Allocution de Rumina Velshi à la 3e conférence annuelle de la Société nucléaire canadienne sur les technologies perturbatrices, novatrices et émergentes dans le secteur nucléaire
Discours
Discours
1er novembre 2022
Introduction
Bonjour à tous.
Je tiens tout d’abord à souligner que nous comptons aujourd’hui des participants de partout au pays et de l’étranger. Je m’adresse à vous depuis le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinaabeg.
Je suis ravie de me joindre à vous à l’occasion de la troisième conférence annuelle sur les technologies perturbatrices, novatrices et émergentes (ou TPNE) de la Société nucléaire canadienne.
Au cours de mon allocution d’aujourd’hui, je me concentrerai sur trois domaines. Le premier consistera à décrire le changement de paradigme qui est si important pour l’avenir du secteur nucléaire et la façon dont l’innovation sera essentielle. Je soulignerai également le travail que nous faisons, en tant qu’organisme de réglementation nucléaire du Canada, pour nous assurer que nous sommes prêts à réglementer les TPNE et, enfin, je ferai part des travaux que nous accomplissons en collaboration avec d’autres organismes de réglementation.
En quelques années seulement, cette conférence est devenue un incontournable annuel pour faire le point et garder les yeux rivés sur la voie que suit le Canada en vue de comprendre, de déployer et de réglementer les TPNE qui seront éventuellement utilisées dans les petits réacteurs modulaires, ou PRM, le parc nucléaire actuel et les projets de réfection. Par ailleurs, ce ne sera pas seulement dans les installations dotées de réacteurs; les TPNE seront utilisées tout au long du cycle du combustible nucléaire.
Cette conférence vise surtout à fournir une tribune qui permet aux participants d’échanger des points de vue, des idées et des renseignements sur des technologies comme l’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique, et sur la manière dont on peut les réglementer. Les TPNE constitueront un outil important pour la génération actuelle et la prochaine génération du nucléaire.
En raison de sa portée internationale, une conférence comme celle‑ci nous permet également d’en savoir plus sur ce que font nos collègues internationaux dans le domaine des TPNE.
Ensemble, nous pouvons déterminer les domaines pour lesquels il faut s’entraider et apprendre les uns des autres, en prenant appui sur une priorité commune, à savoir la sûreté nucléaire pour les demandeurs potentiels de TPNE.
Pendant que les pays cherchent à respecter des engagements ambitieux et importants en matière de changement climatique, l’utilisation des TPNE, dans les PRM par exemple, devient un moyen de plus en plus important pour atteindre ces objectifs.
La CCSN a récemment annoncé une initiative de subventions de recherche sur les PRM, une nouvelle démarche conjointe avec le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG). Cette initiative encouragera les universités canadiennes à réaliser des travaux de recherche sur les PRM, ce qui étoffera les renseignements scientifiques disponibles sur cette nouvelle technologie et offrira des possibilités de formation aux étudiants diplômés. Elle appuiera également notre processus décisionnel et nos activités de surveillance en matière de réglementation afin d’assurer le déploiement futur sûr et sécuritaire des PRM au Canada.
Si l’on veut que les PRM, et les installations nucléaires existantes réalisent le potentiel de lutte contre les changements climatiques et l’insécurité énergétique que beaucoup voient en eux, nous devrons faire en sorte de communiquer efficacement au public le fait que la sûreté ne sera jamais compromise au cours du déploiement d’une nouvelle technologie. Les TPNE doivent jouer un rôle dans ces plans, et pour favoriser la sûreté, l’innovation et la réglementation doivent aller de pair.
Dans le reste de mon allocution, j’expliquerai davantage ce que nous faisons à la CCSN pour soutenir ces technologies, et ce que nous attendrons de vous.
Nhan Tran, Wesley Ross, John MacIntosh, Chris Cochrane, qui est président technique de cette conférence, et Kevin Lee, coprésident de la conférence, présideront des groupes d’experts ou présenteront des exposés au cours des prochains jours et vous fourniront plus de détails sur les activités que mène la CCSN au Canada et avec nos homologues internationaux.
Changement de paradigme
Alors, pourquoi les technologies perturbatrices, novatrices et émergentes sont‑elles si importantes pour l’avenir du nucléaire? En quelques mots, les PRM et leur déploiement dépendront des TPNE.
