Méthode d’essai biologique : essais toxicologiques sur des truites arc-en-ciel aux premiers stades de leur cycle biologique : chapitre 3
Section 3 : Système expérimental
3.1 Installations, matériaux
L’essai devrait se dérouler dans une installation isolée des causes générales de perturbation du laboratoire. Faute d’une pièce isolée, le secteur affecté à l’essai devrait être entouré d’un rideau opaque (p. ex. de plastique noir) afin de réduire au minimum le stress chez les embryons, les alevins ou les truitelles. La poussière et les émanations devraient être réduites au minimum.
On doit pouvoir maintenir une température moyenne journalière de 14 ± 1,0 °C dans toutes les solutions d’essai (v. § 4.3.3). Pour cela, on pourrait devoir assurer le chauffage ou le refroidissement, sur canalisation, de l’eau témoin ou de l’eau de dilution, et on pourrait avoir besoin d’un vivier expérimental thermostaté, avec programmation de la photopériode, et de divers types d’équipement comme des appareils portatifs de chauffage ou de refroidissement de l’eau.
Le laboratoire doit être doté des instruments de mesure des variables fondamentales de la qualité de l’eau (température, conductivité, OD, pH) et il devrait être prêt pour l’analyse rapide et fidèle d’autres variables telles que la dureté, l’alcalinité, l’ammoniaque et le chlore résiduel.
Les matériaux ou l’équipement qui pourraient entrer en contact avec les substances ou les solutions d’essai ou l’eau témoin ou de dilution ne doivent aucunement renfermer de substances qui peuvent être entraînées par lixiviation dans l’échantillon, les solutions ou l’eau à des concentrations susceptibles de provoquer des effets toxiques. Il faudrait utiliser des matériaux tels que le verre borosilicaté (p. ex. PyrexMC), l’acier inoxydable, la porcelaine, le nylon, le polystyrène haute densité ou les plastiques à base d’hydrocarbures perfluorés. On peut utiliser également d’autres plastiques non toxiques tels que le polypropylène ou le polyéthylène, mais, on ne devrait les réutiliser qu’après nettoyage à fond (p. ex. lavage à un détersif non phosphaté, puis trempage dans l’acide et plusieurs rinçages à l’eau désionisée) pour réduire au minimum le risque de libération ultérieure de toxiques adsorbés. Pour les essais employant des produits chimiques (v. section 5), on recommande le verre pour les récipients et l’appareillage entrant en contact avec les solutions d’essai, avant et durant ce dernier.
3.2 Éclairage
L’essai devrait se dérouler à l’obscurité jusqu’à la première semaine après l’éclosion des embryonsNote de bas de page 3. Pendant le reste de l’essai, il faudrait un éclairage tamisé. L’intensité lumineuse à la surface de l’eau devrait se situer dans la fourchette de 100 à 500 lux. Selon les exigences et l’objectif de l’essai, l’éclairage, vertical et en spectre continu, devrait provenir de luminaires fluorescentsNote de bas de page 4. La photopériode devrait normalement être de 16 ± 1 h. On recommande une transition de 15 à 30 min entre la clarté et l’obscuritéNote de bas de page 5.
