Ce que nous avons entendu : Améliorer les mesures de protection des travailleurs pour les travailleurs à la demande

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Liste des acronymes et abréviations

AACCTR
Alliance des artistes canadiens du cinéma, de la télévision et de la radio
AB 5
Assembly Bill 5
ABC
Association des banquiers canadiens
ACC
Alliance canadienne du camionnage
ACP
Association canadienne de la paie
AFAC
Association des femmes autochtones du Canada
AFPC
Alliance de la Fonction publique du Canada
AIMTA
Association internationale des machinistes et des travailleurs et travailleuses de l’aérospatiale
AITC
Association de l’industrie touristique du Canada
ARC
Agence du revenu du Canada
AVD
Association de ventes directes du Canada
CCC
Chambre de commerce du Canada
CNB
Code national du bâtiment
CNLA
Conseil national des lignes aériennes du Canada
Code
Code canadien du travail
CS
Conditions d’utilisation
CTC
Congrès du travail du Canada,
EDSC
Emploi et développement social Canada
EHQ
Engagement Headquarters
ETCOF
Employeurs des transports et communications de régie fédérale – Transport et communications
FCEI
Fédération canadienne de l’entreprise indépendante
FTQ
Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec
HEA
Halifax Employers Association
ILWU
International Longshore and Warehouse Union
LFMO
Women of the Métis Nation – Les Femmes Michif Otipemisiwak
OAN
Organisations autochtones nationales
SAP
Sanctions administratives pécuniaires
SCFP
Alliance de la fonction publique du Canada
SRC
Société Radio-Canada
STTP
Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes
TUAC
Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce

Liste des figures

1. Introduction

Une part croissante de la main-d’œuvre canadienne est constituée de travailleurs à la demande. Le terme « travailleur à la demande » décrit les travailleurs qui concluent des accords de travail de nature plus occasionnelle, comme des contrats à court terme avec des entreprises ou des particuliers pour accomplir des tâches spécifiques et souvent ponctuelles. Le travail à la demande est souvent facilité par les nouvelles technologies, comme les plateformes de travail numériques. Les personnes qui travaillent sur des plateformes numériques sont un sous-ensemble des travailleurs à la demande. Ils accomplissent leurs tâches sur :

  • des plateformes fondées sur le lieu (par exemple, Uber, Lyft, et SkipTheDishes); ou
  • des plateformes de pigistes sur le web (par exemple, Upwork, Freelancer et Amazon Mechanical Turk).

Ces dernières années, l’évolution de la demande de main d’œuvre (en particulier avec la crise financière de 2008 et la pandémie de COVID-19) et l’émergence de nouvelles technologies de travail ont contribué à l’augmentation de la part des travailleurs canadiens qui effectuent du travail à la demande. En effet, cette part des travailleurs a presque doublé ces 15 dernières années, passant de 5,5 % en 2005 à environ 10 % en 2020 (Figure 1). Une étude récente de Statistique Canada a révélé qu'en 2022, environ 250 000 Canadiens ont effectué des travaux à la demande par des plateformes numériques, les services de covoiturage et de livraison sont les types de travail les plus courants.Note de bas de page 1 Étant donné que la compétence fédérale en matière de travail couvre un nombre limité de secteurs, il est attendu que la plupart des travailleurs à la demande relèveront de la compétence provinciale.Note de bas de page 2 Cela dit, on estime qu’il y a environ 41 000 travailleurs à la demande œuvrent actuellement dans des secteurs sous réglementation fédérale.Note de bas de page 3

Figure 1 : Part des travailleurs à la demande au sein de la main d’œuvre canadienne (2005 à 2020)
Figure 1
Texte descriptif de la figure 1
Année Part des travailleurs à la demande en %
2005 5.5%
2009 6.8%
2016 8.2%
2020 10.0%

Source : Jeon, Liu and Ostrovsky (2019); Jeon and Ostrovsky (2020).

Le développement de l’économie à la demande offre un certain nombre de possibilités aux travailleurs, qui peuvent ainsi bénéficier d’une plus grande flexibilité et d’une liberté accrue quant à la manière, au lieu et au moment qu’ils choisissent pour travailler. Toutefois, les travailleurs à la demande peuvent également être confrontés à un certain nombre de difficultés, qui exposent nombre d’entre eux à des conditions de travail difficiles et à des situations économiques précaires.

Conscient de ces difficultés, le premier ministre a chargé le ministre du Travail d’améliorer les protections destinées aux travailleurs à la demande, y compris ceux qui travaillent sur des plateformes numériques.

Afin de recueillir de l’information et des points de vue sur l’économie à la demande au Canada, les fonctionnaires du Programme du travail ont mobilisé, dans le cadre de diverses activités de consultation :

  • des experts en travail à la demande;
  • des universitaires;
  • la population canadienne;
  • des organisations autochtones;
  • des syndicats et organisations de travailleurs, incluant des groupes représentant des travailleurs à la demande, et des employeurs.

Faits saillants des consultationsNote de bas de page 4

  • 530 visites du forum de discussion en ligne;
  • 215 contributions aux questions du sondage éclair en anglais et en français;
  • 6 expériences personnelles;
  • 511 employeurs ont répondu à une enquête;
  • 3 tables rondes avec des partenaires provinciaux et territoriaux;
  • 29 soumissions écritesNote de bas de page 5;
  • 5 tables rondes avec les intervenantsNote de bas de page 6;
  • 4 réunions avec des entreprises de plateformes numériques;
  • 3 réunions avec des organisations autochtones nationales (OAN).

Les fonctionnaires ont effectué des recherches approfondies et mené de nombreux entretiens avec des experts dans les mois qui ont précédé les consultations du public et des intervenants, qui se sont déroulées en 3 phases, en février 2021, juillet 2021 et décembre 2022.

La première phase des consultations visait à mieux comprendre les difficultés et les opportunités que présente le travail à la demande. La deuxième phase consistait à recueillir les commentaires des intervenants sur une série de solutions stratégiques préliminaires visant à améliorer les protections destinées aux travailleurs à la demande. La troisième phase des consultations visait à obtenir des commentaires sur les options politiques qui avaient été accueillies positivement lors de la deuxième phase. Les principaux objectifs du présent rapport sont de résumer ce que nous avons entendu pendant les consultations (section 2) et de décrire les prochaines étapes (section 3).

2. Ce que nous avons entendu

Cette section résume les principales conclusions des consultations auprès d’experts, du public et des parties prenantes. Les commentaires reçus dans le cadre des activités d’engagement sont organisés sous 4 thématiques :

  • les difficultés et les opportunités du travail à la demande;
  • améliorer les protections destinées aux travailleurs à la demande;
  • assurer une transparence et une équité accrues au sein de l’économie à la demande; et
  • améliorer la qualité de l’information pour renforcer l’élaboration des politiques.

Reconnaître les difficultés et les opportunités que présente le travail à la demande

Les différents points de vue recueillis lors des consultations ont permis de mieux comprendre les principales difficultés et opportunités liés au travail dans l’économie à la demande. La présente section du rapport résume ce que nous avons entendu au sujet de ces difficultés et opportunités.

2.1 Difficultés

Les entretiens avec les experts et les consultations avec le public et les intervenants ont révélé un certain nombre de difficultés majeures auxquelles sont confrontés les travailleurs à la demande au Canada, notamment :

  • classification erronée : les travailleurs à la demande présentent souvent un grand nombre de caractéristiques similaires aux employés, mais sont classés comme des entrepreneurs indépendants et ne bénéficient donc pas de protections essentielles, comme la couverture des normes du travail;
  • rémunération faible : les travailleurs à la demande ne bénéficient d’aucune protection en matière de salaire minimum et effectuent de nombreuses heures de travail non rémunérées à la recherche de contrats ou en attente d’une tâche sur des plateformes ou des applications en ligne;
  • risque de retard de paiement ou de non-paiement : en particulier dans le cas des travailleurs à la demande travaillant exclusivement en ligne, le travail peut être accepté ou refusé sans rémunération;
  • horaires et revenus imprévisibles : de nombreux travailleurs à la demande ne sont pas en mesure de prévoir le nombre d’heures qu’ils travailleront au cours d’une journée ou d’une semaine donnée, ce qui rend la stabilité des revenus difficile à assurer;
  • risque de conditions de travail dangereuses : de nombreux travailleurs à la demande sont seuls responsables d’assurer leur propre santé et sécurité au travail;
  • accès limité aux mécanismes de résolution des litiges : lorsqu’ils sont confrontés à des décisions défavorables de la part des employeurs ou des plateformes de travail numérique (par exemple, un non-paiement, des évaluations en ligne inexactes ou la désactivation des plateformes), les travailleurs à la demande ont difficilement accès à des mécanismes efficaces de règlement des litiges, hormis les recours coûteux offerts par les tribunaux ou l’arbitrage privé. Ils peuvent également ne pas connaître leurs droits et ne pas savoir comment déposer une plainte par l’entremise du Programme du travail.

Les travailleurs indépendants confrontés à au moins l’une de ces difficultés peuvent se retrouver dans une situation économique précaire et vulnérable. Dans les commentaires que nous avons reçus des travailleurs à la demande lors des consultations publiques réalisées en ligne, la frustration à l’égard des conditions de travail sur les plateformes numériques de l’économie à la demande était un thème récurrent. Certains travailleurs ont qualifié le travail sur les plateformes numériques d’exploitation, expliquant que les entreprises profitent largement du travail de leur personnel sous contrat, tout en leur offrant peu d’avantages ou de protection des travailleurs.