Les PRM devront être déployés plus rapidement, à moindre coût et de façon beaucoup plus étendue que l’étaient les réacteurs du passé, et les TPNE joueront un rôle important à cet égard.
Le secteur nucléaire devra s’éloigner des projets conventionnels à grande échelle et privilégier désormais un modèle rationalisé fondé sur le produit. Pensez à la fabrication adaptative utilisée pour fabriquer des pièces et des composants, assistée éventuellement par l’intelligence artificielle dans le processus de conception, la production et le contrôle de la qualité. Je parlerai d’autres applications de l’intelligence artificielle plus tard.
En tant qu’organisme de réglementation, la sûreté passera toujours en premier : rien ne change à cet égard.
Mais, nous avons également fait savoir avec fermeté et clarté que nous ne voulons pas représenter un fardeau ou un obstacle inutile pour les technologies novatrices comme les PRM et les TPNE.
Je suis convaincue qu’il faut créer des conditions favorables pour soutenir l’adoption de l’innovation dans le secteur nucléaire.
Il faut un élan vers l’harmonisation internationale de la réglementation, et des efforts doivent être faits au chapitre de la normalisation internationale des conceptions ou des exigences de conception.
Tout cela doit s’inscrire dans une surveillance internationale efficace faisant appel à une collaboration jamais vue auparavant dans notre secteur.
Mise à jour canadienne sur les TPNE
Je voudrais maintenant vous dire sur quoi nous nous sommes concentrés à la CCSN en ce qui concerne les technologies dont nous discutons ici aujourd’hui.
Comme vous le constaterez, les efforts que nous déployons font en sorte que non seulement nous sommes prêts à réglementer les TPNE au pays, mais que nous travaillons également avec des partenaires internationaux sur les TPNE pour mettre en place les conditions favorables au changement de paradigme dont je viens de parler.
En tant qu’organisme de réglementation nucléaire du Canada, nous avons travaillé sans relâche pour être fin prêts à réglementer, que ce soit les PRM ou les TPNE.
Il y a quelques années, la CCSN a constaté qu’il lui fallait à la fois comprendre les TPNE et être prête à les réglementer. À cette fin, la CCSN a fondé le Groupe de travail sur les TPNE en 2019.
Ce groupe a pour mandat de rencontrer des représentants de l’industrie et d’autres parties intéressées afin de déterminer ce qu’ils envisagent, si ces nouvelles technologies méritent d’être examinées plus avant et si elles entraîneront une mise à jour du cadre de réglementation.
L’une de nos premières tâches a été de définir ce qui constitue des technologies nouvelles et inédites.
Par perturbatrices, nous entendons les technologies qui remplacent ou reconfigurent radicalement les technologies établies, modifiant de manière significative le mode de fonctionnement des organisations.
Par novatrices, nous entendons l’utilisation de nouvelles technologies ou de stratégies, capacités, produits, services ou processus modifiés.
Les technologies émergentes désignent les technologies en cours d’élaboration ou d’exploration qui seront utilisées dans un avenir proche, autrement dit, au cours des 5 à 10 prochaines années en général.
Maintenant que vous comprenez comment la CCSN définit les TPNE, j’aimerais attirer votre attention sur certains projets que l’équipe des TPNE a réalisés.
TPNE et intelligence artificielle
Il est possible que la TPNE dont on parle le plus, mais aussi celle qu’il faut surtout comprendre et dont il faut surtout s’informer, est l’intelligence artificielle ou IA. Nous travaillons avec un cabinet d’experts‑conseils en nucléaire pour que tous comprennent et interprètent l’IA de la même façon en vue d’examiner le cadre de réglementation de la CCSN et de déterminer s’il convient à la réglementation de l’utilisation de l’IA.
Dans le cadre de ces travaux, nous examinerons les activités de réglementation internationales réalisées à l’heure actuelle afin de traiter les applications de l’IA dans le domaine nucléaire.
Lorsque cet examen sera terminé, en principe d’ici la fin de 2023, un rapport sera mis à la disposition de toutes les parties intéressées sur le site Web public de la CCSN.
En outre, des entreprises ont consulté la CCSN pour discuter de l’utilisation de technologies telles que la réalité virtuelle, la numérisation et d’autres, afin d’établir si et comment on peut en tenir compte dans le cadre de réglementation.
Par exemple, nous collaborons avec une entreprise de l’industrie à un examen du traitement et de la numérisation en langage clair afin de mieux comprendre la rationalisation des processus dans les centrales nucléaires en transférant les procédures, les formulaires et les processus papier dans l’espace numérique.
