Archivée - Decision: 01-009 CODE CANADIEN DU TRAVAIL PARTIE II SANTÉ ET SÉCURITÉ

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Pêches et Océans Canada

demandeur

et

Union canadienne des employés des transports

syndicat

et

Bill Gallant

agent de sécurité

                                                                       

Décision no 01-009

Le 4 avril 2001                     

Affaire entendue par Michèle Beauchamp, agent régional de sécurité, à Port Hawkesbury (Nouvelle-Écosse), le 24 janvier 2001.

Ont comparu : 

Pour le demandeur :

Seward Benoit, agent responsable, canal de Canso, Pêches et Océans Canada (POC)

John Fox, conseiller en santé et sécurité au travail, POC 

Pour les employés :

Greg Castle, préposé au canal, Union canadienne des employés des transports, section locale 80824, canal de Canso, POC

Rory Dempsey, coprésident, comité de santé et de sécurité, Travailleurs et travailleuses canadiens de l’automobile (TCA), Corporation de gestion de la Voie maritime du Saint-Laurent, St. Catharines


[1]          Cette affaire concerne une demande présentée en vertu du paragraphe 146(1) de la partie II du Code canadien du travail par Seward Benoit, agent responsable, Garde côtière canadienne, pour le compte de Pêches et Océans Canada, en vue de la révision d’une instruction (en annexe) donnée le 20 septembre 2000 par Bill Gallant, agent de sécurité, Programme du travail, Développement des ressources humaines Canada.

[2]          La demande ayant été présentée le 26 septembre 2000, avant l’entrée en vigueur, le 30 septembre 2000, de la partie II du Code canadien du travail (le Code) dans sa forme modifiée, elle sera traitée sous le Code en vigueur avant le 30 septembre.

[3]          À la suite de trois visites au canal de Canso, situé à l’extrémité nord de la levée de Canso (Nouvelle-Écosse), l’agent de sécurité Gallant a donné à Pêches et Océans, le 22 septembre 2000, l’instruction suivante en application du paragraphe 145(1) :

[TRADUCTION]

Ledit agent de sécurité est d’avis que la disposition suivante de la partie II du Code canadien du travail est enfreinte :

1.  L’article 124 de la partie II du Code canadien du travail

Les employés travaillant près du bord du canal ne sont pas protégés contre les risques rattachés au fait de travailler au bord d’une structure non protégée.

[4]          Dans le rapport qu’il a envoyé aux parties en prévision de l’audience, l’agent de sécurité Gallant a décrit le lieu de travail en ces termes :

[TRADUCTION]

Le canal de Canso mesure à peu près 75 pieds de largeur et 45 pieds de profondeur.  Les parois sont des structures de béton verticales qui s’étendent sur plusieurs centaines de pieds.  Deux paires de portes forment une écluse qui régularise les niveaux de l’eau quand les navires franchissent le canal.  La distance entre la partie supérieure de la paroi du canal et la partie supérieure de l’eau varie selon les marées, soit entre 8 et 12 pieds.  Il n’y a pas de garde-fous le long du canal, sauf ceux qui se trouvent sur les portes d’écluse.

[5]          L’agent de sécurité Gallant a aussi noté que, lors d’entretiens antérieurs avec les représentants de l’employeur et des employés ainsi qu’avec des membres du comité de sécurité et de santé, [TRADUCTION] « il a été convenu que les employés accomplissant des travaux d’entretien près du bord de la paroi du canal devraient utiliser un dispositif de protection contre les chutes… et [porter] les vêtements de flottaison individuels qui leur étaient fournis lorsqu’ils travailleraient au bord de la paroi du canal ».  Un plan de contrôle d’urgence pour le canal de Canso a été établi pour refléter cette exigence.

