Potentiel d'effets nocifs sur la santé humaine

L'APDFO a été détecté à différents endroits au Canada : dans la poussière domestique à Ottawa, en Ontario, à une concentration moyenne de 106 ng/g (n = 67; valeurs comprises entre 2,29 et 1 234 ng/g; médiane = 19,72 ng/g – Kubwabo et al., 2005); dans l'eau du robinet de Calgary, en Alberta, et de Vancouver, en Colombie-Britannique, à une concentration de 0,2 ng/L (un échantillon par ville – Lien et al., 2006); dans les eaux de surface des États-Unis et du Canada, soit dans le lac Ontario et le lac Érié, à des concentrations comprises entre 13 et 50 ng/L (moyenne de 8 échantillons prélevés à 4 endroits dans le lac Ontario : 42,5ng/L; moyenne de 8 échantillons prélevés à 4 endroits dans le lac Érié : 35,6 ng/L – Boulanger et al., 2004; médiane de 13 échantillons prélevés dans le lac Ontario : 21 ng/L; médiane de 3 échantillons prélevés dans le lac Érié : 15 ng/L – Sinclairet al., 2006); dans l'eau lacustre recueillie à 5 endroits en Arctique, à des concentrations moyennes allant de 0,9 à 14 ng/L (valeurs comprises entre 0,5 et 16 ng/L – Stock et al., 2007); dans l'air intérieur et les résidus de sécheuse (courriel du Bureau de l'évaluation et du contrôle des substances nouvelles de Santé Canada adressé en 2009 au Bureau de l'évaluation des risques de Santé Canada; source non citée dans les références[2]). On a également détecté une contamination par l'APDFO des poissons et de l'eau à des sites aéroportuaires canadiens à la suite d'un déversement de mousse extinctrice (Moody et al., 2002; courriel de Transports Canada adressé en 2008 au Bureau d'évaluation de risque et d'impact de Santé Canada; source non citée dans les références).

De même, des FTOH ont été détectés à différents endroits au Canada : dans la poussière domestique à Ottawa, en Ontario (n = 59; moyenne du 8:2 FTOH : 55 ng/g – Shoeibet al., 2005), et dans l'air au-dessus des zones rurales et urbaines en Ontario et au Manitoba (total des FTOH à Toronto, en Ontario : valeurs comprises entre 113 et 213 pg/m3, moyenne = 165 pg/m3; Winnipeg, au Manitoba : valeurs inférieures à la limite de détection à 18 pg/m3, moyenne = 11 pg/m3; Long Point, en Ontario : valeurs inférieures à la limite de détection à 52 pg/m3, moyenne = 26 pg/m3; n = 3 échantillons par site – Stock et al., 2004; 8:2 FTOH à Toronto, en Ontario : valeurs comprises entre 9 et 123 pg/m3, moyenne = 55 pg/m3; n = 4; Long Point, en Ontario : valeurs comprises entre 25 et 40 pg/m3, moyenne = 32 pg/m3; n = 2 – Martin et al., 2002) et en Arctique (total desFTOH : moyenne = 28 pg/m3; valeurs du 8:2 FTOH inférieures à la limite de détection à 20 pg/m3 – Stock et al., 2007; 8:2 FTOH : valeurs comprises entre 5,8 et 26 pg/m3; n = 20 – Shoeib et al., 2006).

De l'APDFO a été détecté dans 3 des 54 échantillons composites d'aliments recueillis dans le cadre de l'Étude de la diète totale [EDT] menée de 1992 à 2004, la concentration quantifiable la plus élevée (3,6 ng/g) se retrouvant dans un échantillon de maïs à éclater au micro-ondes (Tittlemier et al., 2007). L'APDFO a également été mesuré dans plusieurs espèces de poisson (dans des échantillons cuits et crus; concentration maximale détectée = 1,59 ng/g) achetés dans des marchés en Ontario en 2006 (Del Gobboet al., 2008) et dans certains aliments autochtones (phoque, canard et caribou; concentration maximale détectée = 0,8 ng/g) recueillis au Nunavut en 1997-1998 (Ostertag et al., 2009).

L'APDFO a été mesuré dans les matériaux d'emballage et dans les vapeurs produites par la cuisson au micro-ondes des deux marques de maïs à éclater préemballé (conçu pour ce type de cuisson) de l'essai, et le 8:2 FTOH a été mesuré dans l'emballage et les vapeurs de l'une des deux marques de maïs à éclater. Ni l'APDFO ni le 8:2 FTOH n'a été détecté dans les matériaux d'emballage ou les vapeurs des grains de maïs à éclater nature cuits dans un sac en polyéthylène (Sinclair et al., 2007). Dans le cadre d'études portant sur l'analyse de produits achetés dans des magasins de détail aux États-Unis, l'APDFO a été mesuré dans de batteries de cuisine neuves traitées au polytétrafluoroéthylène après avoir été chauffées à des températures de cuisson normales (Begley et al., 2005) et dans de l'eau bouillie dans deux casseroles antiadhésives neuves sur quatre (Sinclair et al., 2007). La présence d'APDFO et de 8:2 FTOH a été décelée dans le dégagement gazeux des quatre marques de casseroles antiadhésives neuves mises à l'essai chauffées à des températures de cuisson normales (Sinclair et al., 2007). Dans une étude menée en Italie, l'APDFO a aussi été détecté dans l'huile de cuisson après avoir été chauffée dans des casseroles antiadhésives neuves dans des conditions de cuisson normales (Bononi et Tateo, 2007). D'autres études ont signalé que des échantillons extraits de batteries de cuisine traitées neuves n'affichaient aucune concentration décelable d'APDFO (Powley et al., 2005; Washburn et al., 2005; Bradley et al., 2007). Les échantillons extraits de certains articles traités aux composés fluorés (vêtements, tapis et tissus d'ameublement) contenaient de l'APDFO (Washburnet al., 2005).

