Méthode d’essai biologique : essais toxicologiques sur des truites arc-en-ciel aux premiers stades de leur cycle biologique : chapitre 4
Section 4 : Modes opératoires universels
- 4.1 Préparation des solutions d’essai
- 4.2 Début de l’essai
- 4.3 Conditions d’essai et modes opératoires
- 4.4 Observations et mesures
- 4.5 Paramètres de mesure et calculs
- 4.5.1 Paramètres biologiques de mesure
- 4.5.2 Concentrations efficaces et létales
- 4.5.3 Concentration inhibitrice correspondant à un pourcentage d’effet précisé
- 4.5.4 Concentration sans effet observé (CSEO) et concentration avec effet minimal observé (CEMO)
- 4.5.5 Test t de Student
- 4.5.6 Test de Tukey
- 4.6 Validité de l’essai
- 4.7 Considérations juridiques
Les modes opératoires décrits dans les pages qui suivent s’appliquent à chacun des essais toxicologiques d’un produit chimique, d’une eau usée ou d’une eau réceptrice décrits dans les sections 5, 6 et 7. Il faut y intégrer tous les aspects du système expérimental décrit dans la section 3. La liste sommaire de contrôle des conditions expérimentales et des modes opératoires recommandés du tableau 2 ne décrit pas seulement les modes opératoires propres à chaque espèce, mais aussi les modes opératoires d’essai de types précis de substances.
4.1 Préparation des solutions d’essai
Il faut nettoyer et rincer à fond tous les récipients, appareils de mesure, agitateurs et tout l’équipement de manipulation des poissons, conformément aux modes opératoires normalisés. Le rinçage final devrait se faire à l’eau de contrôle ou de dilution.
Pour chaque essai visant à déterminer la CE 50, la CL 50, la CIp ou le rapport CSEO/CEMO (§ 4.5), il faut préparer au moins cinq concentrations d’essai ainsi qu’un témoin (eau de dilution à 100 %). Pour les essais EA et EAT, dont les multiples paramètres ultimes de mesure se fondent sur les effets létaux et sublétaux (§ 4.5), on recommande un plus grand nombre de concentrations (p. ex., 6 à 8 plus le témoin) afin d’améliorer la possibilité d’atteindre chaque paramètre ultime recherché de mesure. La série de dilutions peut être géométrique (p. ex. 100, 32, 10, 3,2, 1,0 ; ou 100, 46, 22, 10, 4,6, 2,2, 1,0). On peut choisir les concentrations à partir d’autres séries logarithmiques convenables (v. annexe E). Dans les cas où l’on est moins sûr de la gamme des concentrations susceptibles d’être toxiques, on recommande une série géométrique dans laquelle chaque concentration successive est la moitié de celle qui la précède (p. ex. 100, 50, 25, 12,5, 6,3). Habituellement, on n’améliore pas beaucoup la précision en utilisant des coefficients de dilution inférieurs à 50 % (c’est-à-dire des concentrations plus proches les unes des autres). Si on doute fortement des concentrations toxiques, on devrait utiliser un nombre plus grand de concentrations pour en obtenir un grand étalement, plutôt que d’utiliser un coefficient moindre de dilution. Les volumes à utiliser pour les essais varieront selon l’option (E, EA ou EAT) utilisée (v. § 4.3.2, 5.1, 6.1 et 7.1).
Pour les besoins de la réglementation, les essais pourraient porter sur une concentration unique (p. ex. réussite ou échec [tout ou rien]), c’est-à-dire, normalement, sur l’effluent, l’élutriat, le lixiviat ou l’eau réceptrice non diluée ou une concentration arbitraire ou réglementaire. L’emploi de témoins obéirait à la même logique que les essais avec concentrations multiples. Nous ne décrivons pas d’essais avec concentration unique, mais le mode opératoire est évident, et toutes les règles s’appliquent, à ceci près que l’essai porte sur une seule concentration et utilise un témoin.
On doit entreprendre l’essai avec au moins trois répétitions de chaque concentration, y compris les témoins. Si les paramètres ultimes de mesure doivent être calculés au moyen de tests d’hypothèses (c’est-à-dire rapport CSEO/CEMO), il faut au moins quatre répétitions par concentrationNote de bas de page 11. L’essai doit débuter avec un nombre égal de répétitions par concentration, y compris les témoins. Si, accidentellement, une répétition est détruite au cours de l’essai, on peut analyser un ensemble asymétrique de résultats, mais avec moins de puissance (EC, 1998b).
Dans un essai donné, il faut utiliser la même eau témoin ou de dilution pour préparer le témoin et toutes les concentrations d’essai. Chaque solution doit être constituée d’un volume identique et être bien agitée au moyen d’une tige de verre propre, d’une barre aimantée de TéflonMCou par tout autre instrument propre fait d’un matériau non toxique.
On devrait ajuster la température de l’échantillon (ou des échantillons) ou des solutions d’essai (y compris de l’eau témoin ou de dilution) selon les exigences de chaque option ou de chaque stade vital (v. § 4.3.3). Au besoin, on peut l’ajuster par chauffage ou refroidissement dans un bain d’eau ou par un refroidisseur à immersion, d’un matériau non toxique (p. ex. d’acier inoxydable). Il ne faut pas réchauffer les échantillons ou les solutions d’essai par des thermoplongeurs, lesquels peuvent altérer les constituants chimiques et la toxicité. On pourrait devoir régler le pH de ces milieux (v. § 4.3.5) ou aérer les solutions au préalable (§ 4.3.4).
Pour l’évaluation de l’effet toxique en un lieu donné, on peut se servir d’eau d’amont comme eau témoin ou de dilution. On ne peut pas utiliser d’eau d’amont si cette dernière est manifestement toxique, d’après les critères de l’essai auquel elle est destinée (v. § 4.6). Dans ce cas, il faut la prendre ailleurs (§ 3.4).
Tableau 2. Liste de contrôle des conditions et modes opérations recommandés
Options |
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Type d’essai |
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Espèces |
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Début de l’essai |
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Fin de l’essai |
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Eau témoin ou de dilution |
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Appareillage, renouvellement des solutions |
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Nombre d’organismes et de répétitions |
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Température |
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Oxygène ou aération |
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Éclairage |
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pH |
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Alimentation |
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Observations, sur chaque répétition |
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Mesures |
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Paramètres (ultimes) de mesure |
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Toxique de référence |
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Validité de l’essai |
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Solvants |
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Concentration |
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Besoins en échantillons |
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Transport et entreposage |
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Eau témoin ou de dilution |
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Forte teneur en matières solides |
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Besoins en échantillons |
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Transport et entreposage |
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Eau témoin ou de dilution |
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4.2 Début de l’essai
Les œufs doivent être fécondés à sec (consulter l’annexe D) afin de prévenir le début de la fermeture du micropyle et le durcissement à l’eau avant leur transfert dans les solutions d’essaiNote de bas de page 12. Il importe que la taille des œufs fraîchement fécondés soit aussi uniforme que possible, car elle peut influer sur celle des alevins et des truitelles (Beacham et al., 1985). On devrait mettre au rebut tous les œufs qui, à l’œil, sont nettement ou trop gros ou trop petits. Pour l’essai E, il faut utiliser au moins 120 embryons par concentration ; pour l’essai EA ou EAT, il en faut 120 à 320 (§ 4.3.1). À chaque concentration, y compris le ou les témoins, doivent correspondre au moins quatre enceintes expérimentales, si l’on prévoit un traitement statistique, y compris des tests d’hypothèses ; et il faut au moins trois répétitions par concentration si on prévoit d’appliquer des techniques d’estimation de paramètres ponctuels (p. ex. CE 50, CIp) [v. § 4.1 et 4.5].
Dans chaque enceinte, on devrait ajouter un nombre identique d’embryons. À raison de 40 embryons par répétitionNote de bas de13page 13, un essai comptant trois répétitions (comprenant cinq concentrations plus un témoin) exige 720 œufs. De même, un essai employant 80 embryons par répétition, trois répétitions et cinq concentrations plus un témoin exige 1 440 œufs. Les œufs doivent provenir d’un lot d’œufs évacués par pression de l’abdomen d’au moins quatre femelles de taille semblable (v. § 2.2 et annexe D).
On doit essayer « d’homogénéiser les unités expérimentales », pour éviter, entre les récipients, tout écart qui serait relié à l’expulsion provoquée des gamètes. On y parvient de deux façons. Les deux sont valides et conviennent aux mêmes analyses statistiques des résultats (Hubert, 1991). Dans la première, on peut réunir les embryons provenant de géniteurs différents ou d’opérations différentes d’expulsion des œufs, qui ont été gardés séparés, avant d’exposer ces embryons aux solutions d’essai. Dans la seconde, on peut répartir de façon égale les embryons provenant d’une opération donnée d’expulsion entre toutes les répétitions de toutes les concentrations, puis répartir de même les embryons obtenus semblablement d’autres femelles, entre tous les incubateurs pour constituer l’effectif complet de la répétition. La seconde méthode exige plus de soins et d’efforts d’élevage et de manipulation. Elle devrait cependant réduire le « bruit » des variations entre les répétitions de la même concentration et prévenir le risque, auquel est exposée la première méthode, d’obtenir de fortes proportions d’œufs non fécondés dans une répétition donnée, dans l’éventualité d’une telle fluctuation reliée à l’expulsion provoquée.
La fécondation doit être assurée par le brassage à sec des œufs et de la laitance pendant au moins cinq minutes (Fennell et al., 1998) et au plus 20 minutes (Birge et al., 1985). Après ce brassage, on devrait transvaser aussi rapidement que possible les groupes d’œufs fraîchement fécondés (les embryons) dans les solutions d’essai (consulter l’annexe D). Ce transvasement devrait se faire dans les 10 minutes suivant immédiatement les 5 à 20 minutes de fécondation et elle doit se terminer dans les 30 minutes suivant immédiatement la fécondation. Un court rinçage (de pas plus de 10 secondes) de chaque groupe d’embryons transvasés pourrait être nécessaire pour éliminer les débris et la laitance excédentaire. À cette fin, on pourrait utiliser soit de l’eau témoin ou de dilution ou une partie aliquote de la solution d’essai à laquelle sont destinés les embryons. Si on utilise de l’eau, son contact avec les embryons ne doit pas durer plus de quelques secondes, entre le moment de la fécondation et la mise en contact des œufs avec la solution d’essai. Il ne faut pas retenir pour l’essai d’œufs présentant des anomalies (p. ex. opaques ou blanc laiteux) ou qui sont notablement de taille insuffisante ou de taille excessive par rapport aux autres œufs. Il faut éliminer tout embryon peut-être blessé au cours du transvasement ; pour ce faire, on peut utiliser des pincettes ou une pipette de gros diamètre intérieur (7 à 10 mm) coiffée d’une poire en caoutchouc.
Il faut prendre bien soin de ne pas heurter ou laisser choir les embryons durant leur transfert vers les incubateurs ou de ne pas les manipuler inutilement. Dans les incubateurs, les embryons ont besoin d’un espace suffisant pour assurer un échange suffisant d’oxygène et l’évacuation des déchets du métabolisme. On doit les répartir uniformément sur le fond de chaque incubateur, pour qu’ils forment une couche d’une seule épaisseur et qu’ils ne soient pas agglutinés ou empilés les uns sur les autres. Cette répartition facilite également la reconnaissance et le dénombrement des embryons non viables ou de ceux qui éclosentNote de bas de page 14.
