Utiliser la technologie financière pour stimuler l’investissement et aider les Canadiens à mieux préparer leur retraite

Par : Adedeji Philip Adetunji
Maîtrise en administration des affaires, Fonds d’investissement géré par les étudiants
Université du Nouveau-Brunswick, Fredericton

© 2021 Adedeji Philip Adetunji. Tous droits réservés.

Introduction

L’adoption d’un bon régime de retraite, qui permettrait aux Canadiens de maintenir le mode de vie de leur choix, commence par une décision financière judicieuse basée sur la littératie financière (voir la page Planification de la retraite de l’ACFC pour obtenir des précisions). La technologie financière a facilité la prise de décisions financières en offrant divers instruments de placement comme des fonds négociés en bourse (FNB). Bon nombre de Canadiens n’investissent pas suffisamment pour s’assurer d’avoir la meilleure retraite possible; les FNB, en tant qu’instrument de placement, peuvent donc les aider à améliorer leur niveau de littératie financière. Le régime de retraite des Canadiens est fondé sur trois grands piliers : la Sécurité de la vieillesse, le Régime de pensions du Canada et l’épargne privée. Même si le système canadien de revenu de retraite s’est avéré très efficace pour réduire la pauvreté chez les personnes âgées, les résultats montrent qu’il a été nettement moins efficace pour permettre aux Canadiens de conserver le même niveau de vie après la retraite (MacDonald, Moore, Chen et Brown, 2011).

En raison du nombre croissant de professionnels recensés au Canada, la préparation précoce à la retraite, qui est un événement incontournable, devrait être au cœur des préoccupations. La plupart des jeunes diplômés doivent composer avec de nombreux enjeux financiers, comme le remboursement d’un prêt étudiant ou encore l’achat d’une maison ou d’une voiture neuve ou l’organisation d’un voyage. Par conséquent, la connaissance et l’utilisation hâtives des FNB constitueraient un excellent moyen d’améliorer leur littératie financière en vue d’une retraite réussie.

Parmi les recommandations concrètes pour résoudre le problème de la littératie financière au moyen de FNB, notons la mise en place dans les institutions canadiennes de programmes d’investissement aux fins de placement dans des FNB, de mesures incitatives visant à encourager l’investissement dans les FNB et l’établissement d’activités réglementaires visant à simplifier l’administration des possibilités d’investissement.

Le présent document traite du troisième pilier du régime de retraite, soit l’épargne privée (voir la page Épargne et investissement de l’ACFC pour obtenir des précisions), et examine les FNB d’un point de vue global, en tant qu’outil d’innovation financière pouvant être utilisé pour aider les Canadiens à préparer leur retraite.

Fonds négociés en bourse

Les fonds négociés en bourse (FNB) sont en voie de devenir l’une des innovations les plus fructueuses et les répandues en matière d’investissement. Ils sont devenus des instruments de placement populaires et sont négociés sur les grandes places boursières partout dans le monde. On retrouve des FNB sur les actions, les obligations et l’or. Malgré les avis partagés des experts reconnus en investissement à propos du bitcoin, certains pays disposent de FNB permettant de suivre le bitcoin, notamment le Canada, puisque la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (CVMO) a approuvé le FNB Bitcoin en février 2021. Le fonds négocié en bourse permet aux investisseurs d’acheter un grand panier d’actions individuelles ou d’obligations d’État et de sociétés en une seule opération. Contrairement aux fonds communs de placement qui ne peuvent être négociés en bourse, l’une des principales caractéristiques des FNB relève de leur liquidité, qui peut être comparée à celle des actions.

Bien que les FNB et les fonds communs de placement présentent de nombreuses similitudes, la décision d’investir dans l’un ou l’autre de ces produits financiers dépend largement des circonstances particulières de l’investisseur. À l’instar de tout autre instrument de placement public, les FNB sont négociés en bourse, et les investisseurs assument les coûts de transaction, en particulier les frais de gestion, comme c’est le cas pour les fonds indiciels. De plus, les investisseurs sensibles aux politiques fiscales peuvent préférer les FNB, tandis que les fonds conventionnels peuvent mieux convenir aux investisseurs exonérés d’impôt ou insensibles à la fiscalité (Agapova, 2011). Un autre aspect essentiel des FNB en tant qu’instrument de placement indiciel est qu’ils ont tendance à refléter la nature cyclique de l’économie. La valeur d’un FNB fondé sur des actions augmente lorsque l’économie est en croissance, et l’inverse est également vrai. Le présent document de recherche inclut une analyse documentaire, dépeint le caractère unique de l’investissement dans les FNB et présente une analyse des données sur les FNB pour l’indice S&P/TSX 60, qui est constitué au Canada et qui vise à procurer une croissance du capital à long terme.