Cet acide a été détecté dans 44 des 45 échantillons de lait maternel humain prélevés au Massachusetts, à des concentrations allant de moins de 0,0301 à 0,161 µg/mL (Tao et al., 2008). De plus, la présence d'APDFO a été décelée dans le sang du cordon ombilical de nouveau-nés au Canada dans le cadre de trois études (Tittlemeir et al., 2004; Monroy et al., 2008; courriel du Bureau de l'évaluation et du contrôle des substances nouvelles de Santé Canada adressé en 2009 au Bureau de l'évaluation des risques de Santé Canada; source non citée dans les références), ce qui indique une exposition possible à la substance in uteroainsi que par le lait maternel.

Les données disponibles semblent indiquer que les Canadiens sont exposés à l'APDFO et à ses précurseurs présents dans l'environnement, notamment l'air, l'eau potable et la nourriture, et par l'utilisation de produits de consommation tels que les ustensiles antiadhérents, ainsi que de vêtements et de matériaux traités avec des composés perfluorés, par exemple les tapis et les tissus d'ameublement. En général, les concentrations d'APDFO observées dans l'air ambiant, les aliments et l'eau potable au Canada sont comparables à celles mesurées ailleurs, notamment aux États-Unis, en Europe et en Asie (Fromme et al., 2009). Toutefois, dans d'autres pays, des sources industrielles que l'on ne trouve pas au Canada produisent des concentrations ponctuelles d'APDFO dans l'eau potable qui sont considérablement supérieures à celles signalées au Canada (p. ex. Little Hocking, en Ohio : concentration moyenne de 3,5 µg/L; Emmett et al., 2006a).

Comme on disposait de données de biosurveillance, qui tiennent compte de toutes les sources d'exposition, on n'a pas calculé d'estimation quantitative de l'exposition à l'APDFO fondée sur les concentrations dans les milieux naturels et l'utilisation de produits de consommation. De telles estimations de l'absorption quotidienne totale ont cependant été publiées récemment. Trudelet al. (2008) ont estimé l'exposition de la population générale en Amérique du Nord à l'APDFO provenant de l'air, de la nourriture, de l'eau potable, de la poussière et des produits de consommation. Les estimations de l'exposition tirées de scénarios d'exposition à des concentrations faibles, intermédiaires et fortes variaient entre 1 et 130 ng/kg p.c. par jour pour tous les groupes d'âge. Le régime alimentaire constituait la principale source d'exposition dans les scénarios d'exposition à des concentrations faibles et intermédiaires, alors que les produits de consommation (exposition par voie orale à du tapis traité, migration de la substance dans les aliments à partir du papier traité et inhalation pendant le traitement de vêtements) constituaient la principale source d'exposition dans les scénarios de forte exposition. Cette étude n'a pas abordé l'apport de l'exposition aux précurseurs de l'APDFO. Dans une autre étude menée par Fromme et al. (2009), l'exposition de la population générale à l'APDFO a été estimée à l'aide de données de l'Amérique du Nord, de l'Europe et du Japon. La limite supérieure de l'exposition a été estimée à 12,6 ng/kg p.c. par jour et résultait principalement de la consommation alimentaire. L'exposition aux FTOH comptait pour moins de 1 % de l'exposition à l'APDFO. Cette étude ne portait pas particulièrement sur l'examen de scénarios d'exposition aux produits de consommation.

Les données de biosurveillance sont à la base de la présente évaluation de l'exposition à l'APDFO, car les concentrations sériques représentent l'exposition combinée de l'ensemble des sources et des voies, dont l'exposition aux précurseurs de l'APDFO. Cet acide a été détecté dans les échantillons de sang de populations non exposées à cette substance au travail dans divers pays du monde, y compris chez les adultes et les nouveau-nés au Canada. La présence d'APDFO dans une grande proportion des échantillons sanguins prélevés chez les humains indique que ces derniers sont exposés à l'APDFO ou à ses précurseurs qui se dégradent en APDFO dans l'environnement. Une fois dans l'organisme, cet acide peut se lier à certaines protéines (Han et al., 2003; id., 2005), mais aucune donnée n'indique qu'il est modifié par le métabolisme, la conjugaison ou la défluoruration (Vanden Heuvelet al., 1991). La demi-vie de l'APDFO est relativement longue chez l'humain, variant entre 2 et 13 ans (Burris et al., 2002; Olsen et al., 2007).

L'APDFO a été mesuré dans le sang d'adultes et de nouveau-nés canadiens dans plusieurs études, à des concentrations allant de 0,00048 µg/mL à 0,0072 µg/mL. Bien que l'on ne dispose que de peu de données de biosurveillance pour le Canada, celles dont on dispose sont comparables à celles sur les populations des États-Unis. Par exemple, dans la National Health and Nutrition Examination Survey (NHANES; enquête nationale sur la nutrition et la santé) de 2003-2004, la moyenne géométrique de la concentration d'APDFO dans le sérum de 2 094 Américains âgés de 12 ans et plus était de 0,0039 µg/mL, le 95e centile étant de 0,0098 µg/mL. Les concentrations sériques d'APDFO chez les enfants et les personnes âgées sont comparables à celles des adultes. Le tableau 7 montre les résultats d'études de biosurveillance réalisées au Canada et aux États-Unis.