Bien que toutes les difficultés recensées soient importantes et méritent une attention particulière, les représentants du travail (syndicats, groupes de défense des droits des travailleurs et travailleurs à la demande) considèrent que les questions liées à la classification des emplois, en particulier les classifications erronées, sont à l’origine de bon nombre des problèmes rencontrés par les travailleurs à la demande. Les classifications erronées et d’autres difficultés seront examinées dans les prochaines sections du présent rapport, y compris les solutions proposées par les intervenants pour y remédier.

« Les employeurs de l’économie du travail à la demande perturbent les normes du travail en vigueur au Canada; ils profitent de la possibilité de classer les travailleurs comme des entrepreneurs indépendants pour réaliser des bénéfices et se dégager de toute responsabilité envers les travailleurs. Cette exploitation est présente dans tous les aspects de l’expérience quotidienne des travailleurs à la demande. »

Soumission écrite de Gig Workers United, mai 2021.

Tout en reconnaissant que certains travailleurs à la demande connaissent des situations de travail difficiles, les représentants des employeurs ont exprimé leurs réserves quant au fait de qualifier toutes les formes de travail à la demande de précaires. Dans le cadre de soumissions écrites et lors de tables rondes, ils ont fourni des exemples de travailleurs pouvant correspondre à la définition conventionnelle de « travailleur à la demande », mais qui ressemblent davantage à des entrepreneurs établis, n’ayant pas besoin d’une meilleure protection des travailleurs. C’est selon eux le cas de la plupart des :

  • propriétaires exploitants du secteur du transport routier;
  • spécialistes des technologies de l’information du secteur bancaire;
  • travailleurs des ports sur appel du secteur du transport maritime.

« Les propriétaires exploitants ont réalisé des investissements considérables dans leur entreprise, bon nombre de semi-remorques coûtant de 125 000 $ à plus de 200 000 $. »

Soumission écrite de l’Alliance canadienne du camionnage, avril 2021.

« Les travailleurs à la demande [du secteur du transport maritime] ne sont pas différents de notre main d’œuvre syndiquée, qui ne bénéficie d’aucune garantie d’emploi ni d’heures de travail fixes, mais dont le salaire annuel moyen est tout de même de l’ordre de 100 000 $, et qui bénéficie depuis très longtemps de protections négociées collectivement. »

Soumission écrite de l’Halifax Employers Association, avril 2021.

Les employeurs et leurs représentants ont également souligné que les formes de travail précaires se retrouvent principalement dans les secteurs sous réglementation provinciale, et non dans les secteurs de compétence fédérale. En revanche, les groupes syndicaux ont fait part de nombreux témoignages de travailleurs à la demande confrontés aux mêmes difficultés que celles rencontrées dans le cadre de la prestation de services aux entreprises sous réglementation fédérale. En conjuguant les 2 points de vue, on constate que le travail à la demande est diversifié. Certains travailleurs sont confrontés à de graves difficultés, tandis que d’autres sont en mesure de tirer parti de leur travail pour obtenir des résultats positifs.

« Pour certains groupes, il s’agit d’un changement très positif. Les cols blancs, en particulier, ont bénéficié de la possibilité d’acquérir des compétences spécialisées recherchées et d’être payés au prix fort pour des travaux à court terme ou à la demande. En revanche, pour d’autres, les résultats n’ont pas été positifs – c’est particulièrement vrai pour les travaux qui ne nécessitent pas de spécialisation recherchée. »

Participant à une consultation publique en ligne, mai 2021.

Opportunités

2.2 Plus de flexibilité et de liberté au travail

La flexibilité et la liberté accrues par rapport aux horaires et aux lieux de travail traditionnels sont les avantages les plus fréquemment cités du travail au sein de l’économie à la demande. Un grand nombre de travailleurs à la demande apprécient d’avoir plus de contrôle sur leur mode de travail ainsi que sur le moment et le lieu où ils travaillent, et de pouvoir choisir à qui ils fournissent leurs services. Compte tenu de ces avantages, de nombreux participants au processus de consultation ont souligné que toute nouvelle législation ou autre intervention visant à renforcer la protection des travailleurs à la demande devra veiller à préserver la flexibilité qui attire de nombreuses personnes vers ce type de travail.

Cependant, si un gain de flexibilité et de contrôle sur le travail peut être un avantage réel pour certains travailleurs à la demande, d’autres ont décrit la liberté offerte par l’économie à la demande comme une sorte d’illusion. De nombreux travailleurs des plateformes se sentent fortement encadrés par leurs employeurs. Par exemple, ils ont indiqué être fortement encouragés à travailler à des moments précis de la journée, lorsque la demande de services augmente. De nombreux participants aux consultations publiques en ligne ont qualifié d’« arnaque » la flexibilité de l’économie à la demande, en particulier lorsqu’ils passent la majeure partie de leur temps de travail non rémunéré à chercher ou à attendre la prochaine tâche ou le prochain emploi.

« Les travailleurs à la demande s’accordent à dire que la “flexibilité du travail” est ce qui les attire. Il s’agit du principal langage de l’économie à la demande. Ce que nous apprenons après avoir commencé à travailler est que la “flexibilité du travail” dans l’économie à la demande signifie que ce sont les travailleurs qui se montrent flexibles, afin de répondre aux besoins des applications. La “flexibilité” que les petits employeurs annoncent n’est pas ce que les travailleurs à la demande obtiennent. »

« Nous pouvons choisir les jours pendant lesquels nous travaillons, mais pas les périodes où le travail est disponible, si nous voulons gagner un revenu, nous devons travailler lorsque les applications sont fréquentées, ce qui n’est pas nécessairement le moment où il est bénéfique pour nous d’aller travailler. »

Soumission écrite de Gig Workers United, mai 2021.

Une main d’œuvre flexible permet aux employeurs d’adapter leur personnel à l’évolution de la demande des clients et d’entreprendre des tâches ou des projets ponctuels sans la rigidité et les coûts souvent plus élevés de l’établissement et de la gestion d’une relation employeur-employé traditionnelle. Dans une enquête en ligne administrée par le Programme du travail, les employeurs sous réglementation fédérale qui ont déclaré avoir embauché des entrepreneurs indépendants, y compris des travailleurs à la demande, ont cité la flexibilité et les incitatifs économiques (par exemple, la réduction des coûts) comme étant les principaux avantages d’une main d’œuvre indépendante (figure 2).

Figure 2 : Principal avantage perçu par l’employeur d’embaucher des entrepreneurs indépendants
Figure 1
Description de la figure 2
Principal avantage Part des réponses en %
Flexibilité 28%
Incitatif économique 28%
Lacunes en matière de compétences 18%
Pénurie de main d’œuvre 14%
Autre 6%
Productivité 5%

Source : Enquête en ligne auprès des employeurs, consultations sur l’engagement du mandat sur le travail à la demande.
Remarque : 257 réponses valides

En ce qui concerne l’avantage de la flexibilité (28 % des réponses), les employeurs ont déclaré que l’embauche de travailleurs à la demande leur permet d’adapter rapidement la taille de leur effectif à l’évolution de la demande des clients. Quant à la catégorie « incitatif économique » (également 28 % des réponses), ils ont déclaré que l’embauche de travailleurs à la demande leur permet d’acquérir des compétences très spécialisées pour des projets spécifiques à court terme, sans avoir à garder les personnes possédant ces compétences au sein de leur effectif à temps plein.

« Il arrive que nous ayons besoin d’accomplir pour des clients des tâches particulières qui sortent du cadre de nos fonctions habituelles. Pendant ces périodes, nous faisons appel à un spécialiste pour effectuer les travaux nécessaires. Le principal avantage est simple : nous pouvons terminer le travail sans compter de spécialiste au sein du personnel 5 jours par semaine. Nous aimerions beaucoup embaucher des personnes spécialisées dans tous les domaines, mais cela serait trop coûteux pour notre petite entreprise. »

Répondant à l’enquête auprès des employeurs en ligne, avril 2021.

« [Notre] entreprise n’est pas tenue de verser des avantages sociaux ou des parts patronales du Régime de pensions du Canada et de l’assurance emploi pour les travailleurs indépendants. »

Répondant à l’enquête auprès des employeurs en ligne, avril 2021.

Cependant, de nombreux employeurs nous ont également dit que l’embauche d’entrepreneurs et de travailleurs à la demande présentait un certain nombre de difficultés. Les problèmes les plus courants auxquels sont confrontées les entreprises qui embauchent ce type de main d’œuvre sont le manque de disponibilité des travailleurs et le manque de contrôle des employeurs sur leur travail et leurs horaires (figure 3).

Figure 3 : Résultats d’enquête sur les inconvénients pour les employeurs d’embaucher des entrepreneurs indépendants
Figure 1
Description de la figure 3
Principales difficultés Part des réponses en %
Disponibilité des travailleurs 35%
Degré de contrôle des travailleurs 33%
Fardeau administratif 22%
Coûts 6%
Autre 4%

Source : Enquête auprès des employeurs en ligne, consultations sur l’engagement du mandat sur le travail à la demande
Remarque : 165 réponses valides

La possibilité d’embaucher temporairement et à court terme des travailleurs indépendants à la demande présente des avantages pour les employeurs, toutefois de nombreuses entreprises ont du mal à trouver des travailleurs disponibles lorsqu’elles en ont besoin (35 % des employeurs ont déclaré que la disponibilité des travailleurs était la principale difficulté à surmonter pour travailler avec des travailleurs indépendants). Même lorsque les employeurs parviennent à embaucher des travailleurs à la demande, beaucoup d’entre eux (33 %) déclarent que le principal problème rencontré avec ce type de main d’œuvre est le manque de contrôle sur le moment, le lieu et la manière dont les travailleurs à la demande fournissent leurs services.

