Les inondations au Canada : provinces de l'Atlantique

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Nouveau-Brunswick

La province du Nouveau-Brunswick a une longue histoire d'inondations, et depuis 1696, il y a eu plusieurs crues sérieuses. La fonte des neiges, les embâcles et les pluies intenses en sont les principales causes. Comme l'indique le schéma ci-dessous, une bonne partie des inondations furent causées par diverses combinaisons de ces facteurs. Les plus graves que le Nouveau-Brunswick a connues, comme celles de 1887, 1923, 1936, 1970, 1973, 1976, 1979 et 1987, font partie de cette catégorie.


Ruisseau Lincoln-Baker le long de la route 7 à Fredericton, au Nouveau-Brunswick (1er mai 1973).

Photo - Ruisseau Lincoln-Baker le long de la route 7 à Fredericton, au Nouveau-Brunswick (1er mai 1973).

Les inondations causées par la fonte des neiges peuvent se produire lorsqu'un printemps doux suit un hiver très neigeux, conditions qui justement prévalèrent lors des inondations du début de mai 1961, d'avril 1977 et d'avril-mai 1982. Plus souvent qu'autrement, les inondations graves dues à la fonte des neiges surviennent lorsque celle-ci est accompagnée d'une pluie intense, comme ce fut le cas en avril-mai 1973. De plus, cette combinaison de facteurs est souvent propice à la formation d'embâcles. Bien que la seule fonte des neiges soit la cause d'environ 7 % des inondations enregistrées, elle constitue un facteur parmi d'autres dans 40 % des inondations observées dans la province. Les graves inondations provoquées par les embâcles ont habituellement lieu lors de la débâcle printanière, et parfois au milieu de l'hiver pendant les redoux de janvier à mars. On traitera ci-dessous des inondations causées par les embâcles sur la rivière Saint-Jean.

Les inondations d'embâcle sont généralement plus destructrices que les autres, notamment pour les ponts. Par exemple, pendant l'inondation de février 1970, causée par des embâcles sur six rivières, 32 ponts furent détruits et 124 autres endommagés. Les embâcles sont un des facteurs responsables d'environ 42 % des inondations observées au Nouveau-Brunswick.

Les ouragans ont été responsables de plusieurs inondations destructrices au Nouveau-Brunswick. Il y eut des inondations dans les sillons des ouragans Edna en 1954, Gladys en 1968 et Belle en 1976. En septembre 1979, la tempête tropicale David causa pour environ 500 000 $ (881 600 $ de 1998) de dégâts dans la région de Moncton. Des pluies intenses et prolongées accompagnant les cyclones ont aussi provoqué de graves inondations. Par exemple, à la fin de mai 1961, on signala des dommages appréciables dans les bassins de la rivière Saint-Jean et des rivières Nashwaak, Miramichi et Tobique. Des tempêtes de convection peuvent produire des inondations localisées dans de petits bassins versants, comme celui du ruisseau Marsh près de Saint John. En général, les pluies intenses ont été la cause de 43 % des inondations au Nouveau-Brunswick.

Ce graphique illustre les causes des inondations au Nouveau-Brunswick : 

Causes des inondations au Nouveau-Brunswick
Source : Inondations au Nouveau-Brunswick : Vue d'ensemble, 1969-1984, Environnement Canada.

La rivière Saint-Jean

Dans la région Atlantique du Canada, la rivière Saint-Jean est connue pour ses embâcles répétés. Les embâcles se produisent surtout lors de la débâcle hâtive des cours d'eau. Celle-ci est généralement amorcée par une augmentation brusque de la température, qui fait fondre la neige, et par une pluie intense. Le ruissellement et la pluie augmentent le niveau de la rivière, ce qui exerce une pression sur la nappe de glace et en provoque la rupture. À mesure que la glace descend le cours d'eau, elle s'accumule sur les barres, les îles et contre les piliers des ponts.

La première inondation consignée sur la rivière Saint-Jean remonte à 1696. Il est toutefois difficile de déterminer, dans les premiers rapports, quelles furent les inondations attribuables à des embâcles.

1902

En mars 1902, une débâcle très précoce et le déplacement aval de la nappe de glace, dus à des pluies intenses et des températures chaudes, firent monter le niveau de l'eau. Quinze embâcles qui s'étaient formés dans le bassin du fleuve provoquèrent des inondations. On déplora deux pertes de vie. Les dégâts aux ponts, aux routes et aux voies ferrées furent étendus, et certains de ces ouvrages furent emportés. Les inondations touchèrent durement l'industrie du bois; les usines de sciage encoururent des dégâts importants et perdirent une partie de leur stock. Selon diverses estimations, les dommages dans toute la province se chiffrèrent à 25 000 $ (environ 881 600 $ de 1998).