Tableau 7. Études de biosurveillance de l'APDFO réalisées au Canada et aux États-Unis

Description de la population Concentration moyenne ou médiane (µg/mL) Intervalle (µg/mL) 95e centile (µg/mL) Références
Données du Canada
Échantillons de sérum prélevés en 2001 chez 56 adultes habitant à Ottawa, en Ontario, et à Gatineau, au Québec

0,0034

(moyenne arithmétique)

< LD (0,0012)- 0,0072

(73 % des échantillons)

0,0061 Kubwabo et al., 2004
Échantillons de plasma maternel et du cordon ombilical (prélevés entre 1994 et 2001) provenant de 23 échantillons combinés de plasma (10 de plasma maternel, 13 de plasma du cordon ombilical) représentant 500 donneurs des populations du Nord de quatre régions géographiques de l'Arctique canadien

0,0022 (plasma maternel)

0,0034

(cordon ombilical)

(moyennes arithmétiques)

0,000 48-0,005 46 S.O. Tittlemier et al., 2004
Échantillons de sérum maternel et de cordon ombilical (prélevés en 2004 et 2005) provenant de 101 femmes et de leurs 105 bébés à Hamilton, en Ontario

0,002 54/0,002 24

(sérum maternel entre la 24e et 28esemaine de grossesse/sérum maternel à l'accouchement)

0,001 94

(cordon ombilical)

(moyennes arithmétiques)

0,001 33-0,003 14

(maternel)

0,001 09-0,002 37 (cordon ombilical)

(100 % des échantillons)

S.O. Monroy et al., 2008
Échantillons de sérum maternel et de cordon ombilical provenant de 150 femmes et de leur bébé à Vancouver, en Colombie-Britannique (résultats préliminaires)

0,0018

(sérum maternel prélevé à la 15e semaine de grossesse)

0,0011

(cordon ombilical provenant d'un sous-ensemble de 20 échantillons)

S.O.

(100 % des échantillons maternels)

s.o. Communica-tion personnelle du Bureau de l'évaluation et du contrôle des substances nouvelles de Santé Canada adressée en 2009 au Bureau de l'évaluation des risques de Santé Canada; source non citée dans les références
Données des États-Unis
2 094 Américans âgés de 12 ans et plus; concentrations sériques tirées de l'étude NHANES de 2003-2004

0,0039

(moyenne géométrique)

< LD (0,0001)- 0,0772

(99,7 % des échantillons)

0,0098 Calafat et al., 2007
Échantillons de sérum prélevés chez 238 résidents de Seattle âgés de 65 à 96 ans

0,0042

(moyenne géométrique)

< limite de dosage (0,0014)- 0,0167 0,0097 Olsen et al., 2004a
Échantillons de sérum prélevés chez 598 enfants âgés de 2 à 12 ans dans 23 États (en 1994 et 1995)

0,0049

(moyenne géométrique)

< limite de dosage (0,0029)- 0,0561 0,010 Olsen et al., 2004b
Sérum provenant de 12 échantillons combinés prélevés chez des enfants âgés de 3 à 5 ans (21 enfants par groupe) et de 12 échantillons combinés prélevés chez des enfants âgés de 6 à 11 ans (57 enfants par groupe) [recueillis en 2001 et 2002 dans le cadre de l'étude NHANES] S. O.

0,0058-0,0084

(âgés de 3 à 5 ans)

0,0059-0,0082

(âgés de 6 à 11 ans)

S.O. Kato et al., 2009
Échantillons de sérum du cordon ombilical prélevés chez 299 nouveau-nés à Baltimore, au Maryland, en 2004 et 2005

0,0016

(médiane)

0,0003-0,0071

(100 % des échantillons)

0,0034 Apelberg et al., 2007a
Abréviations : LD, limite de détection; S.O., sans objet

Le degré de confiance associé à la mesure de l'exposition (c.-à-d. concentrations d'APDFO dans le sang) est considéré comme élevé, car, bien que les données d'échantillonnage canadiennes soient limitées, la moyenne et la valeur du 95e centile sont très semblables à celles obtenues à l'aide des échantillons recueillis aux États-Unis. De plus, l'utilisation des données de biosurveillance prend en compte les multiples sources d'exposition; il n'est donc pas nécessaire de calculer les estimations de la limite supérieure de l'exposition par l'entremise des milieux naturels, des produits de consommation et des matériaux domestiques.

La plupart des études de toxicité pertinentes portent sur le sel d'ammonium de l'APDFO (SAAPDFO). Des études sur l'anion (PFO) et le sel de sodium (APDFO-Na) de l'APDFO ainsi que sur l'APDFO lui-même ont également été publiées. L'APDFO et ses sels devraient se dissocier rapidement dans les tissus biologiques en perfluorooctanoate (PFO), l'anion de cet acide. Les effets toxicologiques associés à l'exposition à l'APDFO, au SAAPDFO et à l'APDFO-Na sont similaires. L'APDFO et ses sels sont donc considérés comme des équivalents biologiques dans la présente évaluation. Les données toxicologiques propres à chaque précurseur de l'APDFO n'ont pas été évaluées, car la démarche suivie dans cette évaluation consistait à examiner ces composés du point de vue de leur contribution à l'exposition totale à l'APDFO. L'annexe Afournit un résumé de la base de données toxicologiques sur l'APDFO et ses sels. Les études qui ont été considérées comme très importantes dans le cadre de l'évaluation préalable sont celles au cours desquelles les plus petites doses ont été administrées et où les concentrations sériques d'APDFO les plus faibles ont été associées à l'apparition d'effets.

La plus faible DMENO dans les études de toxicité sur les animaux de laboratoire, soit 0,3 mg/kg p.c. par jour pour l'APDFO, a été relevée dans une étude de toxicité à court terme (14 jours) par voie orale menée chez les rats et les souris. Cette dose était associée à une concentration sérique moyenne d'APDFO de 13 µg/mL et à une augmentation du poids du foie chez les souris mâles, ainsi qu'à une concentration sérique moyenne de 20 µg/mL et à la modification des paramètres lipidiques chez les rats mâles. Il s'agissait de la dose la plus faible mise à l'essai, de sorte qu'aucune DSENO n'a été établie (Loveless et al., 2006).

Dans une étude de toxicité subchronique par voie orale (13 semaines) effectuées sur des rats mâles, aucun effet n'a été observé à une dose de 0,06 mg/kg p.c. par jour, ni même des changements hispathologiques dans le foie. Une augmentation du poids du foie ainsi qu'une hypertrophie hépatique ont été observées à la dose suivante (0,64 mg/kg p.c. par jour). Ces effets n'ont pas été enregistrés après une période de rétablissement de 8 semaines. À la fin de la période d'exposition de 13 semaines, les concentrations sériques d'APDFO correspondantes à la DSENO et à la DMENO étaient respectivement de 7,1 et de 41,2 µg/mL (Palazzolo, 1993; Perkinset al., 2004).

