conséquences juridiques et disciplinaires potentiellement liées au fait de sortir de sa rangée alors qu’une situation d’urgence y avait cours pour aller aider des AC dans une autre rangée, de sorte qu’il n’y aurait plus eu personne dans sa rangée pour gérer cette situation d’urgence. On a soutenu que l’AC Hunter et l’AC Campbell se sont renseignés sur la question de savoir s’il était légal d’obliger un agent à surveiller plusieurs étages dans un établissement et cela a été relevé comme un problème persistant lors de la réunion du comité conjoint de la santé et de la sécurité de Joyceville le 3 novembre 2009. Mme Stewart affirme que l’AC Campbell a déclaré lors de son témoignage que l’on n’a pas donné suite à ses demandes de renseignements à ce sujet.
[129] Mme Stewart soutient aussi que les AC ne sont pas autorisés à quitter leur poste dans plusieurs cas. L’AC de l’unité d’isolement, par exemple, ne peut quitter son poste pour répondre à une alerte secondaire s’il est train de surveiller des détenus.
[130] L’appelant soutient aussi que les postes de remplaçants avaient été abolis, tout comme celui du 2e agent de patrouille du périmètre, lorsque les NNDAC avaient été adoptées. En tant que tel, il n’était plus possible d’effectuer d’interventions APRA 2+2+1, cette procédure à laquelle l’AC Hunter et ses collègues avaient été initiés dans le cadre de leur formation.
Détenus souffrant d’une incapacité
[131] Mme Stewart note que le directeur Finucan a précisé qu’un nouveau système de repérage des détenus pouvant avoir besoin d’aide durant une évacuation avait été récemment mis en œuvre. Elle se soucie du fait que ce système ne soit en usage que depuis quelques semaines. De plus, elle soutient que la preuve ne permet pas d’établir clairement si les employés sont conscients des responsabilités qu’ils ont aux termes du nouveau plan en ce qui concerne les détenus souffrant d’une incapacité, et s’il sera possible pour les employés d’évaluer ces détenus et de s’acquitter aussi des autres responsabilités que leur confère le PSI.
[132] Mme Stewart maintient qu’il est tout à fait probable que l’on devra évacuer les détenus souffrant d’une incapacité à Joyceville étant donné leur nombre, et que cela est révélé par le fait qu’on a adopté un plan à cette fin.
Conclusion
[133] Mme Stewart soutient que toutes ces conditions de travail constituent des dangers éventuels et qu’elles peuvent engendrer des risques beaucoup plus marqués si l’on doit gérer plusieurs urgences, évacuer des détenus souffrant d’incapacités ou fournir de l’aide à des premiers intervenants munis d’APRA.
[134] L’appelant affirme qu’en dépit des nombreux progrès réalisés dans le domaine de la sécurité-incendie à Joyceville, des dangers subsistent et peuvent être éliminés, et il a demandé que les appels soient accueillis et que l’agent d’appel rende la décision qu’il juge appropriée.
[135] Mme Stewart m’a demandé d’infirmer les décisions des agents de SST.
B) Arguments de l’intimé
[136] M. Alcock cite la décision Wade Unger c. Canada (Service correctionnel)2011 TSSTC 8 au paragraphe 33 et la décision Verville c. Canada (Service correctionnel) 2004 CF 767 au paragraphe 36, et soutient qu’il n’y avait pas de danger pour l’AC Hunter étant donné qu’il ne s’est pas acquitté du fardeau de déterminer les circonstances dans lesquelles on pourrait s’attendre à ce que la situation dangereuse cause des blessures, et d’établir s’il y a une possibilité raisonnable que ces circonstances se matérialisent. M. Alcock soutient aussi qu’on ne peut déterminer qu’il y a un risque raisonnable de blessure en s’appuyant sur une hypothèse ou une conjecture.
[137] M. Alcock cite la décision David Laroche c. Agence des services frontaliers du Canada, 2010 TSSTC 12 au paragraphe 101 et maintient qu’avant de conclure qu’il y avait un danger aux termes du Code, le membre du Tribunal doit faire ce qui suit : identifier les risques associés à l’exécution de cette tâche; identifier les circonstances dans lesquelles il est raisonnablement possible que ces risques puissent causer des blessures à l’appelant; et déterminer si ces circonstances pouvaient se produire aux dates auxquelles l’appelant a refusé de travailler, et ce, non pas comme une simple possibilité, mais comme une possibilité raisonnable.
Plan de sécurité-incendie
[138] M. Alcock a écrit que si l’AC Hunter ne savait pas que Joyceville appliquait un PSI, c’est parce qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour se familiariser avec ce plan et qu’il n’y a pas d’autre raison possible. Il affirme que le Fire Safety Training Participants Manual daté de décembre 2008 est utilisé tant pour la formation de base que pour la formation d’appoint. M. Alcock souligne qu’il est indiqué à la page 34 de ce document que les AC doivent suivre le plan de sécurité-incendie de l’Établissement lorsqu’ils voient de la fumée. Il ajoute qu’on peut lire à la page 13 d’un document intitulé « Fire Response Training » que les employés doivent « find, read and understand the Institutional FSP for the Institution you are working in. »
[139] M. Alcock note que l’AC Hunter a écrit dans la plainte qu’il a déposée aux termes de l’article 128(1) du Code que [traduction] « l’Établissement de Joyceville a un PSI approuvé et qu’il date de plusieurs années. » M. Alcock maintient que cela prouve que l’AC Hunter connaissait le PSI et son contenu.