[6]          Il a en outre déclaré que [TRADUCTION] « il n’y a pas eu d’entente sur la nécessité de protéger contre les chutes les employés qui exécutent des activités opérationnelles au bord du canal.  Les employés étaient d’avis que les employés affectés aux opérations pouvaient travailler au bord du canal sans mesure de protection contre les chutes… c’était ce qu’on faisait depuis l’ouverture du canal, il y a quelque 45 ans ».

[7]          M. Gallant était préoccupé par le risque de noyade que couraient les employés travaillant au bord du canal, de 8 à 12 pieds plus haut que la surface de l’eau, ou craignait que, s’ils tombaient, ils soient blessés par un navire ou en heurtant le mur.  Lorsque M. Seward Benoit lui a confirmé, le 22 septembre 2000, que les procédures stipulaient toujours que les employés affectés aux opérations travaillent au bord du canal sans dispositif de protection contre les chutes, il a décidé de donner une instruction.  À l’audience, M. Gallant a fait remarquer que, même si elle exigeait que les employés soient protégés contre les risques liés au fait de travailler au bord d’une structure non protégée, l’instruction qu’il a donnée n’ordonnait pas expressément à l’employeur de fournir aux employés un dispositif de protection contre les chutes.

[8]          Dans les observations écrites qu’il a fournies à l’agent régional de sécurité ainsi qu’au cours de l’audience, M. Seward Benoit a déclaré qu’à la suite des discussions tenues au cours de l’été, le ministère avait procédé à une analyse complète des tâches et révisé sa politique concernant les opérations.

[9]          M. Benoit a fait observer que les éclusiers et les amarreurs sont les seuls employés qui ne sont pas tenus de porter un dispositif de protection contre les chutes et ce, à cause de la nature de leur travail.  Les amarreurs doivent attraper et tenir les amarres des navires et ils doivent souvent suivre un navire à pied le long du canal tout en tenant ces amarres, parfois en passant d’un bollard à un autre.  Ils doivent être prêts à assujettir rapidement le navire s’il survient une défaillance mécanique ou si le navire n’est pas en mesure de s’immobiliser à cause du vent ou des conditions de la mer, et ils doivent aussi pouvoir s’écarter rapidement si jamais les lignes d’amarrage se rompent sous la pression.  L’utilisation d’un dispositif de protection contre les chutes augmenterait les risques pour eux, car le dispositif restreindrait leurs mouvements et les empêcherait de réagir rapidement.

[10]      Il a souligné que plusieurs mesures ont été instaurées pour protéger les employés. Par exemple, les employés qui travaillent ou se déplacent à moins de 2 mètres des parois du canal doivent porter un vêtement de flottaison individuel.  Les employés d’entretien et les entrepreneurs qui travaillent sur les parois mêmes ou les portes d’écluse doivent porter un dispositif de protection contre les chutes.  Personne, à l’exception des employés affectés aux opérations et des amarreurs, n’est autorisé à se rendre au-delà d’une ligne peinte le long de la voie de passage.  Tous les employés connaissent les procédures de travail et ont été formés à ce sujet.  Ils sont également au courant de la présence de blocs de sécurité qui les empêcheront, s’ils tombent à l’eau,  d’être coincés entre les parois du canal et un navire.  Il a ajouté que le spécialiste privé d’expérience en matière de dispositifs anti-chute, qui a été consulté pour discuter des options possibles concernant la protection contre les chutes, a procédé à un examen minutieux des systèmes de retenue, mais n’a pu déterminer avec précision si ces derniers assureraient une protection convenable.

[11]      M. John Fox, conseiller en santé et en sécurité au travail, a déclaré que le travail qu’effectuent les deux groupes d’employés présente des risques communs et différents. Tous les employés d’entretien doivent utiliser un dispositif de protection contre les chutes lorsqu’ils se trouvent à moins de 6 pieds de la paroi du canal.  Seuls les éclusiers, les préposés au canal ou les amarreurs sont autorisés à circuler dans la zone à accès restreint qui longe la voie de passage.  Conscient que les conditions atmosphériques et la manipulation des lignes présentent des risques inhérents, l’employeur dispense à ses employés une formation permanente et passe régulièrement en revue ses procédures avec le comité de santé et de sécurité.  En outre, aucun incident lié à une chute n’a été signalé depuis l’ouverture du canal en 1959.

