Podistère du Yukon (Podistera yukonensis) : plan de gestion [proposition] 2022
Titre officiel : Plan de gestion du podistère du Yukon (Podistera yukonensis) au Canada [proposition] 2022
Loi sur les espèces en péril
Série de Plans de gestion
Proposition
2022
Information sur le document
Référence recommandée :
Environnement et Changement climatique Canada. 2022. Plan de gestion du podistère du Yukon (Podistera yukonensis) au Canada [Proposition]. Série de Plans de gestion de la Loi sur les espèces en péril. Environnement et Changement climatique Canada, Ottawa. iv + 19 p.
Version officielle
La version officielle des documents de rétablissement est celle qui est publiée en format PDF. Tous les hyperliens étaient valides à la date de publication.
Version non officielle
La version non officielle des documents de rétablissement est publiée en format HTML, et les hyperliens étaient valides à la date de la publication.
Pour télécharger le présent plan de gestion ou pour obtenir un complément d’information sur les espèces en péril, y compris les rapports de situation du Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC), les descriptions de résidence, les plans d’action et d’autres documents connexes portant sur le rétablissement, veuillez consulter le Registre public des espèces en périlNote de bas de page 1.
Photographie de la couverture : Podistère du Yukon à la crête Miller, à Carmacks (Yukon). Photo prise par Syd Cannings.
Also available in English under the title "Management Plan for Yukon Podistera (Podistera yukonensis) in Canada [Proposed]"
Le contenu du présent document (à l’exception des illustrations) peut être utilisé sans permission, mais en prenant soin d’indiquer la source.
Préface
En vertu de l’Accord pour la protection des espèces en péril (1996)Note de bas de page 2, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux signataires ont convenu d’établir une législation et des programmes complémentaires qui assureront la protection efficace des espèces en péril partout au Canada. En vertu de la Loi sur les espèces en péril (L.C. 2002, ch. 29) (LEP), les ministres fédéraux compétents sont responsables de l’élaboration des plans de gestion pour les espèces inscrites comme étant préoccupantes et sont tenus de rendre compte des progrès réalisés dans les cinq ans suivant la publication du document final dans le Registre public des espèces en péril.
Le ministre de l’Environnement et du Changement climatique est le ministre compétent en vertu de la LEP à l’égard du podistère du Yukon et a élaboré ce plan de gestion conformément à l’article 65 de la LEP. Dans la mesure du possible, le plan de gestion a été préparé en collaboration avec le gouvernement du Yukon, en vertu du paragraphe 66(1) de la LEP.
La réussite de la conservation de l’espèce dépendra de l’engagement et de la collaboration d’un grand nombre de parties concernées qui participeront à la mise en œuvre des directives formulées dans le présent plan. Cette réussite ne pourra reposer seulement sur Environnement et Changement climatique Canada ou toute autre autorité responsable. Tous les Canadiens et les Canadiennes sont invités à appuyer et à mettre en œuvre ce plan pour le bien du podistère du Yukon et de l’ensemble de la société canadienne.
La mise en œuvre du présent plan de gestion est assujettie aux crédits, aux priorités et aux contraintes budgétaires des autorités responsables et organisations participantes.
Remerciements
La première version du présent plan de gestion a été rédigée par Rhonda Rosie (consultante du secteur privé). Les versions subséquentes ont été produites par Syd Cannings et Nancy Hughes (Environnement et Changement climatique Canada [ECCC], Service canadien de la faune [SCF] – Région du Nord). Bruce Bennett, Thomas Jung, Piia Kukka et Caitlin Willier (gouvernement du Yukon) ont examiné une version provisoire du présent plan. Le Centre de données sur la conservation du Yukon a fourni des données sur les occurrences de l’espèce.
Sommaire
Le podistère du Yukon (Podistera yukonensis) est une herbacée cespiteuse vivace longévive aux feuilles basilaires pennées vert-bleu. Ses tiges florifères dépourvues de feuilles portent des ombelles composées de petites fleurs jaune vif qui deviennent blanches avec le temps. L’espèce pousse à partir d’une grosse racine pivotante allongée et forme souvent des touffes. Elle pousse dans des habitats alpins, dans des zones rocheuses bien drainées : sur des éboulis, des tors et des escarpements riverains où le substratum rocheux est exposé.