Analyse documentaire

Yiannaki définit les FNB comme un panier de titres qui garantit aux investisseurs une diversification instantanée et une exposition à de nombreux indices (Yiannaki, 2015). Les FNB, en raison de leur importance grandissante, sont en voie de devenir une innovation acceptable. Selon Bhattacharya et O’Hara, au cœur de la remarquable ascension des FNB se trouve une importante innovation en matière d’ingénierie financière (Bhattacharya et O’Hara, 2018). L’innovation financière introduite par les FNB si on les compare aux fonds de placement traditionnels, tels que les fonds communs de placement, relève d’une amélioration des liquidités. En outre, les FNB offrent aux investisseurs la possibilité de vérifier la situation et le prix du FNB, ce qui constitue un atout majeur par rapport aux fonds communs de placement. Les investisseurs peuvent ainsi accéder à leurs avoirs en tout temps, obtenir des précisions sur la méthode de placement utilisée (profil de risque et de rendement), accéder à la structure des coûts d’investissement ainsi qu’à la structure d’autres produits de placement.

Caractéristique des FNB en tant qu’outil novateur

Diversification

Les FNB sont des titres négociables qui puisent leur valeur dans un panier prédéfini de titres formant un indice. Cet outil de placement reproduit les rendements et les risques d’un panier de titres. Un tel panier d’instruments de placement ne se limite pas aux actions, mais s’étend aussi aux obligations, aux matières premières, aux cryptomonnaies, etc. Contrairement à la création d’un portefeuille pour réduire le plus possible le risque et maximiser le rendement, les investisseurs dans les FNB n’ont pas besoin de recourir à un spécialiste pour bâtir leur portefeuille. Le fonds permet aux investisseurs d’accéder à différents placements en titres compris dans un panier sans gérer les complexités associées à la création d’un portefeuille largement diversifié. Les investisseurs peuvent répartir les risques en entrant sur un marché qui comprend des centaines de titres financiers ou un grand nombre de secteurs d’activité. Ainsi, toute fluctuation importante dans des secteurs cruciaux peut être palliée par d’autres secteurs au sein d’une même position. Le risque de perte est ainsi réduit au minimum si un investissement devait obtenir de mauvais résultats pendant une certaine période.

Possibilité d’investissement passif

À l’instar de tout autre instrument de placement qui fait appel à une stratégie passive pour satisfaire aux futures obligations relatives à la retraite, les FNB ont tendance à suivre un indice de référence précis sur une longue période. Les FNB représentent une possibilité d’investissement passif de plus en plus appréciée des investisseurs actuels et potentiels en raison du faible coût des transactions et de la grande liquidité qui leur sont associés. Selon Sakarya et Ekinci, les FNB constituent un exemple d’outils dits d’« investissement passif » en vertu desquels un investisseur qui souhaite investir dans un indice particulier investit dans un FNB plutôt que d’acheter séparément des actions de cet indice (Sakarya & Ekinci, 2020).

Efficience fiscale

La plupart des FNB sont gérés passivement, ce qui en soi limite le nombre de transactions imposables. Contrairement aux fonds communs de placement traditionnels, les FNB se négocient en tout temps, de sorte que les investisseurs peuvent choisir le moment où les impôts deviennent exigibles en actualisant leurs gains. Puisque les FNB sont destinés à être détenus à longue échéance, les gains en capital qui en résultent sont assujettis à un taux d’imposition des gains en capital à long terme. Le taux d’imposition des gains en capital des FNB est donc plus favorable que celui d’un fonds commun de placement, en vertu duquel les investisseurs paient des impôts sur les gains en capital pendant qu’ils détiennent le placement. Comme le soulignent Poterba et Shoven, les FNB réduisent la charge fiscale qui pèse sur les placements en actions comparativement aux mêmes placements détenus au moyen de fonds communs (Poterba et Shoven, 2002).

Diminution des frais de transaction

Comme les investisseurs n’investissent pas directement dans les entreprises, il n’est pas nécessaire de faire la tenue de livres pour chaque actionnaire, ce qui réduit les frais de gestion des FNB et génère des économies susceptibles de se refléter dans les dépenses globales (Agapova, 2011). De plus, les frais associés aux fonds communs de placement traditionnels, notamment les frais d’entrée et de sortie, n’existent pas pour les FNB. Les frais d’entrée et de sortie correspondent aux frais déboursés lors de l’achat ou de la vente d’un placement. Toutefois, les FNB comportent d’autres frais qui s’apparentent à ceux des fonds communs de placement, notamment des frais de gestion et des commissions. Dans l’ensemble, les FNB engendrent des dépenses globales, sous la forme d’un ratio de frais de gestion (RFG), moins élevées que celles d’un fonds commun de placement ou d’autres instruments de placement traditionnels similaires. Supposons qu’un FNB présente un RFG de 0,05 pour cent et que le portefeuille de FNB ait généré un rendement annuel de six pour cent. Le rendement net en pourcentage du placement sera alors de 5,95 %. Si, par contre, un investisseur opte pour un fonds commun de placement affichant un RFG de 2 %, en supposant que celui-ci offre le même rendement annuel de 6 %, le rendement net en pourcentage sera de 4 %. La différence dans le pourcentage de rendement net aurait une incidence sur la prospérité future attendue.