Au début de l’essai, il faut compter les embryons transvasés dans chaque incubateur, puis les recompter pour s’assurer de la présence du nombre exigé et apporter tous les correctifs nécessaires. Au cours du dénombrement, on peut, au besoin, soulever doucement l’incubateur jusque sous la surface de la solution d’essai. On devrait corriger le nombre d’embryons dans l’incubateur, au besoin, en récupérant les embryons excédentaires à l’aide d’une pincette ou d’une pipette de fort calibre munie d’une poire et en complétant les groupes déficitaires avec le nombre nécessaire d’œufs transférés doucement et avec prudence du ou des groupes restants d’œufs fécondés pour les besoins de l’essai. On devrait aussi alors examiner l’aspect de tous les embryons dans chaque incubateur et on devrait mettre au rebut et remplacer tout embryon à la taille, à la forme ou à la couleur atypiques.
En outre, on doit affecter formellement au hasard le groupe d’embryons de chaque incubateur à des concentrations et à des répétitions particulières. Il faut aussi, dans l’installation expérimentale, randomiser la position des concentrations expérimentales. Chaque enceinte expérimentale doit être clairement codée ou étiquetée afin d’identifier la substance et la concentration d’essai ainsi que la date et l’heure de mise en route de l’essai. On devrait vérifier et régler, si cela est nécessaire ou autorisé, la température, la concentration d’OD et le pH dans les enceintes expérimentales, pour les ramener à des valeurs acceptables (v. § 4.3.3, 4.3.4 et 4.3.5) avant d’y admettre les organismes.
Il est recommandé de mesurer la conductivité de chaque solution d’essai fraîche avant de la distribuer dans les enceintes expérimentales, pour en vérifier préalablement la concentration. On devrait aussi en vérifier la température, la concentration d’OD et le pH, au besoin, avant de l’employer.
Les embryons de salmonidés sont extrêmement sensibles à toute perturbation ou choc mécanique jusqu’au moment où l’on peut percevoir l’œil au travers la paroi de l’œuf (v. annexe D). C’est pourquoi il faut exécuter avec un surcroît de prudence les opérations suivies d’entretien (p. ex., le renouvellement intermittent des solutions) tout au long de l’essai E et dans la partie des essais EA et EAT qui précède la pigmentation de l’œil. Tant que l’œil n’est pas visible, l’élimination des embryons manifestement morts (c’est-à-dire opaques) ou des œufs non fécondés pour maîtriser les infections cryptogamiques devrait se faire avec beaucoup de prudence (sans perturber aucun des embryons survivants), à l’aide d’une pipette de gros calibre (7 à 10 mm) coiffée d’une poire de caoutchouc.
4.3 Conditions d’essai et modes opératoires
4.3.1 Options
On peut utiliser au moins une des trois options suivantes : un essai sur les embryons (E) pour la surveillance fréquente ou périodique ; un essai sur les embryons et les alevins (EA), pour mesurer les effets toxiques sur quelques stades du développement ; un essai sur les embryons, les alevins et les truitelles (EAT) pour les enquêtes de caractère définitif (v. sections 5 à 7). Les trois options commencent au début du développement des embryons et mesurent le développement et la survie au bout des premiers stades du cycle biologique. L’essai E doit débuter avec au moins 120 embryons par concentration (p. ex. trois répétitions de 40 embryons chacune par concentration) et il se termine normalement 7 jours après la fécondation. Cependant, on peut le prolonger jusqu’à 10 jours après la fécondation (Birge, 1996). Cette prolongation peut être indiquée pour l’obtention de résultats concluants, si les essais antérieurs ont montré que les embryons se développaient lentement. L’essai EA débute normalement avec 120 à 320 embryons par concentrationNote de bas de page 15 et il prend fin 7 jours après que l’on a constaté un taux d’éclosion de 50 % parmi les embryons survivants non nourris du groupe témoin. L’essai EAT débute aussi normalement avec 120 à 320 embryons par concentrationNote de bas de page 15 et il se termine 30 jours après que 50 % des sujets survivants du groupe témoin ont commencé à nager librement (v. § 4.3.6). Au cours des 30 jours de l’essai EAT, on nourrit journellement les truitelles, sauf le dernier jour. À la fin, on mesure le taux moyen de survie et le poids sec moyen des truitelles survivantes.
On peut appliquer n’importe laquelle de ces trois options pour évaluer des échantillons de produit chimique, d’effluent, d’élutriat, de lixiviat ou d’eau réceptrice, selon les objectifs de l’essai. L’essai E doit durer au moins 7 jours, l’essai EA une trentaine de jours et l’essai EAT environ 70 jours, selon les conditions expérimentales et les modes opératoires.
L’essai E ne mesure qu’un paramètre biologique ultime (la non-viabilité des embryons de truite arc-en-ciel). Cette option convient à la surveillance fréquente ou périodique, mais, parfois, on recommande une comparaison initiale avec l’essai EA ou EAT, plus définitif, ou l’utilisation de cet essai (v. § 5.1, 6.1 et 7.1). Cette comparaison ou l’utilisation d’un essai EA ou EAT pourrait convenir à certaines substances possédant des modes inhabituels d’action, à la surveillance d’effets de certains types d’effluents sur l’environnement ou à un lixiviat ou à un effluent particulier.
4.3.2 Type d’essai et renouvellement des solutions
Les essais peuvent se dérouler avec renouvellement intermittent ou continu des solutions. Avec de nombreux types de substances, les essais en conditions statiques, avec renouvellement des solutions aux 12 ou aux 24 heures peuvent, s’ils sont réalisés correctement, être aussi sensibles et précis que les essais à renouvellement continu (Sprague, 1973). Avec certaines substances exerçant une forte DCO ou DBO ou, encore, instables, il pourrait être nécessaire de renouveler en continu (rapidement) les solutions.
Dans les essais à renouvellement intermittent, il existe deux façons de renouveler les solutions journellement ou plus fréquemment encore :
- préparer des solutions fraîches dans des enceintes expérimentales propres, puis déplacer prudemment et suspendre de nouveau les incubateurs renfermant les embryons ou les alevins survivants dans les solutions fraîches ;
- laisser les organismes dans le même récipient tout en renouvelant presque complètement les solutions par aspiration de 80 % du volume et son remplacement par une solution fraîche jusqu’à l’obtention du volume initial.
On pourrait se servir de cette dernière méthode dans les essais E avec renouvellement intermittent et, dans les essais EA ou EAT, au cours des deux premières semaines, à peu près. On devrait aspirer les vieilles solutions, en prenant les précautions voulues, puis ajouter la solution fraîche lentement, parce que les embryons sont très sensibles à toute perturbation ou choc mécanique tant qu’ils n’ont pas atteint le stade de l’œuf embryonné (v. § 4.2 et annexe D). Cette étape franchie, on peut suivre l’une ou l’autre des méthodes de renouvellement.
Les essais avec renouvellement continu exigent un système qui distribue aux enceintes expérimentales une série de concentrations prémélangées d’eau usée ou d’une autre substance d’essai, à un débit contrôlé. Divers dispositifs pourraient produire une série de plus en plus diluée de solutions filles de la solution mère ou d’une substance d’essai au moyen de pompes doseuses ou de dilueurs proportionnels. On devrait vérifier journellement, durant l’essai, le débit des solutions d’essai ou des solutions mères et de l’eau témoin ou de dilution, et sa valeur ne devrait pas varier de plus de 10 %.
La quantité minimale de solution d’essai dans chaque répétition est déterminée par deux conditions dont l’une a préséance sur l’autre ; il faut effectuer les calculs à l’égard de chacune de ces conditions, et il faut adopter celle qui exige le plus de solution d’essai fraîche. La première condition découle de la biomasse des organismes dans la répétition ; la quantité de solution d’essai fraîche exigée chaque jour augmente en proportion directe du croît des sujets. Dans ce cas, il faudra la même quantité de solution dans l’essai à renouvellement continu que dans celui à renouvellement intermittent. La deuxième condition est que, à toutes les 24 heures, il faut remplacer avec de la solution fraîche la plus grande partie de la vieille solution dans le récipient. Les volumes relatifs exigés en renouvellement continu ou intermittent dépendent du volume que renferme le récipient. Quand ce volume augmente, la seconde condition (concernant son remplacement) tend à l’emporter sur la première, laquelle, déterminée par la biomasse, devient moins importante. De même, le chercheur ne devrait pas choisir la contenance du récipient de façon arbitraire, mais il devrait fonder sa décision sur le calcul d’un volume convenable de solution dans le récipient, en ne négligeant pas la quantité disponible d’échantillons ou de produit chimique d’essai.
Ces deux conditions absolues sont minimales. Dans certains cas, un renouvellement minimal pourrait se traduire par une toxicité mesurée plus faible que celle que l’on aurait constatée par suite d’un apport plus généreux de solution d’essai. D’autres facteurs, c’est tout à fait possible, pourraient intervenir et accroître les besoins en solution fraîche. Par exemple, on pourrait avoir besoin de plus de cette dernière si les milieux présentaient des signes d’épuisement de l’oxygène.
La condition relative à la biomasse se formule comme suit : il devrait y avoir au moins 0,5 L de solution par gramme d’embryon ou d’alevin et par jour, c’est-à-dire ≥ 0,5 L/(g·j) et, pour les truitelles, cette quantité minimale est obligatoire. On peut estimer le chiffre en fonction de la biomasse maximale prévue au cours de l’essai ou on peut l’ajuster périodiquement quand l’essai est de longue durée. Par exemple, dans un essai EA (avec des truites arcs-en-ciel), 40 alevins de moyenne taille (p. ex. 125 mg, selon l’annexe D) représenterait en 5 g par répétition. Il faut donc au moins 2,5 L de solution fraîche d’essai par jour, que celle-ci soit renouvelée en continu ou par intermittence. Le débit d’alimentation de chaque répétition serait réglé de façon à fournir cette quantité, si c’est là la condition prioritaire.
La deuxième condition consiste à remplacer au moins 80 % de la solution d’essai de chaque récipient, chaque jour. En renouvellement intermittent, l’enceinte renfermerait normalement un volume de solution au moins égal à l’alimentation journalière exigée pour la biomasse, c’est-à- dire 0,5 L/(g·j). À toutes les 24 heures ou plus fréquemment, il faut renouveler ce volume, selon les méthodes déjà décrites. Le renouvellement intermittent pourrait devoir être plus fréquent, selon la nature de la substance d’essaiNote de bas de page 16. Dans un essai avec renouvellement continu, pour remplacer 80 % des molécules de la solution d’essai, il faudrait que le débit journalier entrant dans l’enceinte expérimentale égale au moins 1,6 fois le volume de liquide qui s’y trouve, dans l’hypothèse d’un brassage complet dans l’enceinte (Sprague, 1973).
Voici quelques exemples. Si le récipient doit renfermer 2 L de solution d’essai, à renouveler par intermittence journellement, 80 % de ce volume serait remplacé, c’est-à-dire 1,6 L. Ceci est moins que les 2,5 L exigés par la condition relative à la biomasse, énoncée dans l’exemple qui précède, mais ce n’est pas toujours ce qui se produit. Dans un essai à renouvellement continu, dans lequel chaque récipient renferme 2 L, le débit entrant devrait être de 1,6 × 2 L = 3,2 L, ce qui est plus que ce qu’exige l’essai avec renouvellement intermittent et plus que ce qu’exige la condition relative à la biomasse. On pourrait corriger ce volume s’il suffisait de 1 L, dans le récipient, pour recouvrir les embryons, et le débit entrant n’aurait à être que de 1,6 L/j. La réduction du volume que renferme le récipient et un apport continu relativement important pourraient être souhaitables si des toxiques volatils étaient présents dans la substance d’essai.