« Parfois, le coût du travail distribué à un entrepreneur indépendant externe peut être beaucoup plus élevé que si un employé interne effectuait le travail, de plus, les horaires peuvent parfois ne pas s’aligner parce que nous ne contrôlons pas le moment précis où l’entrepreneur indépendant externe est disponible, car il travaille selon un horaire complètement différent de celui de notre personnel interne régulier. »

Répondant à l’enquête auprès des employeurs en ligne, avril 2021.

Si l’on tient compte du point de vue des travailleurs et des employeurs, il est clair que la flexibilité et la liberté accrues de l’économie à la demande peuvent être bénéfiques pour certains travailleurs et certaines entreprises, tout en constituant une difficulté pour d’autres.

2.3 Meilleures opportunités de travail

De nombreux intervenants et experts représentant des travailleurs et des employeurs, nous ont dit que l’économie à la demande offrait à un grand nombre de travailleurs la possibilité d’entrer sur le marché du travail et d’accumuler des expériences professionnelles significatives. C’est le cas, par exemple, des jeunes travailleurs qui commencent leur carrière. C’est également le cas de nombreux autres groupes qui peuvent se trouver exclus du marché du travail traditionnel, par exemple :

  • les Autochtones;
  • les personnes racisées;
  • les personnes en situation de handicap;
  • les femmes;
  • les nouveaux arrivants;
  • les personnes faisant partie des minorités linguistiques.

De nombreux travailleurs marginalisés peuvent être confrontés à des obstacles sur le marché du travail qui peuvent être moins importants dans l’économie à la demande, comme les exigences linguistiques et géographiques, et les horaires rigides pour les personnes ayant des responsabilités de soins.

Bien qu’un meilleur accès aux opportunités de travail ait souvent été cité comme un avantage clé de l’économie à la demande, les intervenants ont également souligné que le travail à la demande n’est pas accessible à tous les travailleurs intéressés. En effet, le travail au sein de l’économie à la demande repose en grande partie sur les nouvelles technologies de l’information (par exemple, les applications pour téléphone intelligent et les plateformes numériques en ligne), ce qui nécessite un certain niveau de connaissances techniques. Nous avons également entendu que de nombreux travailleurs, particulièrement des individus marginalisés, n’entrent pas dans l’économie à la demande par choix mais en réponse à un manque d’opportunités de travail plus standard ou pour supplémenter les bas salaires gagnés dans des formes d’emploi plus traditionnelles.

« Le travail à la demande peut offrir des possibilités d’entrer sur un marché du travail autrement inaccessible, de gagner sa vie et de répondre à des besoins économiques immédiats, ce qui pourrait être intéressant pour les femmes inuites qui se sentent exclues de l’Inuit Nunangat ou qui ont du mal à s’adapter et à réussir dans les centres urbains. »

Soumission écrite de Pauktuutit Inuit women of Canada, mars 2020.

« […] le fait que de nombreux travaux à la demande puissent être effectués à distance signifie que les femmes autochtones sont moins contraintes de s’éloigner de leur famille et de leur communauté. Cependant, le travail à la demande peut ne pas être accessible à tous, en particulier aux personnes qui n’ont pas accès aux technologies nécessaires pour s’engager dans ce type de travail ou qui n’en ont pas une connaissance pratique. »

Soumission écrite de l’Association des femmes autochtones du Canada, avril 2021.

« Le choix de se lancer dans le travail à la demande est souvent contraint, car de nombreux travailleurs – en particulier ceux qui sont marginalisés, notamment les travailleurs racisés, les femmes, les jeunes et les nouveaux arrivants – ont peu d’options pour gagner un salaire décent et saisiront toute occasion de générer un revenu qui se présente à eux. »

Soumission écrite d'Unifor, mai 2021.

Bilan des difficultés et des opportunités

Dans l’ensemble, les commentaires recueillis lors des consultations montrent que le monde du travail à la demande est complexe et comporte à la fois des difficultés et des opportunités pour les travailleurs et les employeurs. Ce qui peut constituer une difficulté pour certains travailleurs ou employeurs (par exemple, la flexibilité des modalités et des horaires de travail) peut être un avantage pour d’autres. Si le travail à la demande peut offrir des possibilités intéressantes à certains travailleurs, d’autres se sentent condamnés à participer à l’économie du travail à la demande en raison des perspectives limitées qu’offre le marché du travail traditionnel.

Pour ce qui est de la rétroaction sur les politiques, le processus de consultation a mis en évidence la nécessité d’une intervention prudente dans le domaine du travail à la demande. L’objectif est de permettre au gouvernement de mettre en place de meilleures protections de la main d’œuvre, afin de remédier aux principales difficultés rencontrées par les travailleurs à la demande, sans pour autant limiter les opportunités offertes par l’économie à la demande.

Améliorer l’accès aux mesures de protection des normes du travail

La Partie III du Code canadien du travail (Code) établit des normes du travail minimales pour les milieux de travail du secteur privé sous réglementations fédérale, notamment :

  • le salaire minimum;
  • les congés avec protection de l’emploi;
  • les vacances;
  • les horaires de travail.

Toutes les protections de la Partie III sont accordées exclusivement aux employés, tandis que les travailleurs qui ne sont pas considérés comme des employés en sont exclus. En l’absence de définition claire des catégories d’emploi, le statut d’un travailleur peut correspondre à celui d’un employé (ayant droit à des protections) ou à celui d’un entrepreneur indépendant (n’ayant pas droit à des protections). Cette question est traitée par le personnel chargé de l’application de la loi et les tribunaux au cas par cas, sur la base des critères établis dans le droit privé des provinces (droit civil et common law). En règle générale, les travailleurs à la demande sont considérés comme des entrepreneurs indépendants par les employeurs et les entreprises qui les embauchent. En tant qu’entrepreneurs indépendants, ils ne sont pas couverts par les protections des travailleurs en vertu de la Partie III du Code. Toutefois, certains travailleurs à la demande se trouvent dans des situations de travail qui ressemblent à une relation employeur-employé.

Cette partie du rapport traite de ce que nous avons entendu au cours du processus de consultation sur la nécessité de définir plus clairement l’emploi dans la Partie III, la mesure dans laquelle les classifications erronées se produisent au niveau des secteurs de compétence fédérale, les approches visant à étendre les protections des travailleurs aux travailleurs à la demande et la question de la compétence dans le contexte de l’économie à la demande.

Clarification des classifications d’emploi

Plusieurs intervenants nous ont dit que les classifications d’emploi devaient être clarifiées afin que les travailleurs et les employeurs puissent les appliquer. Plusieurs ont suggéré que de nouvelles définitions des statuts d’emploi soient introduites dans la Partie III du Code pour chacune des classifications d’emploi suivantes :

  • employé;
  • contracteur dependant (catégorie intermédiaire existante sous la partie I du Code);
  • entrepreneur indépendant.

Les participants ont souligné que la différence entre les employés (qui bénéficient de toutes les protections prévues par le Code) et les entrepreneurs indépendants (qui ne bénéficient pratiquement d’aucune des protections prévues par le Code) n’est pas clairement définie dans la Partie III, ce qui crée une ambiguïté pour les travailleurs et les employeurs.

Les syndicats et les groupes de travailleurs ont appuyé une recommandation du groupe d’experts sur les normes de travail fédérales modernes visant à introduire les éléments suivants dans la Partie III du Code :

  • une présomption de statut d’employé;
  • définitions simplifiées de l’emploi;
  • un test pour établir la classification de l’emploi.

Ils ont fait valoir que ce changement améliorerait l’accès des travailleurs à la demande aux droits du travail qui leur sont dus. Un représentant du travail a souligné que la détermination du statut d’emploi par le personnel de l’application de la loi du Programme du travail et les tribunaux au Canada nécessite des tests compliqués et multifactoriels qui imposent aux travailleurs de contester eux-mêmes leur statut alors que la plupart des travailleurs indépendants n’ont pas les connaissances ou les ressources nécessaires pour entreprendre cette tâche.

« Le test permettant de déterminer une relation employeur employé devrait être clarifié et simplifié pour correspondre aux conditions de travail modernes, et la loi devrait être appliquée. »

Soumission écrite de Goldblatt Partners, avril 2021.

Pour ajouter à la complexité des classifications d’emploi, certaines organisations d’employeurs et certains organisations de travailleurs ont souligné que les travailleurs à la demande peuvent être classés dans différentes catégories d’emploi selon le ministère ou l’organisme fédéral avec lequel ils traitent (comme l’Agence du revenu du Canada et Emploi et Développement social Canada). Ils suggèrent que l’harmonisation des définitions d’emploi dans les lois fédérales pourrait offrir clarté et cohérence aux travailleurs et aux entreprises

« Il convient d’adopter une approche gouvernementale globale pour proposer une définition solide de ce que sont les (entrepreneurs indépendants), car les petites entreprises ne savent même pas à qui s’adresser pour obtenir ces renseignements. »

Participant à la table ronde des employeurs, le 6 avril 2021.

Bien qu’il n’y ait pas eu d’opposition majeure à la clarification de la classification des emplois, les organisations d’employeurs ont mis en garde contre l’introduction d’une approche générale de la définition des emplois qui pourrait entraîner la reclassification de véritables entrepreneurs indépendants comme employés. Ils ont fait valoir que cette démarche pourrait avoir une incidence négative sur les revenus des travailleurs qui bénéficient de la classification en tant qu’entrepreneurs indépendants. Comme indiqué dans la section précédente, ils ont souligné que les travailleurs indépendants sous réglementation fédérale gagnent souvent des revenus élevés, bénéficient d’horaires de travail flexibles et d’avantages fiscaux, et possèdent des compétences recherchées (par exemple, les professionnels des technologies de l’information et les cammioneurs), ce qui leur confère un fort pouvoir de négociation.

