Bécasseau maubèche (Calidris canutus) évaluation et rapport de situation du COSEPAC : chapitre 6

Répartition

Aire de répartition mondiale

Les aires de répartition mondiales des six sous-espèces du Bécasseau maubèche actuellement reconnues sont illustrées à la figure 1 et décrites plus bas dans les parties traitant des diverses sous-espèces.

Lieux d’hivernage (extérieurs au Canada)

Les principaux lieux d’hivernage de la sous-espèce rufa ont été découverts en Argentine et au Chili, dans la Terre de Feu et en Patagonie, dans les années 1980 par Morrison et Ross (1989). Dans ces années, les sites de la Terre de Feu et de la Patagonie abritaient respectivement 79 p. 100 et 21 p. 100 de la population hivernant dans le sud, mais, au début des années 2000, la Terre de Feu en abritait 98 p. 100 et les sites désormais périphériques de Patagonie, seulement 2 p. 100. La population semblait ainsi s’être concentrée dans les sites principaux, laissant peu d’oiseaux aux sites patagoniens (Morrison et al., 2004). Les principaux lieux d’hivernage du type roselaari comprennent : i) le littoral du Pacifique de l’Amérique le long de la Californie et de la Basse-Californie, avec des régions du nord-ouest du Mexique autour du golfe de Californie (population de la côte du Pacifique); ii) le sud-est des États-Unis, y compris la Floride et la Géorgie, avec de plus faibles effectifs en Caroline du Sud et au Texas (population de la Floride et du sud-est des États-Unis); iii) l’État de Maranhão, dans la partie centrale de la côte nord du Brésil (population brésilienne du Maranhão). La sous-espèce islandica hiverne sur le littoral européen (Salomonsen, 1950; Godfrey, 1953; idem, 1986; Morrison, 1975). 


Aire de répartition canadienne

Lieux de reproduction

L’aire de nidification du C. c. rufa se trouve entièrement dans les régions centrales de l’Arctique canadien, tandis qu’environ 40 p. 100 de la population nicheuse du C. c. islandica se reproduit dans le nord-est de l’Arctique canadien. Les Bécasseaux maubèches qui nichent dans le nord et l’ouest de l’Alaska ainsi que dans l’ouest de l’Arctique canadien appartiennent au type roselaari (figure 5).


Figure 5 : Aire de nidification des Bécasseaux maubèches dans l’Arctique canadien

 

Figure 5 : Aire de nidification des Bécasseaux maubèches dans l’Arctique canadien. Le C. c. rufa occupe des secteurs du centre de l’Arctique canadien et niche seulement au Canada.

Le C. c. rufa occupe des secteurs du centre de l’Arctique canadien et niche seulement au Canada. Les populations du C. c. roselaari hivernant en Floride et dans le sud-est des États-Unis ou au Maranhão peuvent partager certaines parties de cette aire, le plus probablement dans la portion ouest. Les C. c. roselaari hivernant sur la côte du Pacifique des Amériques nichent dans des secteurs du nord-ouest de l’Alaska (et dans l’île Wrangell). Les Bécasseaux maubèches des régions arctiques du nord-est du Canada et du Groenland sont des C. c. islandica. Les lignes tiretées délimitent l’aire de nidification probable totale de chacune des sous-espèces, et les zones ombrées représentent l’habitat propice probablement occupé à l’intérieur des aires de nidification.