4.3.3 Température
Le rythme initial de développement de la truite arc-en-ciel et d’autres salmonidés dépend intimement de la température de l’eau (Peterson et al., 1977 ; Gordon et al., 1987 ; Peterson et Martin-Robichaud, 1989 ; Beacham et Murray, 1990), et différentes températures peuvent correspondre au développement et à la croissance optimaux de chaque stade ou de chaque espèce. Dans l’essai E, la température moyenne journalière doit être de 14 ± 1,0 °C pour les embryons de la truite arc-en-ciel (Fennell et al., 1998) ; la température instantanée à laquelle les répétitions doivent se trouver ne doit pas varier de plus de 3 °C. Cet intervalle, même s’il excède l’optimum pour les embryons, reste néanmoins acceptable pour le bon développement des embryons de truites. Cette température accélère à peine le développement des embryons et l’action des toxiques, ce qui procurera aux paramètres ultimes de mesure une plus grande netteté dans le court intervalle de temps de cet essai (Yee et al., 1996).
Durant un essai EA ou EAT, la température moyenne journalière à laquelle chaque organisme est exposé (c’est-à-dire les embryons et les alevins dans l’essai EA ; les embryons, les alevins et les truitelles dans l’essai EAT) doit être de 14 ± 1 °C (Fennell et al., 1998). En outre, la température instantanée à laquelle les répétitions sont exposées ne doit pas varier de plus de 3 °C.
Il faut ajuster au besoin la température de l’échantillon ou de la solution à la valeur acceptable pour chaque solution (14 ± 1 °C). Il ne faut pas chauffer les échantillons ou les solutions d’essai par des thermoplongeurs, puisque ces derniers pourraient altérer les constituants chimiques et la toxicité. Il faut déterminer la température par des mesures effectuées dans des enceintes expérimentales représentatives (c’est-à-dire renfermant au moins les concentrations maximale, médiane et minimale plus la solution témoin, si l’essai utilise plusieurs concentrations). Dans un essai avec renouvellement intermittent, les mesures doivent se faire et être enregistrées au début et à la fin de chaque période d’exposition de 24 heures (ou plus fréquemment, le cas échéant), dans la solution fraîche et dans la solution usée, immédiatement avant le renouvellement de cette dernière. Dans l’essai à renouvellement continu, les mesures et les enregistrements doivent être journaliers. En outre, on recommande de mesurer en continu tout au long de l’essai la température d’au moins une solution d’essai.
4.3.4 Oxygène dissous et aération
La teneur en OD de l’eau témoin ou de l’eau de dilution servant à la préparation des solutions d’essai devrait être de 90 à 100 % de la teneur de saturation, avant l’emploi et, au besoin, il faudrait aérer vigoureusement l’eau pour atteindre ce taux.
Il pourrait être obligatoire ou convenable d’aérer au préalable (avant l’exposition des organismes d’essai) ou au cours de l’essai chaque solution d’essai, selon la nature de la substance d’essai, le type de l’essai et ses objectifs (v. § 3.3, 4.3.2, 5.3, 6.3 et 7.3). L’appareillage servant à exposer les embryons et les alevins aux solutions d’essai, aérées ou non, est décrit au § 3.3.
Si on effectue une aération préalable (v. § 5.3, 6.3 et 7.3), chaque partie aliquote d’échantillon ou de solution servant au renouvellement devrait être préalablement aéréeNote de bas de page 17 pendant 30 min au débit de 6,5 ± 1 mL/(min·L). Immédiatement après, on devrait mesurer la teneur en OD de l’échantillon ou des solutions. Ce n’est que si le taux mesuré dans au moins une solution est inférieur à 60 % ou supérieur à 100 % de saturation en air et que l’on devrait poursuivre, au même débit, pendant pas plus de 90 min, l’aération préalable de l’échantillon ou de toutes les solutions d’essai (y compris du témoin). Cette période supplémentaire doit être le moindre des deux temps suivants : 90 min ou le temps pris pour atteindre un taux de saturation de 60 % dans le milieu à la concentration maximale de substance d’essai (ou un taux de saturation de 100 %, en cas de sursaturation manifeste)Note de bas de page 18. Immédiatement après, il faut exposer le poisson à chaque solution d’essai, qu’un taux de saturation de 60 à 100 % ait été atteint ou non dans l’échantillon ou dans toutes les solutions d’essai. Il faut signaler dans les rapports toute aération préalable, y compris sa durée et son débit (section 8).
En cas de renouvellement intermittent (v. § 4.3.2), on devrait aérer chaque solution d’essai, y compris les témoins, continuellement tout au long de l’essai, pour assurer un échange permanent de solution dans le milieu entourant immédiatement les embryons ou les alevins qui se développent. Le débit d’aération de chaque solution d’essai doit être minimal et contrôlé, pour éviter le dégazage indu des toxiques volatils ou la détoxication excessive et incontrôlée des constituants toxiques oxydables. Si un groupe d’organismes en expérience est exposé à un volume de solution d’au moins 6 L, on peut et on devrait lui assurer une aération de 6,5 ± 1 mL/(min·L) au moyen d’un appareillage d’aération et de vannes de réglage classiques (v. note 7). Si le volume de chaque solution d’essai est inférieur à 6 L, ce faible débit d’aération ne peut pas être atteint ni maîtrisé à l’aide de vannes de régulation classique. Dans ce cas, on devrait donc pratiquer une aération lente, au moyen d’une conduite fine (p. ex. 0,5 mm, d.i.), à raison de pas plus de 100 bulles à la minute (EC, 1992b ; USEPA, 1994). Le § 3.3 décrit l’appareillage convenant à l’aération dans un essai à renouvellement intermittent (v. note 7 et fig. 3B).
On peut effectuer un essai avec renouvellement continu (§ 4.3.2), avec ou sans aération de solutions d’essai, puisque l’apport continu de solution fraîche assure l’échange permanent de la solution dans laquelle baignent les embryons ou les alevins qui se développent. Le § 3.3 décrit et représente (fig. 3C) un appareillage qui convient à ce genre d’essai, avec ou sans aération. On devrait prendre en considération la nature de la substance d’essai (p. ex. sa volatilité, sa demande d’oxygène, sa stabilité) lorsque l’on décide si le renouvellement continu de la solution est le régime indiqué et si l’aération est de mise ou non. Selon la demande d’oxygène, une lente aération de chaque solution d’essai pourrait être nécessaire au cours de ce type d’essai pour maintenir le taux d’OD à des valeurs convenables, de 60 à 100 % de saturation (v. § 6.3). Si on pratique l’aération, chaque répétition (y compris les témoins) doit être aérée à un débit semblable et contrôlé, comme nous l’avons décrit. Pour maintenir le taux d’OD à 60 à 100 % de saturation, il faudrait peut-être, en outre, accélérer le renouvellement des solutions.
Si l’objet de certains essais (p. ex. pour la recherche) englobe l’évaluation de la forte demande d’oxygène exercée par la substance d’essai, dans le cadre de la mesure de son effet total, on recourrait au renouvellement continu (v. § 3.3 et 4.3.2) et on n’assurerait aucune aération des solutions au cours de l’essai.
Il faut surveiller et enregistrer la teneur en OD de solutions représentatives, tout au long de l’essai. Dans les essais avec renouvellement intermittent, il faut la mesurer au début et à la fin de chaque intervalle de renouvellement, dans au moins une répétition des concentrations du ou des témoins et aux concentrations maximale, médiane et minimale. Dans les essais avec renouvellement continu, il faut la mesurer dans chaque répétition, au début de l’essai, de même que journellement par la suite dans au moins le ou les témoins ainsi qu’aux concentrations maximale, médiane et minimale.
La teneur en oxygène dans les enceintes expérimentales ne devrait pas descendre sous 60 % de saturation. Si cela se produit, il faudrait être sensibilisé au fait que l’essai ne mesure pas la toxicité intrinsèque de la substance, mais l’effet total de la substance (p. ex. l’effluent), y compris son influence désoxygénanteNote de bas de page 19. Les mesures initiales révéleront les éventuels problèmes reliés à l’OD et, dans ce cas, il faut vérifier continuellement la concentration d’oxygène. L’utilisation obligatoire d’eau témoin ou de dilution saturée en oxygène et le renouvellement journalier ou continu des solutions maintiennent, dans la plupart des cas, l’OD au-dessus des taux qui sont très stressants pour les salmonidés en train de se développer et influent fortement sur les résultats.
4.3.5 pH
On doit mesurer le pH des solutions témoins et des solutions aux concentrations maximale, médiane et minimale au début de l’essai, avant l’introduction des embryons. On devrait également mesurer le pH dans des répétitions représentatives, immédiatement avant et immédiatement après chaque renouvellement, dans les essais à renouvellement intermittent, et journellement, dans les essais à renouvellement continu.
On devrait normalement réaliser les essais toxicologiques sans régler le pH. Cependant, si l’échantillon de la substance d’essai déplace le pH d’une solution à l’extérieur de l’intervalle de 6,5 à 8,5 et si on évalue la toxicité de la substance plutôt que les effets nocifs ou perturbateurs du pHNote de bas de page 20, il faudrait ajuster le pH des solutions ou de l’échantillon ou mener parallèlement un second essai, avec le pH ajusté. Pour ce second essai, on peut neutraliser (en le réglant à 7,0) le pH initial de l’échantillon, de la solution mère (essai à renouvellement continu) ou de chaque solution fraîche avant le renouvellement (essai à renouvellement intermittent), selon les objectifs ou on peut l’ajuster à 0,5 unité près, au pH de l’eau témoin ou de dilution avant d’y exposer le poisson. Serait également acceptable pour ce second essai le réglage du pH de 6,5 à 7,0 (si le pH de l’échantillon est inférieur à 6,5 ou si l’échantillon entraîne la baisse du pH à moins de 6,5) ou de l’abaisser entre 8,0 et 8,5 (si le pH est supérieur à 8,5, du fait de l’échantillon). Pour ces réglages, on devrait normalement utiliser de l’acide chlorhydrique (HCl) ou de l’hydroxyde de sodium (NaOH) titrant au plus 1 N. Dans certains cas (p. ex. échantillons d’effluents fortement tamponnés), on pourrait devoir utiliser un acide ou une base de titre plus élevé.
Abernethy et Westlake (1989), fournissent des indications utiles pour le réglage du pH. Après chaque addition d’acide ou de base, on devrait laisser s’équilibrer les parties aliquotes d’échantillons ou de solutions d’essai dont on règle le pH. Le temps d’équilibrage dépend du pouvoir tampon de la solution ou de l’échantillon. Dans le cas d’échantillons d’effluent, on recommande une période de 30 à 60 min (Abernethy et Westlake, 1989). Une fois l’essai en marche, on surveille le pH de chaque solution, mais sans l’ajuster.
Si l’objet de l’essai toxicologique est d’élucider la nature des toxiques présents dans la substance d’essai, l’ajustement du pH est l’une des nombreuses techniques (p. ex. oxydation, filtration, dégazage par entraînement à l’air, addition d’un chélateur) pour caractériser et déterminer la toxicité de l’échantillon. Ces techniques d’évaluation quantitative de la toxicité mettent à la disposition du chercheur des méthodes utiles d’évaluation de la nature physico-chimique du ou des toxiques et la mesure dans laquelle il(s) se prête(nt) à la détoxication (USEPA, 1991a et b).
4.3.6 Périodes de transition
Si les salmonidés traversent plusieurs étapes de développement au début de leur cycle biologique, trois grandes transitions servent de points repères dans l’essai. La première est la transition de l’œuf venant d’être fécondé à l’embryon, y compris l’imperméabilisation relative de sa membrane semi-perméable (c’est-à-dire son durcissement à l’eau) et le début du développement embryonnaire (c’est-à-dire la division cellulaire rapide chez l’embryon). La deuxième transition est celle de l’embryon à l’alevin (c’est-à-dire l’éclosion réussie) ; la troisième est celle de l’alevin à la truitelle (c’est-à-dire résorption de la vésicule vitelline et passage à l’alimentation externe).