« Si nous devons concevoir une protection, nous ne pouvons pas imaginer qu’une approche uniforme puisse fonctionner dans ce domaine. Une telle approche serait très vaste et des personnes de tous horizons pourraient être touchées par des conséquences involontaires. Nous ne voulons pas nuire à la flexibilité avec laquelle certains travailleurs choisissent de recevoir du travail. »

Participant à la table ronde des employeurs, le 29 juin 2021.

Les intervenants du secteur du transport routier étaient particulièrement préoccupés par le fait que l’introduction de définitions des emplois pourrait créer plus de confusion que de clarté pour les camionneurs. Ils ont expliqué que les camionneurs propriétaires-exploitants (par exemple, les chauffeurs qui possèdent ou louent leur véhicule et opèrent en tant qu’entreprises constituées en société) pourraient correspondre à la définition de « travailleur à la demande » étant donné qu’ils travaillent sur une base contractuelle et qu’ils établissent leur propre emploi du temps de façon autonome. Ils ont toutefois souligné que les propriétaires-exploitants entretiennent de véritables relations d’entreprise à entreprise, desquelles ils tirent des avantages économiques et sociaux (par exemple, des revenus élevés et une flexibilité). Ils ont suggéré que les propriétaires exploitants soient exemptés de toute nouvelle politique fédérale liée aux définitions des emplois.

« Lorsque nous pensons aux “travailleurs à la demande”, nous pensons à des emplois à court terme, sans sécurité, sans garantie quant au moment et à la manière dont ils seront payés [mais] les propriétaires-exploitants […] voient comment cela fonctionne et ils estiment que cette pratique est positive et qu’elle ne définit pas l’emploi. C’est la longévité qui définit l’emploi. Les plaintes des travailleurs à la demande sont légitimes, mais cela ne se produit pas dans notre secteur. Les relations à long terme fonctionnent dans notre secteur. La longévité démontre que les choses fonctionnent. »

Participant à la table ronde des employeurs, le 30 juin 2021.

Classification erronée

Plusieurs experts nous ont dit que les classifications erronées étaient un problème récurrent dans l’économie à la demande. Des classifications erronées se produisent lorsque des travailleurs à la demande sont traités comme des entrepreneurs indépendants par leur employeur, alors que leur relation d’emploi s’apparente davantage à une relation contractuelle ou d’entreprise à entreprise. Les classifications erronées peuvent être intentionnelles ou involontaires, mais le résultat est le même : elles privent les travailleurs de la protection des normes du travail et permettent aux employeurs de se soustraire à leurs responsabilités fiscales (comme les cotisations à l’assurance emploi et au Régime de pensions du Canada). Cela dit, de nombreux travailleurs à la demande sont considérés à juste titre comme des entrepreneurs indépendants et bénéficient des libertés et des avantages fiscaux associés à ce statut.

Sept syndicats ont présenté des soumissions écrites suggérant que les classifications erronées permettent aux employeurs d’obtenir un avantage concurrentiel en échappant aux protections des travailleurs et aux responsabilités des employeurs. Un syndicat a suggéré que les plateformes numériques classifient intentionnellement les travailleurs de façon erronée pour réduire les coûts, en affirmant que les travailleurs ne devraient pas avoir à échanger leurs protections pour bénéficier d’une plus grande flexibilité. Un syndicat et un cabinet d’avocats ont souligné que les classifications erronées constituent un problème tant pour les travailleurs à la demande (qui se voient refuser les protections auxquelles ils devraient avoir droit) que pour le public (qui supporte le coût des classifications erronées par le biais de pertes fiscales). Les syndicats et les organisations de travailleurs ont également souligné que les communautés marginalisées sont plus susceptibles de se voir offrir des emplois précaires, y compris des emplois à la demande, ce qui signifie que la correction des classifications erronées permettrait de mieux protéger certains des travailleurs les plus vulnérables. Bien que l’étendue des cas de classification erronée dans la sphère de compétence fédérale ne soit pas claire, les experts s’attendent à ce que les problèmes de classification erronée se multiplient avec l’essor de l’économie à la demande.

« Les femmes, les nouveaux arrivants au Canada et les personnes racisées sont particulièrement susceptibles de travailler au sein de l’économie à la demande; cela signifie que la résolution de la classification erronée des employés et la garantie que les travailleurs à la demande dont la classification est erronée ont accès aux droits et aux protections dont jouissent tous les employés sont des questions fondamentales d’équité entre les sexes et les races. »

Soumission écrite du Congrès du travail du Canada, avril 2021.

En 2018, d’importantes modifications législatives ont été apportées à la Partie III du Code, notamment l’introduction d’une interdiction des classifications erronées, qui est entrée en vigueur en janvier 2021. Cette disposition stipule qu’il est interdit aux employeurs de traiter un employé comme s’il était un entrepreneur indépendant pour se soustraire à leurs droits et obligations en vertu de la Partie III. Tout employeur qui est jugé avoir délibérément classé de façon erronée un employé peut faire l’objet d’une sanction administrative pécuniaire pour avoir agi de la sorte. Le fardeau de la preuve incombe également à l’employeur de démontrer qu’une personne n’est pas son employé si cette personne dépose une plainte en vertu de la Partie III.

Certains intervenants du travail ont critiqué ces nouvelles dispositions, estimant qu’elles font peser sur les travailleurs vulnérables la charge de déposer des plaintes. Un travailleur à la demande a souligné que le fait de placer la responsabilité sur les travailleurs est problématique, car « les travailleurs à la demande n’ont pas les ressources ou l’énergie nécessaires pour régler la classification erronée par eux-mêmes. » Les organisations de travailleurs nous ont dit que les travailleurs, et en particulier les travailleurs marginalisés, ne sont pas susceptibles de se plaindre de la classification de leur emploi, car ils ne sont pas toujours bien informés des procédures administratives à leur disposition et peuvent craindre des représailles de la part de leur employeur. Les organisations de travailleurs et les travailleurs à la demande ont donc plaidé pour une présomption plus large du statut d’employé, qui s’appliquerait même lorsqu’un travailleur ne dépose pas de plainte. En outre, un groupe inuit a indiqué qu’un processus fondé sur les plaintes ne reflétait pas les valeurs de sa communauté et ne serait pas particulièrement utile aux travailleurs à la demande inuits.

« Il peut être difficile de comprendre la dépendance économique dans la dynamique des institutions et des structures de pouvoir coloniales, et les Inuits peuvent ne pas avoir les connaissances, les ressources et le désir de poursuivre une telle classification, en particulier au détriment d’une source vitale de revenus. Le fait de suivre cette voie pourrait être perçu comme étant en contradiction avec les valeurs sociétales inuites, en particulier Aajiiqatigiinniq (prise de décision par la discussion et le consensus) et Piliriqatigiinniq/Ikajuqtigiinniq (travailler ensemble à une cause commune). »

Soumission écrite de Pauktuutit, le 30 avril 2021.

Certaines organisations d’employeurs ont remis en question l’ampleur des classifications erronées dans le secteur privé sous réglementation fédérale, suggérant que les données sur l’économie à la demande au Canada sont très limitées. Une organisation d’employeurs a fait valoir que la classification erronée n’était pas un problème répandu et qu’elle était déjà réglée par l’interdiction de la classification erronée qui est entrée en vigueur en janvier 2021. En outre, plusieurs représentants des employeurs ont affirmé que de nouvelles réglementations pourraient avoir un effet négatif sur les travailleurs à la demande en réduisant leurs opportunités d’emploi si les entreprises choisissent d’embaucher des travailleurs d’autres juridictions pour maintenir leur modèle opérationnel existant.

« Le Code prévoit déjà des protections relatives aux heures de travail et aux heures supplémentaires […] et il existe déjà des protections contre les mauvaises qualifications [classification erronée]. Les personnes devraient pouvoir décider de la manière dont elles veulent travailler et être en mesure de choisir la nature de la relation qu’elles choisissent d’établir. »

Participant à la table ronde des employeurs, le 29 juin 2021.

Cela dit, certains intervenants des employeurs ont convenu qu’un exemple clair de classification erronée dans les secteurs de compétence fédérale se produit dans le secteur du transport routier avec le modèle « Chauffeur inc. ». Il s’agit d’un modèle selon lequel les travailleurs qui ne possèdent pas ou ne louent pas leur propre véhicule, s’incorporent eux-mêmes en tant qu’entreprises de services personnels. Alors que l'approche du Programme du travail en matière de classification erronée comporte plusieurs facettes et tient compte de plusieurs dynamiques d'une relation employeur-employé au cas par cas, de nombreux représentants du secteur ont indiqué au cours des consultations que ce modèle est utilisé pour que les employeurs puissent prétendre que leurs travailleurs sont indépendants et éviter toute obligation en vertu du Code et d’autres lois fédérales, comme la Loi sur l’assurance emploi.

Les intervenants du secteur ont souligné que cette situation est complexe et ne représente qu’un fragment de l’industrie du transport routier. Ils ont émis une mise en garde contre les nouvelles mesures visant à remédier aux classifications erronées dans le secteur du transport routier, car elles pourraient avoir des conséquences négatives imprévues sur les véritables propriétaires exploitants. Ils ont également déconseillé au gouvernement fédéral de compliquer la situation en utilisant le modèle « Chauffeur inc. » comme preuve que la classification erronée est répandue dans les secteurs de compétence fédérale. Enfin, ils ont également déconseillé de créer une catégorie d’emploi supplémentaire dans la Partie III du Code. Par exemple, la catégorie des entrepreneurs dépendants qui figure dans la Partie I, en tant que troisième statut d’emploi, pourrait contribuer à d’autres cas de classification erronée en rendant le système de classification existant encore plus complexe.

