Méthode d’essai biologique : essais toxicologiques sur des truites arc-en-ciel aux premiers stades de leur cycle biologique : chapitre 5
Section 5 : Modes opératoires particuliers pour la mesure de la toxicité de produits chimiques
- 5.1 Options
- 5.2 Propriétés, étiquetage et entreposage de l’échantillon
- 5.3 Préparation et aération des solutions d’essai
- 5.4 Eau témoin ou de dilution
- 5.5 Observations et mesures
- 5.6 Paramètres ultimes de mesure et calculs
La présente section renferme, sur la mesure de la toxicité de produits chimiques, des instructions particulières qui s’ajoutent aux modes opératoires exposés dans la section 4. On effectue habituellement un essai à l’aide de concentrations multiples, afin de déterminer les paramètres ultimes de mesure des options E, EA ou EAT.
5.1 Options
Selon les objectifs et les exigences réglementaires, on peut entreprendre l’évaluation de la toxicité d’un ou de plusieurs échantillons de produits chimiques pour les premiers stades de vie de la truite arc-en-ciel, par l’essai E, l’essai EA ou l’essai EAT (§ 4.3.1 et 4.3.6). L’essai EAT pourrait convenir plus particulièrement aux évaluations réglementaires exigées pour l’homologation d’un pesticide ou d’une catégorie semblable de produits chimiques ou pour d’autres évaluations réglementaires de produits chimiques. Le même essai pourrait aussi servir à des travaux de recherche visant à évaluer définitivement la toxicité d’un produit à l’égard de la truite arc-en-ciel. L’essai EA pourrait servir à ces fins, pour la sélection comparative de plusieurs produits chimiques, à l’égard de leur toxicité relative pour la truite arc-en- ciel, tandis que l’essai E pourrait servir aux surveillances fréquentes. Le choix de l’essai le plus convenable devra prendre en considération les caractéristiques physico- chimiques ainsi que le mode d’action toxique de la substance.
Lorsque l’on organise un essai EA ou EAT, il est recommandé d’établir un essai E employant plusieurs concentrations et de l’exécuter en même temps que les autres, en employant la substance chimique d’essai et des œufs fécondés provenant du même bassin d’organismes d’essai. Les conclusions de l’essai E donneront une idée du taux de réussite de la fécondation chez les témoins des essais EA et EAT et elles seront utiles à l’évaluation de la sensibilité relative à la substance d’essai des options visant à évaluer les caractéristiques aiguës (E) et à plus long terme (EA ou EAT).
Avant de recourir fréquemment ou usuellement à l’essai E à des fins réglementaires ou autres comportant l’évaluation préliminaire de la toxicité de produits chimiques, il est recommandé d’en comparer d’abord la sensibilité à celle de l’essai EAT, afin d’assurer que les résultats offriront une protection suffisante, compte tenu des objectifs poursuivis.
5.2 Propriétés, étiquetage et entreposage de l’échantillon
On devrait se renseigner sur les propriétés du produit à évaluer, y compris sur sa solubilité dans l’eau, sa pression de vapeur, sa stabilité chimique, ses constantes de dissociation et sa biodégradabilité. On devrait consulter, si elles existent, les fiches signalétiques (de santé-sécurité) de la substance d’essai. Lorsque la solubilité dans l’eau est incertaine ou problématique, on devrait se doter des modes opératoires ayant servi à la préparation de solutions aqueuses du produit et les signaler. On devrait recueillir et consigner d’autres renseignements disponibles tels que la formule développée, le degré de pureté, la nature et le pourcentage des impuretés importantes, la présence et la quantité d’additifs ainsi que le coefficient de partage entre le n-octanol et l’eauNote de bas de page 35. On devrait aussi connaître une méthode acceptable de dosage du produit dans l’eau, aux concentrations prévues pour l’essai, ainsi que sa précision et son exactitude.
Les récipients renfermant le produit chimique doivent être scellés et codés ou étiquetés, dès leur réception (p. ex. nom du produit, fournisseur, date de réception). Les conditions d’entreposage (p. ex. température, protection contre la lumière) sont souvent dictées par la nature du produit, il faudrait suivre les modes opératoires normalisés pour manipuler et entreposer le produit ou, sinon, ceux que recommandent les fabricants, une fiche signalétique ou de semblables sources de renseignements et de conseils.