Dans le centre de l’Arctique canadien, l’habitat propice n’est pas continu, d’où des discontinuités dans l’aire de nidification, et il semble par ailleurs que l’habitat propice potentiel ne soit pas entièrement occupé (figure 6). La sous-espèce rufa niche dans les îles Coats et Mansel dans le nord de la baie d’Hudson, dans l’île Southampton, sise près de la côte est de la même baie (Godfrey, 1986) et dans les îles du bassin de Foxe (p. ex. dans l’île du Prince-Charles, dans l’île Rowley, mais pas dans l’île de l’Aviation; V. Johnston, comm. pers., 2005), ainsi que sur la côte ouest de l’île de Baffin (RIGM, comm. pers.; Niles et al., 2005), probablement dans la région de la péninsule de Boothia, dans l’île du Roi-Guillaume, et dans les secteurs sud de l’île Victoria (Parmelee et al., 1967). Il ne semble pas y avoir d’habitat propice sur le continent entre le nord de la baie d’Hudson et le bassin de Rasmussen (Niles et al., 2005), et l’espèce n’a pas été mentionnée dans cette région (Godfrey, 1986; idem, 1992) ni dans les basses terres de Rasmussen (Johnston et al., 2000). La sous-espèce rufa semble nicher du côté ouest de la péninsule de Boothia et dans l’île du Roi-Guillaume (Niles et al., 2005), mais elle est remplacée par la sous-espèce islandica dans l’île du Prince-de-Galles au nord (Manning et Macpherson, 1961; Godfrey, 1992). Bien qu’il semble y avoir un habitat propice dans l’île Banks à l’extrême ouest des Îles de l’Arctique, aucune mention de nidification de l’espèce n’a été faite pour cette région (Manning et al., 1956; V. Johnston, comm. pers., 2005).  

Les C. c. roselaari hivernant sur la côte du Pacifique de l’Amérique nichent dans des secteurs du nord-ouest de l’Alaska et dans l’île Wrangell. Les lieux de nidification fréquentés par la population hivernant en Floride et dans le sud-est des États-Unis et par celle hivernant au Maranhão ne sont pas clairement délimités, mais correspondent probablement aux régions les plus occidentales de l’aire de nidification canadienne de l’espèce. La récupération au Manitoba d’un oiseau bagué ayant hiverné en Floride, durant la migration vers le nord, va dans le sens de cette hypothèse. En effet, cet oiseau devait se diriger vers l’extrémité ouest de l’aire de nidification de l’espèce, n’ayant pas suivi la côte atlantique pour gagner les lieux de nidification de l’est.

Selon une compilation des cartes de l’aire de nidification du rufa de NatureServe, de WildSpace et de The Birds of North America, réalisée par le Service canadien de la faune (A. Baril, comm. pers., 2005), la superficie de la zone d’occurrence de cette sous-espèce est estimée à 205 534 km2. La superficie de la zone d’occupation, ou la superficie d’habitat propice présent dans la zone d’occurrence, est de 128 375 km2 (97 750 km2 à moins de 50 km du littoral plus 30 425 km2 à plus de 50 km du littoral; estimation fondée sur les types d’habitat propice potentiel – voir la figure 6, R. Lathrop, comm. pers., 2005). On estime que la zone d’occurrence des populations du C. c. roselaari de la Floride et du sud-est des États-Unis ainsi que du Maranhão (Brésil) consisterait en une portion inconnue de la zone d’occurrence établie (205 534 km2) pour la sous-espèce rufa (elle chevaucherait partiellement la zone d’occurrence établie pour le rufa), et la superficie de la zone d’occurrence de la population de la côte du Pacifique est de 41 396 km2, y compris les lieux de nidification de l’Alaska. La zone d’occupation des populations de la Floride et du Maranhão correspond à une portion inconnue de la zone d’occupation du rufa (128 375 km2), tandis que la superficie de la zone d’occupation de la population de la côte du Pacifique est de 25 856 km2, selon l’habitat de nidification propice en Alaska. Au Canada, la superficie de la zone d’occurrence de la sous-espèce islandica est estimée à 455 669 km2, et la superficie de son aire d’occupation, selon l’habitat propice, à 284 611 km2.

Migration

Durant la migration vers le sud, d’importants effectifs de Bécasseaux maubèches passent par la côte sud-ouest de la baie d’Hudson (Manitoba et Ontario) et les côtes ouest et sud de la baie James (Ontario) en juillet et en août (Hope et Shortt, 1944; Manning, 1952; Ross et al., 2003). L’extrémité sud-est de l’île Akimiski semble aussi un secteur important pour l’espèce. Des Bécasseaux maubèches ont aussi été signalés en petit nombre (de 100 à 350) sur la côte sud de la baie James, au Québec (Aubry et Cotter, 2001a).