[140] M. Alcock soutient que même si l’AC Hunter a allégué qu’il ne connaissait pas les obligations qui lui revenaient en tant qu’ASIE ou agent de secours incendie d’étage adjoint (ASIEA), il n’a présenté aucune preuve pour établir comment cela avait engendré un danger pour lui ou pour justifier le fait qu’il ne s’était pas acquitté de ses obligations d’ASIE ou d’ASIEA. M. Alcock maintient que les obligations d’un ASIE ou ASIEA correspondent au travail habituellement accompli par les AC affectés à un poste. M. Alcock affirme que l’AC Hunter se serait donc acquitté de ces obligations même s’il n’avait pas su qu’elles étaient les siennes.
[141] M. Alcock soutient que les allégations de l’AC Hunter concernant sa connaissance du PSI sont maintenant purement théoriques étant donné que la version à jour de ce plan est affichée sur le site Web de l’Établissement, lequel est accessible à tous les employés.
Évacuation des détenus
[142] M. Alcock précise que le directeur Finucan a affirmé qu’il était impossible de dire exactement à quel endroit on placerait les détenus évacués durant une situation d’urgence liée à un incendie, car cela dépendrait de l’emplacement et du degré de gravité de l’incendie. M. Alcock ajoute que le directeur Finucan a déclaré lors de son témoignage que les gestionnaires correctionnels à Joyceville ont une formation en gestion de crise et qu’ils ont simulé des situations d’urgence pour s’exercer à intervenir en pareil cas. M. Alcock mentionne que l’AC Hunter a dit lors de son témoignage qu’il avait participé au moins deux fois à des opérations liées à des incendies à l’occasion desquelles des détenus avaient été transférés dans une pièce commune attenante. Il soutient que l’AC Hunter n’a pas mentionné qu’il ne savait pas exactement où il devait transférer les détenus.
[143] M. Alcock affirme que l’AC Hunter n’a pas fourni de preuves pour appuyer son allégation voulant que le PSI est déficient dans la mesure où il traite seulement de l’évacuation des détenus et ne fournit pas de détails sur l’endroit où on doit placer les détenus après l’évacuation des cellules; sur la procédure à suivre pour effectuer les dénombrements de détenus après une évacuation; et sur la question de savoir qui a la responsabilité d’aider ces détenus. M. Alcock soutient également que l’AC Hunter n’a pas démontré que les déficiences alléguées sont raisonnablement susceptibles de se manifester et qu’elles pourraient alors lui occasionner des blessures.
Intervention APRA 2+1+1
[144] M. Alcock maintient par ailleurs qu’il n’est pas nécessaire de donner de la formation pratique sur la marche à suivre pour réaliser une intervention APRA 2+1+1 sécuritaire, car cette formation est déjà offerte.
[145] M. Alcock soutient que SCC effectue des interventions 2+1+1 de façon continue depuis le début des années 1980 si l’on fait exception de la période allant de décembre 2005 à avril 2006, et que le rôle de chaque intervenant est décrit dans le Fire Safety Training Participants’ Manual daté de janvier 2011.
[146] M. Alcock maintient que l’appelant n’a présenté aucune preuve qui aurait pu donner à penser que cette norme 2+1+1 n’était pas sécuritaire ou qu’elle entraînait du danger pour les employés. M. Alcock soutient que M. Gaw a quant à lui affirmé que les trois intervenants participant à une intervention 2+1+1 portent un APRA et travaillent en équipe. Il doivent maintenir un contact visuel entre eux en tout temps et si l’un d’eux perd ce contact visuel ou éprouve des difficultés, les trois intervenants doivent sortir du lieu contaminé.
[147] M. Alcock note que M. Gaw a déclaré lors de son témoignage que les employés sont initiés à la procédure d’intervention 2+1+1 dans le cadre de la formation de base et de la formation d’appoint courante. On peut constater dans un registre déposé en preuve que l’appelant avait reçu cette formation. M. Alcock cite aussi le témoignage de M. Gaw voulant que l’intervention 2+2+1 avait été conçue pour gérer les incendies structurels qui ne relèvent pas du mandat des AC. M. Alcock soutient qu’il y a assez d’employés maintenant pour effectuer au besoin une intervention 2+2+1 et que rien ne démontrait qu’une intervention APRA de type 2+1+1 n’était pas sécuritaire.
[148] M. Alcock précise que le directeur Finucan a dit lors de son témoignage qu’il y a 10 AC et un gestionnaire correctionnel en fonction à Joyceville lors du quart du matin, lequel commence à 23 h et se termine à 7 h, et ce, depuis que les NNDAC ont été adoptées. M. Alcock maintient que le témoignage non contesté du directeur Finucan permet d’établir que sept AC sont disponibles pour intervenir sur les lieux d’un incendie, ce nombre passant à huit dans certains cas. M. Alcock en arrive à la conclusion que le nombre d’AC en fonction était plus que suffisant pour effectuer une intervention 2+2+1 si cela avait été nécessaire.
[149] M. Alcock soutient aussi qu’on donne congé aux AC du quart de soir seulement après avoir confirmé que tous les détenus sont dans leur cellule et, dans le cas du quart du matin, qu’ils y sont tous confinés. L’intimé prétend également qu’il y a toujours assez d’employés pour intervenir en cas d’urgence.
Urgences multiples (incendies et évasions)
[150] M. Alcock soutient qu’aucune preuve ou argument logique n’avait été présenté pour étayer l’allégation de l’appelant voulant qu’il était probable que plusieurs situations d’urgence surviennent en même temps. Il répète que durant les 16 dernières années, un seul incendie a été rapporté et aucune tentative d’évasion n’a été signalée lors du quart du matin. M. Alcock note qu’il n’y a eu que sept urgences médicales lors du quart du matin durant les six dernières années. M. Alcock soutient que le risque que plusieurs urgences surviennent en même temps peut être quantifié de façon statistique et qu’il est tellement faible qu’on ne peut pas considérer qu’il existe une probabilité raisonnable qu’une telle situation se produise. M. Alcock soutient également que la plupart des incendies à Joyceville ne constituent que des perturbations mineures; la probabilité qu’un incendie important et une autre situation d’urgence surviennent en même temps est encore plus faible.