« L’ACC (Alliance canadienne du camionnage) craint que dans les tentatives d’EDSC de trouver une population de travailleurs sous réglementation fédérale correspondant à cette initiative, le secteur du transport routier ne se retrouve pris dans une conversation qui ne s’applique pas à cette industrie. EDSC ne ferait que compliquer un problème déjà complexe du secteur du transport routier. »

Soumission écrite de l’Alliance canadienne du camionnage, avril 2021.

2.4 Meilleure couverture pour les travailleurs à la demande

Tout au long de nos consultations, les intervenants et les experts ont affirmé que l’un des principaux problèmes auxquels sont confrontés les travailleurs à la demande est leur manque d’accès aux protections sociales et aux protections des travailleurs. Toutefois, les avis divergent considérablement quant à la raison pour laquelle les travailleurs à la demande n’y ont pas accès. Comme évoqué, certaines personnes pensent que le problème réside entièrement dans les classifications erronées et que la loi et les pratiques d’application devraient être renforcées et précisées pour les détecter et les corriger. Par ailleurs, plusieurs experts, universitaires et intervenants du travail estiment que les lois du travail sont trop étroites pour s’appliquer aux travailleurs à la demande et devraient être élargies afin d’étendre les protections aux travailleurs qui ne correspondent pas à la définition traditionnelle d’un « employé ». Plusieurs parties prenantes ont souligné l'importance d'une application plus proactive pour agir contre les employeurs qui sont susceptibles de mal classer leurs travailleurs.

L’adoption par la Californie du « Assembly Bill 5 » (AB 5) et l’adoption du test « ABC » étaient au cœur des préoccupations des syndicats, des experts et des cabinets d’avocats. L’un des experts a déclaré qu’il s’agissait « de la mesure législative la plus importante pour renforcer la protection des travailleurs ».

L’AB 5 est entré en vigueur le 1er janvier 2020 et a codifié un critère d’emploi connu sous le nom de test « ABC ». Selon ce test, un travailleur est présumé être un employé et non un entrepreneur indépendant, à moins que l’entité qui l’embauche puisse démontrer que le travailleur embauché remplit les 3 conditions suivantes :

  1. le travailleur n’est ni contrôlé ni dirigé par l’entité recruteuse dans l’exécution du travail, tant aux termes du contrat que dans les faits;
  2. le travailleur exécute un travail qui ne s’inscrit pas dans le cours normal des activités de l’entité recruteuse;
  3. le travailleur exerce habituellement de façon indépendante un métier, une profession ou une activité de même nature que le travail effectué.

Si la relation du travailleur avec l’employeur ne répond à aucun de ces critères, le travailleur est considéré comme un employé et a droit aux protections de la législation californienne du travail.

Neuf syndicats et 1 cabinet d’avocats ont suggéré au gouvernement d’adopter une approche similaire en suivant la recommandation du groupe d’experts sur les normes du travail fédérales modernes d’introduire un critère d’emploi et de définir les termes « employé », « entrepreneur dépendant » et « entrepreneur indépendant » dans la Partie III du Code. La plupart des syndicats ont suggéré que les entrepreneurs dépendants aient droit aux mêmes protections que les employés (comme dans la Partie I) et ont mis en garde contre une catégorie distincte pour les entrepreneurs dépendants, car elle pourrait permettre aux employeurs de faire passer les travailleurs dans une classification moins protégée et créer une ambiguïté supplémentaire.

Un cabinet d'avocats est allé plus loin en suggérant qu'un critère d'emploi harmonisé s'applique à la loi sur l'assurance-emploi, au Régime de pensions du Canada et à toutes les parties du Code afin de simplifier et de clarifier les statuts d'emploi dans le cadre de ces lois.

« Les travailleuses et travailleurs à la demande devraient être classés comme tout autre employé et bénéficier des mêmes droits et privilèges que les employées et employés visés par le code du travail. La mise en place d’une bonne politique permettrait également aux travailleuses et travailleurs de l’économie des plateformes numériques d’avoir accès à l’assurance-emploi, aux jours fériés, au congé de maternité, aux protections contre le vol de salaire, à une protection contre les mesures disciplinaires et les licenciements injustes, à une protection contre le harcèlement et les mauvais traitements, ainsi qu’à d’autres dispositions considérées comme des normes minimales pour les employées et employés. »

Soumission écrite du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, avril 2021.

A l’inverse, les employeurs ont avancé plusieurs arguments contre un élargissement de l’application du Code. Tout d’abord, certains d’entre eux ont suggéré que nous ne disposons pas de suffisamment de preuves que le travail à la demande est assez répandu dans les secteurs réglementés par le gouvernement fédéral pour justifier des changements révolutionnaires tels que la modification de l’application des lois fédérales. En effet, un employeur a déclaré qu’il avait « du mal à comprendre quel était le problème lié au travail à la demande dans le secteur privé sous réglementation fédérale ». Deuxièmement, les organisations d’employeurs ont fait valoir que le travail à la demande ne devrait pas être présenté comme étant « toujours précaire ou nécessairement négatif ». En particulier dans les secteurs sous réglementation fédérale, les employeurs ont noté que les salaires sont relativement élevés et que les travailleurs préfèrent la flexibilité qu’offre le travail à la demande. D’autres employeurs ont suggéré que les problèmes découlent davantage du fait que les employeurs ne comprennent pas comment appliquer la loi, plutôt que de la loi elle-même, et ont suggéré que le Programme du travail offre plus de possibilités d’apprentissage aux employeurs.

2.5 Questions de compétence

Certains participants aux consultations n’ont pas bien compris quels types de travail à la demande seraient touchés par l’apport d’éventuelles modifications au Code, étant donné que la plupart des travailleurs à la demande relèvent de la compétence provinciale en raison de la nature de leur travail. Par exemple :

  • livraison locale;
  • covoiturage;
  • services professionnels.

Cela dit, de nombreux représentants syndicaux ont fait valoir que le gouvernement fédéral devrait faire preuve de leadership en développant des protections pour les travailleurs à la demande afin de promouvoir des actions similaires dans d'autres juridictions. Reconnaissant que les gouvernements provinciaux et territoriaux ont une plus grande autorité sur le travail à la demande, un représentant syndical a soutenu que le gouvernement fédéral devrait être « considéré comme fixant la barre des normes du travail au Canada ».

Les organisations autochtones ont expliqué que les travailleurs à la demande ne savent généralement pas de quelle compétence relève leur travail et, par conséquent, quelle est la législation qui s’applique. Une organisation a suggéré au gouvernement de trouver un moyen de s’assurer que les protections des travailleurs à la demande s’appliquent à tous les secteurs, dans toutes les provinces et tous les territoires, afin que les travailleurs autochtones puissent réellement bénéficier de ces protections. Elle a cité le Code national du bâtiment (CNB) comme exemple de cas dans lequel le gouvernement fédéral a établi un modèle national et les provinces et territoires l’ont adopté, ou ont complété leur propre réglementation du travail sur la base du CNB. Une autre organisation autochtone a suggéré qu’un revenu de subsistance garanti représenterait un système de bien être socio-économique accessible à tous et essentiellement égalitaire. Cela pourrait permettre de relever de nombreux défis auxquels sont confrontés les travailleurs à la demande, en particulier ceux qui appartiennent à de multiples groupes marginalisés croisés.

« Lorsque la province, le gouvernement fédéral et les municipalités ne travaillent pas ensemble, nous, les Autochtones, sommes pris dans un étau. »

Soumission écrite de l’Association des femmes autochtones du Canada, avril 2021.

2.6 Bilan : normes du travail pour les travailleurs à la demande

Les intervenants, les experts et les travailleurs à la demande eux-mêmes avaient des opinions diverses sur la manière de garantir la protection des normes du travail pour les travailleurs à la demande. Les syndicats et les organisations de travailleurs étaient généralement favorables à l’introduction dans le Code de définitions et de critères d’emploi qui permettraient d’étendre les protections des travailleurs à de nombreux travailleurs actuellement classés comme entrepreneurs indépendants. Les travailleurs à la demande auxquels nous avons parlé et que nous avons interrogés ont confirmé qu’ils avaient besoin de ces protections et ont exprimé l’urgence de la situation, en particulier dans le contexte de la pandémie de COVID-19.

Les employeurs et les organisations d’employeurs, quant à eux, ne voyaient pas la nécessité de modifier le Code à ce stade, étant donné la faible présence de l’économie à la demande dans les secteurs de compétence fédérale et le fait que l’introduction de définitions de l’emploi pourrait avoir une incidence négative sur les travailleurs à la demande qui sont bien payés et qui bénéficient du statut d’entrepreneur indépendant. Ils ont également indiqué que les entreprises canadiennes sont encore sous le choc de l’impact économique de la pandémie de COVID-19 et que le gouvernement devrait laisser les entreprises se rétablir avant d’apporter des changements importants à la législation du travail.

Assurer une équité et une transparence accrues au sein de l’économie à la demande

Plusieurs experts, travailleurs à la demande, syndicats et organisations de travailleurs nous ont dit que le manque de pouvoir de négociation des travailleurs à la demande se manifeste de 2 manières principales. Tout d’abord, les travailleurs à la demande ont souvent le sentiment qu’ils ne peuvent pas s’exprimer et communiquer avec leur employeur sur les questions qui affectent leurs conditions de travail, de peur que celui-ci ne prenne des mesures à leur encontre, par exemple en refusant de leur confier plus de travail. Par conséquent, les intervenants ont fait valoir que la protection des travailleurs à la demande s’ils décident de faire entendre leur voix collectivement pour améliorer leur situation de travail est essentielle pour améliorer la qualité du travail au sein de l’économie à la demande. La deuxième façon dont le manque de pouvoir de négociation des travailleurs à la demande se manifeste est dans les pratiques commerciales des plateformes numériques de travail sur lesquelles ils travaillent. Souvent, le mode de fonctionnement des plateformes numériques manque de transparence (en ce qui concerne la désactivation des comptes, le paiement des travailleurs ou le traitement des plaintes ou des litiges), ce qui crée des situations confuses et parfois injustes pour les personnes qui les utilisent.