À l’échelle mondiale, le podistère du Yukon est restreint à des zones de l’Alaska et du centre-ouest du Yukon qui ont échappé à la glaciation. Environ 90 % de son aire de répartition mondiale se trouve au Canada.
Le podistère du Yukon a été inscrit comme espèce préoccupante à l’annexe 1 de la Loi sur les espèces en péril (LEP) en février 2019.
La perte d’habitat alpin causée par le réchauffement climatique constitue peut-être la plus grande menace à long terme pour le podistère du Yukon. L’exploration et l’exploitation minière pourraient dégrader l’habitat à certains sites.
L’objectif de gestion consiste à assurer la persistance à long terme de toutes les sous-populations existantes au Canada, y compris toute sous-population qui serait découverte ou retrouvée.
Les stratégies générales à adopter pour contrer les menaces qui pèsent sur l’espèce sont présentées dans la section Mesures de conservation.
1. Évaluation de l’espèce par le COSEPAC*
Date de l’évaluation : Novembre 2014
Nom commun (population) : Podistère du Yukon
Nom scientifique : Podistera yukonensis
Statut selon le COSEPAC : Espèce préoccupante
Justification de la désignation : Cette plante longévive, presque entièrement limitée au Canada, est en péril en raison de la perte prévue de son habitat alpin par suite de l’évolution rapide du climat. De plus, l’exploration et l’exploitation minière a lieu à plusieurs localités ou près de celles-ci.
Présence au Canada : Yukon
Historique du statut selon le COSEPAC : Espèce désignée « préoccupante » en novembre 2014.
* COSEPAC (Comité sur la situation des espèces en péril au Canada)
2. Information sur la situation de l’espèce
Au Canada, le podistère du Yukon (Podistera yukonensis) est inscrit comme espèce préoccupante à l’annexe 1 de la Loi sur les espèces en péril (LEP) du gouvernement fédéral.
NatureServe (2020) considère le podistère du Yukon comme étant vulnérable à apparemment non en péril à l’échelle mondiale (G3G4), à l’échelle nationale au Canada (N3N4) et à l’échelle infranationale au Yukon (S3S4). Aux États-Unis, il est considéré comme étant gravement en péril à en péril à l’échelle nationale (N1N2) et à l’échelle infranationale en Alaska (S1S2). Environ 90 % de son aire de répartition mondiale se trouve au Canada (COSEWIC, 2014).
3. Information sur l’espèce
3.1 Description de l’espèce
Le podistère du Yukon est une plante vivace cespiteuse qui forme souvent des touffes denses à partir d’une tige souterraine ramifiée issue d’une grosse racine pivotante allongée. Ses feuilles basilaires sont vert-bleu, longues de 3 à 12 cm et pennéesNote de bas de page 3; elles comportent 3 à 6 paires de folioles opposées (figure 1). Les tiges, d’une hauteur de 10 à 40 cm, sont dépourvues de feuilles et teintées de rouge lorsque la plante est mature. Les fleurs forment une ombelle composéeNote de bas de page 4 dont les rayons, peu nombreux à nombreux, mesurent 5 à 10 mm de longueur. Les 5 pétales sont petits (environ 1 mm de longueur) et jaune vif lorsqu’ils s’ouvrent (photo de la couverture), puis passent rapidement au blanc. Les fruits, d’environ 3 à 7 mm de longueur et 1,5 à 3 mm de largeur, sont aplatis et d’abord rougeâtres avant de se délaver en prenant une couleur jaune paille (COSEWIC, 2014).
Figure 1. Podistère du Yukon dont les fleurs matures montent en graine à la crête Miller, à Carmacks (Yukon). Photo : Syd Cannings.
Description longue
Figure 1. Cette figure montre un podistère du Yukon portant des fleurs matures dans une zone sèche ouverte en pente près de plusieurs roches.