[12]      Il a fait remarquer qu’en 1999, un plan d’urgence détaillé a été dressé en consultation avec Développement des ressources humaines Canada.  Des caméras ont été fixées sur les lieux pour surveiller les employés.  Des échelles fixes ont été posées à intervalles de 75 pieds, des deux côtés des parois du canal.  De l’équipement d’urgence est disponible en cas de besoin et un bateau à moteur est tenu en état de fonctionnement à l’extrémité est du canal.

[13]      M. Fox a cité la décision 89-6 qu’a rendue l’agent régional de sécurité Pierre Rousseau, en 1989, au sujet des écluses de Chambly de Parcs Canada.  Pêches et Océans, a-t-il déclaré, satisfait à toutes les exigences mentionnées dans cette décision.  Par exemple, les lignes d’amarrage n’obstruent pas les surfaces de déplacement.  Le ministère a établi des procédures de travail sécuritaires précises et il a mis en place de l’équipement et des procédures d’urgence.  Il n’y a pas de garde-fous parce qu’il considère qu’à l’instar des écluses de Chambly de Parcs Canada, les écluses du canal de Canso sont des quais maritimes.

[14]      M. Fox a également présenté une lettre envoyée à M. P. Vincelli, chef des Services opérationnels, Administration de la voie maritime du Saint-Laurent, en novembre 1991, par M. Harold Monteith, gestionnaire de district de Travail Canada (nom utilisé à l’époque), au sujet de la nécessité que les employés de la Voie maritime du Saint‑Laurent en poste à St.Catharines portent un dispositif antichute lorsqu’ils travaillent sur les murs d’écluse.  À cette lettre était jointe une note de service que M. Dick Acton, directeur intérimaire des Services techniques de Travail Canada, avait écrite en octobre 1991 à M. Wayne Page, conseiller technique en santé et en sécurité au travail (SST) pour la région des Grands Lacs de Travail Canada.

[15]      On reconnaissait dans ces deux documents que l’emploi de systèmes de protection contre les chutes ferait courir aux employés des risques additionnels.  En outre, dans sa note de service, M. Acton a [TRADUCTION] « fortement recommandé que Travail Canada n’exige pas que les amarreurs portent des dispositifs antichute quand ils travaillent aux écluses ».

[16]      La lettre de M. Monteith faisait suite à un document que M. Vincelli avait auparavant soumis à Travail Canada pour examen.   Intitulé « Proposed Modifications and Procedures in lieu of Fall Arrest/Guard System at Locks » (Modifications et procédures proposées en remplacement d’un système antichute ou de protection aux écluses), ce document exposait en détail les risques additionnels associés à l’emploi d’un dispositif antichute dans les procédures d’amarrage :

                        [TRADUCTION]

a)     Si un cordage ou un filin d’amarrage cassait, le personnel de l’écluse ne pourrait pas s’écarter rapidement.  En outre, le câble d’amarrage pourrait heurter le câble antichute.  Cette brusque secousse entraînerait le blocage du dispositif antichute, et  l’amarreur serait repoussé par l’impact et pourrait se blesser, tandis que, dans des circonstances ordinaires, le câble en mouvement le manquerait.  Le câble du système antichute offre une cible plus grosse.

b)    Pendant que les amarreurs concentrent leur attention sur le processus d’amarrage, il faudra aussi qu’ils pensent à tirer leur cordon d’assujettissement.  Le fait de se concentrer en même temps sur ces deux opérations n’est pas sans danger.

c)     Les employés de l’écluse devront attacher leur ceinture au câble et l’en détacher un certain nombre de fois à mesure qu’ils se déplaceront le long du canal lors du travail d’amarrage.  Si le câble est situé près du mur de couronnement, le fait qu’ils auront à se pencher pour s’attacher ou se détacher n’est pas sécuritaire et constitue, en fait, un risque plus élevé que les procédures actuellement en vigueur.