[151] M. Alcock maintient qu’il y a très peu de chances qu’un incendie se propage d’une cellule à l’autre ou d’une partie de l’établissement à une autre étant donné que la structure physique de Joyceville est faite de béton et d’acier et que les unités résidentielles se trouvent à l’écart de cellules et des autres parties de l’établissement en plus d’être séparées entre elles. En outre, toutes les cellules sont munies de détecteurs de fumée, de gicleurs automatiques et d’avertisseurs d’incendie, et il y aussi des avertisseurs d’incendie manuels, des extincteurs d’incendie et des boyaux.
[152] M. Alcock ajoute que le contenu des cellules est contrôlé, ce qui permet de réduire la charge d’incendie au minimum dans chaque cellule. Par exemple, les matelas et les couvertures sont ignifuges, les effets personnels autorisés pour chaque cellule sont indiqués sur une carte et des inspections de routine sont effectuées tous les 30 jours pour vérifier le contenu des cellules.
[153] De plus, M. Alcock affirme qu’à Joyceville, on applique un niveau élevé de sécurité active qui permet aux AC de recueillir constamment des renseignements sur ce qui se passe dans l’Établissement, y compris les évasions planifiées.
Serrures
[154] M. Alcock soutient que l’appelant n’a pas présenté de preuve à l’appui de son allégation voulant que les serrures manuelles des portes de cellules constituaient un risque. M. Alcock affirme que le directeur Finucan a plutôt soutenu que ces serrures réduisent le risque étant donné qu’elles permettent aux AC de synchroniser l’ouverture des cellules et de contrôler le nombre de cellules ouvertes; les agents ont aussi l’habitude d’utiliser les clés, ce qui leur facilite les choses lorsqu’ils doivent ouvrir d’autres portes en situation d’urgence; et ils savent que les clés fonctionneront tel que prévu et que le risque de complications d’ordre technique est moins élevé.
Cour
[155] M. Alcock note aussi que l’appelant n’a pas présenté de preuve à l’appui de son allégation voulant que l’aménagement de l’Établissement fasse augmenter le risque lorsque survient une situation d’urgence liée à un incendie, étant donné que les détenus doivent être confinés à un lieu sûr avant que les pompiers n’entrent dans la cour. M. Alcock affirme que cela présuppose qu’il serait nécessaire de diriger les détenus vers la cour en cas d’incendie. Il maintient que l’on n’a pas besoin d’une telle option à Joyceville, puisque la preuve présentée en l’espèce démontre que les incendies survenant dans cet établissement tendent à être mineurs, contenus et facilement éteints. M. Alcock soutient que le seul exemple d’incendie ayant nécessité une évacuation limitée est celui à l’occasion duquel les détenus furent transférés durant une courte période dans une pièce commune attenante. M. Alcock en arrive à la conclusion que l’allégation de l’AC Hunter voulant que la conception de la cour centrale à Joyceville représente un risque pour sa santé et sa sécurité devrait être rejetée.
Quitter son poste
[156] L’appelant craint d’être tenu responsable si un détenu sous sa supervision se blesse pendant qu’il est parti s’occuper d’une situation d’urgence dans une autre partie de l’établissement, et M. Alcock maintient que ces inquiétudes ne relèvent pas de la compétence du Tribunal. Il soutient que l’appelant n’a pas présenté de preuve démontrant comment il pourrait se blesser lui-même et que sa demande devrait donc être rejetée en ce qui concerne cette question.
[157] M. Alcock cite ensuite le témoignage du directeur Finucan; celui-ci a contesté l’allégation de l’appelant voulant qu’en cas d’urgence, certains employés ne peuvent quitter leur poste pour aller effectuer une intervention; c’est notamment le cas de l’AC de l’unité d’isolement qui surveille les détenus suicidaires, et ce principe vaut aussi pour d’autres postes. M. Alcock soutient que cette allégation est inexacte, puisque le directeur Finucan a déclaré lors de son témoignage qu’un AC supplémentaire est affecté à l’unité d’isolement lorsqu’on doit y surveiller des détenus suicidaires. M. Alcock en arrive à la conclusion que l’AC habituellement affecté à l’unité d’isolement est disponible pour intervenir en cas d’urgence.
[158] À cet égard, M. Alcock affirme que le directeur Finucan, l’AC Hunter et Mike Velichka ont déclaré lors de leur témoignage que les AC sont censés quitter leur poste lorsqu’une situation d’urgence survient et que l’on a besoin d’eux pour gérer cette situation. M. Alcock affirme que cela est mentionné dans un bulletin d’information distribué à tous les employés. Il note que l’AC Hunter a déclaré lors de son témoignage qu’il avait spontanément quitté son poste pour aider ses collègues à effectuer des patrouilles et des dénombrements de détenus.
Détenus souffrant d’une incapacité
[159] M. Alcock affirme que Joyceville a maintenant une politique s’appliquant aux surveillants qui s’occupent des détenus souffrant d’une incapacité. Il note que l’AC Hunter n’avait pas fourni de preuves démontrant qu’une politique déficiente à cet égard constituait un danger pour lui. En tant que tel, M. Alcock maintient que rien ne justifie que le Tribunal examine les allégations de l’AC Hunter à ce sujet. Il avance aussi qu’il incombe à l’AC Hunter de prouver que la nouvelle politique concernant les surveillants qui s’occupent des détenus souffrant d’une incapacité n’a pas été mise à l’essai. Du reste, comme l’AC Hunter n’a pas présenté de preuve, les questions qu’il soulève ne suffisent pas à justifier que l’on remette cette politique en cause.
[160] M. Alcock soutient que l’appelant n’a pas présenté de preuve démontrant que les mesures correctives mises en œuvre à Joyceville sont insuffisantes, et les allégations de l’AC Hunter se rapportant au PSI de Joyceville devraient donc être rejetées.