2.7 Élargir les possibilités d’expression collective et de règlement des litiges dans l’économie du travail à la demande

De nombreux experts ont affirmé que l’absence de canaux établis et protégés permettant aux travailleurs à la demande d’exprimer leurs préoccupations, leurs griefs ou d’engager des discussions avec leurs employeurs constituait une difficulté majeure de l’économie à la demande. Selon eux, une partie du problème réside dans le fait que les travailleurs à la demande sont souvent classés dans la catégorie des entrepreneurs indépendants (parfois à juste titre, parfois incorrectement) et ne bénéficient donc pas du droit de se syndiquer qui est accordé aux employés ou aux entrepreneurs dépendants. Une autre partie du problème est que, même si les travailleurs à la demande étaient considérés comme des entrepreneurs dépendants et autorisés à se syndiquer, rien ne garantit qu’ils seraient en mesure de former un syndicat et d’accéder aux protections fondamentales des travailleurs par le biais de ce canal de représentation collective. Le travail à la demande ne se prête pas à l’organisation de syndicats, car ces travailleurs :

  • ne se connaissent généralement pas;
  • sont disperses géographiquement;
  • peuvent ne realiser du travail à la demande que de façon occasionnelle.

« [La décision de 2020 de la Commission des relations de travail de l’Ontario concluant que les messagers utilisant l’application Foodora sont des entrepreneurs dépendants et ont donc le droit de se syndiquer] ne règle pas le problème, qui est l’incapacité (pour les travailleurs à la demande) d’accéder aux protections des travailleurs. »

Entrevue d’experts, mars 2020.

Le manque de canaux protégés d’expression collective pour les travailleurs non syndiqués a également été reconnu dans le rapport 2019 du groupe d’experts sur les normes de travail fédérales modernes, qui a formulé la recommandation d’introduire des protections pour les « activités concertées ». Les activités concertées sont une forme de liberté d’association qui existe aux États Unis et qui offre une protection contre les représailles lorsque 2 travailleurs ou plus se livrent à des actes d’activités concertées de bonne foiNote de bas de page 7 avec leur employeur pour aborder des problèmes et tenter d’améliorer leurs conditions de travail.

Dans leurs soumissions écrites, les syndicats, les groupes de défense des travailleurs, les avocats du travail et une association d’employeurs ont recommandé la mise en place de canaux d’expression collective appropriés et protégés pour les travailleurs à la demande et les travailleurs non syndiqués en général, par exemple des protections contre les activités concertées et de nouvelles formes de négociations collectives sectorielles.

« [Sans canaux protégés d’expression collective] les travailleurs à la demande et tous les travailleurs sont peu susceptibles de parler de conditions de travail dangereuses et inférieures aux normes s’ils craignent les représailles de l’employeur. »

Soumission écrite du Congrès du travail du Canada, avril 2021.

« Le fait d’accorder à ces travailleurs (à la demande) des droits de représentation et de négociation dans l’ensemble d’un secteur ou d’une plateforme de travail à la demande contribuerait à établir des normes de travail à l’échelle du secteur, qui répondent aux difficultés uniques du travail à la demande dans ce domaine. »

Soumission écrite d’Unifor, mai 2021.

Lorsqu’ils ont été consultés sur la possibilité d’introduire des protections des activités concertées pour les employés non syndiqués et les entrepreneurs dépendants (un statut dont de nombreux travailleurs à la demande sont susceptibles de relever), les syndicats, les organisations de travailleurs et les travailleurs à la demande ont soutenu cette idée. Toutefois, certains ont estimé que ces nouvelles protections ne seraient probablement pas suffisantes et ont indiqué que le gouvernement devrait prendre des mesures pour rendre la syndicalisation plus accessible aux travailleurs qui n’ont actuellement pas de représentation syndicale officielle. Les représentants des employeurs ne sont pas nécessairement opposés à de nouveaux mécanismes qui fourniraient des canaux protégés permettant aux travailleurs d’exprimer leurs préoccupations sur le lieu de travail. Ils ont toutefois averti que tout changement susceptible d’avoir des répercussions sur la productivité et la continuité des activités devait être soigneusement étudié, d’autant plus que nombre d’entre eux se remettent à peine de la pandémie de COVID-19 et des confinements qui en ont découlé.

« Les modifications du Code canadien du travail visant les travailleurs à la demande créeraient des changements pour l’ensemble de la main d’œuvre sous réglementation fédérale, et ré-imagineraient les canaux d’expression collective qui sont déjà en place pour de nombreux travailleurs non syndiqués. »

Participant à la table ronde des employeurs, le 30 juin 2021

« La mise en place de ces [protections des activités concertées] pourrait avoir pour conséquence inattendue d’avoir une incidence sur les travailleurs qui veulent gérer leur propre entreprise, être indépendants et bénéficier des avantages associés à cette classification, notamment en évitant la rigidité du travail et des syndicats formels. »

Participant à la table ronde des employeurs, juin 2021.

Outre la nécessité de protéger les canaux d’expression collective, de nombreux participants à la consultation ont indiqué que le manque d’accès à des mécanismes efficaces de résolution des litiges était un problème majeur pour les travailleurs à la demande. Les travailleurs à la demande peuvent être confrontés à des circonstances dans lesquelles ils ont besoin d’un règlement impartial des litiges, par exemple en cas de retard ou de non-paiement des sommes dues, de refus de travail sans justification, de désactivation ou de critiques inexactes sur les plateformes numériques.

Étant donné qu’ils sont généralement classés comme des entrepreneurs indépendants, les experts nous ont dit que les travailleurs à la demande ne sont pas couverts par les mécanismes de règlement des différends établis, comme les mécanismes de plainte prévus dans la Partie III du Code. Cela signifie que ces travailleurs doivent s’en remettre au règlement privé des litiges (par exemple, la Cour des petites créances) pour remédier à un traitement injuste, ce qui peut être long et coûteux pour les 2 parties.

« [Si les travailleurs à la demande avaient les mêmes droits que les employés,] nous ne craindrions pas la désactivation arbitraire (des plateformes numériques), car nous aurions le droit de déposer un grief pour licenciement abusif. »

Soumission écrite de Gig Workers United, avril 2021.

« La possibilité de faire appel et de protéger ses droits par le biais d’agences ou de tribunaux administratifs est une solution bien meilleure et bien plus facilement accessible que la résolution de litiges privés. Le ministère du Travail offre aux travailleurs un espace plus sûr pour protéger leurs droits et leurs intérêts. »

Soumission écrite de la Workers’ Health and Safety Legal Clinic, mai 2021.

Les experts, les travailleurs à la demande et les organisations de travailleurs ont également souligné que de nombreux travailleurs à la demande sont confrontés à la difficulté de se retrouver dans des relations indirectes avec l’entité qui les embauche ou l’employeur. C’est le cas, par exemple, des travailleurs à la demande qui fournissent des services en ligne par l’intermédiaire de plateformes numériques, comme les pigistes travaillant sur des plateformes comme Upwork ou les personnes effectuant des microtâches sur des plateformes comme Amazon Mechanical Turk.

Les travailleurs qui ont recours à ce type de régime n’ont généralement pas d’accès direct à l’entité qui les embauche ou à l’employeur qui sollicite leur travail. Cela signifie qu’ils n’ont pas la possibilité de discuter des problèmes éventuels ou de les régler, par exemple en cas d’évaluations inexactes des travailleurs ou de rejet du travail produit. En d’autres termes, les interactions avec l’employeur passent par l’infrastructure des plateformes numériques, qui ne disposent souvent pas de mécanismes efficaces de résolution des conflits.

« Le gouvernement devrait exiger des plateformes qu’elles fournissent aux travailleurs à la demande un accès à des mécanismes transparents et responsables de résolution des litiges avec les utilisateurs et clients, ainsi qu’avec les autres travailleurs, dans un délai raisonnable. »

Soumission écrite du Congrès du travail du Canada, avril 2021.

Tout en reconnaissant que l’absence de mécanismes de résolution des litiges est un problème pour certains travailleurs à la demande, les représentants des employeurs ont indiqué que de nombreux entrepreneurs indépendants qui pourraient être considérés comme des travailleurs à la demande ont établi des méthodes de résolution des litiges, et que le processus de résolution des litiges et de recours est souvent inclus dans les ententes contractuelles. Ainsi, de nombreux représentants des employeurs ne voyaient pas de besoin pressant pour le gouvernement fédéral d’introduire de nouveaux mécanismes de résolution des conflits, qu’il s’agisse de problèmes de paiement rapide des salaires ou d’autres problèmes survenant dans le cadre de la relation contractuelle.

2.8 Améliorer l’équité et la transparence au sein des plateformes numériques

Nombre des experts que nous avons interrogés ont expliqué que certaines personnes qui travaillent sur des plateformes numériques ne comprennent pas les politiques et les pratiques de ces dernières, car les conditions d’utilisation (CU) que les travailleurs doivent accepter sont souvent opaques et soumises à de fréquentes modifications. Les experts nous ont dit que ces contrats de prestation de services peuvent inclure une variété de clauses injustes pour les travailleurs. Par exemple, certaines peuvent limiter la capacité du travailleur à travailler hors de la plateforme (par exemple, en imposant des pénalités pour avoir établi des relations avec les clients hors de la plateforme), tandis que d’autres peuvent exiger que le travailleur et le client se soumettent à un arbitrage dispendieux en cas de litige entre eux. Selon eux, ce type de clause nuit à la capacité des travailleurs à gagner décemment leur vie et ne les protège pas suffisamment en cas de non-paiement.

