Plan de gestion du Méné d’herbe au Canada [finale] 2011 : Information sur l'espèce

Précédent Suivant

Date de l’évaluation : Novembre 2001
Nom commun (population) : Méné d’herbe (Bridle Shiner)
Nom scientifique : Notropis bifrenatus (Cope, 1867)
Statut de l’espèce selon le COSEPAC : Préoccupante
Justification de la désignation : Au Canada, cette espèce a une aire de répartition restreinte et est sensible à la turbidité accrue de l’eau résultant des pratiques agricoles et du développement urbain.
Présence au Canada : Québec, Ontario
Historique du statut selon le COSEPAC : Espèce désignée préoccupante en avril 1999. Ce statut a été réexaminé et confirmé en novembre 2001. Dernière évaluation fondée sur un rapport de situation existant et son addendum.

Le méné d’herbe (Notropis bifrenatus [Cope, 1867]) (Figure 1) est un petit poisson au corps élancé, quelque peu comprimé latéralement et dont la longueur totale excède rarement 60 mm (Bernatchez et Giroux 2000, Robitaille 2005). Il possède une petite bouche terminale et sa mâchoire supérieure se prolonge vers l’arrière jusqu’au bord antérieur de l’œil (Scott et Crossman 1998, Robitaille 2005). La lèvre inférieure est peu ou pas pigmentée (Holm et coll. sous presse). Chez les cyprinidés du Canada, le méné d’herbe est celui qui possède les plus grands yeux, avec un diamètre pouvant couvrir de 31,2 à 38,8 % de la longueur de la tête (Scott et Crossman 1998). Les adultes présentent une coloration paille sur la face dorsale du corps, des flancs argentés d’un vert bleu irisé de même qu’une teinte blanc argenté sur la face ventrale. Une bande latérale noire s’étend du museau à la queue (Bernatchez et Giroux 2000, Robitaille 2005). Cette bande latérale est surtout apparente chez les spécimens conservés dans l’alcool ou le formol alors qu’elle est beaucoup moins évidente sur les individus vivants. Il est souvent possible d’observer un point caudal au niveau de la bande latérale. Il y a généralement sept rayons principaux sur la nageoire anale, bien que Scott et Crossman (1998) notent que 32 % des spécimens échantillonnés en possédaient huit.

Le méné d’herbe ne vit que deux ans et ne fraie qu’une fois, dans sa première ou sa deuxième année. Il existe un dimorphisme sexuel pendant la fraie qui survient au printemps et en été. Les mâles prennent alors une coloration jaune vif ou dorée sur le bas des flancs et les cinq ou six premiers rayons pectoraux se bordent de brun. Leurs dos sont plus foncés que ceux des femelles génitrices ou des mâles non reproducteurs. Les mâles développent aussi de petits tubercules sur les nageoires pectorales de même que sur la tête et la nuque. Peu de temps avant la fraie, des nageoires jaunes apparaissent chez les individus des deux sexes (Harrington 1947, Scott et Crossman 1998, Robitaille 2005). Le méné d’herbe est difficile à identifier et peut facilement être confondu avec d’autres espèces rayées du genre Notropis, en apparence très similaires, dont le museau noir (N. heterolepis) (Holm et coll. sous presse). Tant chez le méné d’herbe que chez le museau noir, la ligne latérale s’étend jusqu’au museau, mais pas jusqu’à la lèvre inférieure. Le museau noir peut se distinguer du méné d’herbe grâce à son museau plus grand et surplombant la bouche subinfère. La bouche du museau noir fait un angle inférieur à 45 ° tandis que celle du méné d’herbe est de 45 ° (Letendre 1960). Le méné d’herbe se distingue du méné camus (N. anogenus) et du menton noir (N. heterodon) par l’absence de pigment noir sur sa lèvre inférieure (tant chez le méné camus que chez le menton noir, la bande latérale s’étend au museau et à la lèvre inférieure). La ligne latérale incomplète et la nageoire dorsale implantée directement au-dessus ou en avant du point d’insertion des nageoires pelviennes peuvent aussi permettre de distinguer le méné d’herbe adulte d’autres espèces semblables (Robitaille 2005).

Figure 1. Méné d’herbe (Notropis bifrenatus). Tous droits réservés, Ellen Edmonson (New York State Department of Environmental Conservation).

Aire de répartition mondiale – L’aire de répartition mondiale du méné d’herbe (Figure 2) se limite aux bassins hydrographiques de l’Atlantique, à l’est de l’Amérique du Nord. Elle s’étend de la partie est du Lac Ontario jusqu’au Maine à l’est et au sud, jusqu’à la Caroline du Sud (Robitaille 2005, Holm et coll. sous presse).

Aux États-Unis, le méné d’herbe est répertorié dans le Connecticut, le Delaware, le District de Columbia, le Maine, le Maryland, le Massachusetts, le New Hampshire, le New Jersey, l’État de New York, la Caroline du Nord, la Pennsylvanie, le Rhode Island, la Caroline du Sud, le Vermont et la Virginie (NatureServe 2009).

Aire de répartition canadienne – Au Canada, l'aire de répartition du méné d'herbe (figure 2) est délimitée à l'ouest par la baie de Quinte (lac Ontario), au nord par le Système du canal Rideau jusqu'à Manotick, juste au sud d'Ottawa, au nord-est par le lac Saint-Paul, près de Trois-Rivières, et au sud-est par le lac Memphrémagog (Robitaille 2005). Aucun spécimen de méné d'herbe n'a été observé entre l'aval de l'archipel des Mille Îles et la tête du lac Saint-François (c.-à-d. Cornwall). Cependant, des inventaires ciblés dans des secteurs qui présentent un habitat propice pour le méné d'herbe pourraient possiblement y confirmer la présence de l'espèce.