3.2 Population et répartition de l’espèce
Le podistère du Yukon compte parmi les quelques espèces qu’on ne trouve que dans l’est de la Béringie, qui comprend les zones de l’Alaska et du centre-ouest du Yukon ayant échappé à la glaciation. À l’exception d’une sous-population connue, l’espèce est retreinte au bassin hydrographique du cours supérieur du fleuve Yukon et est à peine présente en Alaska, à la limite ouest de son aire de répartition. Environ 90 % de l’aire de répartition mondiale de l’espèce se trouve au Canada (COSEWIC, 2014).
Il existe 26 sous-populations connues du podistère du Yukon au Canada (Yukon Conservation Data Centre, 2021). Ces sous-populations sont séparées l’une de l’autre par des distances considérables, notamment entre un groupe septentrional de sous-populations centré dans les monts Ogilvie et un groupe méridional dans les chaînes Dawson et Nisling (figure 2).
Le nombre total estimé d’individus connus du podistère du Yukon au Canada se situe entre 17 000 et 30 000, dont environ les deux tiers sont matures (COSEWIC, 2014; Yukon Conservation Data Centre, 2021). Il s’agit d’une estimation minimale, car les sous-populations n’ont pas toutes été entièrement recensées et il pourrait y avoir des occurrences non découvertes. Les tendances sont inconnues, mais on infère que le réchauffement climatique entraînerait une baisse des effectifs (COSEWIC, 2014).
Figure 2. Répartition connue (points verts) du podistère du Yukon au Canada (Yukon Conservation Data Centre, 2021).
Veuillez voir la traduction française ci-dessous :
Podistera yukonensis in Yukon = Podistera yukonensis au Yukon
Description longue
Figure 2. Cette figure consiste en une carte montrant la répartition connue du podistère du Yukon au Canada. Les sous‑populations se trouvent au Yukon. Il y a un groupe septentrional de sous‑populations centré dans les monts Ogilvie et un groupe méridional dans les chaînes Dawson et Nisling. Il y a aussi une sous‑population située au nord‑est du sillon de Tintina et au sud des monts Ogilvie.
3.3 Besoins du podistère du Yukon
Le podistère du Yukon est restreint à un habitat ouvert, sec, bien drainé, à prédominance rocheuse, où il occupe des couloirs où du sol et de la végétation se sont développés entre les roches. On le trouve le plus souvent sur des éboulis qui se déplacent lentement sous l’action du gel, habituellement sur le bord de bandes de végétation orientées vers le bas de la pente et composées d’un tapis de graminées basses, de plantes herbacées non graminoïdes et de lichens. Il pousse également dans les crevasses de tors et des escarpements riverains où le substratum rocheux est exposé. Il occupe principalement des pentes orientées au sud, mais des individus ont été observés dans un petit nombre de microsites abrités sur des pentes orientées à l’est et à l’ouest. Les pentes occupées varient de 5 à 40 degrés et ont généralement une faible accumulation de neige, ce qui permet une exposition précoce de l’espèce au printemps. Au Yukon, on trouve l’espèce généralement entre 1 232 et 1 777 m d’altitude, mais il y a 3 populations entre 500 et 800 m (Yukon Conservation Data Centre, 2021). En Alaska, on la trouve à une altitude de 360 à 1 280 m (Parker, 1995; University of Alaska Museum Herbarium ALA15084).
Le podistère du Yukon semble intolérant à l’ombre, bien qu’une partie de la sous-population de la crête Miller (environ 20 individus) s’étend dans la lisière d’une tremblaie clairsemée qui pousse dans la coulée de débris (ou la tranchée minière) située à la base de la pente abritant la majeure partie de la sous-population. Ces individus tolèrent ces conditions, mais ils ne semblent pas être aussi nombreux, robustes et fertiles que ceux poussant sur la pente au-dessus d’eux qui est orientée vers le sud (Bruce Bennett, comm. pers., 2020). Il se peut que la forêt soit en train de s’étendre dans des secteurs où le podistère du Yukon s’est établi par le passé dans de meilleures conditions. L’âge relativement jeune des trembles appuie cette hypothèse. De même, quelques individus poussaient dans la lisière d’une tremblaie, en dessous de la sous-population principale du mont Kathul, en Alaska (Batten et al.,1979).