[161] M. Alcock soutient également, en contrepartie, que si le Tribunal en arrive à la conclusion que le risque d’incendie constitue un danger, ce risque est une condition d’emploi normale pour l’AC Hunter.
C) Contre-observations de l’appelant
Plan de sécurité-incendie
[162] Mme Stewart maintient que l’employeur est tenu, en vertu du Code de prévention des incendies et du Fire Safety Manual de Joyceville, d’informer les employés de leurs obligations d’agent des services de secours d’étage adjoint, peu importe si les AC s’acquittent déjà de ces obligations sans savoir qu’elles leur revenaient et sans avoir reçu de formation à cette fin. Mme Stewart ajoute que la position de l’employeur voulant que les employés doivent s’informer des responsabilités qu’ils doivent assumer en situation d’urgence témoigne d’une attitude frivole envers la sécurité.
[163] Mme Stewart précise que l’AC Hunter n’a jamais mentionné qu’il ne connaissait pas le PSI au moment où il a refusé de travailler; il a plutôt déclaré lors de son témoignage qu’il ne connaissait pas le PSI à l’époque où il a commencé à se préoccuper des problèmes de sécurité liés aux niveaux de dotation en personnel.
[164] Mme Stewart rejette le principe invoqué par l’intimé voulant qu’il revînt à l’AC Hunter de se familiariser avec les modalités du PSI de Joyceville, et elle cite les obligations de l’employeur décrites aux alinéas 125(1)l), o), q), s) et z) du Code.
Urgences multiples (incendie et évasion)
[165] Mme Stewart affirme que l’appelant a souscrit à l’observation de l’intimé voulant que l’on retrouve plusieurs appareils de sécurité-incendie tels que des systèmes de gicleurs et des détecteurs de fumée à Joyceville. Quoi qu’il en soit, Mme Stewart mentionne à nouveau que l’AC Hunter a répété plusieurs fois lors de son témoignage, et cela a été confirmé par la déposition d’autres témoins, que certains des détenus avaient trafiqué des appareils de ce genre et que l’on ne s’en était pas toujours rendu compte sur-le-champ. Mme Stewart soutient également que les gicleurs n’atténuent pas le danger posé par la fumée et l’inhalation de celle-ci, ce qui explique pourquoi le port de l’APRA est exigé.
[166] Mme Stewart confirme qu’il y a des restrictions à Joyceville en ce qui concerne le contenu des cellules, ce qui permet de réduire la charge d’incendie potentielle se manifestant dans ces mêmes cellules, lesquelles font l’aussi l’objet de fouilles. Cela dit, Mme Stewart soutient que l’on ne peut pas tenir pour acquis que les détenus se conformeront aux règles ou que des fouilles permettront de trouver tous les objets proscrits avant qu’ils ne deviennent dangereux.
[167] Mme Stewart avance que même si l’intimé a déclaré qu’un seul incendie avait été signalé durant le quart du matin de 1995 à 2010, l’AC Hunter a pour sa part affirmé lors de son témoignage qu’il avait vu plus d’un incendie durant cette période-là. Mme Stewart remet en question la façon dont les incidents liés à des incendies sont signalés et enregistrés.
[168] Mme Stewart soutient que lorsque l’intimé prétend qu’il n’y a pas eu de tentative d’évasion lors du quart du matin de 1995 à 2011, il ne tient pas compte du fait que des AC qui travaillaient à contrer de telles tentatives ont découvert que certains détenus avaient fait des préparatifs en prévision d’une évasion. Mme Stewart soutient également que l’intimé n’a pas pris en considération le fait qu’il y a eu au moins deux tentatives d’évasion lors du quart du matin avant 1995 et que l’appelant travaillait à cette époque-là. Mme Stewart prétend que la statistique selon laquelle il n’y a eu aucune tentative d’évasion est trompeuse et ne rend pas compte de la possibilité que de telles tentatives aient lieu.
[169] Mme Stewart affirme qu’au moment où l’intimé a essayé de déterminer la probabilité que plusieurs urgences surviennent en même temps en fonction de la fréquence de certains événements, il n’a pas tenu compte de la gravité potentielle de ce genre d’urgences.
[170] Mme Stewart rejette l’argument de l’intimé voulant qu’à l’avenir, les incendies qui surviendront à Joyceville s’apparenteront aux précédents, lesquels avaient peu d’ampleur et ont pu être contenus et facilement éteints. Mme Stewart soutient que pour l’essentiel, si l’on veut être en mesure de réagir à des situations d’urgence, il faut être prêt à gérer des événements improbables, mais potentiellement graves.
APRA 2+1+1
[171] Mme Stewart mentionne à nouveau que l’AC Hunter et l’AC Campbell ont déclaré lors de leur témoignage que leur formation de base portait exclusivement sur l’intervention 2+2+1 et qu’on avait dit aux participants que les membres devaient toujours travailler par paires.
[172] Mme Stewart soutient que l’appelant s’est acquitté du fardeau de démontrer qu’un danger existe et que les circonstances citées comme étant potentiellement dangereuses ne relèvent pas du tout de la spéculation et qu’elles pourraient très bien se matérialiser.
[173] Mme Stewart conteste l’affirmation de l’intimé voulant que tous les intervenants qui recourent au système 2+1+1 devraient sortir de la zone à risque s’ils perdent le surveillant de vue. Elle soutient que les intervenants ne pourront peut-être pas quitter les lieux sans aide. Mme Stewart précise que l’AC Hunter a déclaré lors de son témoignage qu’il n’avait jamais eu l’occasion de mettre les directives théoriques en pratique et qu’il n’avait donc pas reçu assez de formation pour assurer sa propre sécurité et celle de ses collègues. Mme Stewart ajoute, dans la même optique, qu’il ne suffit pas de lire un PSI pour se préparer à effectuer une évacuation d’urgence si l’on n’a jamais fait d’exercices d’évacuation.