Figure 2. Localisation du méné d’herbe au Canada et, en médaillon, répartition de l’espèce en Amérique du Nord (tiré de Robitaille 2005 et modifié de Holm <em>et coll</em> 2001).

Québec – Au Québec, l’espèce a été observée pour la première fois dans les années 1940 dans les régions de Montréal et du lac Saint-Pierre. Depuis, elle a aussi été signalée dans les affluents situés dans huit différentes régions de la province : Montréal, Laval, Montérégie, Estrie, Laurentides, Lanaudière, Mauricie et Centre-du-Québec (Tableau 1 et Figure 3). L’espèce se trouve habituellement dans les milieux aquatiques des basses terres du Saint-Laurent et dans le secteur de la rivière Richelieu. Le méné d’herbe a également été capturé dans le fleuve Saint-Laurent, en amont de la ville de Québec, lors d’inventaires menés par le Réseau de suivi ichtyologique (RSI)1 (N. La Violette, données non publiées). Les détails sont présentés plus loin, dans la section consacrée à la taille de la population, son statut et ses tendances.

Tableau 1. Sites historiques et actuels du méné d’herbe au Québec (1).

Région
administrative
Cours d’eau (nombre en référence pour la Figure 3) Endroit Dernière année d’observation

Laurentides

Lac Borcoman (1)

Ferme-Neuve

1988

Lac des Journalistes (2)

Ferme-Neuve

1975

Lanaudière

Archipel du Lac Saint-Pierre (4)

Berthierville

2002

Ruisseau du Marais Noir (5)

La Visitation-de-l’Île-Dupas

2001

Rivière l’Assomption (7)

Joliette

1987

Rivière Maskinongé (30)

Saint-Barthélemy

1974

Mauricie et

Lac Saint-Pierre (8)

Rives sud et nord

2003

Centre-du-

Lac Saint-Paul (3)

Bécancour

1964

Québec

Montérégie,

Fleuve Saint-Laurent (6)

Tronçon Montréal-Sorel

2001

Montréal et

Archipel du Lac Saint-Pierre (4)

Tronçon Berthier-Sorel

2003

Laval

Rivière Pot au Beurre (9)

Tronçon Berthier-Sorel

1997

Rivière Petit Pot au Beurre (10)

Tronçon Berthier-Sorel

1995

Ruisseau des Ormes (9)

Tronçon Berthier-Sorel

1995

Fleuve Saint-Laurent (11)

Yamaska

1992

Fleuve Saint-Laurent (12)

Pointe-des-Cascades

1980

Fleuve Saint-Laurent (13)

Sainte-Anne-de-Sorel

1971

Fleuve Saint-Laurent (14)

Saint-Ignace-de-Loyola

1971

Fleuve Saint-Laurent (15)

Saint-Barthélemy

1971

Fleuve Saint-Laurent (16)

Maskinongé

1971

Rivière des Prairies (17)

Pierrefonds

1990

Rivière Richelieu (18)

Saint-Jean-sur-Richelieu

1987

Rivière Richelieu (19)

Chambly

1970

Rivière Richelieu (20)

Mont-Saint-Hilaire

1970

Rivière Richelieu (21)

Saint-Roch-de-Richelieu

1970

Rivière Richelieu (22)

Saint-Paul-de-l’Île-aux-Noix

1969

Rivière Richelieu (23)

Henryville

1969

Rivière Richelieu (24)

Iberville

1969

Rivière Châteauguay (25)

Sainte-Martine

1983

Rivière Châteauguay (26)

Ormstown

1983

Rivière Châteauguay (27)

Howick

1973

Rivière Châteauguay (28)

Châteauguay

1971

Lac des Deux Montagnes (29)

Rigaud

1975

Rivière Maskinongé (30)

Saint-Barthélemy

1974

Ruisseau Saint-Jean (non cartographié)

Châteauguay

1974

Rivière des Mille Îles (31)

Sainte-Thérèse

1973

Rivière des Mille Îles (32)

Saint-Eustache

1973

Rivière des Mille Îles (33)

Rosemère

1973

Rivière des Mille Îles (34)

Fabreville

1973

Ruisseau Norton (27)

Howick

1973

Ruisseau Chamberry (12, 40)

Pointe-des-Cascades

1971

Lac Saint-Louis (35)

Lac Léry

1971

Lac Saint-Louis (36)

L’Île-Perrot

1968

Lac Saint-Louis (37)

Îles de la Paix

1965

Rivière Saint-Louis (38)

Saint-Louis-de-Gonzague

1941

Rivière Yamaska (39)

Yamaska

1967

Montérégie,

Canal Soulanges (40)

Pointe-des-Cascades

1967

Montréal et

Ruisseau Marigot (22)

Saint-Paul-de-l’Île-aux-Noix

1966

Laval

Rivière Bleury (22)

Saint-Paul-de-l’Île-aux-Noix

1966

Rivière La Guerre (41)

Saint-Anicet

1965

Ruisseau Patenaude (42)

Cantic (lieu-dit)

1965

Ruisseau Beauvais-Davignon (non cartographié)

Iberville

1965

Rivière du Sud (43)

Henryville

1965

Rivière des Iroquois (44)

Talon (hameau)

1965

Rivière à la Raquette (45)

Rigaud

1965

Rivière Beaudette (46)