Analyse des données

Dans la section Analyse des données, on examine le FNB fondé sur l’indice iShares S&P/TSX 60 (XIU), un FNB qui est constitué des 60 plus grandes entreprises canadiennes. Le XIU a été choisi de préférence au XIC (FNB fondé sur l’indice composé plafonné iShares Core S&P/TSX)^{Note de bas de page 1}   parce qu’il est davantage stable et qu’il repose sur une approche conservatrice en matière de croissance cumulée à long terme. Dans le cadre de la présente recherche, les cours de clôture de fin de mois du XIU ont été examinés. Les données ont été extraites des travaux de Bloomberg et s’étendent de 2001 à 2020.

Le graphique ci-dessous illustre la tendance à la hausse du cours annuel moyen et du cours annuel moyen ajusté (incluant les dividendes et les fractionnements) du FNB fondé sur l’indice iShares S&P/TSX 60 (voir les piècesv1 et 2).

Figure 1 : Rendement moyen du XIU (cours moyen annuel historique du XIU de 2001 à 2020)

On constate que le cours annuel moyen passe de 11,25 CAD, en 2001, à 24,13 CAD, en 2020. Au fil du temps, l’écart entre le cours ajusté et le cours non ajusté se creuse également, ce qui peut être attribué au revenu supplémentaire sous forme de dividendes et de fractionnements d’actions qui découle de l’investissement dans le XIU.

La baisse observée entre 2008 et 2009 peut logiquement être attribuée à la crise financière qui a frappé la plupart des économies. À long terme, le rendement des FNB tend à croître parallèlement à la croissance économique du pays.

Pour profiter de ce lien avec la croissance économique, les jeunes Canadiens qui souhaitent bien planifier leur retraite doivent démontrer un comportement d’investisseur sur une base quotidienne, hebdomadaire, mensuelle ou annuelle, en investissant dans un instrument de placement comme les FNB.

Examinons un scénario dans lequel un Canadien investit 100 $ chaque mois, de janvier 2001 à décembre 2020, à un taux mensuel moyen de 0,467 % (taux annualisé de 5,74 % – voir l’annexe I) dans un FNB fondé sur l’indice iShare S&P/TSX 60. Le revenu mensuel (c’est-à-dire le dividende versé) est présumément réinvesti dans l’instrument de placement. La valeur du placement dans le FNB atteindrait 44 066 $ selon le calcul de la valeur future^{Note de bas de page 2}  basé sur un montant en capital de 24 000 $ cumulé sur 20 ans, comme le montre le calcul ci-dessous.

VF = P [(1+i) ^n – 1)]/i

P = 100 $, i = 0,467 %, n=240 (c.-à-d. 12 mois *20 ans)

VF = 100 $[(1+0,00467) ^240 – 1]/0,00467

VF = 44 097 $

Si le choix se porte sur un taux de rendement médian mensuel (qui correspond à une approche plus musclée), la valeur future sera alors plus élevée.

P = 100 $, i = 1,081 %, n=240 (c.-à-d. 12 mois *20 ans)

VF = 100 $[(1+0,01081) ^240 – 1]/0,01081

VF = 112 890 $

L’effet de la capitalisation revêt une importance cruciale en matière d’investissement, car il fait fructifier plus rapidement les 24 000 $ investis sur l’horizon de placement, les intérêts étant calculés sur le rendement cumulé au fil du temps et sur le capital initial. Toutefois, l’inflation érode le bénéfice tiré d’un placement, surtout lorsque le taux d’inflation est supérieur au taux de rendement prévu. De 2001 à 2020, le taux d’inflation au Canada se situait entre 0,3 % et 2,91 % par année, comparativement au rendement annualisé de 5,74 % utilisé dans le scénario ci-dessus. Cela montre que le rendement annuel moyen de 5,74 % du FNB n’était pas érodé par le taux d’inflation au Canada pendant cette période.

Recommandations

Si les Canadiens investissaient de façon régulière, et non ponctuelle, dans les FNB, leur régime de retraite ne s’en porterait que mieux. Les Canadiens peuvent avoir recours aux services de diverses plateformes de placement offertes par les institutions financières pour commencer à investir dans les FNB. Néanmoins, il faut pouvoir miser sur la contribution de tous les intervenants pour promouvoir l’investissement dans les FNB.