1936

Les conditions météorologiques en mars 1936 étaient similaires à celles de 1902, et il y eut également une débâcle précoce. On signala 22 embâcles dans le bassin, certains se prolongeant sur 10 kilomètres en amont. Les dégâts furent importants : 15 ponts partiellement ou complètement détruits, routes et voies ferrées inondées, maisons, commerces et granges inondés et détruits, perte des stocks de bois de sciage, perte de bétail. Pour l'ensemble de la province, on estima les dégâts à 1,9 million de dollars, soit environ 33,9 millions de dollars de 1998.


Vue de l'est vers l'église baptiste unie de Maugerville (2 mai 1973).

 Photo - Vue de l'est vers l'église baptiste unie de Maugerville (2 mai 1973).

Perth-Andover, 1976 et 1987

Perth-Andover, sur la rivière Saint-Jean, fut le lieu d'embâcles majeurs en 1976 et 1987. En 1976, le principal point d'accumulation était à 6,4 kilomètres sous le pont ferroviaire près du village de Perth-Andover. Les eaux gonflées par l'embâcle inondèrent les routes régionales et les rues du village et formèrent des mares étendues dans les secteurs résidentiels. L'état d'urgence fut déclaré lorsqu'il devint nécessaire d'évacuer l'hôpital Hôtel-Dieu. L'eau submergea environ 200 maisons, plusieurs commerces, un foyer pour personnes âgées et l'école secondaire. Quelque 400 personnes durent être évacuées. On se préoccupa beaucoup d'un effondrement possible du pont de la voie ferrée. Afin d'empêcher qu'il ne soit jeté bas de ses piliers, on y amena 17 wagons remplis de copeaux de bois, pour ajouter du poids. Le pont a tenu.

Bien que l'embâcle de 1987 à la hauteur du pont ferroviaire de Perth-Andover fût secondaire (car il avait été provoqué par un autre embâcle sur le ruisseau Upper Guisiguit), les dommages furent plus importants qu'en 1976.

L'inondation se produisit rapidement. Malgré une dépression majeure du fleuve entreprise très tôt le matin du 2 avril par la Commission de l'énergie électrique du Nouveau-Brunswick, l'eau continua de monter à Perth-Andover. Vers 6 h, la glace s'écoulant en aval s'accumula contre les piliers du pont. Comme en 1976, on transporta des wagons chargés sur le pont. Toutefois, à la différence de 1976, le pont ne put contenir la pression et s'effondra vers 9 h. Un wagon transporté par les glaces et l'eau en crue fut plus tard retrouvé à 1,1 kilomètre en aval. En flottant ainsi, le wagon passa sans encombre sous un pont routier. La crue de 1987 fut supérieure à celle de 1976 d'environ 1 mètre. De nouveau, l'état d'urgence fut déclaré, l'hôpital fut évacué, et des centaines de personnes durent quitter leurs maisons.


Vue de l'est de l'autre côté de la rivière Saint-Jean en amont du pont du CN (1er mai 1973).

Vue de l'est de l'autre côté de la rivière Photo - Saint-Jean en amont du pont du CN (1er mai 1973).

Voir aussi : Anecdote : Provinces de l'Atlantique

Nouvelle-Écosse

Bien que la fonte des neiges n'ait pas à elle seule provoqué d'inondation en Nouvelle-Écosse, elle a néanmoins été un facteur dans 65 inondations depuis la première consignée en 1759. Les conditions propices à une inondation lors de la fonte des neiges surviennent souvent pendant les fortes pluies d'hiver en décembre, janvier et février. Les redoux accompagnés de pluie ne sont pas inhabituels pendant ces mois en Nouvelle-Écosse. En fait, ces conditions furent responsables de toutes les 48 inondations observées dans cette province pendant ces trois mois, parmi lesquelles 36 étaient dues à la fonte des neiges. Des redoux prolongés pendant cette partie de l'année peuvent être très désastreux. Ce fut le cas des inondations qui suivirent le plus long redoux observé en Nouvelle-Écosse en janvier, soit du 3 au 18 janvier 1956, et qui causèrent des dégâts dans toute la province.

Les inondations à la fonte des neiges se produisent lorsque des pluies intenses accompagnent un fort ruissellement printanier. La plupart des 35 inondations observées pendant les mois de mars et d'avril furent attribuables à de telles conditions. Les plus graves inondations de ce type surviennent lorsque la neige a été abondante en hiver. L'inondation du 2 au 10 avril 1962, qui toucha presque toute la province, fut causée par d'intenses pluies pendant la fonte des neiges. De plus, pendant cet épisode, la nappe de glace se rompit et forma des embâcles, ce qui aggrava la situation.