[174] Mme Stewart maintient que l’AC Hunter avait toutes les raisons du monde de croire que les membres du comité conjoint de la santé et de la sécurité remplissaient leur mandat de gestion de la santé et de la sécurité en milieu de travail lorsqu’ils ont affirmé que l’AC Hunter s’était montré tout à fait raisonnable en déclarant qu’il considérait que le mode d’intervention 2+1+1 n’était possiblement pas sécuritaire et que c’était toujours le cas.
Quitter son poste
[175] Mme Stewart répond que les inquiétudes de l’AC Hunter quant aux conséquences juridiques liées au fait de quitter son poste pour aller gérer une autre situation d’urgence ne concernent pas les détenus, mais plutôt les AC confrontés à une telle décision.
[176] Mme Stewart soutient que l’intimé a négligé d’établir le nombre de surveillants qui devaient être mobilisés pour s’occuper des détenus souffrant d’une incapacité, et de se demander s’ils étaient disponibles pour intervenir en réaction à la situation d’urgence initiale ou à des incidents secondaires. Mme Stewart maintient qu’il n’est pas réaliste de s’attendre à ce que tous les AC soient disponibles pour participer à une intervention en cas d’urgence.
Serrures
[177] Mme Stewart souligne que l’AC Hunter et l’AC Campbell ont tous deux déclaré lors de leur témoignage que si un incendie se manifeste dans une rangée, les serrures manuelles des portes des cellules présentent un risque pour les AC lorsqu’elles sont verrouillées à double lors du quart du matin, en raison du temps qu’il faut pour les déverrouiller.
Analyse
Y avait-il un danger pour l’AC Hunter?
[178] Afin de traiter les deux appels de l’AC Hunter, je trancherai d’abord la question de savoir s’il y avait un danger, au sens de l’article 122 du Code, pour l’AC Hunter au moment où il a refusé de travailler. Si j’en arrive à la conclusion que tel était le cas, j’examinerai ensuite les mesures qui ont été prises à l’Établissement depuis que l’AC Hunter a exercé ses refus de travailler à quelques reprises et je déterminerai si le danger continue d’exister. Si, enfin, je constate que ce danger est toujours présent, je devrai déterminer si ledit danger constitue une condition d’emploi normale pour l’AC Hunter.
[179] Le terme « danger » est défini comme suit au paragraphe 122(1) du Code :
« danger » Situation, tâche ou risque — existant ou éventuel — susceptible de causer des blessures à une personne qui y est exposée, ou de la rendre malade — même si ses effets sur l’intégrité physique ou la santé ne sont pas immédiats —, avant que, selon le cas, le risque soit écarté, la situation corrigée ou la tâche modifiée. Est notamment visée toute exposition à une substance dangereuse susceptible d’avoir des effets à long terme sur la santé ou le système reproducteur.
[180] En ce qui concerne le critère dont il faut tenir compte pour déterminer l’existence d’un danger existant ou éventuel au sens du paragraphe 122(1) du Code, la juge Gauthier affirme ce qui suit au paragraphe 36 de la décision rendue par la Cour fédérale dans l’affaire Verville:
Sur ce point, je ne crois pas non plus qu’il soit nécessaire d’établir précisément le moment auquel la situation ou la tâche éventuelle se produira ou aura lieu. Selon moi, les motifs exposés par la juge Tremblay-Lamer dans l’affaire Martin, susmentionnée, en particulier le paragraphe 57 de ses motifs, n’exigent pas la preuve d’un délai précis à l’intérieur duquel la situation, la tâche ou le risque se produira. Si l’on considère son jugement tout entier, elle semble plutôt reconnaître que la définition exige seulement que l’on constate dans quelles circonstances la situation, la tâche ou le risque est susceptible de causer des blessures, et qu’il soit établi que telles circonstances se produiront ultérieurement, non comme simple possibilité, mais comme possibilité raisonnable.
[181] Il importe aussi de relever le passage suivant au paragraphe 51 de la décision Verville:
[I]l existe plus d’un moyen d’établir que l’on peut raisonnablement compter qu’une situation causera des blessures. Il n’est pas nécessaire que l’on apporte la preuve qu’un agent a été blessé dans les mêmes circonstances exactement. Une supposition raisonnable en la matière pourrait reposer sur des avis d’expert, voire sur les avis de témoins ordinaires ayant l’expérience requise, lorsque tels témoins sont en meilleure position que le juge des faits pour se former l’opinion. Cette supposition pourrait même être établie au moyen d’une déduction découlant logiquement ou raisonnablement de faits connus.
[182] Compte tenu du passage de la décision Verville cité plus haut, je dois, pour déterminer qu’il y avait un danger au sens du Code :
i. identifier les risques associés à l’exécution de la tâche en cause;
ii. identifier les circonstances dans lesquelles il est raisonnablement possible que ces risques puissent entraîner des blessures; et déterminer si ces circonstances auraient pu se produire le 10 mai 2008, et ce, non pas comme une simple possibilité, mais comme une possibilité raisonnable.
Quel est le risque associé à l’exécution de la tâche en cause?
[183] Si j’ai bien compris les observations de l’appelant, la position de l’AC Hunter est la suivante : il y a un risque potentiel en l’espèce, à savoir qu’à Joyceville, toute situation d’urgence liée à un incendie constitue un danger en raison des facteurs suivants, qui peuvent avoir des répercussions isolément ou conjointement :
- · il n’y a pas assez d’AC en poste lors du quart du matin pour gérer une situation d’urgence liée à un incendie;
- · le plan de sécurité-incendie de Joyceville est inadéquat, car il ne traite pas de la procédure à suivre lorsque plusieurs urgences surviennent en même temps (émeute, urgences médicales, tentative d’évasion, incendies secondaires, etc.).