Organismes gouvernementaux et de réglementation

Les pouvoirs publics et les autorités de réglementation devraient proposer des incitatifs (des possibilités d’exonération d’impôt, une réduction des frais de transaction, etc.) par le biais des institutions financières pour promouvoir l’investissement dans les FNB. Il pourrait s’agir, par exemple, d’une structure semblable à celle du régime enregistré d’épargne-logement, mais qui viserait à promouvoir une épargne plus générale en permettant aux citoyens de moins de 30 ans d’obtenir une déduction fiscale cumulative pouvant atteindre 10 000 $. S’ils retirent les fonds avant l’âge de 65 ans, ils seront imposés, mais ils ne subiront aucune charge fiscale s’ils attendent après 65 ans pour ce faire.

En outre, la situation financière des jeunes est généralement simple lorsqu’ils sont aux études. Après cette période, toutefois, la vie a tendance à devenir plus complexe. Les jeunes étudiants canadiens, par le biais de diverses institutions, peuvent participer à un concours de placement dans les FNB visant à les sensibiliser à cette innovation financière ainsi qu’à les initier à sa fonctionnalité et à ses processus. Cela les préparera à appliquer des concepts d’investissement lorsque leur situation financière deviendra complexe en raison de leurs différents besoins financiers à court et à long terme.

Organismes de réglementation

Les organismes de réglementation devraient encourager l’investissement dans les FNB en simplifiant, par exemple, les tâches administratives imposées par les institutions financières avant d’investir dans les FNB.

Conclusion

Le présent document examine le concept même de la littératie financière à différentes étapes de la vie, qui ne se limite pas à l’investissement. La budgétisation revêt une importance de plus en plus cruciale après l’obtention du diplôme (voir le Planificateur budgétaire de l’ACFC qui vous aidera à créer un budget personnalisé). En effet, après l’obtention d’un diplôme, une personne pourrait avoir des engagements passés, comme des prêts étudiants à rembourser, et des désirs futurs, comme l’achat d’une maison, l’organisation d’un voyage, l’augmentation de son niveau de vie, etc. Dans l’ensemble, la préparation financière qui permettra d’atteindre l’objectif de retraite souhaité repose sur l’adoption d’habitudes de placement soutenues par les jeunes professionnels. Tous les intervenants, en l’occurrence les gouvernements, les fournisseurs de services financiers, les établissements d’enseignement et d’autres entités, ont un rôle crucial à jouer dans l’établissement d’un régime de retraite considérable, une nécessité pour les Canadiens.

Références

• Agapova, A. (2011). Conventional mutual index funds versus exchange-traded funds. Journal of Financial Markets, pp. 323-343 (en anglais seulement).
• Bhattacharya, A., et O’Hara, M. (avril 2018). Can ETFs Increase Market Fragility? Effect of Information Linkage in ETF Markets (en anglais seulement).
• Bloomberg L.P. (n.d.). [iShares S&P/TSX ETF monthly stock price data, 2001-2020 in CAD]. Consulté le 4 mars 2021 sur le terminal Bloomberg de l’Université du Nouveau Brunswick (en anglais seulement).
• Mac-Donald, B.-J., Moore, K., Chen, H., et Brown, R. (2011). The Canadian National Retirement Risk Index: Employing Statistics Canada’s LifePaths to Measure the Financial Security of Future Canadian Seniors. University of Toronto Press Journals, pp. 73-94 (en anglais seulement).
• Poterba, J. M., et Shoven, J. B. (mai 2002). Exchange-Traded Funds: A New Investment Option for Taxable Investors. The American Economic Review (en anglais seulement).
• Sakarya, B., et Ekinci, A. (2020). Exchange-traded funds and FX volatility: Evidence from Turkey. Central Bank Review (en anglais seulement).
• Yiannaki, S. M. (2015). ETFs performance Europe – a good start or not. Procedia Economics and Finance. Rome & London: Elsevier (en anglais seulement).

Pièces

Pièce 1

Le tableau montre les cours moyens annuels ajustés (dividendes et fractionnements) de XIU. Pour calculer ces cours moyens ajustés, on utilise une moyenne des cours de clôture de fin de mois.

Pièce 2

Le tableau montre les cours moyens annuels non ajustés de XIU. Pour calculer ces cours moyens non ajustés, on utilise une moyenne des cours de clôture de fin de mois.

Pièce 3

Le tableau montre les cours mensuels ajustés de XIU, soit de janvier 2001 à décembre 2020. Les données ont été utilisées pour calculer le rendement mensuel moyen, le rendement médian moyen ainsi que le rendement moyen et médian annualisé.