Comme dans les autres provinces de l'Atlantique, les embâcles ont eu des effets destructeurs lors des dégels hivernaux et des crues nivales de printemps. Par exemple, des embâcles se formèrent pendant le dégel de janvier 1956, et détruisirent plus de 100 ponts dans la province.

Les tempêtes tropicales de type ouragan ont également causé des inondations étendues dans toute la province. L'ouragan Beth en août 1971 provoqua des dégâts pour quelque 5,1 millions de dollars (20,4 millions de dollars de 1998). D'autres tempêtes majeures causèrent des inondations : l'ouragan Ethel en 1964, l'ouragan Gladys en 1968, et les tempêtes de type ouragan de septembre 1936 et août 1950.

Les cyclones ont eux aussi été la cause de pluies intenses qui ont provoqué de graves inondations dans toute la province, comme ce fut le cas lors de l'inondation des 10 et 11 octobre 1967.

Des marées hautes exceptionnelles ont été la cause de dommages importants le long des côtes, mais les inondations littorales les plus destructrices ont été provoquées par des lames de tempête qui accompagnaient des ouragans ou des cyclones. La tempête dite du « jour de la marmotte », les 2 et 3 février 1976, frappa toutes les régions côtières de la province. Bien qu'un seul bassin versant ait été touché, on estima les dommages initiaux à plus de 10 millions de dollars (24,9 millions de dollars de 1998).

Les tempêtes de convection donnent souvent lieu à des pluies intenses et constituent la principale cause unique d'inondation en Nouvelle-Écosse. Elles provoquent rarement des inondations étendues.

Ce graphique illustre les causes des inondations en Nouvelle-Écosse : 


Source : Flooding in Nova Scotia - An Overview: 1759-1986, Environnement Canada.)

Causes des inondations en Nouvelle-Écosse

Terre-Neuve et Labrador

Comme dans les autres provinces de l'Atlantique, l'effet modérateur de l'océan est manifeste dans le régime des eaux. Dans les bassins versants du centre et du sud de la province, les inondations peuvent survenir n'importe quand au cours de l'année, à la suite de la fonte des neiges, des pluies, des embâcles ou des précipitations qui accompagnent les tempêtes d'importance. Les dégels de mi-hiver, accompagnés de pluies, peuvent entraîner la débâcle des glaces et causer ensuite des embâcles. Dans la partie nord de l'île, notamment dans la péninsule Northern, la neige demeure habituellement au sol tout l'hiver, et les inondations sont alors causées par les crues nivales. Dans la partie sud-est de la province, la péninsule d'Avalon est fréquemment éprouvée par les inondations sur la côte. Par exemple, on a observé des inondations dans la ville de Placentia depuis 1904 et, ces dernières années, il s'en est produit en 1977, en 1982 (deux fois), en 1983 (deux fois) et en 1989.

En janvier 1983, une tempête d'hiver majeure a causé une grave inondation dans les bassins des rivières Exploits et Gander. La pluie, un temps doux et la fonte de la neige pendant une période de trois jours en furent les causes. Les propriétés publiques et privées subirent d'importants dommages, dont la destruction partielle du réservoir et de la centrale de Bishop's Falls. Les dommages le long des rivières Exploits et Gander furent estimés à 34 millions de dollars (41,8 millions de dollars de 1998).

Terre-Neuve se trouve sur la trajectoire de tempêtes qui prennent naissance dans l'océan Atlantique, sous les Tropiques. Toutefois, dans la plupart des cas, les tempêtes ont déjà perdu leurs caractéristiques tropicales lorsqu'elles atteignent l'île, tout comme les vents ont diminué d'intensité. Les ouragans ont causé peu d'inondations par le passé dans cette province.

Un tsunami frappe la côte est

Les tsunamis sont si rares sur la côte est que le terme y est peu usité. Pourtant, le 18 novembre 1929, l'impensable se produisit. Un tremblement de terre secoua la côte est de l'Amérique du Nord à 17 h. À St. John's (Terre-Neuve), les dommages ne furent pas sérieux, mais le séisme brassa les édifices, il y eut de la vaisselle brisée et quelques meubles furent bousculés. La plupart des habitants n'avaient jamais connu de tremblement de terre auparavant, et ils pensèrent que c'était une explosion.

Il s'ensuivit un débat quant à l'emplacement de l'épicentre du tremblement de terre. De nombreux câbles sous-marins rompus permirent aux chercheurs de conclure que l'épicentre était situé à 560 kilomètres au sud de St. John's, dans l'océan Atlantique.

À cette époque, le réseau de communications à Terre-Neuve était peu étendu. La radio était à ses débuts, il y avait peu de téléphones, et bon nombre de câbles télégraphiques avaient été brisés. Ainsi, pendant que le reste des habitants de la côte est avaient repris le cours habituel de la vie, ils étaient dans l'ignorance de la tragédie qui avait frappé la péninsule Burin à Terre-Neuve.