Malgré la présence de grandes superficies d’habitat apparemment convenables dans quelques-uns des sites fouillés, le podistère du Yukon n’a été trouvé que dans de très petites proportions de cet habitat (COSEWIC, 2014). Cette répartition éparse s’expliquerait par la faible capacité de dispersion du podistère du Yukon ou simplement par notre incompréhension de son habitat « convenable ».
Il n’y a pas de lien évident entre la nature géologique du substratum rocheux et les sites des sous-populations au Yukon, quoiqu’aucune des sous-populations ne soit présente sur de la roche sédimentaire calcaire (roche composée principalement ou partiellement de carbonate de calcium), qui couvre une grande partie des régions du Yukon qui ont échappé à la glaciation. Il y a toutefois en Alaska, dans les monts Ogilvie, une petite sous-population de 32 individus poussant sur un éboulis de schiste calcaire (Parker, 1997). Dans ce cas, il se peut que le podistère du Yukon tolère les conditions calcaires afin de tirer profit de la végétation clairsemée (Parker, comm. pers., 2013).
4. Menaces
4.1 Évaluation des menaces
L’évaluation des menaces pesant sur le podistère du Yukon se fonde sur le système unifié de classification des menaces de l’UICN-CMP (Union internationale pour la conservation de la nature-Partenariat pour les mesures de conservation). Les menaces sont définies comme étant les activités ou les processus immédiats qui ont entraîné, entraînent ou pourraient entraîner la destruction, la dégradation et/ou la détérioration de l’entité évaluée (population, espèce, communauté ou écosystème) dans la zone d’intérêt (mondiale, nationale ou infranationale). Ce processus d’évaluation ne tient pas compte des facteurs limitatifs. Aux fins de l’évaluation des menaces, seulement les menaces présentes et futures sont considérées. Les menaces historiques, les effets indirects ou cumulatifs des menaces ou toute autre information pertinente qui aiderait à comprendre la nature de la menace sont présentés dans la section Description des menaces.
Menace | Description de la menace | Impacta | Portéeb | Gravitéc | Immédiatetéd |
---|---|---|---|---|---|
3 | Production d’énergie et exploitation minière | Faible | Restreinte | Légère | Élevée |
3.2 | Exploitation de mines et de carrières | Faible | Restreinte | Légère | Élevée |
6 | Intrusions et perturbations humaines | Négligeable | Négligeable | Légère | Élevée |
6.1 | Activités récréatives | Négligeable | Négligeable | Légère | Élevée |
11 | Changements climatiques et phénomènes météorologiques violents | Moyen-faible | Généralisée | Modérée-légère | Élevée |
11.1 | Déplacement et altération de l’habitat | Moyen-faible | Généralisée | Modérée-légère | Élevée |
a Impact – Mesure dans laquelle on observe, infère ou soupçonne que l’espèce est directement ou indirectement menacée dans la zone d’intérêt. Le calcul de l’impact de chaque menace est fondé sur sa gravité et sa portée et prend uniquement en compte les menaces présentes et futures. L’impact d’une menace est établi en fonction de la réduction de la population de l’espèce, ou de la diminution/dégradation de la superficie d’un écosystème. Le taux médian de réduction de la population ou de la superficie pour chaque combinaison de portée et de gravité correspond aux catégories d’impact suivantes : très élevé (déclin de 75 %), élevé (40 %), moyen (15 %) et faible (3 %). Inconnu : catégorie utilisée quand l’impact ne peut être déterminé (p. ex. lorsque les valeurs de la portée ou de la gravité sont inconnues); non calculé : l’impact n’est pas calculé lorsque la menace se situe en dehors de la période d’évaluation (p. ex. l’immédiateté est non significative/négligeable ou faible puisque la menace n’existait que dans le passé); négligeable : lorsque la valeur de la portée ou de la gravité est négligeable; n’est pas une menace : lorsque la valeur de la gravité est neutre ou qu’il y a un avantage possible.
b Portée – Proportion de l’espèce qui, selon toute vraisemblance, devrait être touchée par la menace d’ici 10 ans. Correspond habituellement à la proportion de la population de l’espèce dans la zone d’intérêt (généralisée = 71-100 %; grande = 31-70 %; restreinte = 11-30 %; petite = 1-10 %; négligeable < 1 %).