Rivière-Beaudette (Sainte-Claire-d’Assise)

1946

Rivière Beaudette (47)

Rivière-Beaudette

1946

Ruisseau de la Loutre (48)

Abenakis Springs (lieu-dit)

1945

Rivière Saint-François (49)

Saint-François-du-Lac

1944

Ruisseau Brunson (50)

Dundee Centre (hameau)

1941

Estrie

Lac Memphrémagog (51)

The Narrow

1964

Lac Memphrémagog (52)

Fitch Bay

1964

Ruisseau Bunker (52)

Fitch Bay

1999

Ruisseau Tomkins (53)

Cedarville

1965

Ruisseau Tomkins (53)

Marlington

1999

Lac Magog (54)

Dauville

2007

(1) L’information présentée dans le Tableau 1 provient des bases de données du ministère des Ressources naturelles et de la Faune du Québec et de Desroches et al. (2008).

Figure 3. Sites historiques et actuels du méné d’herbe au Québec. Les chiffres renvoient à la localisation des cours d’eau au Tableau 1.

Figure 3. Sites historiques et actuels du méné d’herbe au Québec. Les chiffres renvoient à la localisation des cours d’eau au Tableau 1.

Ontario – En Ontario (figures 4a et b), le méné d'herbe a été capturé pour la première fois en 1928 dans la baie de Quinte (bassin versant du lac Ontario) (Hubbs et Browne 1929). En 1938, à la suite d'échantillonnages plus poussés, l'aire de répartition connue de l'espèce a été étendue vers le nord-est dans un affluent sans nom du canal Rideau à proximité de Brewers Mills, et vers l'est, dans la rivière Gananoque, dans le fleuve Saint-Laurent aux abords de Gananoque et dans un affluent du lac Saint-François (Holm et coll. sous presse). Actuellement, le méné d'herbe serait présent dans le fleuve Saint-Laurent, le lac Big Rideau, les ruisseaux Wood et Jones et la rivière Napanee. Un échantillonnage intensif mené en 2009 et en 2010 par le MPO a permis de trouver le méné d'herbe dans un certain nombre de nouveaux emplacements, dont la rivière Rideau et les lacs Upper Rideau, Lower Rideau, Newboro, Opinicon, Sand, Whitefish, Cranberry et Little Cranberry. L'échantillonnage a également visé divers endroits dans le cours supérieur du fleuve Saint-Laurent en aval de Gananoque. Un échantillonnage récent dans la baie de Quinte a également été positif pour les baies Big et Hay ainsi que pour les lacs East, West, la rivière Black et la baie Wellers dans le lac Ontario (N.E. Mandrak, Pêches et Océans Canada, données non publiées 2010). De 2008 à 2010, la Raisin River Conservation Authority a échantillonné des sites historiques et a retrouvé le méné d'herbe dans le ruisseau Finney (B. Jacobs, Raisin Region Conservation Authority, comm. Pers. 2011).Voir le tableau 2 pour ce qui est des sites historiques et actuels du méné d'herbe en Ontario.

Tableau 2. Sites historiques et actuels du méné d’herbe en Ontario.

Cours d’eau

Endroit

Dernière année d’observation

Baie de Quinte (lac Ontario)

Prinyer’s Cove

1981

Baie Big

2010

Baie Hay

2010

Lac East

2010

Rivière Black

2010

Rivière Gananoque

1938

Fleuve Saint-Laurent

Gananoque

1938

Région des Milles Îles

2005

Près de l’île Hill

1999

Île Owen

1994

Île Mulcaster

1994

Rive sud de l’île Hill

1999

Île Hill, en face de l’île Club

1994

Rive nord de la baie de Thompson

2010

Entrée de la baie de Thompson

2009

Baie de Thompson près des Milles-Îles

2010

Rive nord de l’île d’Adelaide

1974

Mallorytown Landing

2010

Baie de Brown

1959

Eastview

2009

Rive nord de l’ile Grenadier

2010

Lac Big Rideau

Vallée Rideau

2010

Lac Lower Rideau

Vallée Rideau

2010

Lac Upper Rideau

Vallée Rideau

2010

Rivière Rideau

Vallée Rideau

2010

Lac Whitefish

Vallée Rideau

2010

Lac Sand

Vallée Rideau

2010

Lac Cranberry

Vallée Rideau

2010

Lac Little Cranberry

Vallée Rideau

2010

Lac Newboro

Vallée Rideau

2010

Lac Opinicon

Vallée Rideau

2010

Tributaire sans nom du canal Rideau

Brewers Mills

1937

Ruisseau Finney

Région de Raisin

2010

Ruisseau Wood

Région de Raisin

1994

Ruisseau Gunn

Région de Raisin

1987

Ruisseau Jones

Région de Cataraqui

2009

Rivière Napanee

Strathcona

1998

Ruisseau Morton

Région de Cataraqui

2010

Lac Outlet to Leo

Région de Cataraqui

1975

Lac Kingsford

Région de Cataraqui

1975

Lac Hart

Région de Cataraqui

1975

Ruisseau Fraser

Région de Raisin

1961

Baie Wellers

Région de Quinte

2010

Figure 4a. Répartition du méné d’herbe en Ontario.
Figure 4a. Répartition du méné d’herbe en Ontario.

Figure 4b. Répartition du méné d’herbe en Ontario - Sites du Parc national du Canada des Îles-du-Saint-Laurent.
Figure 4b. Répartition du méné d’herbe en Ontario - Vue détaillée des sites du Parc national du Canada des Îles-du-Saint-Laurent.