Les experts nous ont également indiqué que, pour assurer l’équité et la transparence sur les plateformes numériques, les responsables politiques devaient dépasser les accords formels sur les CU et examiner les algorithmes utilisés par les plateformes numériques. Selon eux, ces algorithmes ont souvent autant de répercussions sur l’expérience des travailleurs qui utilisent une plateforme que les accords formels sur les CU. Par exemple, ils ont souligné que les travailleurs ne savent pas comment les plateformes déterminent les cotes et le classement des travailleurs (en d’autres termes, si le travailleur est classé premier ou trente et unième pour un type de travail particulier). Étant donné que les cotes et les classements déterminent souvent la quantité de travail offerte aux travailleurs des plateformes, les experts affirment que les travailleurs devraient disposer des renseignements nécessaires pour comprendre les facteurs qui influent sur ces décisions.

Les intervenants ont discuté en détail de la gestion à travers des algorithmes, citant la question de la transparence entre les plateformes numériques comme un problème particulier de ce modèle opérationnel pouvant créer des difficultés pour les travailleurs. Le recours à la technologie pour gérer les travailleurs, attribuer les tâches et suivre les progrès est nécessaire pour répondre aux exigences opérationnelles de la plupart des plateformes numériques, mais peut créer certains obstacles pour les travailleurs, qui sont propres au travail sur les plateformes. En effet, les intervenants des organisations de défense des travailleurs nous ont dit qu’ils étaient préoccupés par les obstacles importants à la communication directe entre les travailleurs et les représentants des plateformes, par les difficultés d’accès à la résolution des litiges et par la difficulté à obtenir les renseignements personnels, les dossiers de travail et les factures en cas de besoin. Certains intervenants ont suggéré que ce type de gestion par des algorithmes pouvait avoir une incidence négative sur la santé mentale des travailleurs des plateformes.

« Le travail virtuel présente un risque réel de non-respect de la vie privée, de capacité accrue de discrimination et de non-paiement des salaires. Les nouvelles technologies peuvent également accroître la capacité des employeurs à surveiller leurs employés, ce qui pourrait avoir des répercussions psychologiques importantes. »

Soumission écrite de la Canadian Poverty Institute, avril 2021.

Dans sa soumission écrite, une plateforme numérique a reconnu la nécessité de faciliter la communication entre la plateforme et ses travailleurs, et a souligné que des progrès ont été réalisés dans la tentative de résoudre ces problèmes et d’améliorer la capacité des travailleurs à communiquer directement avec les plateformes numériques. Certaines plateformes ont commencé à utiliser des formes de communication avec la communauté et offrent la possibilité de rejoindre des groupes de travail, de remplir des enquêtes ou d’utiliser d’autres méthodes pour obtenir une rétroaction sur l’expérience des utilisateurs.

« Nous sommes convaincus de l’importance de travailler en étroite collaboration avec les travailleurs de DoorDash et nous tenons compte de leurs commentaires pour déterminer comment nous pouvons les aider au mieux à résoudre les problèmes qui les préoccupent. Nous maintenons un dialogue régulier avec les travailleurs de DoorDash à travers le pays et tirons constamment des enseignements de leur expérience pour améliorer leur expérience. »

Soumission écrite de DoorDash, avril 2021.

Plusieurs pays, dont le Royaume-Uni et l’Afrique du Sud, ont travaillé avec des universitaires et des experts pour recueillir des renseignements sur les politiques et les pratiques des plateformes numériques, ainsi que sur l’expérience de leurs utilisateurs. Une fois ces renseignements obtenus, les plateformes sont évaluées et notées sur la base de principes d’équité élaborés en consultation avec les intervenants et les travailleurs à la demande. Les résultats sont ensuite publiés en ligne. Ces outils ont permis aux travailleurs à la demande de disposer de plus de renseignements pour choisir le travail qui leur convient le mieux. Ils peuvent également mettre en évidence les mesures prises par les plateformes pour répondre aux difficultés courantes et améliorer l’expérience des travailleurs et des utilisateurs.

Les intervenants se sont montrés largement favorables à la poursuite de cette approche dans le contexte canadien. Cependant, ils sont divisés sur l’efficacité d’une telle initiative pour améliorer les conditions de travail au sein de l’économie à la demande. En particulier, les représentants syndicaux ont indiqué qu’une telle initiative doit être conjuguée à d’autres efforts, car une initiative de transparence pourrait ne s’attaquer qu’aux symptômes du problème et ne pas avoir d’impact pour résoudre les véritables problèmes auxquels sont confrontés les travailleurs à la demande, qui, selon eux, découlent d’une protection inadéquate en vertu de la législation du travail existante et d’un manque de pouvoir des travailleurs.

« Nous ne sommes pas opposés à la transparence, mais la mise en place de cette option sans autres éléments ne sera pas suffisante. Les travailleurs ont besoin d’une classification appropriée [de leur emploi]. Cette solution ne changera pas grand-chose. »

Participant à la table ronde sur le travail, le 28 juin 2021.

« Un accès de base aux renseignements devrait être exigé dans l’économie du travail à la demande. Par exemple, le nom de l’entreprise et le salaire des travailleurs. »

Participant à la table ronde sur le travail, le 28 juin 2021.

2.9 Bilan : assurer l’équité et la transparence au sein de l’économie à la demande

Les intervenants ont généralement indiqué que les principaux domaines dans lesquels les réponses stratégiques pourraient servir à améliorer les résultats pour les travailleurs à la demande sont les suivants :

  • représentation collective;
  • équité;
  • transparence au sein de l’économie à la demande.

Bien que les intervenants conviennent généralement de l’importance de la représentation collective, il existe des différences entre les syndicats, les organisations de défense des travailleurs et les employeurs quant à la question de savoir s’ils considèrent les protections des activités concertées comme une solution potentielle au manque de canaux protégés de représentation des travailleurs au sein de l’économie à la demande. De nombreux intervenants ont également reconnu qu’il existe des problèmes d’équité et de transparence propres au travail sur les plateformes numériques, mais beaucoup ont convenu que ces problèmes sont des symptômes de problèmes plus vastes, tels que la classification erronée et le faible pouvoir de négociation. Du côté des travailleurs, les intervenants ont convenu que toute initiative de transparence visant les plateformes numériques devrait s’inscrire dans une stratégie plus large visant à améliorer les protections des travailleurs à la demande.

Améliorer la qualité de l’information sur l’économie à la demande

Tous les participants au processus de consultation ont fait part de leurs inquiétudes quant à la qualité des renseignements et des données statistiques sur l’économie à la demande et, plus précisément, sur les travailleurs à la demande. Bien que les données sur l’économie du travail à la demande s’améliorent au fil du temps, à mesure que Statistique Canada complète et élabore des produits statistiques et des stratégies de données qui permettent de mieux rendre compte du travail à la demande, il reste d’importantes lacunes en matière d’information. Ces lacunes contribuent à une compréhension imprécise de la portée de l’économie du travail à la demande, des personnes qui y participent et des difficultés qu’elles rencontrent.

Les représentants des gouvernements provinciaux et territoriaux ont également exprimé la nécessité de disposer de meilleures données sur l’économie du travail à la demande pour les aider à étudier des interventions stratégiques qu’ils pourraient mettre en œuvre pour mieux protéger ce type de travailleur dans les secteurs sous réglementation provinciale. Ces représentants ont notamment plaidé pour l’élaboration d’une définition standard du travail à la demande, qui permettrait de mieux distinguer les travailleurs à la demande vulnérables des entrepreneurs indépendants prospères. Cela permettrait de centrer les interventions stratégiques sur les formes de travail les plus vulnérables de l’économie à la demande.

Certains intervenants ont également suggéré que les sources statistiques existantes pourraient sous-estimer l’ampleur du travail à la demande, en particulier dans les communautés plus marginalisées. Une organisation autochtone a fait remarquer que les données présentées par le Programme du travail au cours du processus de consultation ne rendent peut-être pas compte du nombre total d’Autochtones qui pratiquent le travail à la demande, en particulier de la participation des femmes inuites à l’économie à la demande.

« Bien que Pauktuutit ne dispose pas de données indépendantes sur les femmes inuites au sein de l’économie du travail à la demande, nous pensons que les sources de données disponibles ne rendent pas compte de l’ampleur et de la portée de leur participation. Par exemple, de nombreuses femmes inuites travaillent comme artistes, couturières ou autres, et répondent à la définition des travailleurs à la demande. »

Soumission écrite de Paaktuutit Inuit Women of Canada, mai 2021.

Un représentant syndical a fait remarquer que le fait de disposer de données de meilleure qualité sur l’économie du travail à la demande permettrait également de mieux comprendre les difficultés particulières auxquelles sont confrontés les groupes en quête d’équité au sein de cette économie, par exemple :

  • les femmes;
  • les personnes en situation de handicap;
  • les Autochtones;
  • les personnes racisées.

Tous les participants au processus de consultation ont soutenu les propositions visant à développer de meilleurs produits statistiques, qui contribueraient à éclairer les travaux politiques en cours sur l’économie à la demande.