La transition de l’œuf qui vient d’être fécondé au début du développement de l’embryon, avant l’imperméabilisation relative de la membrane de l’œuf (jusqu’à deux heures environ après la fécondation) est une période critique, pendant laquelle l’embryon est très vulnérable à l’exposition directe aux solutions toxiquesNote de bas de page 21. C’est pourquoi on a normalisé le début de l’essai (E, EA et EAT) pour s’assurer que cette période coïncide avec l’exposition aux solutions d’essai. Pour maximiser la sensibilité et la comparabilité, l’essai devrait débuter le plus tôt possible après la fécondation et il doit débuter dans les 30 min qui suivent immédiatement le mélange complet, à sec, des œufs et de la laitance, auquel on accorde au moins 5 min et au plus 20 (§ 4.2).
Dans la transition de l’embryon à l’alevin (essai EA ou EAT seulement), le début du stade de l’alevin est défini comme le moment où la moitié du nombre initial d’œufs a éclos. L’observateur n’est pas susceptible d’enregistrer l’heure à laquelle 50 % exactement des poissons sont sortis de l’œuf ; dans la pratique, on note le temps où on compte pour la première fois comme éclos au moins la moitié des embryons et où le taux d’éclosion est assez près de 50 %. Dans l’essai EA, lorsque l’on constate pour la première fois l’éclosion de la moitié du nombre initial d’œufs témoins, on considère que le stade de l’alevin a débuté, et l’essai prend fin sept jours plus tard. À la fin, on dénombre tous les alevins survivants dans chaque répétition, afin de déduire le nombre et le pourcentage d’alevins non viables (c’est-à-dire les œufs non fécondés, les embryons morts, les embryons qui ne sont pas sortis de l’œuf ou les embryons qui ne se sont pas développés normalement)Note de bas de page 22.
Le début du stade de la truitelle se définit comme le moment où la moitié des poissons survivants nagent activementNote de bas de23page 23. Dans l’essai EAT, une étape de l’essai prend fin et l’étape finale commence lorsque la moitié des poissons témoins survivants commencent à nager. Il faut alors compter tous les alevins, tous les alevins difformes et toutes les truitelles dans chaque répétition, après quoi, on se débarrasse des alevinsNote de bas de page 24. On libère dans l’enceinte expérimentale une partie ou la totalité des truitelles de chaque répétition qui se trouvent dans l’incubateur ou les incubateurs. Au § 4.3.7, il est question du nombre de truitelles à utiliser et de la possibilité d’éclaircissageNote de bas de page 25. On commence à nourrir les truitelles (v. § 4.3.8) et on continue pendant 29 journées consécutives. Ensuite, on les fait jeûner 24 heures, on met fin à l’exposition et on recueille les données sur les taux de mortalité, les anomalies et le poids moyen des truitelles survivantes dans les répétitions (v. § 4.4).
4.3.7 Réussite de la fécondation et éclaircissage
Quel que soit l’essai (E, EA ou EAT), on peut se faire une première idée de la réussite de la fécondation et de la viabilité des témoins quelques jours après la fécondation, en gardant des répétitions supplémentaires dans de l’eau témoin ou de dilution, dans des conditions identiques à celles des essais, en les clarifiant et en les examinant au microscope (v. note 28, § 4.4) pour y déterminer l’incidence des embryons non viables. Si le pourcentage moyen d’embryons témoins non viables (y compris les œufs non fécondés) est alors supérieur à 30 %, on doit mettre fin à l’essai et le reprendre à zéro en utilisant une autre population d’œufs fraîchement fécondés.
Le taux de réussite de la fécondation, le taux de survie jusqu’à l’éclosion et le développement des alevins peuvent varier fortement, d’un lot de gamètes à l’autre. Si un taux de fécondation de 100 % et un taux de survie de 100 % sont des témoins souhaitables, on les atteint rarement.
L’éclaircissage consiste à éliminer au hasard un certain nombre d’organismes en expérience d’une ou de plusieurs répétitions, afin de réduire l’encombrement, de maintenir une densité acceptable de charge ou réduire au minimum le volume des solutions d’essai exigés à chaque renouvellement (§ 4.3.2). On ne peut pas le pratiquer au cours de l’essai E ou EA, ni durant le stade de l’embryon ou de l’alevin de l’essai EAT. On pourrait croire qu’il est souhaitable d’entreprendre l’essai avec un nombre excédentaire d’œufs, puis de choisir des nombres égaux d’embryons viables lorsqu’il est possible de les distinguer des œufs apparemment infertiles, en raison du risque d’un faible taux de fécondation à toutes les concentrations y compris les témoins. Or, c’est cela qu’il ne faut pas faire, cependant, parce que cela pourrait compromettre la validité des tests statistiques. L’exposition au toxique avant l’éclaircissage pourrait influer sur la viabilité à certaines concentrations, créant une distorsion dans le choix des organismes. Il n’y a qu’un seul moment dans l’essai EAT où l’éclaircissage est praticable, si on le souhaite, et c’est au début de la dernière étape de l’essai de mesure de la survie et de la croissance des truitelles (v. § 4.3.8).
Dans les préparatifs de l’essai EA ou EAT, on recommande des études préliminaires. Ces études devraient déterminer le nombre maximal d’embryons que l’on peut réunir, au début, dans chaque incubateur, sans provoquer les effets négatifs dus à l’encombrement (p. ex. le manque d’oxygène ou l’accumulation des déchets du métabolisme). En étalant les embryons sur une seule couche sur le fond de l’incubateur, on facilite aussi la reconnaissance et le dénombrement rapides des embryons viables par rapport aux non viables (y compris les œufs non fécondés). Le nombre maximal par incubateur devrait être déterminé en fonction de la taille de l’embryon, du débit, des dimensions de l’incubateur, de la quantité de solution d’essai alimentant l’enceinte expérimentale et la taille prévue des alevins ou des truitelles à la fin de l’essai. Dans les cas où on suspend plus d’un incubateur dans l’enceinte expérimentale, on peut déplacer les embryons ou les alevins d’un incubateur à l’autre pour les répartir également. Cependant, il ne faut pas transvaser d’organismes d’une enceinte expérimentale (c’est-à-dire d’une répétition) à une autre.
Dans l’essai EAT, l’éclaircissage des truitelles peut précéder le début des 30 dernières journées d’exposition, c’est-à- dire au moment où la moitié des organismes témoins manifestent un comportement de nage. On pourrait le pratiquer pour satisfaire à la condition relative à la biomasse et réduire au minimum les besoins connexes en échantillon et en solution (§ 4.3.2). L’éclaircissage pourrait aussi viser à mieux équilibrer les effectifs, p. ex. égaliser le nombre de sujets par répétition pour la dernière étape de l’essai. Le degré d’éclaircissage peut être indépendant, d’une répétition à l’autre, et il n’est pas nécessaire qu’il soit équilibré d’une répétition à l’autre ou d’une concentration à l’autre. Le nombre de truitelles dans une répétition donnée doit, cependant, être réduit de façon aléatoire. On ne peut pas éclaircir les truitelles au cours de la durée d’exposition de 30 jours, ce qui invaliderait l’essaiNote de bas de page 26.
Il est avantageux de conserver toutes les truitelles, plutôt que d’en sacrifier, si les installations et la quantité de substance d’essai l’autorisent. Toutes autres choses étant égales, plus le nombre d’organismes en expérience est élevé, plus les limites de confiance à l’égard des paramètres ultimes de mesures sont étroites, par exemple la CL 50 pour les truitelles. L’éclaircissage devrait, idéalement, aboutir à l’obtention du même nombre élevé de truitelles dans chaque répétition. Il est préférable de conserver dans chaque répétition au moins 10 truitelles, mais on pourrait en utiliser moins, au besoin, tant que l’on satisfait aux exigences minimales énumérées au § 4.3.8.
4.3.8 Étape finale de l’essai EAT
Lorsque l’on constate que la moitié des témoins survivants de l’essai EAT ont atteint le stade de la truitelle, débute alors la période finale de 30 jours d’exposition. On dénombre les alevins et les alevins difformes de chaque répétition, puis on les sacrifie. Ces données servent aux comptes rendus descriptifs des résultats de l’essai EAT (v. § 4.4). On dénombre aussi les sujets qui, dans chaque répétition, sont non viables au début du stade de la truitelle (v. § 4.4) et on enregistre cette donnée comme étant le premier paramètre (« ultime ») de mesure de l’essai EAT (§ 4.4).
On devrait libérer de l’incubateur les truitelles de toutes les répétitions, les laisser pénétrer dans l’enceinte expérimentale, puis on devrait les compter. Ce sont là les sujets que l’on peut utiliser à la dernière étape de l’essai. Au besoin, ou si on le souhaite, on pourrait éclaircir leurs effectifs (§ 4.3.7). On se sert par la suite de ces groupes de poissons pour les observations ultérieures de la mortalité, du comportement et de la croissance. Une répétition doit compter au moins cinq truitelles, faute de quoi il faut l’exclure de l’étape finale de l’essai EAT (30 j). À une concentration donnée, on doit disposer d’au moins deux répétitions, faute de quoi on n’expose pas de poissons à cette concentration. Il doit y avoir au moins deux répétitions du milieu témoin, chacune comptant au moins cinq truitelles, faute de quoi on ne peut réaliser cette dernière partie de l’essai EAT. On ne peut pas, pour satisfaire aux besoins, transférer des truitelles d’une répétition à l’autre. L’essai doit aller de l’avant avec un nombre inégal de répétitions ou un nombre inégal de truitelles par répétitionNote de bas de page 27.
On entreprend de nourrir des truitelles de chaque répétition et on poursuit leur alimentation pendant 29 jours, on les fait jeûner la dernière journée, puis on met fin aux 30 journées d’exposition et on effectue toutes les observations et mesures finales (§ 4.4).
On devrait nourrir les truitelles arcs-en-ciel avec un aliment de démarrage convenable. Chaque jour, la truitelle devrait recevoir 4 % de son poids en nourriture, en portions à peu près égales, au moins quatre fois par jour. On peut aussi utiliser des artémias venant d’éclore.
Le fond de chaque enceinte expérimentale devrait être nettoyé quotidiennement, par siphonnement, pour être débarrassé de toute accumulation de nourriture ou de matières fécales. Dans les essais avec renouvellement intermittent, on peut combiner l’opération avec le siphonnement et le remplacement quotidiens de chaque solution d’essai. On devrait veiller, au cours du siphonnement, à ne pas blesser le poisson. À l’embouchure du siphon, une crépine évite d’aspirer le poisson dans le tube.
4.3.9 Toxique de référence
L’utilisation systématique d’un toxique ou de toxiques de référence est pratique et nécessaire pour évaluer, dans des conditions normalisées, la sensibilité relative du groupe d’embryons utilisés ainsi que la précision et la fiabilité des données obtenues par le laboratoire à l’égard du ou des toxiques de référence (EC, 1990a). Il faut évaluer, au moment où on réalise chaque essai E, EA ou EAT, la sensibilité des embryons au(x) toxique(s) recommandé(s) de référence, en utilisant une partie du même groupe d’œufs fraîchement fécondés servant au démarrage de l’essai. L’essai toxicologique entrepris en parallèle au début de ces essais devrait être un essai E, en raison de la longue durée de l’essai EA ou EAT.
Voici les critères qui font recommander les toxiques convenables de référence pour cet essai :
- produit facilement accessible à l’état pur ;
- stabilité en conservation (longue durée de conservation) ;
- forte solubilité dans l’eau ;
- stabilité en solution aqueuse ;
- danger minime pour l’utilisateur ;
- analyse précise et facile ;
- bonne courbe dose/effet pour les embryons de salmonidés ;
- influence connue sur le plan quantitatif et qualitatif, du pH sur la toxicité pour les organismes en expérience ;
- influence connue, sur le plan qualitatif et quantitatif, de la dureté de l’eau sur la toxicité pour les embryons d’arc-en-ciel.