Des effets sur le foie ont également été observés dans une étude d'exposition par inhalation de 14 jours sur des rats mâles. On a noté une augmentation réversible du poids du foie, des hausses réversibles de l'activité enzymatique sérique ainsi qu'une pathologie microscopique hépatique, dont une nécrose (non réversible), à des niveaux d'exposition de 8 mg/m3 et plus, mais non au niveau d'exposition de 1 mg/m3. Il a été calculé que ces niveaux d'exposition équivalaient respectivement à des doses de 2,48 et de 0,31 mg/kg p.c. par jour[3] (les concentrations sériques d'APDFO correspondantes étaient respectivement de 47 et de 13 µg/mL, à la fin de la période d'exposition de 14 jours) (Haskell Laboratory, 1981a; Kennedy et al., 1986).

Dans une étude de toxicité subchronique sur des singes mâles exposés par voie orale durant 26 semaines, la dose d'APDFO de 3 mg/kg p.c. par jour, soit la dose la plus faible mise à l'essai, a entraîné une augmentation du poids du foie (Thomford, 2001b; Butenhoffet al., 2002). D'après les mesures prises deux fois par semaine, la concentration sérique moyenne d'APDFO était de 77 µg/mL.

Au cours d'une étude de toxicité sur le développement des souris auxquelles on a administré des doses de 1 mg/kg p.c. par jour d'APDFO par voie orale durant les jours de gestation 1 à 17, on a observé une augmentation du poids du foie des souris mères, une ossification réduite des os des fœtus et une puberté précoce des souris mâles. La concentration sérique moyenne d'APDFO chez les souris mères recevant la DMENO de 1 mg/kg p.c. par jour était de 21,9 µg/mL. Comme il s'agissait de la dose la plus faible mise à l'essai, aucune DSENO n'a été établie (Lau et al., 2006).

Deux études de toxicité chronique sur des animaux de laboratoire ont été relevées. Dans l'une d'entre elles, des rats CD ont été exposés au SAAPDFOà des doses de 0, 30 ou 300 parties par million (ppm ou p.p. 106) dans leur alimentation pendant 2 ans (0, 1,3 ou 14,2 mg/kg p.c. par jour chez les mâles; 1, 1,6 ou 16,1 mg/kg p.c. par jour chez les femelles). Une DMENO de 1,3 mg/kg p.c. par jour a été établie d'après une augmentation importante des concentrations sériques dans le foie (glutamate pyruvate transaminase, phosphatase alcaline et albumine) chez les mâles. Aucun signe de cancérogénicité n'a été rapporté chez les rats femelles, mais les mâles affichaient une augmentation des adénomes des cellules de Leydig. Cette augmentation était significative (p = 0,05) chez le groupe exposé à la dose élevée de 14,2 mg/kg p.c. par jour (Sibinski, 1987). Dans la seconde étude de toxicité chronique, des rats mâles CD n'ont été exposés qu'à une seule dose d'APDFO dans leur alimentation, soit 300 ppm ou 13,6 mg/kg p.c. par jour, pendant 2 ans. L'incidence des adénomes du foie, de l'hyperplasie et des adénomes des cellules de Leydig ainsi que de l'hyperplasie et des adénomes dans les cellules acineuses du pancréas était significativement plus élevée chez les mâles exposés (Biegelet al., 2001). Aucune de ces études n'indiquait les concentrations sériques d'APDFO.

Afin de déterminer le potentiel de génotoxicité, l'APDFO ainsi que ses sels d'ammonium et de sodium (voir l'annexe A pour obtenir des données détaillées sur chacun des composés et les références) ont été évalués à l'aide de trois tests du micronoyau in vivo sur la moelle osseuse de souris, de plusieurs tests d'Ames sur la mutation bactérienne et de trois tests d'aberration chromosomique in vitro (deux sur des cellules de hamster et un sur des cellules humaines); aucun de ces tests n'a produit de données probantes. Des résultats positifs ont été obtenus dans un essai de dommages chromosomiques sur des cellules de hamster et dans un test du micronoyau in vitrosur des cellules humaines. L'APDFO a provoqué des dommages oxydatifs à l'ADN dans les cellules d'hépatomes humains en culture et dans le foie des rats exposés par voie orale ou intrapéritonéale. La base de données sur la génotoxicité indique que les composés d'APDFO ne sont pas mutagènes.

Chez les rongeurs, l'APDFO induit une prolifération des peroxysomes, par l'intermédiaire du PPARa. L'activation du PPARaprovoque des changements au niveau du foie, des modifications du transport et du métabolisme des lipides ainsi que la modification d'autres processus biochimiques. La triade de tumeurs bénignes observées chez les rats mâles exposés à l'APDFO (adénomes du foie, des cellules de Leydig et des cellules acineuses du pancréas) est typique des agonistes du PPAR, dont le clofibrate, le 2,2-dichloro-1,1,1-trifluoroéthane (HCFC 123) et l'acide pirinixique (WY-14,643) [Cook et al., 1999; Kennedy et al., 2004]. Il a été avancé que l'activation du PPARahépatique, et non la génotoxicité directe, constituait l'événement critique de l'induction de ces tumeurs. Le degré de confiance accordé aux données sur le mode d'action du PPARaest élevé en ce qui concerne les tumeurs hépatiques, modéré pour les tumeurs à cellules de Leydig et faible pour les tumeurs des cellules acineuses du pancréas (examiné dans Klaunig et al., 2003).