c Gravité – Au sein de la portée, niveau de dommage (habituellement mesuré comme l’ampleur de la réduction de la population) que causera vraisemblablement la menace sur l’espèce d’ici une période de 10 ans ou de 3 générations (extrême = 71-100 %; élevée = 31-70 %; modérée = 11-30 %; légère = 1-10 %; négligeable < 1 %; neutre ou avantage possible ≥ 0 %).
d Immédiateté – Élevée = menace toujours présente; modérée = menace pouvant se manifester uniquement dans le futur (à court terme [< 10 ans ou 3 générations]) ou pour l’instant absente (mais susceptible de se manifester de nouveau à court terme); faible = menace pouvant se manifester uniquement dans le futur (à long terme) ou pour l’instant absente (mais susceptible de se manifester de nouveau à long terme); non significative/négligeable = menace qui s’est manifestée dans le passé et qui est peu susceptible de se manifester de nouveau, ou menace qui n’aurait aucun effet direct, mais qui pourrait être limitative.
4.2 Description des menaces
On croit que la perte d’habitat alpin causée par les changements climatiques est la plus grande menace qui pèse sur le podistère du Yukon. Le déplacement de l’habitat (arbustification vers le haut des pentes) devrait être important à long terme.
Menace 3 de l’UICN-CMP. Production d’énergie et exploitation minière (impact faible)
3.2. Exploitation de mines et de carrières
L’exploitation minière pourrait toucher la partie (18 %) de la population canadienne connue qui se trouve sur des concessions minières actives de quartz (COSEWIC, 2014), mais l’impact est considéré comme étant faible, car la plupart des concessions sont actuellement au stade de l’exploration. Un pourcentage additionnel de 40 % de la population canadienne se trouve à moins de 2 km de concessions minières actives (COSEWIC, 2014).
Menace 6 de l’UICN-CMP. Intrusions et perturbations humaines (impact négligeable)
6.1 Activités récréatives
On croit que les activités récréatives ont un impact négligeable, car la plupart des sous-populations se trouvent en milieu éloigné. La crête Miller se trouve le long d’un itinéraire de randonnée populaire sans sentier établi. Le crapahutage (escalade/marche dans des zones au sol meuble) pourrait nuire à la population de ce site. Le seul autre site à distance de marche d’une route est celui de Little Gold sur la route Top of the World, mais il se trouve sur un petit tor qui est peu susceptible d’être érodé par les marcheurs (B. Bennett, comm. pers., 2020).
Menace 11 de l’UICN-CMP. Changements climatiques et phénomènes météorologiques violents (impact moyen-faible)
11.1 Déplacement et altération de l’habitat
Les changements climatiques causent actuellement des pertes d’habitat alpin.
Les projections régionales indiquent que la température annuelle augmentera de 2,5-3,7°C d’ici 2050 (Hennessey et al., 2011; Hennessey et Streicker, 2011; Northern Climate ExChange, 2011). Les précipitations devraient généralement augmenter dans la majeure partie du territoire central, mais elles devraient diminuer dans la région située au nord-est de Dawson. Avec le réchauffement climatique, il est probable que la limite des arbustes dans les chaînes de montagnes du Yukon s’élèvera sur le flanc des montagnes (Danby et Hik, 2007). Une hausse du couvert arbustif est d’ailleurs observée dans la toundra arctique en Alaska depuis 50 ans (Tape et al., 2006). La perte de toundra alpine et arctique et l’augmentation du couvert arbustif réduiront probablement l’habitat convenable du podistère du Yukon, ce qui menacera sa persistance. L’arbustification augmentera probablement l’accumulation de neige, ce qui réduirait davantage le caractère convenable de l’habitat pour l’espèce, qui semble privilégier une exposition hâtive au printemps. Au site de la crête Miller, situé près de Carmacks, la progression du peuplier faux-tremble semble dégrader l’habitat du podistère du Yukon aux pourtours de la sous-population, de sorte que les individus y sont moins nombreux, moins robustes et moins fertiles que dans les sites exposés adjacents (COSEWIC, 2014).
5. Objectif de gestion
- Assurer la persistance à long terme de toutes les sous-populations existantes au Canada, y compris toute sous-population qui serait découverte ou retrouvée.