Si la ceinture de sécurité était attachée à un câble situé derrière la rangée de bollards, les amarreurs auraient à traîner un câble de sécurité d’une quinzaine de pieds.  Cela non plus n’est pas une solution acceptable car ce câble pourrait facilement s’emmêler à des câbles d’amarrage ou des cordages, ou s’enrouler autour d’un bollard ou d’un cabestan.

[17]      MM. Benoit et Fox sont tout à fait d’accord avec l’explication de M. Vincelli à propos des risques reliés au système de protection antichute, ainsi qu’avec les avis exprimés dans les deux documents de Travail Canada.  Ils croient en outre que le fait d’exiger l’utilisation des systèmes antichute au canal de Canso aurait un impact important sur tous les canaux et toutes les écluses qu’exploite non seulement leur ministère, mais aussi Parcs Canada, dans tout le pays.

[18]      M. Greg Castle, représentant du syndicat et préposé au canal de Canso, a écrit dans ses observations à l’agent régional de sécurité que [TRADUCTION] « après mûr examen, le personnel opérationnel du canal de Canso ne se sent pas à l’aise face à la décision d’utiliser un système pour retenir les employés opérationnels qui travaillent sur les parois du canal ».

[19]      À l’audience, M. Castle a déclaré que le comité de sécurité et de santé et les employés avaient étudié de près la question de la protection contre les chutes.  Les employés sont d’avis que c’est le vent qui est le principal risque dans leur lieu de travail et ils s’inquiètent du fait – et sont d’accord avec leur employeur là-dessus – que l’emploi d’un système antichute accroîtrait davantage les risques pour les employés qu’il ne les protégerait.  M. Castle est persuadé que tous les employés connaissent les procédures de sécurité au travail et le matériel de sécurité mis en place et qu’ils ont été formés à ce sujet.

[20]      M. Rory Dempsey, coprésident du comité de sécurité et de santé de l’Administration de la voie maritime du Saint-Laurent, à St.Catharines (Ontario), a confirmé que cette même question de l’emploi de dispositifs de protection contre les chutes aux écluses avait été soulevée dix ans plus tôt.

[21]      Il a expliqué qu’après avoir fait une visite à l’écluse Iroquois, tant Dick Acton que Cindy Gagnon, conseillère technique en SST pour la Région de la capitale nationale de Travail Canada, ont considéré, comme l’a indiqué M. Acton dans sa note de service d’octobre 1991, que des procédures de travail convenables et complètes étaient en vigueur et que [TRADUCTION] « l’utilisation de dispositifs antichute par les amarreurs travaillant aux écluses augmentera les risques au travail ».

[22]      Il a déclaré que le canal de Canso et la Voie maritime du Saint-Laurent sont confrontés aux mêmes problèmes et que les deux protègent convenablement leurs employés au moyen de procédures similaires.  Il a souscrit au document dans lequel M. Vincelli explique les risques associés à l’utilisation d’un dispositif antichute lors des procédures d’amarrage.  Il s’est dit profondément inquiet du fait qu’en décidant d’obliger à utiliser des dispositifs antichute, l’agent régional de sécurité ferait en réalité courir des risques accrus aux employés.

*****

[23]      Selon les paragraphes 146(1) et 146(3) de la partie II du Code canadien du travail en vigueur avant le 30 septembre 2000, lorsqu’un employeur, un employé ou un syndicat demande la révision d’instructions données, l’agent régional de sécurité procède à une enquête sommaire sur les circonstances ayant donné lieu aux instructions et sur la justification de celles-ci, et peut les modifier, les annuler ou les confirmer.  Une décision écrite est ensuite fournie aux parties.

