Documents de référence sur la gestion des eaux usées : conclusion

Le rejet d’effluents municipaux (eaux usées, eaux pluviales et TPEU) continue d’avoir des effets nocifs appréciables sur les eaux réceptrices canadiennes, cela en dépit de la proportion relativement élevée (81 %) de la population desservie par des installations de traitement des eaux usées. Les conséquences environnementales du rejet d’eaux usées municipales dans l’environnement canadien sont cependant difficiles à généraliser, cela en grande partie à cause des variations régionales du niveau de traitement et de la nature des eaux réceptrices (cours d’eau, lacs ou eaux côtières). Les incidences directes les plus connues de ce rejet sont les restrictions imposées à la récolte des mollusques ainsi qu’à l’utilisation des eaux à des fins récréatives, comme les fermetures de plages pour cause de contamination microbienne (tableau 9a). La contamination des bancs de mollusques et crustacés est généralisée et diffuse sur les côtes de l’Atlantique et du Pacifique. Ces dernières années, il y a eu augmentation du nombre de fermetures de secteurs coquilliers sur les deux côtes, ce qui a donné lieu à des pertes économiques importantes.

Dans de nombreuses parties du Canada, les rejets d’eaux usées municipales ont entraîné une dégradation et une contamination de l’habitat qui ont modifié l’abondance et la diversité des organismes aquatiques (tableau 9b). La destruction des habitats du poisson et de la faune a été recensée à la suite de modifications physiques de l’environnement, notamment à cause du rejet d’eaux pluviales et de TPEU. Les EEUM sont aussi des sources importantes de substances toxiques parmi lesquelles certaines sont persistantes et bioaccumulables (tableau 6). On ne dispose de pratiquement aucun signalement d’une toxicité aiguë in situ dans des eaux réceptrices canadiennes, mais les effets chroniques chez les organismes aquatiques de charges peu concentrées mais continues et à long terme de polluants persistants et bioaccumulables sont peu connus et pourraient présenter une menace appréciable pour l’habitat et les communautés aquatiques. En outre, on connaît peu de choses des incidences environnementales cumulatives interreliées se produisant à différentes échelles spatiales (géographiques) et temporelles (années ou décennies), de même que des effets cumulatifs ou synergiques résultant de la complexité des substances présentes dans les EEUM. Des substances capables de perturber la reproduction chez les poissons (perturbateurs endocriniens) ont aussi été décelées dans les EEUM, mais la rareté de l’information sur leur présence et les réactions à leur exposition rendent difficile l’évaluation des risques que posent actuellement ces substances. Parmi les autres enjeux pour lesquels on dispose de peu de renseignements au Canada, il y a lieu de mentionner les concentrations et les effets sur la santé humaine et l’environnement des médicaments qui pénètrent dans les eaux de surface à partir des eaux usées domestiques (Franke et al. [1995] et Wilken et al. [1997] ont présenté des données pour l’Europe). On peut également souligner l’importance écologique de dinoflagellés marins toxiques, comme Pfiesteria piscicida récemment découvert, qui provoquent d’importantes hécatombes de poissons dans les estuaires peu profonds riches en substances nutritives de la côte est des États-Unis (Lewitus et al., 1995; Noga et al., 1996).  

Notre examen des EEUM au Canada montre que la dégradation à grande échelle de l’environnement découlant du rejet d’eaux usées est rare. On note cependant des effets nuisibles pour l’environnement et la santé humaine en aval de collectivités urbaines qui déversent d’importantes quantités d’eaux usées ou pluviales peu ou aucunement traitées ou en aval de collectivités où le taux de renouvellement des eaux réceptrices est faible. Il y a aussi les problèmes que pose la prestation de services à des collectivités largement dispersées et de faible population, comme celles des zones rurales et nordiques. Il n’existe guère de renseignements sur les réactions à une exposition à long terme à de faibles concentrations de substances chimiques ou sur la dégradation de l’habitat et les incidences environnementales cumulatives. 

Au niveau international, on reconnaît que la pollution marine dépend de façon appréciable de sources de pollution dans les cours d’eau, dont les rejets d’eaux usées municipales. Le PNUE a mis sur pied le « Plan d’action mondial pour la protection du milieu marin contre la pollution due aux activités terrestres ». Cette initiative comporte un programme d’action mondial qui a été appuyé par les gouvernements en 1995 (PNUE, 1995). Des conférences récentes des Nations Unies (Nations Unies, 1992a; PNUE, 1995) ont permis de définir des initiatives, des politiques et des mesures pour maintenir ou rétablir la qualité des eaux intérieures et côtières et protéger la santé humaine des conséquences du rejet d’eaux usées:

L’adoption de ces mesures suppose de nouvelles initiatives intégrées aux niveaux local, national et, dans le cas des eaux côtières, mondial pour la gestion des EEUM et l’évaluation des risques environnementaux.

Nos résultats quant aux effets du rejet d’eaux usées municipales au Canada et les mesures récemment proposées par les Nations Unies (1992a, 1995) indiquent la nécessité de procéder à un examen des exigences en matière de traitement des eaux usées au Canada. Ces exigences devraient refléter les paramètres des eaux réceptrices locales, notamment la chimie de l’eau, la biodiversité et les utilisations humaines de la ressource. Notre évaluation des incidences du rejet d’eaux usées municipales met aussi l’accent sur le besoin de recherches sur les réactions interdépendantes et cumulatives à l’exposition à long terme à des substances chimiques et à la dégradation de l’habitat. Enfin, notre examen souligne, en matière de gestion des eaux usées, la nécessité d’une démarche intégrée prenant en considération les charges ayant pour origine les usines de traitement, les eaux pluviales et les TPEU, ainsi que d’autres sources d’eaux usées. Dans les régions où le traitement des eaux usées est poussé, la gestion des eaux pluviales et la régulation ou le traitement des TPEU sont aussi avancés car en l’absence d’une démarche intégrée de réduction des sources de pollution ponctuelles et diffuses, il est impossible d'améliorer la qualité des eaux réceptrices.

Section précédent | Retour au Documents de référence | Prochaine section

Détails de la page

Date de modification :