On recommande comme toxiques de référence pour cet essai le phénol ou le zinc (préparé à l’aide du sulfate) de qualité réactif. On devrait évaluer la sensibilité des embryons arcs-en-ciel à l’un de ces toxiques ou aux deux dans des essais E et on devrait déterminer la CE 50 de l’une de ces substances ou des deux (v. § 4.5).
Les conditions et les modes opératoires des essais E employant un ou des toxiques de référence doivent être fidèles à ceux qui ont été décrits ailleurs dans le présent rapport.
On devrait utiliser dans une installation expérimentale, chaque fois que l’on y exécute un essai avec toxique de référence, les mêmes conditions et modes opératoires (p. ex. avec renouvellement intermittent ou continu ; eau témoin ou de dilution de même origine). Les essais avec toxique(s) de référence appliqués aux embryons devraient normalement utiliser l’eau témoin ou de dilution servant aux essais E définitifs dans le laboratoire. Ou bien, si on souhaite un degré plus poussé de normalisation, on devrait préparer de l’eau douce reconstituée (d’une dureté de 40 à 48 mg/L en CaCO3, d’un pH de 7,2 à 7,5 [v. note 37, § 5.4]). Cette eau devrait servir dans les milieux témoins et aux dilutions (USEPA, 1985b ; EC, 1990b).
On doit préparer une carte de contrôle (EC, 1990 et 1998b) et la mettre à jour pour chaque toxique de référence utilisé. Sur ce diagramme, on reporte les CIp. L’analyse de la carte permet de déterminer si les résultats se trouvent à ± 2 σ (limite de la zone de confiance) des valeurs obtenues au cours des essais antérieurs ayant utilisé le même toxique de référence et le même mode opératoire. On recalcule la moyenne et l’écart-type du logarithme des CE 50 disponibles à chaque essai successif jusqu’à ce que la statistique se stabilise (EC, 1990 et 1998b). La carte de contrôle devrait représenter le logarithme de CE 50 sur l’axe vertical en fonction de la date de l’essai (ou du numéro de l’essai) sur l’axe horizontal.
Dans tous les calculs de la moyenne et de l’écart type et sur tous les graphiques, on devrait utiliser le logarithme de la concentration (log CE 50). On continue ainsi d’adhérer à l’hypothèse selon laquelle on a estimé chaque CE 50 d’après le logarithme des concentrations. On peut construire la carte de contrôle en reportant les valeurs logarithmiques de la moyenne et ses limites sur du papier graphique ordinaire ou en reportant les valeurs arithmétiques sur du papier logarithmique ou semi-logarithmique. Si on devait montrer catégoriquement que les CE 50 n’obéissent pas à la loi log-normale, la moyenne et des limites arithmétiques pourraient se révéler plus convenables.
On devrait comparer chaque nouvelle CE 50 du toxique de référence aux limites de la zone de confiance. On considère cette valeur comme acceptable si elle se trouve entre les limites de la zone de confiance. Si une valeur donnée de la CE 50 se retrouve à l’extérieur, la sensibilité des embryons ainsi que la réalisation et la précision de l’essai sont suspectes. Comme le phénomène pourrait survenir 5 % du temps, par le seul jeu du hasard, une CE 50 aberrante n’est pas nécessairement le signe d’une sensibilité ou d’une précision douteuses. Ce serait plutôt un avertissement que ce pourrait être le cas. La vérification de toutes les conditions et modes opératoires de l’essai et antérieurs à l’essai est pour le moment exigée.
Des résultats qui restent dans la zone de confiance, il ne faut pas déduire que le laboratoire obtient des résultats constants. Des résultats extrêmement variables que donne un toxique de référence élargissent la zone de confiance ; un nouveau résultat pourrait s’y retrouver même s’il représente un écart indésirable. Environnement Canada (1990) propose provisoirement comme limite raisonnable un coefficient de variation de pas plus de 30 %.
On devrait préparer les solutions mères de phénol la journée de leur utilisation. On devrait préparer les solutions mères de zinc immédiatement avant de les utiliser, auquel cas l’ajout d’un conservateur est inutile, ou on pourrait les acidifier à l’acide nitrique de façon à en abaisser le pH à moins de 2, si on veut les entreposer (APHA et al., 1995). Les solutions acides de zinc que l’on conserve devraient être gardées à l’obscurité, à 4 ± 2 °C, et on peut alors les conserver plusieurs semaines avant l’emploi. Le sulfate de zinc (habituellement ZnSO4·7H2O, dont le poids moléculaire est 4,398 fois celui du zinc) devrait servir à la préparation des solutions mères de zinc. La concentration de zinc devrait s’exprimer en mg de Zn++/L.
On devrait doser par les méthodes convenables (p. ex. APHA et al., 1995) les toxiques de référence présents dans toutes les solutions mères. Lors de la préparation des solutions, on devrait prélever des parties aliquotes des concentrations témoins, minimale, médiane et maximale et les analyser directement ou les conserver en vue d’une analyse ultérieure, si la CE 50 se révélait tomber à l’extérieur des limites de confiance. Les parties aliquotes d’échantillons, si on les entrepose, devraient être gardées à l’obscurité, à 4 ± 2 °C. Avant de les mettre en entreposage, on devrait ajouter aux solutions de zinc et de phénol un agent de conservation, selon les instructions convenables données dans APHA et al. (1995). Les parties aliquotes gardées en entreposage et qui exigent un dosage chimique devraient être analysées rapidement après la réalisation de l’essai toxicologique. Il est souhaitable de doser les mêmes solutions à la fin de l’essai, après avoir terminé les observations biologiques. Les calculs de la CE 50 devraient se fonder sur la moyenne géométrique des concentrations mesurées si ces dernières sont notablement différentes (c’est-à-dire d’au moins 20 %) des concentrations théoriques et si l’exactitude des analyses chimiques est satisfaisante.
4.4 Observations et mesures
Dans tous les essais, on devrait retirer tous les embryons, tous les alevins et toutes les truitelles manifestement morts (c’est-à-dire opaques) dès qu’on les découvre et en enregistrer le nombre. Il ne faut pas retirer les sujets vivants, qu’ils soient ou non difformes. Notamment, on ne devrait pas déranger ni retirer du milieu les embryons en développement qui ne sont manifestement pas morts, mais qui semblent atypiques, en vue de l’examen microscopique avant la fin de l’essai (si c’est un essai E) ou, du moins, tant que l’œil n’est pas visible (si c’est un essai EA ou EAT). Lorsque l’on récupère les cadavres, on devrait veiller à ne pas heurter ni endommager les embryons ou les alevins adjacents, qui sont alors extrêmement sensibles et délicats (v. § 4.2). On doit notamment prendre des précautions extrêmes pour de ne pas déranger les autres embryons avant le stade de la formation de l’œil.
Dans tous les essais, on devrait recenser journellement tous les cadavres retirés de chaque répétition. Dans les essais de longue durée, il faudrait également recenser journellement le nombre de sujets éclos, le nombre de truitelles, le nombre d’alevins et de truitelles difformes et le nombre de truitelles présentant un comportement anormal, notamment : incoordination de la nage, tranquillité atypique, comportement d’alimentation atypique, hyperventilation, perte d’équilibre.
Il faut mesurer régulièrement les conditions expérimentales de la façon énoncée dans les autres paragraphes. Il faut mesurer journellement la température et la teneur en OD dans des enceintes expérimentales représentatives (§ 4.3.3 et 4.3.4). On doit aussi mesurer l’OD dans chaque échantillon ou solution d’essai avant ce dernier et pratiquer au besoin une aération préalable (§ 4.3.4). Il faut mesurer le pH dans les solutions témoins et dans des enceintes expérimentales représentatives au début de l’essai, avant d’y admettre les embryons, et on devrait le mesurer journellement ensuite (§ 4.3.5). Dans les essais avec plusieurs concentrations, les mesures de la température, de l’OD et du pH doivent comprendre au moins les concentrations maximale, médiane et minimale plus le ou les solutions témoins. Dans le § 4.2, on recommande certaines mesures de la conductivité.
À la fin de l’essai E, normalement sept jours après la fécondation, il faut enregistrer dans chaque répétition les observations du nombre et du pourcentage d’embryons non viables, y compris des œufs non fécondés ainsi que des embryons vivants mais manifestement difformes (p. ex., bicéphales). À la fin de l’exposition, on devrait transvaser le groupe d’embryons et d’œufs non fécondés subsistant dans chaque incubateur, ensemble, dans une fiole étiquetée renfermant une solution de fixateur et d’agent clarifiantNote de bas de page 28. Après clarification, on devrait transvaser le contenu de la fiole dans un récipient peu profond, par exemple une nacelle, et on pourrait l’examiner soigneusement sous un stéréo-microscope à dissection (Yee et al., 1996).
À la fin de l’essai E, on doit enregistrer comme viable ou non viable chaque embryon ou œuf non fécondé. Les embryons viables semblent s’être développés normalement jusqu’à l’étape typique des contrôles. Les non-viables comprendraient les œufs qui ne semblent pas fécondés, les embryons souffrant d’un retard marqué du développement et les embryons manifestement difformes ou autrement atypiques, y compris les jumeaux. Tout œuf non fécondé ou tout embryon qui s’est opacifié et qui a été retiré du milieu avant la fin de l’essai doit être compté comme embryon non viable. Si le dénombrement révèle que des sujets manquent à l’appel, comparativement au nombre initial, il faut les classer dans la catégorie des non-viables. Les observations devraient débuter avec les groupes témoins, pour se familiariser avec l’aspect des embryons normaux en cours de développement. Yee et al. (1996) donnent une série de microphotographies en couleur pour aider à distinguer les embryons viables des non viables. On trouve d’autres renseignements à ce sujet dans Vernier (1969) et Velsen (1980)Note de bas de page 29.
Dans l'essai EA, sept jours après que l'on constate l’éclosion de la moitié des sujets dans le groupe témoin, ce qui marque la fin de l’essai, on détermine et on enregistre le nombre et le pourcentage d’alevins non viables dans chaque répétition. On classe tous les sujets comme alevins viables ou non viables. La non-viabilité englobe les échecs survenant à toutes les étapes : non- fécondation de l’œuf ; mortalité de l’embryon ou de l’alevin ; non-éclosion à la fin de l’essai ; embryons ou alevins manifestement difformes ou autrement atypiques (p. ex. bicéphales). Si le dénombrement révèle que certains sujets manquent à l’appel, d’après le nombre initial dans la répétition, il faut compter les disparus dans la catégorie des alevins non viables.
On effectue les observations des répétitions sept jours après que l’on a constaté un taux d’éclosion de 50 % chez les témoins. Dans chaque répétition, on compte le nombre d’œufs apparemment non fécondés, le nombre d’embryons morts, le nombre d’embryons vivants, le nombre d’alevins morts, le nombre d’alevins vivants mais difformes ou autrement atypiques et le nombre d’alevins vivants et apparemment normaux.
Il faut faire un compte rendu descriptif sur l’une des deux catégories d’effets observés au cours de l’essai EA ou les deux, lorsqu’il n’existe aucun paramètre officiel ultime de mesure. Dans chaque cas, il faut décrire les écarts apparents ou l’absence d’écart par rapport au témoin. On devrait fournir dans ce compte rendu des données numériques approximatives sur les écarts ou des données sous forme de tableaux, s’il y a lieu.
- Éclosion retardée. - Les comparaisons utiles avec les témoins pourraient être, selon le cas : a) les délais approximatifs pour parvenir au taux médian d’éclosion à chaque concentration ; b) le pourcentage approximatif et estimatif d’éclosion correspondant à chaque concentration au moment où le taux d’éclosion chez le groupe témoin est de 50 %.