- · l’AC Hunter n’avait pas reçu de formation suffisante relativement aux rôles et responsabilités qui lui revenaient lorsqu’une situation d’urgence liée à un incendie devait être gérée;
- · et à la réalisation d’une intervention APRA 2+1+1.
[184] Étant donné qu’aucune situation d’urgence liée à un incendie n’avait cours lorsque l’AC Hunter a refusé de travailler, mes motifs porteront sur le risque qu’une situation d’urgence liée à un incendie survienne à Joyceville durant le quart du matin.
Les circonstances dans lesquelles il serait raisonnablement possible que ce risque entraîne des blessures
1. Il n’y a pas assez d’employés en poste lors du quart du matin pour gérer une situation d’urgence liée à un incendie
[185] Si j’ai bien compris le témoignage du directeur Finucan, il y a 10 AC et un gestionnaire correctionnel en fonction à Joyceville lors du quart du matin, lequel commence à 23 h et se termine à 7 h, et ce, depuis que les NNDAC ont été adoptées.
[186] M. Alcock note aussi que personne n’a contredit le directeur Finucan lorsqu’il a déclaré dans le cadre de son témoignage que sept AC sont en poste pour intervenir sur les lieux d’un incendie, ce chiffre passant à huit dans certaines circonstances. Ces points furent cités par M. Alcock dans le but de démontrer qu’il y avait amplement d’AC en poste pour effectuer une intervention 2+2+1 si cela devenait nécessaire. Compte tenu de l’ensemble de la preuve, mes constats sont en accord avec les observations de M. Alcock sur ce point.
[187] Le témoignage du directeur Finucan a aussi permis d’établir qu’un Augment Recall Plan visant à augmenter le nombre d’employés disponibles pour gérer une crise a été mis au point à Joyceville et qu’il comprenait le PSI de cet établissement daté de juillet 2011, lequel contient une liste de rappel d’employés en cas d’urgence. Le GC affecté au quart du matin, qui agit comme gestionnaire intérimaire, peut mettre en œuvre le Augment Recall Plan et faire venir d’autres AC lorsqu’une situation d’urgence survient.
[188] Le protocole d’entente avec l’Établissement de Pittsburgh qui est joint à la preuve documentaire permet de s’assurer que le nombre d’employés disponibles pour réagir à une situation d’urgence liée à un incendie lors du quart du matin est le même que celui qui était prévu avant que l’AC Hunter ne refuse de travailler. De plus, le Augment Recall Plan, qui a aussi été mis en œuvre après que l’AC Hunter eut refusé de travailler, prévoit que des AC supplémentaires peuvent être rapidement mobilisés pour fournir de l’aide en cas d’urgence si le GC juge que cela est nécessaire.
[189] Compte tenu de tout cela, les niveaux de dotation en personnel peuvent être rapidement révisés à la hausse en cas d’incendie afin d’atteindre ou de dépasser ceux qui avaient cours avant l’adoption de la NDPCO.
[190] En tant que tel, j’en arrive à la conclusion que la preuve ne permet pas de démontrer qu’il n’y a pas assez d’employés en poste pour réagir, le cas échéant, à une situation d’urgence liée à un incendie. Je ne suis donc pas persuadé que le niveau de dotation en personnel du quart du matin à Joyceville constitue un facteur en raison duquel on pourrait raisonnablement s’attendre à ce qu’une situation d’urgence liée à un incendie occasionne des blessures à l’AC Hunter ou un autre employé avant que ce risque ne puisse être éliminé.
2. Plan de sécurité-incendie
[191] En ce qui concerne l’efficacité du PSI dans le contexte d’un incendie, je traiterai d’abord du problème soulevé relativement à la possibilité que plusieurs urgences surviennent de façon simultanée. L’appelant prétend qu’il est raisonnable de penser que plusieurs urgences (évasion, émeute, urgence médicale, incendie secondaire, etc.) pourraient survenir en même temps à Joyceville étant donné qu’on y retrouve de quatre à cinq cents détenus et que le PSI de l’Établissement et la norme nationale de déploiement ne traitent pas de cette possibilité.
[192] Le directeur Finucan a déclaré lors de son témoignage que les AC du quart de soir ne partent pas avant que les détenus aient été confinés à leur cellule et dénombrés, et que ces mêmes détenus demeuraient dans leur cellule durant le quart du matin. Peu importe le nombre de détenus hébergés à l’Établissement, je suis persuadé que cette procédure a pour effet de réduire le risque qu’une situation d’urgence liée à un incendie ou plusieurs urgences simultanées surviennent. Je constate que tel est le cas, comme cela est révélé par les points qui suivent.
[193] Le directeur Finucan a affirmé lors de son témoignage qu’aucune évasion n’avait été rapportée et qu’un seul incendie avait été signalé durant le quart du matin durant les 16 dernières années. Il a aussi déclaré qu’il n’y avait eu que sept urgences médicales durant les six dernières années. M. Alcock soutient que cela démontre que le risque que plusieurs urgences ou problèmes surviennent en même temps est tellement faible qu’on ne peut pas considérer qu’il existe une probabilité raisonnable qu’une telle situation se produise.
[194] Cela dit, on ne m’a pas présenté de preuves suffisantes en ce qui concerne les autres incendies qui seraient survenus; et la propension des détenus à trafiquer les avertisseurs d’incendie et les systèmes de gicleurs, et à apporter des objets plus inflammables dans leur cellule durant le quart du matin. Par conséquent, je n’ai guère eu l’occasion d’évaluer le risque afin de déterminer le niveau d’efficacité du PSI à l’aune de ces critères.