La présence continue à long terme (au moins 50 à 100 ans) de sous-populations apparemment stables dans des sites connus implique et nécessite le maintien de l’intégrité de l’habitat. Dans certains sites, le maintien de l’intégrité de l’habitatNote de bas de page 5 pourrait nécessiter des mesures d’atténuation consistant notamment à éviter toute perturbation de l’habitat au sein de groupes de plantes. Dans le cas du podistère du Yukon, le maintien de l’intégrité de l’habitat signifie la persistance d’un habitat rocheux ouvert (non ombragé) et non perturbé.
La vulnérabilité de l’espèce à la perte d’habitat causée par le réchauffement climatique (COSEWIC, 2014) représente un défi particulier, car il n’est pas facile d’atténuer ce phénomène à l’échelle locale.
6. Stratégies générales et mesures de conservation
6.1 Mesures déjà achevées ou en cours
- Des employés du Service canadien de la faune ont effectué des relevés exhaustifs du podistère du Yukon de 2012 à 2014 : 104 jours-personnes ont été consacrés à la visite de 174 sites. Ces relevés visaient principalement à trouver des sous-populations non découvertes; des dénombrements préliminaires des individus ont été effectués, et l’habitat a été décrit brièvement.
- En 2020, Environnement Yukon a effectué à deux sites dans les chaînes Dawson et Nisling des relevés par transects plus détaillés qui serviront de référence pour le suivi futur. Ces relevés visaient à surveiller la santé du podistère du Yukon alors que les arbustes augmentent en taille et en nombre en raison du réchauffement climatique.
- Une étude phylogénétique de la sous-famille des Apioïdées (Sun et al., 2004; Sun et Downie, 2010) indique qu’elle s’est rapidement diversifiée et que le genre Podistera n’est pas monophylétique. La région du code-barres d’ADN a été analysée chez toutes les sous-populations du Yukon : l’analyse montre une diversité génétique considérable, mais d’autres analyses sont nécessaires pour déterminer les relations entre les sous-populations (Bennett, comm. pers., 2020).
6.2 Stratégies générales
Les mesures de conservation visant à atteindre l’objectif de gestion sont classées en cinq stratégies générales (selon la Conservation Actions Classification v. 2.0 de Conservation Measures Partnership [2016]) :
- Gestion des terres
- Sensibilisation
- Désignation et planification de la conservation
- Cadres juridiques et stratégiques
- Recherche et suivi
6.3 Mesures de conservation
Tableau 2. Mesures de conservation et calendrier de mise en œuvre
Les stratégies générales sont tirées de Conservation Actions Classification v. 2.0 de Conservation Measures Partnership (2016).
Stratégie générale | Mesure de conservation | Prioritée | Menaces ou préoccupations traitées | Échéance |
---|---|---|---|---|
Gestion des terres | Évaluation des menaces qui pèsent actuellement sur les populations existantes et présumées existantes; élaboration et mise en œuvre d’un plan d’atténuation au besoin | Moyenne | Exploitation et exploration minière; menace 3 | 2022-2026, puis en permanence |
Gestion des terres | Élaboration de conseils en matière d’atténuation des impacts. | Moyenne | Exploitation et exploration minière; menace 3 | 2022-2026, puis en permanence |
Sensibilisation | Élaboration d’une stratégie de communication visant à sensibiliser les intervenants et le public et à encourager l’intendance; production et distribution de documents éducatifs | Élevée | Exploitation et exploration minière; menace 3 | 2022-2026, puis en permanence |
Sensibilisation | Sensibilisation du public à la vulnérabilité des écosystèmes alpins aux changements climatiques | Moyenne | Changements climatiques; menace 11 | 2022-2026, puis en permanence |
Désignation et planification de la conservation | Prise en compte du podistère du Yukon dans le plan d’aménagement du territoire de la région de Dawson et dans les projets ultérieurs de planification de l’aménagement du territoire | Élevée | Exploitation et exploration minière; menace 3 | 2022-2023 |
Cadres juridiques et stratégiques | Atteinte par le Canada des cibles climatiques qu’il s’est fixées dans l’Accord de Paris | Élevée | Changements climatiques; menace 11 | 2022-2031, puis en permanence |