[24]      Ces dispositions se lisent comme suit :

146(1).  Tout employeur, employé ou syndicat qui se sent lésé par des instructions données par l’agent de sécurité en vertu de la présente partie peut, dans les quatorze jours qui suivent, en demander la révision par un agent régional de sécurité dans le ressort duquel se trouve le lieu, la machine ou la chose en cause.

146(3).  L’agent régional de sécurité mène une enquête sommaire sur les circonstances ayant donné lieu aux instructions et sur la justification de celles-ci. Il peut les modifier, annuler ou confirmer et avise par écrit de sa décision l’employeur, l’employé ou le syndicat en cause.

[25]      M. Gallant s’est rendu à trois reprises au canal de Canso, en juin, en juillet et en septembre 2000.  Lors de ces visites, il a discuté en détail des procédures de travail en vigueur au canal de Canso avec l’employeur, les employés et le comité de sécurité et de santé.  Il a été convenu, lors de ces entretiens, que les employés accomplissant des travaux d’entretien à proximité du bord de la paroi du canal porteraient un dispositif de protection contre les chutes et que des vêtements de flottaison individuels seraient fournis et portés.  On lui a également remis le plan de contrôle d’urgence que l’employeur avait établi par suite de ces disucssions .

[26]      Ce n’est que lorsque M. Seward Benoit lui a confirmé que les procédures obligeaient encore les employés affectés aux opérations à travailler au bord du canal sans protection antichute que l’agent de sécurité Gallant a décidé de donner une instruction.  Hormis cette question, il a semblé satisfait des différentes mesures de protection et procédures de travail dont il avait discuté et qui avaient été mises en application au lieu de travail.  On ne peut que louer M. Gallant d’être aussi soucieux du risque de noyade que courent les employés travaillant au bord du canal.

[27]      M. Gallant a donné son instruction en vertu du paragraphe 145(1) du Code, relativement à une infraction à l’article 124.  L’article 124 porte sur l’obligation générale de l’employeur de veiller à la sécurité et la santé au travail de ses employés et le paragraphe 145(1) traite des contraventions au Code.  En voici le texte :

124. L’employeur veille à la protection de ses employés en matière de sécurité et de santé au travail. 

145(1). S’il est d’avis qu’il y a contravention à la présente partie, l’agent de sécurité peut ordonner à l’employeur ou à l’employé en cause d’y mettre fin dans le délai qu’il précise et, sur demande de l’un ou l’autre, confirme par écrit toute instruction verbale en ce sens.

[28]      La question qu’il faut donc trancher en l’espèce est de savoir si, quand l’agent de sécurité Gallant a donné son instruction, l’employeur avait omis de veiller à la protection de la sécurité et de la santé au travail de ses employés comme l’exige l’article 124 du Code.

[29]      Les dispositions pertinentes du Règlement canadien sur la sécurité et la santé au travail sont les suivantes.

[30]      L’alinéa 12.10(1)a) de la partie XII, Matériel, équipement, dispositifs, vêtements de sécurité, se lit comme suit :

12.10(1).  L’employeur doit fournir un dispositif de protection contre les chutes à toute personne qui travaille sur l’une des structures suivantes, à l’exception d’un employé qui installe ou qui démonte un tel dispositif selon les instructions visées au paragraphe (5) :

a)      une structure non protégée qui est, selon le cas :

(i)   à plus de 2,4 m au-dessus du niveau permanent sûr le plus proche,

(ii)  au-dessus de pièces mobiles d’une machine, d’une autre surface ou d’une chose sur lesquelles un employé pourrait se blesser en tombant;

[…]

[31]      Cette disposition exige que l’employeur fournisse un dispositif de protection contre les chutes à tout employé qui travaille sur une structure non protégée située à plus de 2,4 m au-dessus du niveau permanent le plus proche ou au-dessus de toute surface sur laquelle un employé pourrait se blesser en tombant.