Les titulaires de permis actuels consultent également la CCSN pour discuter des TPNE qu’ils envisagent, ce qui nous aide à cibler nos efforts sur les technologies qui seront probablement déployées dans le secteur nucléaire. Par exemple, les titulaires de permis se penchent sur l’utilisation de drones pour les inspections, le transport et les activités liées à la sécurité.
Enfin, nous participons avec le Secrétariat du Conseil du Trésor du gouvernement du Canada à un forum permettant aux organismes de réglementation canadiens d’échanger des renseignements et des pratiques exemplaires sur la réglementation des TPNE.
J’espère que cet aperçu de certains des travaux effectués à la CCSN au niveau national pour se préparer aux TPNE réaffirme à vos yeux l’engagement pris par la CCSN quant à sa préparation au chapitre de la réglementation, qu’il s’agisse des PRM, des projets de réfection ou des TNPE.
Sur la scène internationale
Collaboration entre la CCSN, la NRC et l’ONR
Notre collaboration soutenue avec la Commission de réglementation nucléaire des États‑Unis, ou NRC, et l’Office de réglementation nucléaire du Royaume-Uni, ou ONR, demeure un excellent exemple de l’art du possible en matière de leadership trilatéral au sein de la communauté des organismes de réglementation nucléaire.
Notre effort de collaboration dans des domaines tels que la robotique, les jumeaux numériques et autres a permis d’établir des points communs dans nos approches en matière de TPNE. Cette relation et cette collaboration entre les trois équipes chargées des TPNE sont la preuve que les organismes de réglementation peuvent mettre en commun leur expertise et leurs connaissances variées pour aborder des enjeux et des sujets techniques.
À la suite des réunions trilatérales et des diverses discussions sur l’IA, les trois organismes de réglementation ont convenu qu’il était avantageux de créer un livre blanc montrant une méthode unifiée d’évaluation de l’utilisation de l’IA en vue d’orienter les approches de réglementation.
Une fois publié, en principe d’ici la fin de 2023, le livre blanc sera communiqué à l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et d’autres parties intéressées afin de faciliter encore davantage le dialogue sur l’IA. En bref, l’objectif est de lancer la conversation sur l’IA dans le domaine du nucléaire.
Grâce à notre étroite collaboration, à nos examens conjoints et à l’adoption ou à l’adaptation de nos conclusions respectives dans la mesure du possible, nous démontrons qu’un changement de paradigme est possible, du moins entre les organismes de réglementation partageant les mêmes idées et entretenant une relation solide.
Et n’oublions pas la fusion. Nous consultons l’industrie, d’autres organismes de réglementation et l’AIEA pour comprendre et être prêts à réglementer ce qui pourrait être la plus perturbatrice de toutes les TPNE, la technologie de fusion.
Pour être fin prêts, nous avons commandé un rapport de recherche qui nous permettra d’examiner le cadre de réglementation de la CCSN pour vérifier qu’il convient à la réglementation des technologies de fusion; le rapport est disponible sur notre site Web.
Conclusion
Nous sommes à un moment unique de l’histoire de l’humanité.
L’énergie nucléaire, une technologie qui ne produit pas d’émissions et qui est bien réglementée tout au long de son cycle de vie, mais qui est souvent crainte et mal comprise, pourrait contribuer à stopper ou à prévenir d’autres conséquences liées à l’utilisation de sources émettrices et assurer la sécurité énergétique de nombreux pays.
En tant qu’organisme de réglementation, nous sommes là pour veiller à la sûreté des technologies novatrices adoptées dans l’industrie nucléaire.
Mais c’est le rôle de tout organisme de réglementation de surveiller son industrie, de voir où elle se dirige et d’être prêt à remplir son mandat réglementaire de manière efficace. L’équipe des TPNE de la CCSN continue de faire preuve de leadership dans l’établissement des conditions favorables aux TPNE grâce aux efforts qu’elle déploie au Canada et à l’échelle internationale.
Vous avez besoin d’une preuve de l’engagement de la CCSN à cet égard? Le nombre d’employés de la CCSN qui ont consacré du temps à cette conférence en est un très bon indicateur.
Je vous remercie et j’espère que vous profiterez de cette conférence qui promet d’être passionnante et tournée vers l’avenir.
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