Cadres juridiques et stratégiques | Atteinte par le Yukon de ses cibles climatiques | Élevée | Changements climatiques; menace 11 | 2022-2031, puis en permanence |
Recherche et suivi | Relevés des populations connues pour déterminer leur situation, leur abondance et les menaces qui pèsent sur elles | Élevée | Lacunes dans les connaissances | 2022-2031 |
Recherche et suivi | Recherche de populations inconnues | Faible | Lacunes dans les connaissances | 2022-2031 |
Recherche et suivi | Établissement de parcelles de suivi à long terme pour déterminer l’étendue et le taux d’arbustification de la zone alpine inférieure | Élevée | Changements climatiques; menace 11 | 2021-2026, puis en permanence |
Recherche et suivi | Utilisation de modèles d’habitat et de projections de changements climatiques afin de relever les zones pouvant constituer des refuges climatiques pour le podistère du Yukon | Moyenne | Changements climatiques; menace 11 | 2022-2026 |
Recherche et suivi | Études génétiques pour déterminer les relations entre les populations isolées | Faible | Lacunes dans les connaissances | 2022-2031 |
e « Priorité » reflète l’ampleur dans laquelle la mesure contribue directement à la conservation de l’espèce ou est un précurseur essentiel à une mesure qui contribue à la conservation de l’espèce. Les mesures à priorité élevée sont considérées comme étant celles les plus susceptibles d’avoir une influence immédiate et/ou directe sur l’atteinte de l’objectif de gestion de l’espèce. Les mesures à priorité moyenne peuvent avoir une influence moins immédiate ou moins directe sur l’atteinte de l’objectif de gestion, mais demeurent importantes pour la gestion de la population. Les mesures de conservation à faible priorité auront probablement une influence indirecte ou progressive sur l’atteinte de l’objectif de gestion, mais sont considérées comme des contributions importantes à la base de connaissances et/ou à la participation du public et à l’acceptation de l’espèce par le public.
6.4 Commentaires à l’appui des mesures de conservation et du calendrier de mise en œuvre
Stratégie générale : Gestion des terres
Afin d’assurer la viabilité à long terme de l’espèce au Canada et la pérennité de son habitat, il faut élaborer des conseils en matière d’atténuation des impacts de l’exploration minière dans les sites alpins. Il faut décrire les impacts et mettre au point des pratiques de gestion exemplaires.
Stratégie générale : Désignation et planification de la conservation
Des sites de conservation de l’espèce pourraient être désignés dans le plan d’aménagement du territoire de la région de Dawson et d’autres plans d’aménagement du territoire dans le sud de son aire de répartition.
Stratégie générale : Sensibilisation
Une grande partie du public et de nombreux intervenants ignorent sans doute l’existence du podistère du Yukon. Une communication accrue sur l’espèce, ses besoins en matière d’habitat et les menaces qui pèsent sur elle contribuerait grandement au succès des mesures de conservation. Il faut insister sur la menace du réchauffement climatique pour les écosystèmes alpins auprès du public et des gouvernements.
Stratégie générale : Cadres juridiques et stratégiques
Le réchauffement climatique étant considéré comme la principale menace à long terme pour le podistère du Yukon, tant le Canada que le Yukon jouer leur rôle dans les mesures mondiales visant à limiter l’ampleur des changements climatiques. En signant l’Accord de Paris, le Canada s’est engagé à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 30 % par rapport à leur niveau de 2005 d’ici 2030. En 2019, le niveau de 2005 a été estimé à 730 Mt d’éq. CO2 (Environment and Climate Change Canada, 2020). De même, le gouvernement du Yukon s’est engagé à réduire les émissions de gaz à effet de serre de son territoire de 30 % d’ici 2030 (Government of Yukon, 2020).
Stratégie générale : Recherche et suivi
Une cartographie détaillée et des recensements exacts doivent être effectués à toutes les occurrences de l’espèce; les progrès ne peuvent être suivis sans mesures de référence de sa répartition et de son abondance. Des parcelles ou transects de suivi à long terme de la végétation devraient être établis pour mesurer l’étendue et le taux d’arbustification de l’habitat alpin du podistère du Yukon.