Ce n'est que trois jours après le tremblement de terre que le monde apprit qu'un tsunami avait dévasté la péninsule, soit lorsque le navire à vapeur Portia arriva à Burin, selon l'horaire habituel. Le navire envoya aussitôt un message radio qui annonça au monde entier ce qui venait de se passer.

On apprit que la péninsule avait été frappée par une vague énorme quelques heures après le tremblement de terre. La vague avait noyé 27 personnes. Un grand nombre de maisons, de commerces, de quais et de bateaux de pêche furent écrasés ou emportés, ainsi que le marché de poisson, et les stocks de nourriture et de carburant.

Comme ailleurs sur la côte, on avait ressenti le tremblement de terre à 17 h, et les dommages avaient été minimes. Comme rien d'inhabituel n'avait suivi, la plupart des habitants reprirent leurs activités.

Peu après le tremblement de terre, de nombreuses personnes virent l'eau se retirer des anses et des ports. À St. Lawrence, le fond du port, profond en moyenne de 10 mètres, était visible par endroit. Ne comprenant pas ce qui se passait, de nombreux habitants se réfugièrent dans les hauteurs, ce qui sauva sans doute plusieurs vies.

Deux heures et demie après le tremblement de terre, la vague arriva. Les témoins ne purent dire s'il y avait deux ou trois vagues, mais tous convinrent que la première fut la plus destructrice. Selon les témoins, la vague avait une hauteur de 15 à 30 mètres. La forme et la largeur de la vague variaient selon la configuration de la côte et du fond marin. La vague eut le plus d'impact dans les endroits où l'eau était confinée, comme dans les anses et les ports.

La vague herculéenne transporta les bâtiments à l'intérieur des terres et les y déposa, ou encore les balaya dans les ports ou vers la mer lorsqu'elle se retira. À St. Lawrence, 31 bâtiments furent ainsi transportés. La vague entra dans le port et circula autour, charriant les bâtiments d'une extrémité à l'autre. Burin, un regroupement d'une douzaine de collectivités, fut aussi gravement touchée, et on y déplora de nombreuses pertes de vie.

Plusieurs récits décrivirent les événements de cette nuit. De nombreuses personnes crurent que les villes étaient en train de couler, vu la montée rapide des eaux.

Si de nombreux bâtiments furent frappés de plein fouet et démolis par la vague, d'autres furent tout simplement soulevés de leurs fondations et portés par la vague. Un magasin faisant 9 mètres sur 17 fut déplacé sur 60 mètres vers les terres et déposé dans un pré, et pourtant, toutes les marchandises qu'il contenait demeurèrent intactes.

Les habitants montèrent alors dans les embarcations qui restaient et partirent à la recherche des personnes accrochées aux débris ou prisonnières des maisons à la dérive. Une lampe au kérosène allumée à l'étage d'une maison qui flottait permit aux secouristes de sauver un bébé qui dormait, alors que le reste de la famille avait été noyé au rez-de-chaussée. Un homme, balayé à la mer, nagea vers une maison flottante seulement pour constater que c'était la sienne. Plus tard, on remorqua la maison sur la côte et on la replaça sur ses fondations.

Pendant la nuit, le vent souffla violemment, fort, ce qui fit chuter la température et ajouta neige et gadoue à la misère des survivants.

La férocité de la vague ne fut pas restreinte à la terre, car elle ravagea également le fond marin. Pour de nombreuses personnes, la destruction du fond de l'océan fut la cause principale des piètres prises de poissons pendant une bonne partie de la Grande Dépression.

La vague avait perdu la majeure partie de son énergie dans la péninsule Burin. Les localités voisines de Fortune et de Grand Bank, à l'abri dans la baie Fortune, ne subirent que quelques inconvénients. La vague toucha également le Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse, où l'on signala la noyade d'une personne.

Île-du-Prince-Édouard

La faible superficie de l'Île du Prince-Édouard la met presque à l'abri des inondations. Cela ne signifie pas toutefois qu'elle en soit exempte, puisqu'il y eut une inondation majeure au début d'avril 1962, lorsqu'une tempête frontale sur la côte sud déposa en peu de temps environ 180 millimètres de pluie sur une neige épaisse. Dans de nombreuses régions de la province, il y eut un lavage important et de forts dégâts aux routes pavées.

L'acier est arrivé hier dans la province pour la construction du pont St. Peter's, l'un des nombreux qui ont été emportés pendant la fin de semaine lorsque la pluie torrentielle et la fonte des neiges ont causé des dégâts estimés à 300 000 $.

- Traduit de The Guardian, 4 avril 1962.

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