Pourcentage de l’aire de répartition mondiale au Canada – En l’absence de données d’échantillonnage récentes, il est difficile de déterminer quel pourcentage de l’aire de répartition mondiale du méné d’herbe se situe au Canada. Toutefois, il s’agit d’une faible fraction, probablement que moins de 5 % de l’aire de répartition se situe au Canada (N.E. Mandrak, MPO, comm. pers. 2008). Au Canada, le méné d’herbe est à la limite septentrionale de son aire de répartition.

Tendance de la répartition – L’aire occupée par le méné d'herbe tend à diminuer dans la majorité de son aire de répartition nord-américaine. Par exemple, récemment, il n’a été retrouvé que dans un des 31 sites historiques en Pennsylvanie et dans un petit pourcentage de plusieurs dizaines de sites historiques dans le Massachusetts (NatureServe 2009). Au Canada, particulièrement au Québec, le méné d’herbe est présent dans des régions fortement industrialisées, densément peuplées ou assujetties à une agriculture intensive. Il est donc peu probable que l’espèce y connaisse un accroissement de son aire de répartition (Scott et Crossman 1998). L’absence d’échantillonnage récent dans certaines rivières pour lesquelles il existe des données historiques, rend difficile l’évaluation des tendances en matière de répartition. Au Québec, les données du RSI semblent indiquer un déclin de l’espèce dans certaines parties de son aire de répartition.

Taille, statut et tendance de la population mondiale – L’abondance et le nombre de sous-populations de l’espèce ont connu un déclin dans l’ensemble de l’aire de répartition. Sans intervention humaine, le taux de déclin à court terme (c.-à-d. pour les 10 à 100 prochaines années), se situerait entre 10 et 30 %, tandis que le taux à long terme (c.-à-d. pour les 200 prochaines années), fluctuerait entre 25 et 75 % (NatureServe 2009).

Plusieurs sites nord-américains où l’espèce a déjà été répertoriée n’ont pas été échantillonnés récemment, ce qui rend difficile la détermination des tendances de la population. Des problèmes à identifier l’espèce s’ajoutent à cette lacune, des spécimens ayant pu être incorrectement identifiés. À l’échelle mondiale, le méné d’herbe est classé dans la catégorie à risque modéré de disparition (G3)2 et il est considéré rare (NatureServe 2009). Aux États-Unis, le méné d’herbe est classé dans la catégorie à risque modéré (N3). Il serait disparu (SH) dans le District de Columbia et dans le Maryland; très à risque (S1) en Caroline du Nord, en Pennsylvanie et au Vermont; et à risque (S2) dans le Maine et en Virginie. Le statut de l’espèce est actuellement examiné dans le New Jersey, l’État de New York et le Rhode Island (actuellement S4, S5 et S5 respectivement). Le classement dans chacun de ces États pourrait passer à un niveau de risque plus élevé, soit S2 ou S3 (NatureServe 2009). Les classements complets du méné d’herbe à l’échelle nationale et internationale sont donnés au Tableau 3.

Tableau 3. Statuts de conservation nationaux et infranationaux pour le méné d’herbe au Canada et aux États-Unis.

Lieu Statut de conservation Organisme ayant attribué le statut de conservation

Amérique du Nord

Espèce à risque modéré (G3)

NatureServe

États-Unis

Espèce à risque modéré (N3)

NatureServe

Connecticut

S3

NatureServe

Delaware

SU

NatureServe

District de Columbia

SH

NatureServe

Maine

S2

NatureServe

Maryland

SH

NatureServe

Massachusetts

S3

NatureServe

New Hampshire

S3

NatureServe

New Jersey

S4

NatureServe

New York

S5

NatureServe

Caroline du Nord

S1

NatureServe

Pennsylvanie

S1

NatureServe

Rhode Island

S5

NatureServe

Caroline du Sud

SNR

NatureServe

Vermont

S1?

NatureServe

Virginie

S2

NatureServe

Canada

Espèce préoccupante

Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC)

Espèce préoccupante

Loi sur les espèces en péril

Espèce à risque modéré (N3)

NatureServe

Ontario

Espèce préoccupante

Liste des espèces en péril en Ontario

Espèce à risque (S2)

NatureServe

Québec

Espèce vulnérable

Loi sur les espèces menacées et vulnérables

Espèce à risque modéré (S3)

NatureServe

Pourcentage de l’abondance mondiale au Canada – Aucune estimation de l'abondance du méné d'herbe au Canada n'est disponible. Cependant, considérant le déclin aux États-Unis, des zones d'occurrences, du nombre de sous-populations et de l'abondance de l'espèce, il est possible que la proportion de ménés d'herbe au Canada soit supérieure aux estimations actuelles.

Populations importantes à l’échelle du Canada – Aucune n’a été identifiée.

Taille, statut et tendance de la population canadienne – Au Canada, les données existantes indiquent que le méné d'herbe est en déclin dans plusieurs sites. Cependant, l'espèce est encore commune dans certains secteurs du fleuve Saint-Laurent, par exemple dans les Mille Îles et le lac Saint-Pierre et son archipel. Rien ne semble indiquer une diminution de l'abondance dans ces secteurs. L'absence d'échantillonnage récent rend difficile toute tentative de caractériser l'état de la population présente dans certains sites canadiens, par exemple dans les lacs faisant partie du réseau du canal Rideau, dans le lac Memphrémagog, dans le lac Saint-Paul (Holm et coll. sous presse). Les ruisseaux Fraser, Gunn, Wood et Finney sont des sites historiques échantillonnés en 2008, 2009 et 2010 suivant un protocole de détection spécifique aux poissons en péril des Grands Lacs (Portt et coll. 2008). Le méné d'herbe n'a été trouvé que dans le ruisseau Finney en 2010 (B. Jacobs, Raisin River Conservation Authority, comm. pers. 2011).