Des données génétiques ont été recueillies dans tous les sites, mais elles n’ont pas été analysées en détail pour révéler les relations entre les sous-populations isolées. Ce travail serait utile pour déterminer si certaines d’entre elles constitueraient des unités désignablesNote de bas de page 6, dans les futures évaluations de la situation de l’espèce.
7. Mesure des progrès
Les indicateurs de rendement présentés ci-dessous proposent un moyen de mesurer les progrès vers l’atteinte des objectifs de gestion et de faire le suivi de la mise en oeuvre du plan de gestion.
- Population du podistère du Yukon stable ou à la hausse au cours des dix prochaines années. Les tendances de population seront inférées grâce à des relevés répétés de l’espèce dans ses sites connus.
- Persistance ou hausse de la répartition actuelle du podistère du Yukon au Canada, mesurée par des relevés de reconnaissance répétés.
8. Références
Batten, A.R., D.F. Murray et J.C. Dawe. 1979. Threatened and Endangered plants in selected area of the BLM Fortymile Planning Unit, Alaska. U.S. Department of the Interior, Anchorage, Alaska. 127 pp.
Bennett, B. 2020. Communication personnelle par téléphone avec S. Cannings, 24 juin 2020. Coordonnateur, Centre de données sur la conservation du Yukon, Whitehorse (Yukon).
Conservation Measures Partnership. 2016. Conservation Actions Classification (v2.0). https://cmp-openstandards.org/using-cs/tools/__actions/ (consulté le 19 août 2020).
COSEWIC. 2014. COSEWIC assessment and status report on the Yukon Podistera Podistera yukonensis in Canada. Committee on the Status of Endangered Wildlife in Canada. Ottawa. x + 34 pp. http://sararegistry.gc.ca/default.asp?lang=En&n=45A14631-1 [Également disponible en français : COSEPAC. 2014. Évaluation et Rapport de situation du COSEPAC sur le podistère du Yukon (Podistera yukonensis) au Canada. Comité sur la situation des espèces en péril au Canada. Ottawa. xi + 36 p. https://sararegistry.gc.ca/default.asp?lang=Fr&n=45A14631-1.]
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Annexe A : Effets sur l’environnement et sur les espèces non ciblées
Une évaluation environnementale stratégique (EES) est effectuée pour tous les documents de planification du rétablissement en vertu de la LEP, conformément à la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmesNote de bas de page 7. L’objet de l’EES est d’incorporer les considérations environnementales à l’élaboration des projets de politiques, de plans et de programmes publics pour appuyer une prise de décisions éclairée du point de vue de l’environnement, et d’évaluer si les résultats d’un document de planification du rétablissement peuvent affecter un élément de l’environnement ou tout objectif ou cible de la Stratégie fédérale de développement durableNote de bas de page 8 (SFDD).
La planification de la conservation vise à favoriser les espèces en péril et la biodiversité en général. Il est cependant reconnu que la mise en œuvre de plans de gestion peut, par inadvertance, produire des effets environnementaux qui dépassent les avantages prévus. Le processus de planification fondé sur des lignes directrices nationales tient directement compte de tous les effets environnementaux, notamment des incidences possibles sur des espèces ou des habitats non ciblés. Les résultats de l’EES sont directement inclus dans le plan de gestion lui-même, mais également résumés dans le présent énoncé, ci-dessous.
Le présent plan de gestion profitera à l’environnement en favorisant la conservation de l’habitat alpin ayant échappé aux glaciations du podistère du Yukon. Cet habitat abrite également le pica à collier (inscrit comme espèce préoccupante sur la liste de la LEP) et plusieurs plantes qui ne sont présentes que dans cette région, mais qui n’ont pas encore été évaluées ou inscrites sur la liste des espèces en péril. La possibilité que la mise en œuvre du plan ait des conséquences néfastes imprévues sur d’autres espèces a été envisagée, et l’EES a permis de déterminer que le programme aura certainement un effet bénéfique sur l’environnement et qu’il n’entraînera pas de conséquences néfastes notables. Le lecteur devrait consulter plus particulièrement les sections suivantes du document : description des besoins de l’espèce, rôle écologique et facteurs limitatifs; mesures de conservation.
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