5.3 Préparation et aération des solutions d’essai
Habituellement, on prépare les solutions du produit chimique par l’ajout de parties aliquotes d’une solution mère dont le solvant est de l’eau témoin ou de l’eau de dilution. On peut aussi, dans le cas des solutions très concentrées ou de volumes importants, ajouter des quantités pesées (à la balance de précision) du produit à de l’eau témoin ou de dilution pour obtenir les titres nominaux d’essai. Si on utilise des solutions mères, on devrait au préalable en déterminer le titre et la stabilité. On devrait protéger de la lumière les solutions mères susceptibles de photolyse et préparer aussi souvent qu’il est nécessaire les solutions instables, afin de maintenir les concentrations pour chaque renouvellement des solutions d’essai.
Dans le cas des substances peu solubles dans l’eau, on peut préparer les solutions mères à l’aide de la technique de la colonne génératrice (Billington et al., 1988 ; Shiu et al., 1988) ou, ce qui est moins souhaitable, par dispersion ultrasonique. Cette dernière peut produire des gouttelettes non uniformes, de différentes tailles, dont certaines pourraient gagner la surface du liquide ou présenter une assimilabilité biologique variable, ce qui pourrait faire varier la toxicité. On ne devrait pas utiliser de solvants organiques, d’émulsifiants ou de dispersants pour accroître la solubilité du produit, sauf lorsque ces substances risquent d’entrer dans la composition normale de la préparation commerciale du produit. Si on en utilise, on doit préparer une solution témoin supplémentaire, renfermant la même concentration de l’agent solubilisant que dans la solution la plus concentrée du produit chimique d’essai. On devrait utiliser ces agents parcimonieusement, leur concentration ne devant jamais dépasser 0,1 mL/L dans les solutions d’essai. Quant aux solvants, ceux dont l’emploi est préférable sont : le diméthylformamide, le triéthylèneglycol, le méthanol, l’éthanol et l’acétone (USEPA, 1985b).
À la préparation de chaque solution d’essai, y compris du ou des témoins, on devrait en doser l’OD. Ensuite, on devrait aérer préalablement chaque solution d’essai (§ 4.3.4). Dans la plupart des cas, l’aération préalable, (antérieure à l’exposition des poissons) et l’aération (durant l’exposition des poissons) des solutions n’est pas nécessaire ni justifiée, et on devrait l’éviter à moins que les concentrations d’OD ne s’écartent de l’intervalle de 60 à 100 % de saturation en un instant déterminé (v. § 3.3, y compris les notes 6 à 8).
Tout essai effectué sans aération devrait être à renouvellement continu (v. § 3.3, 4.3.2 et fig. 3C), pour permettre la circulation continuelle des solutions d’essai autour des embryons ou des alevins qui se développent. Si l’aération préalable ou l’aération est convenable (p. ex. le taux d’OD dans au moins une solution d’essai est inférieur à 60 % ou supérieur à 100 % de saturation en air), il faudrait suivre les conseils donnés au § 4.3.4.
5.4 Eau témoin ou de dilution
Cette eau peut être de l’eau naturelle souterraine ou de surface, de l’eau reconstituée, de l’eau municipale déchlorée (en dernier recours, si c’est nécessaire ; v. § 3.4) ou un échantillon d’eau réceptrice, si on s’intéresse particulièrement à une situation locale. Le choix dépend de l’objet de l’essaiNote de bas de page 36.
Si, pour les besoins de la comparaison, il faut pousser plus loin l’uniformisation, on devrait préparer une eau reconstituée, douce, et l’utiliser dans le milieu témoin et dans toutes les solutions filles (dureté de 40 à 48 mg de CaCO3 par litre, pH de 7,2 à 7,5)Note de bas de page 37 (USEPA, 1985b ; EC, 1990b).
Si l’on doit évaluer l’effet toxique d’un produit chimique dans une eau particulière, on pourrait prélever des échantillons de cette eau réceptrice en un endroit isolé de l’influence du produit, puis l’utiliser comme eau témoin ou eau de dilutionNote de bas de page 38. Par exemple, il peut s’agir d’évaluer les effets toxiques, dans un plan d’eau particulier, de déversements ou d’applications intentionnelles, tant réelles que potentielles de substances ou d’un pesticide. À cette fin, on peut se servir de l’eau d’approvisionnement du laboratoire, notamment si le prélèvement et l’utilisation de l’eau réceptrice sont impraticables. L’eau normale de laboratoire convient également à l’évaluation préliminaire ou intralaboratoire de la toxicité d’un produit chimique.