Il a été démontré que l'APDFO stimule lePPARa in vitro et provoque la prolifération des peroxysomes dans le foie in vivo. Des données sur les relations dose-réponse et des données temporelles appuient le mode d'action du PPARa en ce qui concerne les tumeurs hépatiques chez le rat. Dans l'étude de toxicité chronique par voie alimentaire menée par Biegelet al. (2001), l'APDFO a entraîné, dès un mois après le début du traitement, une augmentation du poids du foie et la prolifération des peroxysomes dans cet organe chez les rats exposés tout au long de l'étude; quant aux tumeurs hépatiques, elles sont apparues pour la première fois 12 mois après le début du traitement. Dans une étude d'une durée de 14 jours sur des rats mâles, Liu et al. (1996) ont établi une DSEO de 0,2 mg/kg p.c. par jour et une DMEO de 2 mg/kg p.c. par jour d'après l'augmentation du poids du foie et la prolifération des peroxysomes du foie (mesurée à l'aide de la ß-oxydation hépatique), soit les principaux paramètres de l'initiation des tumeurs hépatiques. Des signes de cancérogénicité hépatique ont été observés à la dose de 13,6 mg/kg p.c. par jour dans l'étude de toxicité chronique menée par Biegel et al.(2001), mais aucun signe n'a été observé à la dose de 1,3 mg/kg p.c. par jour dans l'étude de toxicité chronique menée par Sibinski (1987), ce qui est conforme avec la relation dose-réponse établie pour les événements clés précoces. Dans une étude de toxicité subchronique sur des singes, aucune augmentation de la prolifération des peroxysomes n'a été observée après une exposition à l'APDFO; toutefois, des effets hépatiques, dont une augmentation du poids du foie, ont été notés (Butenhoff et al., 2002).

Chez les rats mâles, l'APDFO n'a pas induit de prolifération des peroxysomes ni des cellules de Leydig (Biegelet al., 2001), ce qui semble indiquer que la formation des tumeurs dans les testicules est attribuable à un mécanisme autre que l'activation directe du PPAR. Il a été proposé que les tumeurs à cellules de Leydig chez le rat mâle résultent d'une augmentation de l'estradiol sérique provoquée par l'activation du PPARa dans le foie, suivie par des changements de l'activité enzymatique dans la biosynthèse des stéroïdes. Les études montrent que le traitement à l'APDFO accroît l'activité de l'aromatase hépatique et augmente les concentrations d'estradiol dans le sérum (Liu et al., 1996; Biegel et al., 2001). Dans une étude d'une durée de 14 jours menée sur des rats mâles, Liu et al. (1996) ont démontré que l'activité de l'aromatase hépatique et les concentrations d'estradiol dans le sérum n'augmentaient qu'à des doses provoquant la prolifération des peroxysomes du foie. Une DSEO de 0,2 mg/kg p.c. par jour et une DMEO de 2 mg/kg p.c. par jour ont été établies pour l'augmentation de l'activité de l'aromatase hépatique et des concentrations d'estradiol dans le sérum. Au cours de l'étude de toxicité chronique menée par Sibinski (1987), une augmentation notable des tumeurs à cellules de Leydig a été observée à une dose élevée de 14,2 mg/kg p.c. par jour, mais non à une faible dose de 1,3 mg/kg p.c. par jour. Dans le cadre de l'étude de toxicité chronique par voie alimentaire réalisée par Biegel et al. (2001), l'APDFO a fait augmenter la concentration de l'estradiol dans le sérum des rats après 1, 3, 6, 9 et 12 mois d'exposition, avant la première apparition de la tumeur à cellules de Leydig. Le mode d'action proposé du PPARaest donc conforme aux relations dose-réponse et temporelles associées à l'augmentation de la concentration d'estradiol dans le sérum. Dans les testicules, l'estradiol module l'expression du facteur de croissance, ce qui peut entraîner une hyperplasie et des adénomes (Biegel et al. 1995). Il a également été démontréin vitro que l'APDFO et d'autres agonistes du PPARa, dont le bézafibrate, le phtalate de monoéthylhexyle et le WY-14,643, inhibent la production de testostérone dans les cellules de Leydig (Klaunig et al., 2003), bien qu'on n'ait noté aucune diminution des taux de testostérone sérique dans l'essai biologique d'une durée de deux ans portant sur l'exposition à l'APDFO chez les rats (Biegel et al., 2001). Chez les primates non humains, une exposition à l'APDFO n'a entraîné aucune augmentation des taux de testostérone ou d'œstrogène dans le sérum ni aucune histopathologie anormale dans les testicules dans le cadre d'une étude de 26 semaines (Butenhoff et al., 2002).

L'induction des tumeurs des cellules acineuses du pancréas chez les rats mâles peut également se faire par un mécanisme médié par le PPAR du foie, bien que le degré de confiance à l'égard de ce mode d'action soit jugé plus élevé pour l'induction des tumeurs hépatiques ou des tumeurs à cellules de Leydig (examiné dans Klaunig et al., 2003). Les données sur les modes d'action in vivo proviennent surtout d'autres agonistes du PPAR, dont on a démontré l'induction de tumeurs des cellules acineuses du pancréas chez le rat. Chez cette espèce, les hormones stéroïdes, y compris l'estradiol et la cholécystokinine, ont un effet sur l'hyperplasie, les adénomes et l'hypertrophie des cellules acineuses du pancréas. L'exposition à l'APDFO pourrait réduire l'écoulement de la bile ou changer sa composition en raison des effets en aval de l'activation du PPARa hépatique. Il peut alors s'ensuivre une augmentation des taux de cholécystokinine et une stimulation des cellules acineuses du pancréas. Bien qu'il n'existe aucune donnée mécaniste sur l'APDFO, on a noté une réduction de l'écoulement de la bile et de la concentration d'acide biliaire ainsi qu'une augmentation de la cholécystokinine plasmatique chez les rats traités au WY-14,643, un agoniste du PPARa. Ces changements ont été observés dès le troisième mois d'exposition, soit avant l'observation des premières tumeurs des cellules acineuses du pancréas. Dans l'étude de toxicité chronique par voie alimentaire menée par Biegel et al.(2001), les rats traités à l'APDFO présentaient une prolifération accrue des cellules pancréatiques après 15, 18 et 21 mois d'exposition, ainsi qu'une augmentation notable de l'hyperplasie acineuse. Aucune hispathologie anormale dans le pancréas des singes exposés à l'APDFO n'a été constatée dans l'étude de 26 semaines (Butenhoff et al., 2002).