[195] M. Alcock mentionne que le directeur Finucan a déclaré lors de son témoignage qu’il est peu probable qu’un incendie autre qu’un incendie mineur se déclare étant donné que les cellules sont faites d’acier et de béton, que la charge d’incendie y est contrôlée et qu’elles sont munies d’avertisseurs d’incendie et de systèmes de gicleurs. Ces facteurs réduisent encore plus le risque associé à une situation d’urgence causée par un incendie et à des urgences simultanées. M. Alcock précise aussi que le directeur Finucan a confirmé lors de son témoignage que le système de la sécurité active utilisé dans l’établissement peut servir à prévenir les employés de la possibilité d’un plan d’évasion. J’estime que ce témoignage est convaincant.
[196] Après avoir tenu compte de toute cette information, je considère que le risque d’incendie durant le quart du matin est extrêmement faible, et que cela était notamment le cas au moment où l’AC Hunter a refusé de travailler, et que la possibilité que plusieurs urgences surviennent en même temps parallèlement à une situation d’urgence liée à un incendie n’est qu’hypothétique et qu’il est raisonnable de penser qu’il y a peu de chances qu’elle se matérialise.
[197] De plus, j’estime que même s’il y avait plusieurs urgences simultanées, la preuve ne me fournit pas de motifs raisonnables de croire que l’appelant subirait des blessures ou que cela arriverait probablement en pareil cas.
[198] J’aborderai maintenant le problème soulevé par l’AC Hunter, à savoir que si un incendie se déclarait , un tel événement constituerait un danger, puisque le PSI ne traite que de l’évacuation initiale des détenus et ne fournit aucun détail quant aux questions suivantes : comment le service des incendies peut-il accéder à l’Établissement; où doit-on placer les détenus après l’évacuation des cellules; comment doit-on effectuer les dénombrements de détenus après une évacuation; quels employés ou titulaires doivent agir comme surveillants pour les détenus souffrant d’incapacités; et qui est responsable d’aider ces détenus?
[199] L’AC Hunter a déclaré lors de son témoignage que les employés du service d’incendie municipal n’entrent pas dans la cour de l’entrée principale avant que les détenus aient été confinés à un autre lieu, mais que le PSI ne prévoit pas où l’on doit envoyer les détenus si l’incendie s’intensifie et qu’il devient nécessaire de faire sortir les détenus à l’extérieur de la prison.
[200] Selon moi, il serait préférable de pouvoir compter sur des plans établis à l’avance pour gérer les problèmes soulevés par l’AC Hunter en ce qui a trait à l’évacuation des détenus. Quoi qu’il en soit, et nonobstant l’affirmation de l’AC Hunter voulant que le PSI exige qu’il y ait assez de surveillants en poste pour qu’il ne soit pas nécessaire de rappeler des employés lorsque survient une situation d’urgence liée à un incendie, l’ensemble de la preuve ne me permet pas de déterminer comment on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que les déficiences présumées du PSI en ce qui concerne les procédures d’évacuation aient pour effet d’exposer une personne à un risque de blessures avant que la situation ne puisse être rétablie.
[201] Je traiterai maintenant des problèmes associés au mécanisme de verrouillage manuel des cellules à Joyceville, à propos duquel on a soutenu qu’il représentait un danger dans le contexte d’une situation d’urgence liée à un incendie.
[202] L’AC Hunter et l’AC Campbell ont déclaré lors de leur témoignage qu’il faudrait plus de temps pour évacuer une rangée en cas d’incendie, car toutes les portes sont verrouillées manuellement et leur ouverture n’est donc pas commandée par un système électronique centralisé.
[203] Le directeur Finucan a déclaré lors de son témoignage que ces serrures manuelles réduisent le risque étant donné qu’elles permettent aux AC de décider de la séquence d’ouverture des cellules et du nombre de cellules qui seront ouvertes lors d’une situation d’urgence liée à un incendie, et qu’un simple système mécanique de ce genre fonctionnant à l’aide de clés est supérieur à un système électronique dans le contexte d’une situation d’urgence.
[204] Compte tenu de la preuve et des arguments m’ayant été présentés, je constate qu’il n’existe pas de motifs suffisants me permettant de statuer que l’obligation de composer avec des serrures manuelles de cellules lors d’un incendie pourrait amener l’AC Hunter à se blesser. J’estime qu’une telle conclusion serait de nature excessivement spéculative.
[205] Le dernier point soulevé par l’appelant relativement à l’inefficacité présumée du plan de sécurité-incendie concerne la fourniture d’une aide aux détenus souffrant d’une incapacité lors d’une situation d’urgence liée à un incendie.
[206] Le directeur Finucan a déclaré que Joyceville avait maintenant un programme pour les surveillants qui s’occupent des détenus souffrant d’une incapacité.
[207] Mme Stewart soutient également que le nouveau système de repérage des détenus souffrant d’incapacités n’a pas été mis à l’essai comme système autonome ou en conjonction avec le PSI. Elle ajoute que la preuve ne permet pas d’établir clairement si les employés connaissent les responsabilités qui leur reviennent aux termes du plan, et s’ils seront en mesure d’aider des détenus souffrant d’incapacités tout en s’acquittant de leurs autres obligations dans le contexte d’une situation d’urgence liée à un incendie.
[208] M. Alcock rétorque à ce sujet que l’AC Hunter n’avait soumis aucune preuve démontrant que l’on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que la mise en œuvre du programme visant à fournir de l’aide aux détenus souffrant d’une incapacité occasionne des blessures à quelqu’un en cas d’incendie.
[209] De plus, l’AC Hunter se demande si le PSI est adéquat étant donné qu’un AC pourrait se voir imputer une faute, d’un point de vue légal, pour le motif qu’il a quitté son poste pour participer à une intervention d’urgence, surtout s’il était en train de surveiller des détenus souffrant d’une incapacité à ce moment-là.