Le taux de déclin des populations de méné d'herbe au Canada demeure inconnu (Holm et coll. sous presse). Actuellement, l'espèce est considérée à risque modéré de disparition à l'échelle nationale (N3), à risque (S2) en Ontario et à risque modéré (S3) au Québec (NatureServe 2009). Au Québec, le méné d'herbe est désigné espèce faunique vulnérable en vertu de la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables du gouvernement du Québec. L'espèce est également inscrite sur la Liste des espèces préoccupantes selon la Loi de 2007 sur les espèces en voie de disparition de l'Ontario (tableau 3).

Québec Il n’existe pas d’estimation d’effectifs pour les populations de méné d’herbe au Québec. Son abondance semble toutefois être à la baisse dans certains secteurs, notamment dans les bassins des rivières aux Brochets, Châteauguay, Richelieu, Yamaska et Saint-François, de même que dans le fleuve Saint-Laurent dans les secteurs des lacs Saint-François et Saint-Louis. Malgré le fait que le méné d’herbe semble être en déclin dans certains secteurs, l’espèce demeure commune dans quelques secteurs du fleuve Saint-Laurent, dont le lac Saint-Pierre et son archipel (Robitaille 2005). Entre 1995 et 2008, un grand nombre de spécimens ont été capturés dans le tronçon du fleuve Saint-Laurent entre Montréal et Sorel ainsi que dans le lac Saint-Pierre et son archipel (Tableau 4).

Tableau 4. Données relatives aux captures de méné d'herbe dans le fleuve Saint-Laurent jusqu'en 2008, lors des campagnes d'échantillonnage du Réseau de suivi ichtyologique (RSI) (Données de N. La Violette et C. Côté, ministère des Ressources naturelles et de la Faune du Québec).

Secteurs Dernière année d’observation Nombre 1

Lac Saint-François

1996

0

2004

0

Lac Saint-Louis

1997

1

1999

0

2005

0

Tronçon Montréal – Sorel

2001

102

Tronçon Bécancour-Batiscan

1996

0

2001

0

2008

25

Archipel du lac Saint-Pierre

1995

61

2003

221

Lac Saint-Pierre

1995

330

1997

0

2002

2512

2007

3492

Tronçon Grondines – Donnacona

1997

0

2006

0

1Un zéro indique qu’aucun méné d’herbe n’a été capturé en dépit de l’échantillonnage du RSI.

Au Québec, l’espèce n’a jamais fait l’objet de recherches ciblées, mis à part un inventaire ichtyologique d’espèces rares effectué en 2002 dans la partie sud du bassin versant de la rivière l’Assomption (région de Lanaudière). Aucun spécimen de méné d’herbe n’a toutefois été capturé lors de l’inventaire dans les rivières Ouareau, l’Assomption et l’Achigan (CARA 2002). Dans la rivière l’Assomption, l’espèce avait été observée en 1987 entre les rapides Nadeau et le barrage Gohier à la hauteur de Joliette (Robitaille 2005).

Dans le lac Saint-François, la présence de l’espèce a été confirmée en 1941 et en 1945, à l’embouchure de la rivière La Guerre, de même que dans la partie nord-est du lac à la fin des années 1960 (Robitaille 2005, Holm et coll sous presse). Aucun méné d’herbe n’a été capturé lors des échantillonnages du RSI dans le lac Saint-François en 1996 et en 2004 (N. La Violette, données non publiées).

Des observations similaires ont été faites lors des campagnes d’échantillonnage du RSI dans le lac Saint-Louis. Un seul spécimen a été capturé en 1997 et aucun en 1999 et 2005 alors que l’espèce était autrefois abondante dans ce secteur (Robitaille 2005, Holm et coll. sous presse, N. La Violette, données non publiées).

Entre 1995 et 2007, un grand nombre de spécimens a été capturé dans le tronçon Montréal-Sorel du fleuve Saint-Laurent ainsi que dans le lac Saint-Pierre et son archipel. Plus de 6692 spécimens ont été capturés lors des inventaires du RSI dans ces secteurs (Robitaille 2005, Holm et coll sous presse, N. La Violette, données non publiées). Pour la première année des inventaires menés par le RSI, en 1995, seuls le lac Saint-Pierre et son archipel ont fait l’objet d’échantillonnages. En 1997, l’échantillonnage visait les habitats lotiques. Entre 1970 et 1971, 5 387 spécimens avaient également été capturés dans l’archipel du lac Saint-Pierre, dans les chenaux des îles de Berthier et de Sorel. Pendant cette même période, 727 spécimens ont été récoltés dans le lac Saint-Pierre (Massé et Mongeau 1974).

Dans le bassin de la rivière Yamaska, des inventaires réalisés entre 1963 et 1971 ont confirmé la présence du méné d’herbe dans le cours inférieur de la rivière. En 1989, 16 spécimens ont été capturés dans ce même cours d’eau. En revanche, aucun spécimen n’a été capturé en 1995, lors d’un inventaire à la pêche électrique (Holm et coll sous presse).

Le méné d’herbe a été répertorié dans la partie inférieure du bassin hydrographique de la rivière Châteauguay en 1968, 1975 et 1976. (Holm et coll sous presse). Toutefois, en 1993 et 2006, aucun n’a été capturé lors d’inventaires à la pêche électrique.