Dans une ébauche d'évaluation préalable, l'EPA des États-Unis a indiqué qu'il existait suffisamment de preuves pour conclure que la toxicité hépatique et les adénomes hépatiques observés chez les rats après une exposition à l'APDFO résulteraient du mode d'action d'un agoniste du PPARa, ce qui est peu probable chez l'humain. L'EPA conclut également que les tumeurs à cellules de Leydig et celles des cellules acineuses du pancréas pourraient s'appliquer aux humains, mais qu'elles ne constituent pas un risque important de cancer, en raison des différences quantitatives de l'expression des récepteurs et d'autres facteurs toxicodynamiques (US EPA, 2005). Toutefois, le Science Advisory Board a examiné l'évaluation des risques de l'EPA et a conclu qu'il pourrait exister d'autres modes d'action à l'origine des tumeurs hépatiques. De plus, comme les modes d'action par lesquels seraient induites les tumeurs à cellules de Leydig et les tumeurs des cellules acineuses du pancréas demeurent inconnus, ils devraient être applicables dans le cas des êtres humains (US EPA, 2006b).

Des études récentes réalisées sur des souris dont l'expression du gène PPARa a été abolie (PPARa-KO) semblent indiquer que certains des effets associés à l'exposition à l'APDFO se produisent indépendamment de la voie de prolifération des peroxysomes. Des effets sur le développement, tels qu'un retard dans l'ouverture des yeux, des déficits du gain de poids après la naissance et une réduction de la survie postnatale, ont été observés chez les souris de type sauvage, mais non chez les souris PPARa-KO; ces effets dépendraient donc de l'expression du PPARa. Des pertes en début de gestation ont été observées chez les deux souches de souris, ce qui indique l'intervention de voies autres que la prolifération des peroxysomes (Abbott et al., 2007). Yang et al. (2002) ont constaté que la diminution du poids de la rate et du nombre de splénocytes observée chez les souris de type sauvage exposées à l'APDFO dans leur alimentation pendant sept jours ne se produisait pas chez les souris PPARa-KO. Les souris exposées à l'APDFO affichaient également une diminution du poids du thymus et du nombre de thymocytes, effets qui étaient atténués chez les souris PPARa-KO. Une augmentation importante du poids du foie a toutefois été notée chez les souris de type sauvage et les souris PPARa-KO. D'après des études du profil d'expression des gènes, l'APDFO pourrait modifier les gènes du foie des souris indépendamment du PPARa (Rosenet al., 2008a; id., 2008b); on ignore toutefois si ces données sont pertinentes du point de vue toxicologique.

Parmi les études épidémiologiques qui ont été réalisées sur les effets nocifs de l'exposition à l'APDFO sur la santé, notons des études transversales sur l'exposition de la population générale, des études portant sur l'exposition de populations à des concentrations élevées d'APDFO dans l'eau potable contaminée ainsi que des études d'exposition professionnelle. Toutefois, aucune relation causale entre l'exposition à l'APDFO et des effets nocifs sur la santé n'a pu être établie en raison des nombreux facteurs confusionnels, dont l'exposition à de nombreuses substances.

Selon deux études menées récemment (une étude transversale aux États-Unis et une étude de cohorte au Danemark), il pourrait exister une faible corrélation entre l'exposition à l'APDFO pendant la grossesse et une insuffisance de poids à la naissance (Apelberget al., 2007b; Fei et al., 2007). Toutefois, l'ampleur de cet effet était faible, compte tenu des variations normales des paramètres mesurés, et tous les enfants se situaient à l'intérieur de la plage normale. Aucune association entre les concentrations sériques d'APDFO chez les mères et le poids des nouveau-nés à la naissance n'a été relevée dans d'autres études sur l'exposition de la population générale menées au Canada (Monroy et al., 2008; Hamm et al., 2009), au Japon (Washino et al., 2009) ou aux États-Unis, où une collectivité affichait une concentration sérique moyenne d'APDFO dix fois supérieure à celle observée au sein de la population générale (Stein et al., 2009).

Le degré de confiance accordé à l'évaluation des effets de l'APDFO va de modéré à élevé, car la base de données toxicologiques englobe un large éventail de paramètres et d'étapes du cycle de vie ainsi que plusieurs espèces des deux sexes.

Il existe suffisamment de données pour calculer des marges d'exposition fondées sur des comparaison entre les concentrations sériques d'APDFO chez les animaux de laboratoire aux doses associées à un effet critique et les concentrations sériques d'APDFO chez les humains tirées d'études de biosurveillance. Les marges d'exposition entre les concentrations sériques d'APDFO associées aux effets les plus critiques chez les animaux de laboratoire et les concentrations sériques d'APDFO chez les Canadiens d'âge adulte étaient comprises entre environ 3 800 et 22 600 pour les concentrations sériques moyennes et entre 2 100 et 12 600 pour les valeurs prudentes du 95e centile. Les marges d'exposition calculées à l'aide des concentrations sériques du 95e centile chez les enfants et les adultes des États-Unis varient entre 1 300 et 7 900 (tableau 8).