[210] Avant de faire un constat de danger en l’espèce, je me dois, en tant qu’agent d’appel, de concentrer mon analyse sur les dangers posés aux employés tels que l’AC Hunter ou ses collègues au SCC. En tant que tel, j’outrepasserais ma compétence si je faisais un constat de danger en m’appuyant seulement sur l’examen de ces questions.
[211] Je traiterai maintenant du deuxième problème majeur cité par l’AC Hunter, à savoir le danger présumé imputable à la formation déficiente qu’il a reçue à propos du PSI.
3. Formation et plan de sécurité-incendie
[212] L’AC Hunter soutient qu’un danger existait au moment où il a refusé de travailler étant donné qu’il n’avait jamais reçu de copie du PSI à Joyceville; et qu’il n’avait pas reçu de formation relative au PSI et aux rôles et responsabilités qui lui revenaient en tant qu’ASSE ou ASIEA. Il avait aussi affirmé, à l’époque où il avait refusé de travailler, que le PSI de Joyceville était désuet. L’AC Campbell mentionne qu’elle n’a jamais participé à un exercice d’évacuation et cela a été corroboré par l’AC Hunter. Celui-ci concède cependant qu’il avait participé à un exercice d’évacuation par la suite, après avoir exprimé un refus de travailler.
[213] Même si l’AC Hunter allègue qu’il ne connaissait pas les obligations qui lui revenaient en tant qu’ASIE ou ASIEA, il n’a pas fourni de preuves démontrant que l’ignorance de ce fait le mettait en danger ou que ces obligations ne seraient pas remplies. La preuve m’ayant été présentée révèle que les rôles et obligations d’un ASIE ou d’un ASIEA correspondent au travail habituellement accompli par les AC affectés à un poste. En tant que tel, je suis persuadé que l’AC Hunter exécutait ces obligations, peu importe s’il en était conscient ou non.
[214] Je considère qu’il incombe à l’employeur de voir à ce que les employés reçoivent une formation sur les interventions d’urgence et qu’il n’appartient pas à ces employés de s’informer au sujet de leurs responsabilités lorsqu’ils n’ont pas reçu de formation adéquate. Quoi qu’il en soit, la preuve m’ayant été présentée ne me convainc pas qu’il y avait un problème de formation déficiente ou que ce manque de formation présumé en ce qui a trait aux rôles et responsabilités revenant à l’appelant lors d’une situation d’urgence liée à un incendie aurait pu le mettre en danger. J’en conclus donc que les préoccupations exprimées par l’AC Hunter sont de nature essentiellement spéculative et qu’elles n’ont pas été raisonnablement étayées.
4. La mise en œuvre de la procédure d’intervention APRA 2+1+1
[215] L’AC Hunter et l’AC Campbell ont aussi déclaré lors de leur témoignage qu’ils ont été initiés au mode d’intervention 2+2+1 et qu’ils croient qu’une intervention APRA 2+1+1 n’est pas sécuritaire étant donné qu’il peut se produire des situations durant un incendie qui obligeraient un AC à entrer seul dans un lieu donné. Dans le cadre de la formation sur l’intervention APRA 2+1+1, on apprend aux employés qu’ils devront travailler par paires aux fins de cette intervention. La preuve a aussi permis d’établir que les membres du comité conjoint de la santé et de la sécurité de Joyceville considèrent eux aussi que ce type d’intervention n’est pas sécuritaire.
[216] M. Alcock soutient que l’appelant n’avait pas fourni de preuve démontrant que l’intervention 2+1+1 n’est pas sécuritaire.
[217] À mes yeux, la preuve démontre que SCC avait adopté le modèle APRA 2+2+1 au départ pour le motif qu’il s’agit du modèle cité dans le Code de prévention des incendies. La preuve m’indique aussi qu’après avoir appris que le modèle APRA 2+1+1 avait été conçu pour les pompiers qui combattaient des incendies structurels en tenue de feu, SCC a déterminé que le modèle 2+1+1 devait être mis en oeuvre seulement lorsque les AC utilisaient l’APRA.
[218] À la lumière de ce constat, il appert que SCC applique le modèle APRA 2+1+1 depuis le début des années 1980, exception faite de la période allant de décembre 2005 à avril 2006. Je suis convaincu que les AC sont initiés au mode d’intervention APRA 2+1+1 dans le cadre de leur formation de base et de leur formation d’appoint courante. Je suis également convaincu du bien-fondé de la preuve démontrant que l’AC Hunter a suivi de la formation d’appoint sur l’APRA le 2 février 2008 ainsi que le 14 mai 2009.
[219] Compte tenu des preuves fournies par les deux parties, je ne suis pas persuadé qu’en cas d’incendie, il serait dangereux de recourir à une personne de moins pour réaliser une intervention APRA. En d’autres mots, je ne crois pas qu’il soit raisonnable de dire que le simple fait de recourir au mode d’intervention APRA 2+1+1 pour combattre le danger lié à un incendie qui se déclarerait à Joyceville pourrait avoir comme conséquence d’occasionner des blessures à l’AC Hunter ou à un autre employé avant que ce danger ne puisse être neutralisé.
Conclusion
[220] Bref, j’en arrive à la conclusion que l’appelant n’était pas exposé à un danger au sens du Code.
[221] Compte tenu de ce constat d’absence de danger, il n’est pas nécessaire d’examiner les questions touchant aux conditions d’emploi normales.
Décision
[222] Pour tous les motifs précités, la décision de l’agent de SST Bob Tomlin datée du 31 mars 2009, laquelle, aux fins qui intéressent le Tribunal, aboutit à un constat d’absence de danger, ainsi que la décision voulant également qu’aucun danger n’existe, comme elle est rendue par l’agent de SST Francesco Misuraca en date du 29 mai 2009, sont confirmées.
Douglas Malanka
Agent d’appel
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