- Alevins difformes. - Le pourcentage approximatif d’alevins difformes à chaque concentration, y compris dans le groupe témoin. Recenser les difformités tout au long de l’essai et les totaliser pour obtenir le nombre total d’alevins difformes (les morts comme les vivants). Exprimer en pourcentage du nombre ayant éclos à chaque concentration.
On pourrait faire d’autres observations et les signaler, si cela peut enrichir l’information tirée de l’essai, notamment : proportions d’embryons non viables et taux de mortalité chez les alevins après l’éclosion. L’essai E parallèle à l’essai EA renseigne sur les premiers stades du développement.
Dans l’essai EAT, la première étape fournit un paramètre de mesure fondé sur la non- viabilité au moment où les sujets accèdent au stade de la truitelle, tandis que la seconde étape fournit des paramètres discrets de mesure sur la mortalité et la croissance des truitelles.
Sur chaque répétition de l’essai EAT, il faut déterminer et enregistrer le nombre et le pourcentage d’organismes non viables au stade de la truitelle, lorsque l’on constate que les groupes témoins ont accédé à 50 % à ce stade. On enregistre, dans cette catégorie de non-viables, tous les échecs à toutes les étapes jusqu’au début du stade de la truitelle : non-fécondation des œufs ; mortalité des embryons, des alevins ou des jeunes truitelles ; non-éclosion ; embryons, alevins ou jeunes truitelles manifestement difformes ou autrement atypiques. Si le dénombrement révèle que certains sujets manquent à l’appel, par rapport au nombre initial de sujets dans la répétition, on doit aussi les inclure dans la catégorie des non- viables au stade de la truitelle.
Les observations se font lorsque l’on a constaté, dans le groupe témoin, un taux de 50 % de truitelles. Dans chaque répétition, on compte le nombre d’œufs apparemment non fécondés, le nombre d’embryons morts, le nombre d’embryons vivants, le nombre d’alevins morts, le nombre d’alevins vivants mais difformes ou autrement atypiques, le nombre d’alevins vivants et apparemment normaux, le nombre de truitelles mortes, le nombre de truitelles vivantes mais difformes ou autrement atypiques et le nombre de truitelles vivantes et apparemment normales. On se débarrasse ensuite de tous les alevins, ce qui marque la fin de la première étape de l’essai EAT.
Débute alors la deuxième étape de l’essai EAT. Cette étape compte 30 jours d’exposition pendant lesquels on nourrit les truitelles et on en mesure le taux de mortalité et le poids. S’il faut éclaircir les groupes de truitelles, c’est le moment de le faire, avant d’entreprendre cette dernière étape (v. § 4.3.7). On peut garder les truitelles dans les mêmes enceintes ouvertes que celles qui ont servi dans la première étape de l’essai ou les transvaser dans des enceintes d’une plus grande capacité, si c’est nécessaire, pour continuer à respecter les conditions relatives à la biomasse, c’est-à- dire ≥ 0,5 L/(g·j) ; (v. § 4.3.2), puisque les sujets se nourrissent et gagnent du poids au cours de cette étape.
Après 29 jours consécutifs d’alimentation, l’exposition se poursuit une autre journée, de jeûne. On enregistre alors le nombre de truitelles mortes dans chaque répétition au cours des 30 jours. Il faut enregistrer le poids sec total (après 24 h à 60 °C) du groupe de truitelles survivantes de chaque répétition, au centième de gramme près. On calcule le poids sec moyen des truitelles survivantes.
Les observations faites au cours de l’essai EAT doivent permettre de rédiger des comptes rendus descriptifs sur les trois catégories suivantes d’effets, qui ne possèdent pas de paramètre officiel de mesure. Dans chaque cas, il faut décrire succinctement les écarts apparents ou l’absence d’écart par rapport au groupe témoin. On devrait fournir dans ce compte rendu des données numériques approximatives sur les écarts ou des données sous forme de tableaux, s’il y a lieu.
- Alevins difformes. - Le pourcentage approximatif d’alevins difformes à chaque concentration, y compris dans le groupe témoin.
- Accession retardée au stade de la truitelle. - Les comparaisons utiles avec le témoin pourraient être, selon a) le parvenir au taux médian d’accession au stade de la truitelle à chaque concentration ; b) le pourcentage estimatif de sujets nageant librement, à chaque concentration, au moment où le taux de truitelles dans le groupe témoin est de 50 %.
- Comportement anormal des truitelles. - Signaler la nature du comportement anormal et son degré.
On pourrait faire d’autres observations et les signaler, si cela peut enrichir l’information tirée de l’essai, notamment : proportions d’embryons non viables, éclosion retardée (comme dans l’essai EA) et taux de mortalité chez les alevins après l’éclosion.
4.5 Paramètres de mesure et calculs
4.5.1 Paramètres biologiques de mesure
Les paramètres à estimer dépendent de l’option choisie (E, EA ou EAT), comme le montre l’énumération suivante.
- L’essai E évalue le nombre d’embryons non viables, c’est-à-dire le non- développement d’embryons qui survient parfois au cours de la période d’exposition débutant immédiatement après la fécondation. On estime l’un des paramètres suivants ou les deux pour le même effet : (1) la concentration efficace se traduisant par un taux de 25 % d’embryons non viables (CE 25) ; (2) la concentration efficace médiane d’embryons non viables (CE 50).
- L’essai EA se fonde sur les nombre d’alevins non viables, c’est-à-dire la non-atteinte du stade de l’alevin d’une façon opportune et normale en raison notamment la non-fécondation des œufs, la mort d’embryons ou d’alevins, la non- éclosion à la fin de l’essai et un développement anormal. Pour le même effet, on obtient l’un des deux paramètres suivants de mesure ou les deux : (1) la concentration efficace à laquelle 25 % des sujets n’évoluent pas normalement jusqu’au stade de l’alevin (CE 25) ; (2) la concentration efficace médiane empêchant l’évolution normale jusqu’au stade de l’alevin (CE 50).
L’essai EAT possède les trois paramètres de mesure suivants : on considère l’effet le plus sensible (c’est-à-dire celui qui correspond à la concentration la plus basse) comme une indication définitive de la toxicité (Woltering, 1984 ; Birge et Black, 1990).
- Les organismes non viables au stade de la truitelle comprennent les sujets ne survivant pas à cette étape ou à toute étape antérieure : non-fécondation des œufs ; mort des embryons ; non- éclosion ; mort des alevins, mort des jeunes truitelles ; embryons, alevins ou jeunes truitelles manifestement difformes ou autrement atypiques. Pour cet effet, on estime l’un des deux paramètres suivants de mesure ou les deux : (1) la concentration efficace à laquelle 25 % des sujets ne se développant pas normalement jusqu’au début du stade de la truitelle (CE 25) ; (2) la concentration efficace médiane empêchant l’évolution normale jusqu’au début du stade de la truitelle (CE 50).
- Le taux de mortalité des truitelles mesure, à la fin de l’essai, la mortalité survenue au cours des 30 journées d’exposition des truitelles. On ne compte pas la mortalité antérieure à cette étape. On estime un paramètre ultime de mesure, la concentration létale médiane pour les truitelles (CL 50).
- Le poids des truitelles mesure le poids sec moyen des truitelles survivantes, relativement à celui du groupe témoin, à la fin de l’essai, au bout de 30 jours d’exposition. C’est essentiellement une mesure du croît, sauf que l’on n’a pas mesuré le poids initial. On estime un paramètre de mesure, la concentration inhibitrice entraînant un écart de 25 % entre le poids sec des truitelles exposées et le poids des groupes témoins, chez les truitelles survivantes à la fin de l’essai (CI 25). On pourrait obtenir un paramètre supplémentaire de mesure en estimant la CSEO et la CEMO, puis en calculant la CESO, si on le souhaite et si on dispose à cette fin un nombre suffisant de répétitions.
Il faut rédiger plusieurs comptes rendus descriptifs sur les observations additionnelles faites au cours des essais EA et EAT, comme nous les énumérons dans les alinéas qui suivent. Ce ne sont pas des paramètres ultimes officiels de mesure et ils n’exigent ni dénombrement ni opération statistique rigoureux. Néanmoins, ces comptes rendus sont exigés comme documentation sur l’essai (v. section 8). Dans chaque cas, on doit décrire rapidement les écarts apparents ou l’absence d’écart par rapport au groupe témoin. On devrait fournir dans ce compte rendu des données numériques approximatives sur les écarts ou des données sous forme de tableaux, s’il y a lieu. Certaines de ces observations pourraient aider à expliquer les résultats obtenus à l’égard des paramètres officiels de mesure déjà énumérés. Un écart apparent par rapport au groupe témoin est chaque fois considéré comme une indication de la toxicité, mais, faute d’analyse statistique formelle, on ne peut pas le considérer comme définitif.
- Éclosion retardée (essai EA). - Les comparaisons utiles avec les témoins pourraient être : a) les délais approximatifs pour parvenir au taux médian d’éclosion à chaque concentration ; et/ou b) le pourcentage approximatif et estimatif d’éclosion correspondant à chaque concentration au moment où le taux d’éclosion chez le groupe témoin est de 50 %.
- Alevins difformes (essais EA et EAT). - C’est le nombre d’alevins difformes observés tout au long de l’essai (survivants et morts), en pourcentage du nombre éclos à cette concentration.
- Accession retardée au stade de la truitelle (essai EAT). - Les comparaisons utiles avec les témoins pourraient être : a) les délais approximatifs pour parvenir à 50 % de truitelles dans chaque répétition ou concentration ; et/ou b) le pourcentage de truitelles au moment où le taux d’éclosion dans le groupe témoin est de 50 %.
- Comportement anormal des truitelles (essai EAT). - Il faut signaler la nature et la prévalence des comportements anormaux.
On pourrait faire d’autres observations, si on voulait plus d’information, mais elles ne seraient pas considérées comme des paramètres officiels de mesure de l’essai. Ce pourrait être notamment la proportion d’embryons non viables (essais EA et EAT), le retard dans l’éclosion (essai EAT) et la mortalité chez les alevins après l’éclosion, observés de façon ponctuelle au stade de l'alevin (essais EA et EAT).
4.5.2 Concentrations efficaces et létales
Pour les effets toxiques fondés sur la CE 50, la CE 25 ou la CL 50 (§ 4.5.1), on applique les étapes suivantes au calcul du paramètre ultime de mesure :
- Dénombrer les sujets touchés (ou manquants) dans chaque répétition, mais totaliser les chiffres pour les répétitions d’une concentration donnée.
- On ne peut pas estimer la CE 50 ou la CL 50 à moins qu’une concentration n’aboutisse à un effet touchant au moins 50 % des sujets. On ne peut pas estimer de même la CE 25, à moins que la concentration ne se traduise par un effet touchant au moins 25 % des sujets.
- À l’égard de la CE 50 ou de la CE 25, appliquer la formule d’Abbott aux nombres combinés, pour autoriser un effet de contrôle raisonnable (voir les paragraphes qui suivent). Cela s’applique aux paramètres de mesure qui intègrent la réussite de la fécondation.
- Utiliser la méthode des probits, pour calculer la CE 50 et la CE 25 ou la CL 50 et leurs limites de confiance à 95 %.
- Si les résultats ne satisfont pas aux exigences de la méthode des probits, utiliser la méthode binomiale pour calculer la CE 50 ou la CL 50 et l’intervalle qui couvrirait les limites de confiance à 95 %. Estimer la CE 25 de façon moins formelle, par interpolation ou par d’autres statistiques quantiques acceptables.
Voici des observations sur chacune de ces étapes.