5.5 Observations et mesures
Outre les observations relatives à la toxicité exposées dans le § 4.4, il faut en effectuer d’autres, ainsi que des mesures, au cours des essais de produits chimiques.
Pendant la préparation des solutions et à chacune des périodes d’observation prescrites, on devrait examiner chaque solution afin d’observer la présence et l’évolution du produit chimique (p. ex. odeur, couleur, opacité, précipitation ou floculation). On devrait consigner les observations.
Il est souhaitable et recommandé d’analyser les solutions d’essai afin de doser les produits chimiques auxquels les embryons, les alevins et les truitelles sont exposésNote de bas de page 39. Pour les besoins d’éventuels dosages, on devrait prélever des parties aliquotes de l’échantillon dans toutes les répétitions, pour le moins aux concentrations élevée, moyenne et faible et dans le ou les témoins. On devrait effectuer des analyses séparées des parties aliquotes, de préférence d’échantillons prélevés immédiatement avant le début de l’exposition initiale et à des intervalles hebdomadaires, par la suite, jusqu’à la fin de l’essai. Au cours de ces journées d’échantillonnage, on devrait prélever des parties aliquotes séparées des milieux des essais avec renouvellement intermittent au début et à la fin des périodes de renouvellement ; dans les essais avec renouvellement continu des solutions, on devrait prélever des parties aliquotes deux fois par jour, au moins à six heures d’intervalle.
Si les dosages montrent un déclin des concentrations de plus de 20 % au cours de l’essai, on devrait réévaluer la toxicité du produit chimique au moyen d’un essai dans lequel on renouvelle les solutions plus fréquemment, soit de façon intermittente, soit en continu. Si on constate la disparition ou le déclin rapide du toxique, on pourrait utiliser un essai avec renouvellement continu à débit élevé, pour maintenir des concentrations stables du produit en solution (peut-être moindres mais stables) [McKim, 1985].
Dans tout essai où l’on mesure les concentrations, on devrait calculer et exprimer la toxicité en fonction des concentrations mesurées, à moins d’avoir de bons motifs de douter de leur exactitude. En faisant les calculs, on devrait caractériser chaque solution d’essai par la concentration mesurée moyenne géométrique. Le but des intervalles entre les prélèvements et des calculs des moyennes devrait être d’obtenir des concentrations moyennes équilibrées dans le temps et réalistes auxquelles les organismes ont été exposés.
5.6 Paramètres ultimes de mesure et calculs
Les paramètres de mesure des essais effectués avec les produits chimiques seront les paramètres habituels, c’est-à-dire la CE 50 et la CE 25, pour la non-viabilité aux divers stades du cycle biologique, dans les essais E, EA et EAT ainsi que, dans ce dernier essai, la CL 50 après 30 jours et la CI 25 après 30 jours pour le poids moyen atteint par les truitelles. Dans les essais de longue durée, on demande d’autres comptes rendus descriptifs sur les retards du développement, les difformités et le comportement ainsi que des observations (facultatives) supplémentaires présentées dans le détail, conformément au § 4.5.
Si on utilise un témoin du solvant pour garder la substance d’essai en solution, il faut s’assurer que ce solvant ne provoque pas lui-même d’effets excessifs. L’essai est rendu invalide si le témoin du solvant (ou le témoin non traité) ne satisfait pas aux critères de validité de l’essai précisés au § 4.6.
Quand on utilise un solvant ou un autre produit chimique, il devient le témoin pour évaluer l’effet du toxique. Les données relatives au témoin du solvant ne doivent pas être réunies aux données sur l’eau témoin ou de dilution. Cette opération ne conviendrait pas, puisque cela pourrait affecter les calculs des paramètres ultimes de mesure d’une erreur systématique ; l’eau témoin ou de dilution est privée d’un facteur qui pourrait agir sur les organismes aux autres concentrations (c’est-à-dire le solvant).
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