Tableau 8. Marges d'exposition

Étude et effet critique (référence) Dose associée à un effet critique (mg/kg p.c. par jour) Mesure de la dose d'APDFO associée à un effet critique (concentration sérique d'APDFO en µg/mL) Mesure de l'exposition humaine à l'APDFO (concentration sérique d'APDFO en µg/mL) Marge d'exposition1

Augmentation du poids du foie des souris mâles auxquelles on a administré de l'APDFO par gavage pendant 14 jours

(Loveless et al., 2006)

DMENO

= 0,3

13

0,0034

(adultes au Canada, moyenne2)

3 824

0,0061

(adultes au Canada, 95ecentile2)

2 131

0,0098

(adultes aux États-Unis, 95ecentile3)

1 327

0,010

(enfants aux États-Unis, 95ecentile4)

1 300

Modifications des paramètres lipidiques chez les rats mâles auxquels on a administré de l'APDFO par gavage pendant 14 jours

(Loveless et al., 2006)

DMENO

= 0,3

20

0,0034

(adultes au Canada, moyenne2)

5 882

0,0061

(adultes au Canada, 95ecentile2)

3 279

0,0098

(adultes aux États-Unis, 95ecentile3)

2 041

0,010

(enfants aux États-Unis, 95ecentile4)

2 000

Augmentation du poids du foie des souris mères, ossification réduite des os des fœtus et puberté précoce des souris mâles, à la suite de l'administration d'APDFO par gavage chez les souris mères durant les jours de gestation 1 à 17

(Lau et al., 2006)

DMENO

= 1

21,9

0,0034

(adultes au Canada, moyenne2)

6 441

0,0061

(adultes au Canada, 95ecentile2)

3 590

0,0098

(adultes aux États-Unis, 95ecentile3)

2 235

0,010

(enfants aux États-Unis, 95ecentile4)

2 190
Augmentation du poids du foie des singes mâles auxquels on a administré de l'APDFO par gavage pendant 26 semaines (Thomford, 2001b; Butenhoff et al., 2002)

DMENO

= 3

77

0,0034

(adultes au Canada, moyenne2)

22 647

0,0061

(adultes au Canada, 95ecentile2)

12 623

0,0098

(adultes aux États-Unis, 95ecentile3)

7 857

0,010

(enfants aux États-Unis, 95ecentile4)

7 700
1 Les marges d'exposition ont été calculées selon le rapport entre les concentrations sériques d'APDFO associées à l'effet critique et les concentrations sériques d'APDFO chez les humains.
2 Kubwabo et al. (2004).
3 Calafat et al.(2007).
4 Olsen et al.(2004b).

Les études sur des animaux de laboratoire qui ont servi à calculer les marges d'exposition étaient celles qui présentaient les doses administrées les plus faibles et des concentrations sériques d'APDFO associées à des effets. Une étude de toxicité de 14 jours menée sur des rats et des souris exposés par voie orale (Loveless et al., 2006) a enregistré la plus faible valeur de DMENO recensée dans l'ensemble des études (0,3 mg/kg p.c. par jour); les marges d'exposition ont été calculées en fonction des concentrations sériques d'APDFO associées à cette dose, qui ont été mesurées chez les rats et les souris. Bien qu'aucune DSENO n'ait été établie durant l'étude critique, il existe des données probantes tirées d'autres études sur les rats, telles qu'une étude sur l'exposition orale de 13 semaines et une étude sur l'exposition par inhalation de 14 jours, au cours desquelles aucun effet n'a été observé aux doses respectives de 0,06 et de 0,31 mg/kg p.c. par jour (Haskell Laboratory, 1981a; Kennedy et al., 1986; Palazzolo, 1993; Perkins et al., 2004).

Les marges d'exposition ont également été calculées en fonction des concentrations sériques chez les souris qui recevaient la DMENO liée à la toxicité pour le développement, soit 1 mg/kg p.c. par jour (Lau et al., 2006). Bien qu'aucune DSENO n'ait été établie dans cette étude, une DSENO liée à la toxicité pour le développement a été fixée à 0,3 mg/kg p.c. par jour au cours d'une étude de suivi visant à examiner le mécanisme d'action des effets de l'APDFO sur le développement;cette dose était fondée sur une diminution du taux de survie néonatale à la dose de 0,6 mg/kg p.c. par jour et un retard de l'ouverture des yeux à la dose de 1 mg/kg p.c. par jour. Comme les concentrations sériques d'APDFO n'ont été mesurées qu'au 22e jour après la naissance, les doses avec effet enregistrées dans cette étude n'ont pas été utilisées pour établir une marge d'exposition (Abbott et al., 2007).

Les primates étant jugés plus représentatifs des sujets humains que les rongeurs, une étude de toxicité chez les singes d'une durée de 26 semaines a aussi été choisie pour estimer une marge d'exposition (Thomford, 2001b; Butenhoff et al., 2002). La concentration sérique d'APDFO à l'état d'équilibre chez les singes recevant la DMENO de 3 mg/kg p.c. par jour a été utilisée pour faire ce calcul. Aucune DSENO n'a été établie dans le cadre de cette étude.

Le fait d'utiliser les concentrations sériques pour calculer les marges d'exposition permet de réduire le degré d'incertitude associé aux différences pharmacocinétiques interspécifiques et intraspécifiques. Chez les animaux de laboratoire, l'APDFO passe principalement dans le sérum et dans le foie (Vanden Heuvel et al., 1991; Butenhoff et al., 2004a; Hundley et al., 2006; Kudo et al., 2007). On dispose de peu de données sur la distribution tissulaire de l'APDFO chez l'humain, mais on suppose qu'elle serait semblable à celle observée chez les animaux de laboratoire, notamment les rats mâles, les souris mâles et femelles et les primates non humains (Hundley et al., 2006). La présence d'APDFO a été décelée dans des échantillons de foie humain recueillis post mortem dans le cadre de deux études (Olsen et al., 2003b; Maestri et al., 2006). Comme les données sur les concentrations d'APDFO dans les tissus humains sont limitées, les données sur les concentrations d'APDFO dans le sérum constituent la mesure de l'exposition interne la plus appropriée. Compte tenu de la longue demi-vie de l'APDFO et de son absence de métabolisme, les concentrations sériques d'APDFO chez les humains d'âge adulte représentent l'exposition cumulative (à vie) à l'APDFO ainsi qu'à tous ses précurseurs. Les concentrations sériques d'APDFO chez les enfants, les personnes âgées et les adultes sont comparables. Bien que les études critiques de toxicologie sur des animaux de laboratoire aient porté sur une période d'exposition inférieure à la durée de vie, les données pharmacocinétiques indiquent que les concentrations sériques d'APDFO signalées représentent un état d'équilibre (Vanden Heuvel et al., 1991; Butenhoff et al., 2004a; Lau et al., 2006).