Répétitions. - On compte les sujets touchés (ou manquants) dans chaque répétition, mais on combine les chiffres correspondant à une concentration donnée. Le mode opératoire utilise trois répétitions, pour faciliter les manipulations, obtenir la charge voulue au cours de l’essai et servir de police d’assurance en cas de perte accidentelle d’une enceinte expérimentale ou d’autres problèmes. Le meilleur emploi à trouver aux données qui en résultent est de combiner les répétitions pour obtenir un grand nombre de sujets pour une analyse donnée, ce qui permet de resserrer les limites de confiance.
Restrictions concernant les données. - On ne reconnaît comme valide l’extrapolation des paramètres ultimes de mesure à partir de l’observation d’un effet moins intense. On peut estimer la CE 50 et la CL 50 uniquement à la condition qu’au moins une concentration entraîne un effet touchant au moins 50 % des sujets. De même, on ne peut pas estimer la CE 25 si une concentration n’entraîne pas un effet touchant au moins 25 % des sujets.
Formule d’Abbott (v. Finney, 1971 ou EC 1998b). - Sauf indication du contraire, dans Environnement Canada (1998b), cette formule devrait servir au calcul de la CE x dans les essais E et EA ainsi qu’au calcul de la non-viabilité au début du stade de la truitelle, dans l’essai EAT. La formule permet de corriger l’effet observé, à chaque concentration, par le pourcentage d’effet exercé chez les témoins, ce qui aide à ajuster les écarts de fécondation qui, d’un essai à l’autre, sont attribuables aux variables et aux gamètes (Yee et al., 1996). La formule s’applique après que l’on a combiné les résultats des répétitions.
Pour que ces essais soient valides, le taux d’échec de la fécondation ne doit pas excéder 30 % (§ 4.6). Le même taux s’applique aux embryons non viables chez les témoins de l’essai E ; la formule d’Abbott devrait s’appliquer à tout effet, jusqu’à concurrence de 30 % chez les témoins. L’essai EA, plus long, concernant les alevins non viables, autorise un taux d’effet de 35 % chez les témoins, à la fin de l’essai, avant de le considérer comme invalide (§ 4.6), et l’on devrait utiliser la formule d’Abbott pour tenir compte de cet effet. L’essai EAT, encore plus long, qui se fonde sur la viabilité des truitelles, autorise un taux d’effet de 40 % chez les témoins avant de considérer l’essai comme invalide (§ 4.6). La formule d’Abbott devrait servir à tenir compte de l’effet observé chez les témoins.
La formule d’Abbott ne doit pas servir à corriger la mortalité compte tenu de celle des témoins dans la deuxième étape de l’essai EAT, avec les truitelles, sauf indication du contraire dans Environnement Canada (1998b). Si, chez les témoins, le taux de mortalité possède 20 % au cours des 30 jours de l’essai, ce dernier est invalide (§ 4.6). Il serait peu avantageux d’utiliser la formule d’Abbott pour appliquer un taux de correction pouvant atteindre 20 %, parce cela influerait peu sur la valeur calculée de la CL 50Note de bas de page 30.
Méthode des probits. - Le choix des méthodes statistiques est le même pour chaque analyse visant à déterminer la CE x ou la CL 50. Nous donnons dans le présent rapport des instructions générales sur les démarches statistiques ; des conseils supplémentaires se trouvent dans Environnement Canada (1998b).
À la condition d’avoir choisi l’intervalle convenable de concentrations d’essai et à la condition que des effets partiels se soient manifestés à deux concentrations, on peut recourir à la méthode des probits. Si l’effet - corrigé par la formule d’Abbott - n’atteint pas 50 % à au moins une des concentrations, on ne peut estimer ni la CE 50 ni la CL 50. De même, on ne peut pas estimer la CE 25 à moins d’observer un effet chez 25 % des sujets à une concentration au moins. Si, à une concentration donnée, l’effet est nul, cette information sert à chiffrer l’effet à 0 %. Cependant, si des concentrations successives donnent une série d’effets nuls, une seule d’entre elles sert à estimer la CE 50 et la CL 50, et ce devrait être la concentration maximale de la série, c’est-à-dire celle où l’effet nul est le plus près de la médiane de la distribution des données. De même, si l’on avait observé une série d’effets successifs touchant la totalité des sujets (p. ex. 100 % de non-éclosion aux concentrations supérieures utilisées dans l'essai), on n'utiliserait qu'une seule valeur correspondant à cet effet, encore une fois celle qui est la plus rapprochée de la médiane, c’est-à-dire l’effet à 100 % observé à la plus faible de ces concentrations. Le fait d’utiliser des valeurs supplémentaires correspondant à l’effet nul et/ou total serait susceptible d’entraîner une distorsion dans l’estimation de la CE 50 ou de la CL 50.
On peut se servir de TOXSTATMC (West et Gulley, 1996) ou d’autres progiciels du commerce pour appliquer la méthode ordinaire des probits. Ils permettent d’estimer la CE 50 et la CL 50 et leurs limites de confiance à 95 %. Ces programmes permettent aussi d’estimer la CE 25 et ses limites de confiance ou toute autre CE x choisie.
Il existe un programme statistique en langage BASIC, adopté de Stephan (1977) et simple d’emploi, que l’on peut obtenir d’Environnement Canada (v. annexe B) pour calculer la CE 50 ou la CL 50 avec une limite de confiance à 95 % par la méthode des probits. Le programme permet aussi d’estimer la CE 50 et la CL 50 par la méthode binomiale. On estime aussi la CE 50, avec ses limites de confiance à 95 %, par la méthode des moyennes mobiles, mais cette méthode n’offre aucun avantage sur celle des probits.
On devrait calculer la CE 25, outre la CE 50, pour obtenir un paramètre ultime de mesure quelque peu plus sensible. Certains programmes de surveillance, des règlements ou des expériences pourraient exiger le calcul d’un autre paramètre tel que la CE 20. On peut se servir de programmes du commerce, y compris de TOXSTAT, pour calculer la CE 25 et ses limites de confiance à 95 %. On devrait cependant être conscient du fait que la précision diminue progressivement quand on détermine ces effets moindres. En outre, les limites de confiance s’élargissent d’autant. On ne recommande pas d’estimation inférieure à la CE 20 (EC, 1998b).
On doit utiliser la méthode binomiale pour estimer la CE 50 ou la CL 50 si les données ne dégagent pas au moins deux effets partiels (c’est-à-dire un effet entre 0 et 100 %). Le programme de Stephan (1977) susmentionné est le seul programme informatique connu qui repose sur cette méthode. Le programme calcule aussi les limites extérieures prudentes (larges) à l’intérieur desquelles les véritables limites de confiance de la CE 50 et de la CL 50 se trouveraient. Malheureusement, le programme de Stephan ne permet pas d’estimer la CE 25.
On peut calculer « à la main » un équivalent simple de l’estimation de la CE 50 et de la CL 50 par la méthode binomiale, dans les cas où une concentration entraîne un effet nul et que la concentration supérieure suivante entraîne un effet total. La moyenne géométrique des deux concentrations est la meilleure estimation de la CE 50. Les deux concentrations représentent presque toujours des estimations prudentes des limites de confiance, mais ce n’est pas invariablement le cas, et l’on devrait donner des conseils de prudence quand on les présente comme limites probables. (L’utilité du programme de Stephan est de calculer les probabilités et de choisir les concentrations qui auront incontestablement une portée plus grande que les véritables limites de confiance.) Le calcul « manuel » de la moyenne géométrique peut se faire en passant par le logarithme des concentrations que l’on convertit ensuite en valeur arithmétique. On peut aussi la calculer en extrayant la racine carrée du produit des deux concentrations dont l’une engendre un effet nul et l’autre un effet total.
On peut aussi calculer la CE 25 à la main, dans les cas où la méthode des probits n’est pas valide. On utilise les probits des proportions observées, pour interpoler le probit auquel, prévoit-on, correspond l’effet à 25 %. Pour les calculs, on utilise les logarithmes de la concentration. On transforme le logarithme obtenu pour la CE 25 en une valeur arithmétique. On peut aussi estimer la CE 25 par une méthode graphique, sur papier log-probabilité. On peut se procurer ce papier dans certaines librairies universitaires ou techniques, ou on peut le copier de la figure qui se trouve dans Environnement Canada (1998b). On peut convertir les pourcentages en probits à l’aide des tables qui se trouvent dans Finney (1971), Newman (1995) ou dans certains manuels de statistique.
Les méthodes binomiales ou manuelles actuelles de calcul de la CE 25 ne fournissent aucune limite de confiance.
4.5.3 Concentration inhibitrice correspondant à un pourcentage d’effet précisé
La CIp et, notamment, la CI 25, sont recommandées comme estimations ponctuelles de la concentration provoquant un certain effet sur des fonctions biologiques quantitatives (graduées), par exemple le poids atteint par les truitelles dans l’essai EAT (§ 4.5.1). Le chercheur choisit le pourcentage p, mais il est habituel de retenir le taux de 25 % (ou de 20 %) pour une performance inférieure à celle du témoin (EC, 1998b). La CI 25 est un paramètre formel de mesure que l’on doit calculer dans l’essai EAT, pour déterminer le poids sec moyen des truitelles après 30 jours d’exposition et d’alimentation. Les limites de confiance à 95 % doivent aussi être calculées et signalées pour chaque CIp, afin de permettre les comparaisons statistiques avec d’autres valeurs du genre.
L’analyse visant à déterminer la CI 25 du poids sec moyen des truitelles devrait débuter par le tracé, à la main, du pourcentage de retard pondéral des truitelles par rapport à celles du témoin, en fonction du logarithme de la concentration d’essai. L’objet de ce travail à la main est de vérifier le caractère raisonnable des résultats que donneront les calculs mathématiques ultérieurs. Le pourcentage de retard du croît se calcule, pour une répétition donnée, à partir du poids sec moyen des truitelles survivantes de cette répétition, par rapport au poids moyen global atteint dans les répétitions témoins. On devrait porter sur le graphique le pourcentage de retard du gain de poids de chaque répétition, de façon séparée. On devrait lire la valeur approximative de la CI 25 à partir d’une ligne ajustée à l’œil. Il faut résoudre tout écart important entre la CI 25 approximative déterminée par méthode graphique et la CI 25 calculée ultérieurement sur l’ordinateur. Le graphique montrerait aussi si l’on a obtenu un rapport positif et logique entre la concentration et l’effet caractéristique souhaitable d’un essai valide (EC, 1998b).
Actuellement, la méthode informatisée normale d’estimation de la CIp avec des limites de confiance de 95 % se fonde sur le lissage des courbes et l’interpolation à l’aide du programme ICPIN (Norberg-King, 1993 ; USEPA, 1994 ; EC, 1998b). Cette modification du programme BOOTSTRP (Norberg-King, 1988) fait partie de la dernière version de TOXSTATMC (West et Gulley, 1996). Le programme ICPIN lisse d’abord les données, au besoin, estime la CIp, par simple interpolation, puis obtient les limites de confiance, par une méthode dite « bootstrap », de nombreux rééchantillonnages aléatoires à partir des observations réelles (USEPA, 1994, annexe M ; ou EC, 1998b). Pour utiliser ce programme, les chercheurs canadiens doivent soit : a) introduire les concentrations sous forme logarithmique ; b) si la transformation logarithmique est offerte dans un progiciel, s’assurer qu’elle est de fait retenue pour l’analyse. Au moment d’écrire ces lignes, le programme ICPIN semble la seule méthode usuelle de calcul de la CIp avec ses limites de confiance, mais la régression linéaire ou générale procurerait de meilleures estimations (EC, 1998b)Note de bas de page 31. Les chercheurs devraient être à l’affût des progiciels améliorés d’écotoxicologie.