3.3 Appareillage
En 1996, on a remis sur la planche à dessin l’appareillage représentée dans Environnement Canada (1992a), qui avait servi dans un certain nombre d’essais toxicologiques employant des embryons ou des alevins de salmonidés (McLeay et Gordon, 1980 ; Martens et al., 1980 ; Hodson et al., 1991). Le nouvel appareillage s’est révélé efficace quand on l’a éprouvé (Yee et al., 1996). L’incubateur et l’appareillage connexe que l’on recommande désormais (figure 3) se montent facilement et à peu de frais et ils permettent l’aération selon un débit lent et/ou la circulation ininterrompue des solutions d’essai à proximité des embryons ou des alevins ainsi que le renouvellement facile des solutions avec le minimum de dérangement pour le milieu. En outre, l’incubateur permet aux embryons et aux alevins de rester immergés dans la solution d’essai au cours de son renouvellement. L’incubateur est constitué d’un becher de plastique de 800 mL (au moins) Tri-PourMC, de forme légèrement tronconique. Contrairement au modèle antérieur, qui exigeait d’en remplacer le fond par un grillage de plastique (EC, 1992a), le fond du nouveau becher reste intact, et on découpe, dans la paroi, près du fond, une série de fentes horizontales, pour permettre la circulation des solutions d’essai dans le becher (Yee et al., 1996 ; fig. 3A). On perce un orifice circulaire dans le fond du becher, au centre, dans lequel on insère par pression un tube, amovible, de 5 cm de longueur, découpé dans une pipette jaugée de polystyrène jetable de 10 mL. Ce tube fera office de gaine.
On peut facilement suspendre l’incubateur dans une enceinte expérimentale en l’insérant dans un orifice de 10 cm de diamètre découpé dans le couvercle de l’enceinte (p. ex. le couvercle de plastique d’un seau de plastique blanc de 4 L). On peut découper dans le couvercle un second orifice, plus étroit (environ 6 cm de diamètre ; Yee et al., 1996) pour permettre la surveillance de la qualité de l’eau au cours de l’essai (§ 4.3). Le volume de solution gardé dans chaque enceinte ne devrait pas être déterminé de façon arbitraire, mais il devrait découler de l’examen du volume de solution d’essai fraîche à fournir chaque jour (§ 4.3.2) tout au long de la période d’exposition des embryons ou des alevins. On renouvelle journellement (ou plus souvent) chaque solution d’essai, par aspiration ou siphonnement d’environ 80 % de la vieille solution et par son remplacement immédiat par une solution fraîche, de même titre (c’est-à-dire essai à renouvellement intermittent) ou par l’adjonction continue d’une solution fraîche à l’enceinte (c’est-à-dire à renouvellement continu [§ 4.3.2]).
L’enceinte expérimentale devrait pouvoir s’adapter, selon leurs exigences et leurs objectifs, aux essais avec renouvellement intermittent ou continuNote de bas de page 6. On recommande pour les essais avec renouvellement intermittent (§ 4.3.2) le montage expérimental montré dans la figure 3B. Dans ce montage, on fait barboter l’air filtré, exempt d’huile, qui parcourt une longueur convenable (p. ex. 60 cm) de tube capillaire de polyéthylène de 0,5 mm, d.i., inséré dans la gaine centrale émergeant du fond de l’incubateur (fig. 3B)Note de bas de page 7. Ce système d’aération qui peut aussi se prêter aux essais à renouvellement continu, débite un courant ininterrompu d’eau aérée aux embryons ou aux alevins.
Pour les essais à renouvellement continu (v. § 4.3.2), le montage de la figure 3C est recommandé. On peut l’utiliser avec ou sans aérationNote de bas de page 6,Note de bas de page 8. Les embryons ou alevins baignent dans un courant continu de solution fraîche traversant l’enceinte expérimentale (fig. 3C). En s’inspirant du montage pour l’essai en conditions statiques montré à la figure 3C, on suspend l’incubateur à une hauteur, autour de la gaine assujettie qui en traverse le centre et le fond de l’enceinte expérimentale. À l’extrémité supérieure de la gaine, on fixe une crépine de plastique pour retenir les embryons ou les alevins.
Qu’un ou plusieurs incubateurs y soient suspendus, chaque enceinte expérimentale, constitue une répétition. Pour chaque concentration d’essai ou pour chaque témoin, on doit compter au moins trois enceintes expérimentales séparées, assurant une véritable répétition de conditions, ce qui permet le calcul convenable de l’erreur expérimentale (v. § 4.1 et 4.5). S’il faut vérifier des hypothèses, par exemple estimer le rapport CSEO/CEMO, on devrait utiliser quatre enceintes expérimentales distinctes ; c’est là le minimum exigé s’il fallait utiliser des tests statistiques non paramétriques.