L’espèce a été capturée dans la rivière Saint-François au cours des années 1940. Aucun spécimen n’a pourtant été observé lors d’inventaires réalisés dans ce cours d’eau entre 1960 et 1970, puis en 1991. La présence du méné d’herbe avait également été signalée dans la rivière aux Brochets en 1941, mais aucun spécimen n’a été repéré lors d’un échantillonnage systématique réalisé dans les années 1970. Cependant, six ménés d’herbe ont été récoltés au printemps 1990 dans la baie Missisquoi (lac Champlain), près de l’embouchure de la rivière aux Brochets (Holm et coll sous presse).

À la fin des années 1960, l’espèce était fréquemment observée dans la rivière Richelieu. Par la suite, 27 spécimens ont été capturés en 1970 et six, en 1989. En 1993, aucun individu n’a été capturé tandis qu’un seul spécimen a été récolté à l’embouchure de la rivière en 1995. À ce jour, les informations semblent indiquer que l’espèce y est toujours présente, mais que les effectifs sont à la baisse depuis les années 1970 (Holm et coll sous presse).

La présence du méné d’herbe dans le lac Saint-Paul, dans la région du Centre-du-Québec, et dans le lac Memphrémagog, en Estrie, n’a pas fait l’objet d’une vérification récente. Par conséquent, l’état actuel des populations demeure inconnu (Robitaille 2005, Holm et coll sous presse).

Ontario – Il est difficile d’évaluer la taille et la tendance des populations de méné d’herbe en Ontario, étant donné qu’il n’existe que peu de données sur l’espèce et qu’elle n’a jamais été fréquemment observée. L’espèce semble stable dans certains secteurs, mais dans d’autres, l’insuffisance d’échantillonnages récents rend impossible l’évaluation de son état (Holm et coll sous presse). À cela, s’ajoute la difficulté d’identifier l’espèce.

En 1975, le méné d’herbe a été découvert dans le lac Kingsford qui sert de réservoir à la Gananoque Power Company (ministère des Richesses naturelles de l’Ontario [MRNO], données non publiées). Cependant, il n’est pas certain qu’une population y subsiste encore, le secteur n’ayant fait l’objet d’aucun échantillonnage récent. En 1994, un inventaire conduit par le Musée royal de l’Ontario n’a pas permis de capturer de spécimen de méné d’herbe ni à Sutherland Creek (nouveau site), ni au ruisseau Finney, ni dans un cours d’eau sans nom situé à proximité de Brewers Mills (sites historiques). Cependant, l’espèce a été répertoriée au ruisseau Wood, dans le fleuve Saint-Laurent dans le secteur des Mille Îles et dans un nouveau site, le ruisseau Jones (Holm et coll sous presse). En 1998, l’espèce a été observée dans la rivière Napanee, près de Strathcona, ce qui confirme qu’elle est toujours présente dans ce bassin versant (Holm et coll sous presse).

En 1999, le méné d'herbe a été capturé dans un nouveau site sur le fleuve Saint-Laurent, sur la rive sud-ouest de l'île Hill (Holm et coll. sous presse). Toujours en 1999, plusieurs sites ayant fait l'objet d'observations historiques, mais pour lesquels il manquait des observations récentes, ont été échantillonnés à nouveau par le MRNO, notamment le ruisseau Morton et le lac Leo, où les observations dataient de 1967 et de 1975, respectivement. Le méné d'herbe n'a été observé dans aucun des sites en 1999, et l'échantillonnage fait à l'aide d'une seine était limité à cause des substrats mous et de la profondeur de l'eau (Dextrase 1999). Il est raisonnable de penser que l'espèce est toujours présente dans le ruisseau Morton et dans le lac Leo, considérant les conditions d'habitat. Des échantillonnages supplémentaires, à l'aide d'autres techniques telles la pêche électrique et les trappes laissées pendant la nuit, devraient être menés pour confirmer la présence de l'espèce dans ces sites (Dextrase 1999). Le cours d'eau sans nom situé à proximité de Brewers Mills et dans lequel le méné d'herbe a initialement été capturé en 1937 est désormais turbide et a été converti en drain agricole sur la majeure partie de son cours. Il est probable que l'espèce ait disparu de ce site (Dextrase 1999). De nouveaux sites où l'habitat est apparemment adéquat ont aussi été échantillonnés en 1999 par le MRNO afin d'y confirmer la présence de l'espèce (Dextrase 1999). Une plage privée sur la partie orientale du lac Gananoque a aussi fait l'objet d'un échantillonnage, puisqu'elle offrait visiblement un habitat propice et se situait à proximité de sites où l'espèce est présente. Aucun spécimen de méné d'herbe n'y a été capturé, bien que d'autres échantillonnages devraient se faire à bord d'un bateau pour permettre l'accès à des baies calmes où la végétation est abondante (Dextrase 1999).

Des relevés menés en 2004 dans 28 sites du fleuve Saint-Laurent et du lac Saint-François (Edwards et coll 2008) n’ont permis d’observer aucun méné d’herbe alors que les relevés menés au Parc national des Îles-du-Saint-Laurent et au lac Big Rideau en 2005 ont permis de capturer dix spécimens dans quatre sites, soit au lac Big Rideau et dans trois autres sites du secteur des Îles-du-Saint-Laurent (Mandrak et coll 2006). En 2007, 30 sites bordant le canal Rideau entre Smiths Falls, Ottawa et le lac Opinicon, ont été échantillonnés dans le but de déterminer l’état des populations de quatre espèces en péril, dont le méné d’herbe. Aucun spécimen de méné d’herbe n’a été trouvé lors de cet inventaire (Mapleston et coll 2007).