Il est important de tenir compte de la contribution possible de la prolifération des peroxysomes lorsqu'on estime une marge d'exposition fondée sur les effets d'une substance sur les rongeurs. Les rats et les souris sont sensibles aux effets des agents de prolifération peroxysomale, alors que les singes et les humains y sont relativement insensibles à des doses similaires (examiné dans Klaunig et al., 2003; Kennedy et al., 2004). De ce fait, les marges d'exposition fondées sur des effets liés à la prolifération des peroxysomes seraient prudentes. Comme les marges reposent sur les effets les plus critiques et les espèces les plus sensibles, elles sont considérées comme adéquates pour tenir compte à la fois des effets indépendants et dépendants du PPAR.

Le SAAPDFO a induit des tumeurs chez les rats exposés à ce sel, mais les autres composés de l'APDFO n'ont pas encore été mis à l'essai pour vérifier leur potentiel de cancérogénicité chez aucune autre espèce d'animaux de laboratoire. Il se peut que le mode d'action d'un agoniste du PPAR proposé pour les tumeurs du pancréas, des testicules et du foie du rat ne s'applique pas à l'humain; toutefois, les cadres établis n'indiquent pas sans équivoque sa pertinence pour les humains (Meek et al., 2003; Boobis et al., 2006).

Il a été démontré que l'APDFO stimule le PPARa humain en culture cellulaire (Takacs et Abbott, 2007; Wolf et al., 2008). L'activation du PPARa provoque une large gamme d'effets, dont la régulation de l'expression des gènes qui participent à la survie et à la croissance des cellules. En fait, on sait que certains ligands du PPARa possèdent des propriétés antioncogènes, telles que la suppression de la croissance de plusieurs types de cellules cancéreuses humainesin vitro et l'inhibition de la cancérogénicité in vivo (examiné dans Pozzi et Capdevila, 2008). Ce récepteur pourrait donc être une cible éventuelle pour un traitement contre le cancer. Il convient également de noter que d'autres ligands du PPARa, tels que les fibrates, qui provoquent une forte incidence de tumeurs chez les rongeurs, sont fréquemment utilisés comme thérapie chez l'humain, et aucun signe de cancérogénicité n'est constaté dans les études épidémiologiques (examiné dans Peterset al., 2005).

Bien que les modes d'action pour l'induction de tumeurs n'aient pas été démontrés de façon concluante et que la pertinence de la formation de tumeurs chez les rats soit incertaine pour ce qui est de l'évaluation de la cancérogénicité chez l'humain, la base de données sur la génotoxicité indique que l'APDFO n'a pas d'effet mutagène direct. Par conséquent, étant donné que les tumeurs observées chez les rats mâles ne semblent pas être causées par une interaction directe avec le matériel génétique, le recours à une approche fondée sur le seuil d'innocuité permet de caractériser les risques pour la santé humaine. Les marges d'exposition calculées pour les effets non néoplasiques sont suffisantes pour tenir compte de l'incidence accrue des tumeurs bénignes observées dans les études de toxicité chronique de l'APDFO sur les rats, car : a) les tumeurs ont été observées seulement à des doses supérieures à celles qui ont induit des effets non néoplasiques; b) la base de données sur la génotoxicité indique que l'APDFO n'a pas d'effet mutagène; c) les tumeurs hépatiques chez le rat sont vraisemblablement induites par un mode d'action qui ne s'applique pas à l'humain; d) aucun effet lié à l'APDFO observé chez les primates non humains n'a été associé à l'apparition de tumeurs du pancréas ou des testicules chez le rat.

L'utilisation des concentrations sériques permet de réduire le niveau d'incertitude associé à l'établissement de la limite supérieure estimée de l'absorption d'APDFO, étant donné le peu de données disponibles sur les concentrations d'APDFO et de ses précurseurs dans l'air, les aliments, l'eau potable et le lait maternel ainsi qu'à la suite de contact avec des matériaux domestiques contenant des substances perfluorées. Qui plus est, les concentrations d'APDFO dans le sérum humain fournissent une mesure de l'exposition combinée à de multiples sources et voies d'exposition. Le fait d'utiliser les concentrations sériques permet également de réduire le niveau d'incertitude associé aux différences pharmacocinétiques interspécifiques et intraspécifiques.

L'utilisation des valeurs du 95e centile pour les concentrations sériques s'avère prudente. En outre, des mesures ont été prises récemment afin de réduire les émissions des usines à l'échelle mondiale ainsi que la teneur des produits en APDFO et en substances apparentées, y compris au Canada (US EPA, 2006c; EPE, 2009). Deux études de biosurveillance menées récemment aux États-Unis indiquent que les concentrations sériques d'APDFO ont déjà diminué (Calafat et al., 2007; Olsen et al., 2008). Au Canada, l'exposition à l'APDFO devrait également diminuer avec le temps, même si l'on ne dispose actuellement d'aucune donnée sur le sérum pour confirmer cette hypothèse. Les marges d'exposition présentées dans cette évaluation sont fondées sur des concentrations sériques mesurées de 1994 à 2004. Or, il se peut que les marges augmentent au fil du temps, étant donné que l'on prévoit une réduction de l'exposition dans l'avenir.

Certaines incertitudes subsistent quant au mode d'action de l'induction de tumeurs; toutefois, comme la base de données sur la génotoxicité indique que l'APDFO n'aurait pas d'effet mutagène, les marges d'exposition fondées sur les effets non néoplasiques chez les espèces les plus sensibles sont considérées comme suffisantes pour assurer une protection contre tout effet cancérogène chez l'humain.


[2] Données préliminaires de l'étude CHirP (Chemicals, Health and Pregnancy Study) (http://www.cher.ubc.ca/chirp)
[3] Les doses ont été calculées à l'aide des valeurs de référence suivantes : taux d'inhalation chez le rat = 0,11 m3/jour; poids corporel du rat = 0,35 kg (Santé Canada, 1994).

Détails de la page

Date de modification :