On peut utiliser un autre type d’enceinte expérimentale (p. ex. Canaria et al., 1996), à la condition d’atteindre les objectifs de l’essai et de respecter les critères de validité (§ 4.6). Cependant, il est recommandé d’utiliser l’appareillage représenté à la figure 3, pour l’incubation des embryons et des alevins, dans le souci d’une normalisation plus poussée des conditions d’incubation.
Figure 3. Montages recommandés pour le renouvellement intermittent ou continu des solutions d’essai durant l’incubation des embryons ou des alevins

- Vue éclatée de l’incubateur modifié et des pièces connexes, y compris des fentes horizontales dans sa paroi.
- Incubateur suspendu dans l’enceinte expérimentale et les trajets de l’air et de l’eau (courant ascendant).
- Incubateur suspendu dans l’enceinte expérimentale, non aéré, avec vue de la gaine d’évacuation et du courant créé par la circulation de la solution.
Description longue de la figure 3
Cette figure comprend trois illustrations. La partie A représente une vue éclatée de l’incubateur modifié et des pièces qui y sont associées. L’appareil est composé de trois éléments principaux. L’un de ces éléments est un bécher de 800 ml; ce dernier sert d’unité d’incubation. Ce bécher compte six fentes horizontales et un orifice au fond pour y insérer une gaine de 5 cm de diamètre découpée dans une pipette. Le dernier élément illustré dans l’image A est le couvercle de l’enceinte expérimentale (p. ex., couvercle d’un seau de plastique de 4 L); celui-ci comporte deux trous. Ces trous ont un diamètre de 10 cm et de 6 cm et visent respectivement à loger l’incubateur et à renouveler la solution.
L’image B représente un montage pour le renouvellement intermittent. La gaine découpée dans une pipette a été insérée au fond de l’incubateur, et l’incubateur a été placé dans l’enceinte expérimentale. L’enceinte est remplie d’une solution d’essai environ jusqu’à la moitié de la hauteur de l’incubateur. L’écoulement de la solution d’essai dans l’incubateur est généré en suspendant un tube d’aération de 0,5 mm à la partie supérieure de l’incubateur de manière à ce que l’extrémité aboutisse au milieu de la gaine (plus ou moins alignée avec le fond de l’incubateur). L’air passe ensuite par ce tube étroit, et les bulles qui s’élèvent tirent la solution d’essai vers le haut par le fond de l’incubateur, puis hors des fentes latérales horizontales.
L’image C illustre un montage pour le renouvellement continu. Ce montage est similaire à celui décrit à l’image B, mais avec l’ajout d’une crépine à la partie supérieure de la gaine et d’un bac de réception des résidus sous l’enceinte expérimentale. La gaine va ici jusqu’au fond de l’enceinte expérimentale, et la crépine est ajoutée à la partie supérieure pour empêcher la perte d’embryons ou d’alevins. Dans ce montage, de la solution d’essai est constamment ajoutée par le trou dans le couvercle de l’enceinte expérimentale. Cet apport constant de solution fait en sorte que cette dernière s’écoule par les fentes horizontales de l’incubateur, puis dans la gaine. La solution d’essai qui s’écoule de la gaine est recueillie dans le bac de réception des résidus.
3.4 Eau témoin et dilution
Selon la nature de la substance d’essai et l’objectif de l’essai (sections 5 à 7), l’eau témoin ou l’eau de dilution peut être de l’eau souterraine ou de surface (d’un cours d’eau ou d’un lac) « non contaminée » ; de l’eau reconstituée, du pH et de la dureté voulus (p. ex. simulant ceux de l’eau réceptrice) ; un échantillon d’eau réceptrice prélevé en amont de la source de contamination ou à proximité, mais à l’abri de son influence ; ou de l’eau déchlorée de la municipalitéNote de bas de page 9.