La Raisin River Conservation Authority a complété, de 2008 à 2010, un large échantillonnage ciblant le méné d’herbe dans des sites historiques et des tributaires voisins, incluant les ruisseaux Wood, Gunn, Fraser, Finney, Sutherland et la rivière Raisin. Cinq spécimens ont été trouvés dans le ruisseau Finney en 2010 (B. Jacobs, Raisin Region Conservation Authority, comm. pers. 2011).

Les échantillonnages effectués par le MPO en 2009 et en 2010 révèlent la présence du méné d'herbe à un certain nombre de nouveaux sites et la confirment à quelques sites historiques. En 2009, deux ménés d'herbe ont été trouvé à l'embouchure du ruisseau de Morton, et deux autres à l'embouchure du ruisseau Jones. 60 spécimens ont également été recueillis dans la baie de Thompson en 2009 et cinq autres en 2010. De nouveaux sites découverts en 2009 se trouvent en amont de la baie de Thompson, dans le fleuve Saint-Laurent, près d’Eastview (Ontario), où 19 spécimens ont été capturé, et 28 spécimens ont été trouvé au lac West dans la baie de Quinte, étendant sa distribution vers l’ouest dans le lac Ontario.

L'échantillonnage du système du canal Rideau en 2010 a permis de récolter des spécimens dans dix nouveaux emplacements (23 spécimens de quatre sites le long de la rivière Rideau, 13 de deux sites dans le lac Lower Rideau, huit dans le lac Upper Rideau, 19 de cinq sites dans le lac Big Rideau (site historique), un dans le lac Newboro, neuf de trois sites dans le lac Sand, 10 de deux sites dans le lac Whitefish, 19 dans le lac Cranberry et 31 dans le lac Little Cranberry). Des échantillonnages supplémentaires en 2010 dans la baie de Quinte ont également permis de trouver 66 ménés d'herbe dans le lac West, de même que 725 à cinq nouveaux endroits. 84 dans le lac East, 22 dans la rivière Black, 27 dans la baie Big, 520 dans la baie Hay, de même que 72 spécimens trouvés dans la baie Wellers du lac Ontario, étandant sa distribution plus à l’ouest dans les eaux de drainage du lac Ontario. (N.E. Mandrak, Pêches et Océans Canada, données non publiées, 2010).

Description de l’habitat – Le méné d’herbe est un poisson d’eau chaude qui se trouve généralement dans des zones calmes et limpides de cours d’eau, de lagunes et de lacs où la végétation est abondante (Scott et Crossman 1998). Ce type d’environnement lui procure la nourriture tout en lui offrant un abri contre les prédateurs (Robitaille 2005, Holm et coll. sous presse). Au Canada, le méné d’herbe a été capturé dans les zones calmes de divers cours d’eau et du fleuve Saint-Laurent ainsi que dans de petits lacs. L’espèce est associée à divers types de substrats, comme le limon, les débris organiques, l’argile ou le gravier, mais selon Scott et Crossman (1998), la vase et les fonds sablonneux seraient plus caractéristiques de son habitat. Le méné d’herbe préfère les eaux claires ou modérément claires. Il semble qu’il évite les secteurs turbides du fait qu’il s’alimente à vue, bien qu’au Canada, il ait été capturé dans des sites où la transparence était faible (profondeur, mesurée à l’aide du disque de Secchi, entre 0,5 et 0,7 m) (Holm et coll. sous presse). Il tolère les eaux saumâtres, mais craint l’acidité, ce qui devrait l’empêcher de se répartir dans la région du Bouclier canadien qui est soumise à l’acidification (Holm et coll. sous presse). L’habitat physique dans les sites de captures a été décrit comme ayant un courant faible, une végétation aquatique dense et des substrats de débris végétaux, de vase, de limon, de gravier, de blocailles ou de roches.

L'habitat de fraie du méné d'herbe se caractérise par une abondance de plantes aquatiques submergées au-dessus desquelles se trouve une couche d'eau libre (sans végétation) de 15 à 50 centimètres (Harrington 1947). C'est dans cette couche d'eau au-dessus de la végétation que survient la fraie. Les macrophytes aquatiques sont essentiels aux juvéniles qui demeurent dans cette végétation, sur le site de fraie. Les larves sont pourvues de glandes leur permettant d'adhérer aux plantes (Jenkins et Burkhead 1994). Selon Harrington (1947), les peuplements de myriophylle indigène (Myriophyllum sp.) semblent être les plus propices à l'espèce lors de la fraie.

Une récente révision de la documentation (Giguère et coll. 2005), visant à modéliser les habitats de reproduction du méné d’herbe (début juin à la fin juillet, pour les populations entre le lac Saint-Louis et le lac Saint-Pierre et en excluant le bassin de La Prairie), suggère les caractéristiques d’habitat de reproduction suivantes :

Le méné d’herbe se nourrit de microcrustacés, d’insectes aquatiques, de détritus et de matière végétale vivante. Il trouve une bonne partie de sa nourriture sur ou au-dessus des plantes aquatiques submergées. L’espèce ne se nourrit au fond de l’eau que lorsque la végétation est rare ou absente (Harrington 1948b).