[32]      Il convient toutefois d’interpréter cette disposition de pair avec les articles 12.1 et 12.2 de la partie XII :

12.1.   Toute personne à qui est permis l’accès au lieu de travail doit utiliser l’équipement de protection réglementaire visé par la présente partie dans les cas suivants :

a)      lorsqu’il est en pratique impossible d’éliminer ou de maintenir à un niveau sécuritaire le risque que le lieu de travail présente pour la sécurité ou la santé;

b)      lorsque l’utilisation de l’équipement de protection peut empêcher une blessure ou en diminuer la gravité.

12.2 L’équipement de protection visé à l’article  12.1 :

a)   doit être conçu pour protéger la personne contre le risque pour lequel il est fourni;

b)   ne doit pas présenter de risque.

[33]      Les deux parties ont établi à l’audience qu’« il est en pratique impossible d’éliminer ou de maintenir à un niveau sécuritaire » le risque que présente le fait de travailler près du bord des parois du canal.  L’employeur et les employés, ainsi que les deux agents de Travail Canada mentionnés précédemment, ont aussi reconnu que l’emploi d’un dispositif de protection contre les chutes pourrait en réalité faire courir des risques additionnels aux employés qui travaillent au bord des parois du canal.

[34]      Au vu des déclarations qui m’ont été faites et des documents qui m’ont été soumis à l’audience, je crois que l’emploi de dispositifs de protection contre les chutes pour les employés affectés aux opérations travaillant au bord des parois du canal pourrait créer en soi un risque.

[35]      Je suis également d’avis, comme il est indiqué dans la décision 89-6, que l’employeur a [TRADUCTION] « mis en place des installations (protection physique) ou des procédures (protection administrative) convenables », au moyen des procédures de sécurité au travail mises en œuvre par l’employeur et du matériel de sécurité fourni pour assurer la protection physique et administrative des employés.

[36]      L’article 12.11 de la partie XII, Matériel, équipement, dispositifs, vêtements de sécurité, prescrit ce qui suit :

12.11(1). Lorsque, dans le lieu de travail, il y a risque de noyade, l’employeur doit fournir à toute personne à qui il permet l’accès au lieu de travail :

a) soit un gilet de sauvetage ou un dispositif flottant conforme à l’une des normes suivantes :

(i) la norme CAN2-65.7-M80 de l’Office des normes générales du Canada (ONGC) intitulée « Gilets de sauvetage à matériau insubmersible », publiée en avril 1980,

(ii)  la norme (F)65-GP-11 de l’Office des normes générales du Canada (ONGC) intitulée « Norme : Vêtements de flottaison individuels » publiée en octobre 1972;

     b)   soit un filet de sécurité ou un dispositif de protection contre les chutes.

(2).  Lorsque, dans le lieu de travail, il y a risque de noyade :

a)   de l’équipement d’urgence doit être fourni et tenu en état de fonctionnement;

b)   une personne qualifiée pouvant faire fonctionner l’équipement d’urgence doit être disponible;

c)   s’il y a lieu, un bateau à moteur doit être fourni et tenu en état de fonctionnement;

d)   l’employeur doit formuler des procédures d’urgence écrites dans lesquelles sont donnés les renseignements suivants :

(i) une description complète des procédures, y compris les responsabilités des personnes à qui est permis l’accès au lieu de travail,

(ii) l’emplacement de l’équipement d’urgence.

(3). Lorsque le lieu de travail est un embarcadère, un bassin, une jetée, un quai ou une autre structure similaire, une échelle ayant au moins deux échelons au-dessous de la surface de l’eau doit être installée sur le devant de la structure, à tous les 60 m.