3. Prochaines étapes

Nous remercions les personnes et les organisations qui ont pris le temps de partager leur expérience de l’économie à la demande et de nous faire part de leurs commentaires et de leurs idées sur la manière de mieux protéger les travailleurs à la demande dans un monde du travail en mutation. Le gouvernement s’est engagé à apporter des modifications au Code et à mener d’autres initiatives non législatives pour que les travailleurs à la demande bénéficient des protections des travailleurs dont ils ont besoin. Alors que nous continuons à réfléchir aux problématiques liés avec l’émergence de ce type d’économie, nous allons nous concentrer sur l’examen attentif de ce que nous avons entendu pendant ces consultations.

Annexe A : Aperçu des consultations

Des consultations auprès du public et des intervenants sur le mandat du ministre et l’engagement de mettre en place de meilleures protections de la main d’œuvre pour les travailleurs à la demande ont été menées de février 2021 à juillet 2021, et en décembre 2022. Au cours des mois qui ont précédé les consultations, les responsables du Programme du travail ont réalisé plus de 30 entrevues avec des experts en la matière et des universitaires, afin de mieux comprendre les difficultés et les possibilités qu’offre l’économie du travail à la demande au Canada.

Entre le 4 février 2021 et le 30 avril 2021, les responsables du Programme du travail ont entrepris la première phase des consultations auprès du public et des principaux intervenants. La première phase visait à mieux comprendre les problèmes rencontrés par les travailleurs à la demande et à recueillir des recommandations visant à améliorer la protection des travailleurs. Elle a compris :

  • des tables rondes avec les intervenants organisées par le Programme du travail;
  • une consultation publique en ligne par l’entremise d’activités de Engagement Headquarters (EHQ), comme des sondages éclair, des forums de discussion et le partage d’expériences;
  • les soumissions écrites des intervenants et du public;
  • des consultations auprès des employeurs au moyen d’un sondage en ligne visant à mieux comprendre les façons et les raisons de conclure des contrats avec des travailleurs à la demande.

Plus précisément :

  • consultations en ligne d’EHQ : Entre le 18 mars 2021 et le 30 avril 2021, la population canadienne a été invitée à faire part de son point de vue sur l’économie du travail à la demande, le « droit à la déconnexion » et ses avantages potentiels pour les travailleurs sous réglementation fédérale. Pendant la période durant laquelle la plateforme EHQ était accessible, 530 visites ont été enregistrées pour les questions relatives au travail à la demande. Parmi les visiteurs :
    • 55 personnes ont répondu aux questions relatives au travail sur les plateformes numériques actives au Canada;
    • 67 ont proposé des idées de changements qui pourraient être apportés au Code canadien du travail afin d’améliorer les protections des travailleurs pour les travailleurs à la demande;
    • 41 ont formulé des commentaires sur l’incidence qu’aurait une meilleure protection des travailleurs sur les travailleurs à la demande et les employeurs;
  • soumissions écrites : Au cours de la première phase de consultations, les responsables du Programme du travail ont reçu 23 soumissions écrites de la part d’intervenants. Parmi celles-ci, 8 ont été soumises par des employeurs, 6 par des syndicats, 2 par des groupes de défense des travailleurs, 3 par des organisations autochtones et 4 par d’autres groupes (2 cabinets d’avocats, un forum de politique publique et 1 institut de recherche);
  • enquête auprès des employeurs : Entre avril et mai 2021, les responsables du Programme du travail ont mené une enquête auprès des employeurs pour mieux comprendre les façons et les raisons d’embaucher des entrepreneurs indépendants, y compris des travailleurs à la demande. Au total, 511 employeurs ont répondu à l’enquête.
    • une nette majorité des participants (91 %) ont indiqué appartenir au secteur fédéral. La moitié des employeurs sous réglementation fédérale ont déclaré faire partie du secteur du transport routier, tandis que d’autres groupes importants de participants appartenaient au secteur du transport aérien (16 %) et des télécommunications (12 %);
    • quatre-vingt-quatre pour cent (84 %) des répondants ont indiqué disposer d’une main d’œuvre totale de moins de 100 employés ou entrepreneurs, 40 % ont déclaré disposer de moins de 20 travailleurs, et 44 % ont déclaré avoir entre 21 et 99 travailleurs;
    • un peu moins de la moitié (45 %) de tous les employeurs ont indiqué qu’ils embauchaient des entrepreneurs indépendants, y compris des travailleurs à la demande. Parmi les employeurs qui engagent des entrepreneurs indépendants, environ un quart (27 %) ne le font que de manière occasionnelle pour répondre à une demande saisonnière changeante ou pour accomplir des tâches ou des projets pour lesquels les compétences requises ne sont pas disponibles à l’interne. Pour la plupart des employeurs qui embauchent des entrepreneurs indépendants (58 %), ces travailleurs ne représentent qu’une petite fraction (moins de 10 %) de leur effectif total.

Au cours de la deuxième phase des consultations, entre juin et juillet 2021, les responsables du Programme du travail ont organisé 3 tables rondes avec les intervenants (1 avec les syndicats et les organisations syndicales; 2 avec les représentants des employeurs de différents secteurs) et 3 réunions bilatérales avec les organisations autochtones, afin d’obtenir des commentaires sur un document de travail décrivant une série d’options stratégiques préliminaires. À la suite de ces tables rondes, les responsables du Programme du travail ont reçu 6 autres soumissions écrites de la part d’intervenants (4 de syndicats, une d’une clinique juridique et 1 d’un représentant d’un employeur) contenant des commentaires plus détaillés sur les options préliminaires.

Lors de la troisième et dernière phase de consultations, en décembre 2022, les responsables du Programme du travail ont organisé une table ronde et plusieurs engagements bilatéraux avec certains intervenants individuels. Les participants à la table ronde comprenaient des intervenants sous réglementation fédérale, y compris certains groupes qui n'avaient pas participé aux séries de consultations précédentes. Les responsables du Programme du travail ont également tenu des rencontres bilatérales avec l'Alliance canadienne du camionnage, Uber/Uber Freight, SkipTheDishes, Doordash et Lyft.

Annexe B : Soumissions écrites

Les 25 organisations ci-dessous ont présenté des soumissions écrites (4 organisations ont présenté 2 soumissions écrites) dans le cadre des consultations sur l’engagement de la lettre de mandat du ministre du Travail :

  • organisations d’employeurs :
    • Association des banquiers canadiens (ABC);
    • Chambre de commerce du Canada (CCC);
    • Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI);
    • Alliance canadienne du camionnage (ACC);
    • Association de ventes directes du Canada (AVDC);
    • DoorDash;
    • Halifax Employers Association (HEA);
    • Association de l’industrie touristique du Canada (AITC).
  • organisations de défense des travailleurs :
    • Ridefair Toronto;
    • Parkdale Community Legal Services;
    • Worker’s Health and Safety Legal Clinic.
  • syndicats :
    • Congrès du travail du Canada (CTC);
    • Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP);
    • Gig Workers United (appuyé par STTP);
    • Association internationale des machinistes et des travailleurs et travailleuses de l’aérospatiale (AIMTA);
    • International Longshore and Warehouse Union (ILWU);
    • Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC);
    • Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce (TUAC).
  • Organisations autochtones nationales (OAN):
    • Association des femmes autochtones du Canada (AFAC);
    • Pauktuutit Inuit Women of Canada;
    • Femmes de la Nation métisse – Les Femmes Michif Otipemisiwak (LFMO).
  • autres :
    • Action Canada;
    • L’Association du Barreau canadien;
    • Canadian Poverty Institute;
    • Goldblatt Partners.

Annexe C : Tables rondes et reunions bilatérales

Au total, 41 intervenants ont participé à des tables rondes et à des réunions bilatérales organisées dans le cadre des consultations sur la création de meilleures protections pour les travailleurs. Ils représentaient les organismes suivants :

  • syndicats et les organisations de travailleurs :
    • Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists (ACTRA);
    • Association canadienne des journalistes;
    • Congrès du travail du Canada (CTC);
    • Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP);
    • Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP);
    • Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ);
    • Gig Workers United (appuyé par STTP);
    • Association international des machinists et des travailleurs et travailleuses de l’aérospatial (AIMTA);
    • International Longshore and Warehouse Union (ILWU);
    • Parkdale Community Legal Services;
    • Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC);
    • Syndicat international des marins;
    • Teamsters;
    • Unifor;
    • Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce Canada (TUAC);
    • Fédération canadienne de camionnage des femmes.
  • employeurs et organisations d’employeurs :
    • Armour Transportation Systems;
    • Atlantic Provinces Trucking Association;
    • Banque de Montréal;
    • Bison Transport;
    • C.A.T.;
    • Association canadienne des radiodiffuseurs;
    • Association des banquiers canadiens;
    • Société Radio-Canada (SRC);
    • Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI);
    • Association canadienne de la paie (ACP);
    • Alliance canadienne du camionnage (ACC);
    • Challenger Motor Freight;
    • Association de ventes directes (AVD);
    • ERB Transport;
    • FedEx;
    • Employeurs des transports et communications de régie fédérale (ETCOF);
    • Manitoulin Transport;
    • Conseil national des lignes aériennes du Canada (CNLA);
    • Banque Nationale;
    • Tandel;
    • RH Camionnage Canada;
    • UPS;
    • Western Transportation Advisory Council.
  • plateformes numériques
    • Uber/Uber Freight;
    • SkipTheDishes;
    • Doordash;
    • Lyft.
  • Organisations autochtones nationales (OAN) :
    • Association des femmes autochtones du Canada (AFAC);
    • Pauktuutit Inuit Women of Canada;
    • Women of the Métis NationLes Femmes Michif Otipemisiwak (LFMO).
  • autres :
    • Canadian Poverty Institute;
    • Goldblatt Partners.

Notes de bas de page

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