Tendances relatives à l’habitat au Québec - Au Québec, l'intensification des activités agricoles au cours des cinquante dernières années a entraîné une augmentation des pressions sur les milieux aquatiques, particulièrement dans les basses terres du Saint-Laurent où se trouve la quasi-totalité de l'aire de répartition du méné d'herbe. Le méné d'herbe a été capturé dans les bassins hydrographiques des rivières parmi les plus polluées au Québec que sont les rivières l'Assomption, Richelieu, Yamaska et Saint-François. La qualité de l'eau dans ces rivières est très pauvre, avec de fortes concentrations de substances nutritives (azote, phosphore), de pesticides, de matières en suspension et de matière organique (MDDEP 2007). Ces quatre rivières se jettent dans le lac Saint-Pierre, un secteur où le méné d'herbe se trouve en abondance. Près de 800 000 tonnes de matières en suspension provenant des terres agricoles se déverseraient annuellement dans ce lac. Le lac Saint-Pierre est également sous l'influence des charges polluantes provenant des zones agricoles et fortement industrialisées implantées dans sa périphérie. Par exemple, en 2004, Hudon et Carignan (2008) ont estimé que les niveaux de phosphore excédaient le critère provincial de qualité des eaux visant à protéger la vie aquatique en eaux courantes (phosphore total > 30 µg P•L–1) pour environ 40 % du lac Saint-Pierre. La qualité de l'eau était la plus basse dans des conditions de fort débit et dans les milieux riverains peu profonds influencés par de petits tributaires drainant des terres agricoles.

Tendances relatives à l’habitat en Ontario – En Ontario, le bassin versant du lac Saint-François a été altéré par le développement agricole qui compte les parcs d’engraissement, les fermes laitières et la culture du maïs et de pâturages divers. Les cours d’eau de ce bassin versant, notamment les rivières Wood, Gunn, Fraser et Finney, ont été canalisés pour le drainage agricole et ils contiennent une forte charge de pesticides, de sédiments et de nutriments (Holm et coll. sous presse). Dans la partie ontarienne du fleuve Saint-Laurent, l’eau a gagné en transparence grâce à la présence de moules zébrées (Dreissena polymorpha) qui ont été détectées pour la première fois en 1989 (Holm et coll. sous presse). Une eau plus limpide devrait en principe favoriser la croissance de macrophytes aquatiques, ce qui devrait ensuite être bénéfique au méné d’herbe. Toutefois, les études sur l’abondance des macrophytes aquatiques sont contradictoires (Holm et coll. 2001) et l’effet d’une plus grande transparence de l’eau sur la densité végétale demeure méconnu. Bien qu’il n’y ait aucune donnée pour les appuyer, de nombreux témoignages anecdotiques laissent entendre qu’il y aurait une plus grande abondance de myriophylles à épis (Myriophyllum spicatum) dans des portions du canal Rideau ces dernières années (H. Knack, Agence Parcs Canada, comm. pers. 2008), ce qui pourrait être nuisible au méné d’herbe (voir 1.5.2). En Ontario, dans le fleuve Saint-Laurent, les niveaux de phosphore ont baissé ces 30 dernières années à la suite d’un meilleur traitement des eaux usées, d’une diminution des niveaux de pollution industrielle et d’une réduction du lessivage des terres agricoles (Holm et coll. sous presse).

Sa petite taille et de sa faible capacité natatoire font du méné d’herbe un poisson-fourrage idéal (Harrington 1948a, Scott et Crossman 1998, Robitaille 2005). Aux États-Unis, il est considéré comme une des ressources alimentaires principales du brochet maillé (Esox niger) (Scott et Crossman 1998). Là où il abonde, le méné d’herbe peut constituer une ressource alimentaire importante pour plusieurs espèces de poissons d’intérêt pour la pêche sportive, notamment l’achigan à grande bouche (Micropterus salmoides), le brochet d’Amérique (Esox americanus) et la perchaude (Perca flavescens) (Holm et coll. 2001). Dans la partie orientale du lac Ontario, il est probable que le méné d’herbe soit ou ait été un aliment important pour la marigane noire (Pomoxis nigromaculatus), l’achigan à petite bouche (Micropterus dolomieu), le baret (Morone americana) et la perchaude (Scott et Crossman 1998).

Le méné d’herbe est une des nombreuses espèces de ménés rayés ou du genre Notropis d’apparence similaire, comme le menton noir, le museau noir et le méné camus, chacune ayant une ligne latérale noire bien évidente, allant du museau à la queue (Holm et coll. sous presse). Ces espèces sont sensibles aux changements environnementaux occasionnés par la perte de végétation aquatique, la turbidité et les charges nutritives ou chimiques excessives (Holm et coll. sous presse). La présence de ces espèces dans les cours d’eau est par conséquent un indicateur de la bonne qualité de l’eau (Scott et Crossman 1998).

Le cycle vital très court du méné d’herbe, sa répartition discontinue de même que sa capacité natatoire limitée restreignant ses déplacements, augmentent sa vulnérabilité à la perturbation des habitats. Des populations isolées sont plus susceptibles d’être affectées par des stresseurs localisés, ce qui entraîne un risque d’éradication de telles populations (Robitaille 2005). Il semble que son besoin en habitat spécifique, ce qui inclut les macrophytes immergés, les niveaux d’eau et les faibles courants, soit aussi un facteur limitant pour l’espèce (Holm et coll. sous presse).


1 Le RSI s’est servi principalement de deux types d’engins de pêche : la seine de rivage pour les habitats lentiques littoraux et le filet maillant expérimental pour les habitats lentiques et lotiques, habituellement utilisé en retrait des rives (La Violette et coll., 2003).

2 Les statuts de conservation sont définis à l'annexe 1.

Précédent Suivant

Détails de la page

2022-02-24