On devrait appliquer certaines contraintes logiques aux estimations de la CI 25. Celle- ci ne devrait pas découler d’une extrapolation. Pour estimer la CI 25, on devrait pouvoir utiliser au moins une concentration abaissant la performance de plus 25 % par rapport au groupe témoin et au moins une concentration l’abaissant de moins de 25 % (mais l’abaissant plus que chez le groupe témoin, c’est-à-dire exerçant un effet non nul)Note de bas de page 32. La variabilité est supérieure dans les parages des extrêmes de la relation et, notamment, des réductions observées de 0 et de 100 % apporteraient peu d’informations utiles à l’estimation juste de la CIp.
Le calcul de la CIp repose sur l’hypothèse d’une réduction de la performance des organismes en expérience par rapport à ceux du groupe témoin. Dans certains cas, on pourrait observer un effet stimulant aux faibles concentrations (p. ex. accélération de la croissance), mais un effet inhibant aux concentrations supérieures. On ne peut pas supposer que la stimulation soit strictement positive ou bénéfique, pas plus que l’on peut toujours affirmer que l’inhibition soit un effet strictement négatif. Ce que l’on mesure, c’est un écart par rapport à la norme (c’est-à-dire au groupe témoin). Les théoriciens sont divisés : doit-on considérer les effets stimulants à faible concentration (hormèse) comme un effet sublétal, dans le calcul de la CIp ? Doit-on plutôt les considérer comme un effet « témoin » parallèle ? Ou, encore doit-on les combiner à la réaction des témoins (comme le fait automatiquement, pour le lissage, le programme ICPIN). Cette dernière option n’est pas recommandée à l’égard de la croissance des truitelles dans l’essai EAT. Nous proposons ici, si l’on constate un effet stimulant, de signaler les résultats de l’essai de deux façons : (1) considérer l’effet stimulant comme un écart négatif, et rédiger un compte rendu descriptif du degré de stimulation et de la ou des concentrations qui y correspondent ; (2) lors de l’introduction des données dans le programme pour le calcul de la CI 25, ne pas tenir compte des concentrations correspondant à l’effet stimulant, c’est-à-dire ne pas les saisir. On évite ainsi de déplacer vers le haut, par les calculs, la réaction des témoins.
4.5.4 CSEO et CEMO
Si on le veut, on peut utiliser le test d’hypothèse, en estimant la concentration sans effet observé (CSEO) et la concentration à effet minimal observé (CEMO). On peut les obtenir, par calcul statistique, à partir des mêmes données quantitatives (graduées) que celles qui ont servi à estimer la CI 25 relative au poids des truitelles (v. § 4.5.3). Si on utilise la CSEO, il faut aussi calculer et signaler l’écart significatif minimal (voir ci-dessous).
L’emploi du rapport CSEO/CEMO comme paramètre ultime de mesure souffre de certaines limites. La CSEO n’est pas la concentration sans effet, mais, plutôt, la concentration à laquelle ne correspond pas d’écart statistiquement significatif. La concentration qui s’est révélée être la CSEO pourrait dépendre en grande partie de la taille de l’échantillon, du nombre de répétitions et de la variabilité à l’intérieur de ces dernières. Le laboratoire dont les résultats seraient très variables ou qui aurait utilisé peu de répétitions pourrait obtenir une CSEO supérieure à celle du laboratoire dont les résultats auraient été moins variables et qui aurait utilisé un plus grand nombre de répétitions.
On pourrait déterminer la CSEO et la CEMO correspondant au poids sec moyen des truitelles survivantes de chaque répétition au terme des 30 jours d’exposition. Si tous les sujets d’une répétition devaient mourir, on exclurait cette répétition, et l’analyse deviendrait asymétrique. De même, si tous les sujets de toutes les répétitions devaient mourir à une concentration donnée, cette concentration serait exclue de l’analyse.
Le programme TOXSTATMC énonce la méthode statistique à suivreNote de bas de page 33. Le programme commence par vérifier la normalité et l’homogénéité des données et il fournit les tests de signification convenant aux types particuliers de distribution. Il fournit aussi les tests convenables dans les cas où le nombre de répétitions est inégal en raison de pertes accidentelles ou pour d’autres causes.
Si la distribution des données obéit à la loi normale ou si, à défaut, le programme peut lui faire subir une transformation convenable, il effectue une analyse de la variance. Habituellement, le test de Williams permettra de constater les écarts correspondant à chaque concentration. Accessible dans le programme TOXSTAT, il est sensible à l’association entre le degré d’effet et le classement des concentrations par ordre d’intensité. Ce test (Williams, 1971 ; 1972) est recommandé parce que plus puissant que celui de Dunnett, qui ne tient pas compte de l’ordre des concentrations (Masters et al., 1991). Si le nombre de répétitions est inégal, on utilise à la place du test de Williams le test t de Bonferroni. Tous ces tests sont des tests de comparaison multiple, qui estiment l’écart significatif minimal, c’est-à-dire l’ampleur de l’écart entre les moyennes qui devraient exister entre le groupe témoin et une concentration d’essai avant que l’on puisse conclure que l’effet correspond à cette concentration est significatif (discuté dans USEPA, 1989 et 1994 ; et EC, 1998b).
Si un ensemble de données ne peut pas satisfaire à la normalité ou à l’homogénéité et ne peut pas être transformé pour s’y conformer, le programme TOXSTAT fournit des tests non paramétriques (test multi- univoque de Steel ou test de sommation des rangs de Wilcoxon, dans le cas d’un nombre inégal de répétitions). Ces tests non paramétriques peuvent s’appliquer aux données dont la distribution n’obéit pas à la loi normale, et ce sont des outils puissants pour ces données. Les tests non paramétriques sont moins puissants que les tests paramétriques, cependant, lorsqu’on les applique à des données obéissant à la loi normale et, dans ce cas, ils pourraient ne pas déceler de différences réelles dans l’effet, c’est-à-dire sous-estimer l’éventuelle toxicité. Il faut aussi se rappeler qu’il faut quatre répétitions pour utiliser les méthodes non paramétriques.
On peut calculer la moyenne géométrique de la CSEO et de la CEMO (c’est-à-dire la concentration avec effet de seuil observé ou CESO), pour faire l’économie d’un paramètre au lieu d’avoir à en manipuler deux. On peut utiliser cette valeur et la signaler, reconnaissant qu’elle représente une estimation arbitraire du seuil d’un effet décelé par une méthode statistique, qui pourrait se trouver n’importe où dans l’intervalle borné par la CEMO et la CSEO. La CESO calculée dépend des concentrations que l’on s’est trouvé à sélectionner pour l’essai. On ne peut pas estimer de limites de confiance pour la CESO, comme c’est aussi le cas pour la CSEO et la CEMO, bien que ces dernières indiquent les limites extérieures de l’estimation.
La signification de « seuil » dans l’expression effet de seul observé est celle du dictionnaire, c’est-à-dire le point auquel on commence à observer un effet. Les effets non décelés peuvent exister à des concentrations inférieures. La moyenne géométrique de la CSEO et de la CEMO est souvent appelée « valeur chronique » (chronic value) aux États-Unis, mais l’expression porte quelque peu à confusion. Les options E, EA et EAT décrites dans le présent rapport se déroulent sur moins de 10 % de la durée de vie prévue de la truite arc-en-ciel ; on ne devrait donc pas qualifier les effets qu’elles permettent d’observer comme chroniques.
4.5.5 Test t de Student
Si, pour l’essai, on n’utilise qu’une seule concentration, le test t de Student est normalement la méthode qui convient pour comparer les résultats donnés par cette concentration avec ceux du groupe témoin. On peut trouver la méthode à suivre pour appliquer ce test dans n’importe quel manuel de statistique. L’effet de la substance d’essai est accepté si l’effet mesuré par un paramètre ultime et normal de mesure diffère de façon significative de la même statistique donnée par le groupe témoin (c’est-à-dire le pourcentage d’embryons non viables, d’alevins non viables, de truitelles non viables, taux de mortalité des truitelles et poids moyen des truitelles). On pourrait aussi appliquer le test aux effets recommandés pour des observations supplémentaires et aux comptes rendus descriptifs connexes, si l’effet a été documenté de façon sûre et numérique (c’est-à-dire, éclosion retardée, alevins difformes, taux de mortalité chez les alevins, stade de la truitelle retardé ou comportement anormal des truitelles). Il faut satisfaire aux exigences concernant l’homogénéité de la variance et la normalité de la distribution (USEPA, 1994, annexe B ; EC, 1998b) avant d’utiliser le test t normal. Si les données ne satisfont pas aux exigences, on pourrait choisir un test non paramétrique, sur les conseils d’un statisticien ; aucun test ne semble encore s’être imposé comme la norme.
4.5.6 Test de Tukey
Parfois, les variantes d’un essai pourraient ne pas représenter les diverses concentrations que l’on trouve dans un seul échantillon d’eau usée ou de produit chimique, mais plutôt un ensemble d’échantillons différents, par exemple les effluents non dilués de différentes industries ou des échantillons d’eaux de surface prélevés en différentes localités. On pourrait vouloir vérifier non seulement si chaque échantillon diffère du groupe témoin, mais, aussi, si les échantillons diffèrent les uns des autres. Le test de Tukey permet de répondre à cette question (c’est une option dans le programme statistique TOXSTAT ; West et Gulley, 1996). Ces batteries de tests devraient signaler les résultats de chaque échantillon en pourcentage d’effet pour le(s) paramètre(s) retenu(s), exprimés en pourcentage observé du ou des témoins et elles devraient déterminer (à l’aide du test de Tukey) si ce nombre est significativement différent de la valeur correspondante chez le témoin.
4.6 Validité de l’essai
Dans l’hypothèse où on a suivi tous les modes opératoires recommandés et que l’on s’est conformé aux conditionsNote de bas de34page 34, la validité du test doit se fonder sur chacune des observations suivantes : stabilité de la température, maintien des concentrations d’OD ; incidence des embryons non viables (essai E), des alevins non viables (essai EA) ou des truitelles non viables (essai EAT) chez les groupes témoins ; taux de mortalité des truitelles (essai EAT) des groupes témoins ; et variation du poids des sujets des groupes témoins (essai EAT).
Dans tous les cas, un taux d’échec de la fécondation supérieur à 30 % invalide l’essai (Yee et al., 1996). La mesure directe du taux de fécondation peut ne pas être accessible, puisqu’elle n’est pas exigée, mais la limite est implicite dans les conditions suivantes de la validité, moyennant quelques correctifs pour les essais de plus longue durée.
Pour que l’essai E soit valide, le taux moyen d’embryons non viables dans le groupe témoin doit être au plus de 30 %. Les œufs non fécondés sont comptabilisés comme embryons non viables et, de fait, le critère est le même que pour l’échec de la fécondation.
Le taux moyen d’alevins non viables dans le groupe témoin à la fin de l’essai EA ne doit pas excéder 35 %.
Dans l’essai EAT, le taux moyen de truitelles témoins non viables au moment où l’on compte 50 % de truitelles survivantes, ne doit pas excéder 40 %.
Pour que l’essai EAT soit valide, il faut en outre que le taux de mortalité chez les truitelles témoins au cours de la période de 30 jours d’exposition n’excède pas 20 %.
4.7 Considérations juridiques
Il faut veiller à l’admissibilité, par les tribunaux, des échantillons prélevés et analysés dans le dessein d’engager des poursuites. À cette fin, les échantillons doivent être représentatifs de la substance échantillonnée ; ne pas être contaminés par des substances étrangères, être identifiables quant à la date, à l’heure et au lieu du prélèvement ; il faut que la chaîne de leur garde et de leur transmission soit attestée et qu’ils aient été analysés le plus tôt possible après le prélèvement. Les responsables de l’exécution de l’essai et de la transmission des résultats doivent assurer la continuité de la preuve (McCaffrey, 1979) et assurer l’intégrité des résultats.
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