[37]      L’employeur se conforme à cette exigence, comme en font foi la fourniture de vêtements de flottaison individuels aux employés travaillant à moins de 6 pieds de la paroi du canal, le fait que l’équipement d’urgence est tenu en état de fonctionnement et que des personnes qualifiées sont disponibles pour le faire fonctionner, le plan de contrôle d’urgence concernant le canal de Canso, les échelles fixes installées à intervalles de 75 pieds le long des parois du canal, la disponibilité d’un bateau, plus l’utilisation de caméras contrôlées et la disponibilité d’autres employés pouvant s’aider mutuellement.

[38]      Pour toutes les raisons qui précèdent, je crois que l’employeur protégeait la santé et la sécurité de ses employés, comme le veut l’article 124 du Code, au moment où l’agent de sécurité Gallant a donné son instruction à l’employeur.

[39]      J’annule donc par la présente l’instruction qu’a donnée à Pêches et Océans Canada, le 22 septembre 2000, l’agent de sécurité Bill Gallant.

___________________________

Michèle Beauchamp

Agent régional de sécurité


ANNEXE

DANS L’AFFAIRE DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL

PARTIE II – SÉCURITÉ ET SANTÉ AU TRAVAIL

INSTRUCTION À L’EMPLOYEUR EN VERTU DU PARAGRAPHE 145(1)

Le 15 septembre 2000, l’agent de sécurité soussigné a procédé à une enquête dans le lieu de travail exploité par PÊCHES ET OCÉANS Canada, employeur assujetti à la partie II du Code canadien du travail, et sis au canal de Canso, à Port Hastings, en Nouvelle‑Écosse, ledit lieu de travail étant également connu sous le nom de « canal de Canso ».

Ledit agent de sécurité est d’avis qu’il y a contravention à la disposition suivante de la partie II du Code canadien du travail :

1.         L’article 124 de la partie II du Code canadien du travail

Les employés travaillant près du bord du canal ne sont pas protégés contre les risques qu'il y a à travailler au bord d’une structure non protégée.

Par conséquent, il vous est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu du paragraphe 145(1) de la partie II du Code canadien du travail, de cesser toute contravention au plus tard le 30 janvier 2001.

Fait à Sydney, ce 22e jour de septembre 2000.

Bill Gallant

Agent de sécurité 1829

À :       PÊCHES ET OCÉANS CANADA

            CANAL DE CANSO

            Port Hastings (Nouvelle-Écosse)

            B0E 2T0


 

RÉSUMÉ DE LA DÉCISION DE L’AGENT RÉGIONAL DE SÉCURITÉ

Décision n° :                                    01-009

Demandeur :                                   Pêches et Océans Canada

                                                         Représenté par M. Seward Benoit

Syndicat :                                         Union canadienne des employés des transports

                                                          Représentée par M. Greg Castle

Agent de sécurité :                           Bill Gallant

                                                           Programme du travail

                                                           Développement des ressources humaines Canada

Devant :                                            Mme Michèle Beauchamp

                                                           Agent régional de sécurité

                                                           Développement des ressources humaines Canada

  

  

MOTS CLÉS :                                 

Révision, structure non protégée, risque de noyade

DISPOSITIONS

Code :            122, 145(1), 146(1), 146(3)

  

Règlement :   12.1, 12.2, 12.10(1)a), 12.11 

RÉSUMÉ

À la suite de visites faites au canal de Canso (Nouvelle-Écosse), l’agent de sécurité a donné à Pêches et Océans Canada une instruction en vertu du paragraphe 145(1) pour avoir contrevenu à l’article 124 du Code en ne protégeant pas ses employés travaillant près du bord du canal contre les risques qu'il y a à travailler au bord d’une structure non protégée.  L’employeur a interjeté appel de cette instruction.

L’agent régional de sécurité a annulé l’instruction car l’employeur protégeait la santé et la sécurité de ses employés, comme l’exige l’article 124 du Code, au moment où l’instruction a été donnée.

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