On devrait avoir montré que l’eau d’alimentation pourvoit de façon constante et fiable à la santé, à la survie et à la croissance des organismes en expérience. On devrait contrôler et évaluer aussi souvent que nécessaire les variables telles que la teneur en chlore résiduel (si on utilise l’eau de la municipalité), le pH, la dureté, l’alcalinité, la teneur en carbone organique total, la conductivité, la teneur en matières en suspension, en OD, en gaz totaux en dissolution, la DCO, la température, la teneur en azote ammoniacal, les nitrites, les métaux et les pesticides, aussi souvent que cela est nécessaire pour étayer la qualité de l’eau (p. ex. mensuellement ou plus souvent encore si on soupçonne ou on constate une dégradation de la qualité de l’eau) [v. tableau 1]. Les conditions du prélèvement, du transport et de l’entreposage des échantillons d’eau réceptrice, si cette dernière sert d’eau témoin et d’eau de dilution, devraient être conformes à celles que l’on décrit au § 6.2.
Si on utilise de l’eau de surface comme eau témoin ou eau de dilution, on devrait la filtrer et/ou la stériliser. Conviendraient à cette fin un filtre à sable classique ou un filtre commercial sur canalisation. On peut filtrer les petites quantités d’eau à l’aide d’un filet à mailles serrées ≤ 60 µm). La stérilisation aux UV est recommandée pour réduire le risque d’introduction de pathogènes dans le laboratoire et les viviers. L’eau doit être préalablement réglée à la température exigée pour les essais (v. § 4.3.3). La pression totale de gaz de cette eau ne devrait pas excéder 100 %Note de bas de page 10.
En outre, sa teneur en OD devrait être de 90 à 100 % de la valeur de saturation en air, avant emploi. Si c’est nécessaire, on devrait aérer vigoureusement l’eau (en faisant traverser de la pierre poreuse à de l’air comprimé exempt d’huile) immédiatement avant l’emploi et vérifier que la concentration d’oxygène correspond au taux de saturation de 90 à 100 %.
Variable | Limites recommandées d’exposition |
pH | 6,5 à 8,5 (7,5 à 8,0 souhaitable) |
Dureté | 15 à 150 mg de CaCO3/L |
Alcalinité | 20 à 200 mg de CaCO3/L |
Aluminium | < 5 µg/L (à pH ≤ 6,5) < 0,1 mg/L (à pH > 6,5) |
Ammoniac (non ionisé) | < 5 µg/L (de préférence non décelable) |
Cadmium | < 0,3 µg/L (dans l’eau douce) < 0,5 à 0,75 µg/L (dans l’eau dure) |
Chlore | < 2 µg/L |
Cuivre | < 6 µg/L (dans l’eau douce) < 30 µg/L (dans l’eau dure) |
Dioxyde de carbone dissous | 0,03 à 15 mg/L |
Oxygène dissous | 90 à 100 % de saturation |
Cyanure d’hydrogène | < 10 µg/L |
Sulfure d’hydrogène | < 2 µg/L (de préférence non décelable) |
Fer | < 0,3 mg/L |
Plomb | < 1 µg/L (dans l’eau douce) < 2 µg/L (dans l’eau dure) |
Mercure | < 0,05 µg/L |
Nitrites | < 60 µg/L (de préférence non décelable) |
Azote (gazeux, en dissolution) | < 1 00 à 103 % (pression partielle maximale) < 1 03 % (pression totale de gaz) |
Sélénium | < 10 µg/L |
Matières totales en suspension | < 3 mg/L au cours de l’incubation <2 5 mg/L au cours du stade des alevins et des truitelles |
Zinc | < 0,03 mg/L (dans l’eau douce) < 0,3 mg/L (dans l’eau dure) |
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