Figure 6 : Lieux de nidification du Bécasseau maubèche prédits selon les types de couverture terrestre dans le centre de l’Arctique canadien (et endroits précis [cercles] occupés par des Bécasseaux maubèches, localisés dans les lieux de nidification grâce à des radioémetteurs posés dans la baie du Delaware durant la migration vers le nord)

Figure 6 : Lieux de nidification du Bécasseau maubèche prédits selon les types de couverture terrestre dans le centre de l’Arctique canadien (et endroits précis [cercles] occupés par des Bécasseaux maubèches, localisés dans les lieux de nidification grâce à des radioémetteurs posés dans la baie du Delaware durant la migration vers le nord).

Tiré de Niles et al., 2005.

Actuellement, les secteurs les plus importants pour les rufa en migration dans l’est du Canada se trouvent le long de la rive nord du Saint-Laurent, au Québec (figure 7). Sur la base de l’observation, en 2006, dans l’archipel de Mingan de nombreux oiseaux portant des marques colorées, qui avaient été capturés en Argentine, on peut conclure que l’archipel est une halte pour des oiseaux de la population de la sous-espèce rufa hivernant dans le sud de l’Amérique du Sud (Y. Aubry, comm. pers., 2006). Ouellet (1969) a identifié quatre Bécasseaux maubèches prélevés à l’île d’Anticosti dans une bande de 200 oiseaux comme appartenant à la sous-espèce rufa.

Durant la migration vers le nord, de grandes volées de Bécasseaux maubèches ont été observées dans le sud de la baie James à la fin de mai et au début de juin (RIGM, données inédites), lesquelles provenaient probablement directement de la baie du Delaware (Morrison et Harrington, 1992). De grandes concentrations sont parfois observées autour du lac Ontario, ces oiseaux s’étant cependant probablement détachés du groupe principal de migrants en raison de conditions météorologiques défavorables (McRae, 1982; Weir, 1989; voir Morrison et Harrington, 1992); l’observation au parc provincial Presqu’île d’un oiseau portant une bague colorée posée à Lagoa do Peixe, dans le sud du Brésil, indique que ces oiseaux comprennent des migrants de la population de rufa du sud.


Figure 7 : Secteurs importants pour les Bécasseaux maubèches dans l’est du Canada

Figure 7 : Secteurs importants pour les Bécasseaux maubèches dans l’est du Canada.

Les lieux indiqués sur la carte sont les suivants : 1. côte sud-ouest de la baie d’Hudson (Manitoba, Ontario) et côtes ouest et sud de la baie James (Ontario, Québec); 2. embouchure du Saguenay, fleuve Saint-Laurent (Québec); 3. archipel de Mingan, rive nord du Saint-Laurent (Québec); 4. île Miscou (Nouveau-Brunswick); 5. îles de la Madeleine, golfe du Saint-Laurent (Québec); 6. côte nord de l’Île-du-Prince-Édouard; 7. fond de la baie de Fundy (pointe Mary’s, Nouveau-Brunswick); 8. sud de l’île du Cap-Breton (Nouvelle-Écosse); 9. île Grand Manan (Nouveau-Brunswick); 10. cap de Sable (Nouvelle-Écosse). (Information tirée de Hope et Shortt, 1944; Morrison et Harrington, 1979; Morrison et al., 1980; Morrison et Gaston 1986; Hicklin, 1987; Aubry et Cotter, 2001a; Roberge et al., 2001; Ross et al., 2003; R.I.G. Morrison, données inédites du Recensement des oiseaux de rivage des Maritimes; R.K. Ross et R.I.G. Morrison, données inédites de relevés aériens effectués dans la région de la baie d’Hudson et de la baie James, base de données de l’ÉPOQ, comm. pers., Yves Aubry).

On dispose de moins d’information pour repérer les secteurs utilisés durant la migration par les oiseaux du type roselaari hivernant en Floride et dans le sud-est des États-Unis ainsi qu’au Maranhão. On sait que les deux groupes passent par la baie du Delaware au printemps. Cependant, une proportion importante de ces oiseaux migre vers les lieux de nidification en passant probablement par l’intérieur de l’Amérique du Nord, comme en témoigne l’observation au Manitoba, durant la migration printanière, d’un oiseau bagué ayant hiverné dans l’ouest de la Floride. La population de la côte du Pacifique du C. c. roselaari migre vers le sud le long de la côte du Pacifique de l’Amérique du Nord, en passant par le littoral de la Colombie-Britannique.

 

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