Cahier de transition du sous ministre d’IRCC 2024 – Voies pour considérations d’ordre humanitaire et voies d’accès complémentaires
Contexte
Outils discrétionnaires
Les outils discrétionnaires offrent une marge de manœuvre dans les cas méritants et exceptionnels et sont largement considérés comme le « filet de sécurité » de la législation.
Les considérations d’ordre humanitaire (CH) et les politiques d’intérêt public sont des outils discrétionnaires qui confèrent au ministre le pouvoir d’accorder le statut de résident permanent, ou une exemption des exigences de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés ou du Règlement, aux étrangers qui ne seraient pas autrement admissibles dans une catégorie ou un programme d’immigration.
Un demandeur qui n’est pas autrement admissible à la résidence permanente ou qui est interdit de territoire peut présenter une demande en invoquant des considérations d’ordre humanitaire (article 25). À l’étranger, les considérations d’ordre humanitaire sont principalement utilisées pour offrir des exemptions aux dispositions de la Loi. Des considérations d’ordre humanitaire peuvent être demandées pour des particuliers ou utilisées à l’initiative du ministre pour accorder des exemptions ou faciliter l’attribution de la résidence permanente. Les considérations d’ordre humanitaire ne peuvent pas être utilisées pour faire fi des interdictions de territoire les plus graves : sécurité, violations des droits de la personne ou internationaux, crime organisé (articles 34, 35 et 37 de la Loi). Le ministre a le pouvoir d’accorder des exemptions ou d’attribuer la résidence permanente selon des considérations d’ordre humanitaire, ou cette décision peut être prise par un agent délégué. Les agents délégués examinent tous les facteurs présentés par le demandeur et procèdent à une évaluation globale (p. ex. l’établissement au Canada, l’intérêt supérieur de tout enfant concerné par la demande, les considérations en matière de santé, la situation dans le pays d’origine, entre autres).
Le ministre a le pouvoir d’adopter des politiques d’intérêt public en vertu de l’article 25.2. Les politiques d’intérêt public ne peuvent venir modifier les dispositions de la Loi ou du Règlement ou en créer de nouvelles, mais elles peuvent exempter les demandeurs de certaines dispositions ou leur accorder le statut de résident permanent sans qu’ils fassent partie d’une catégorie.
En ce qui concerne la résidence temporaire, des politiques d’intérêt public sont souvent mises en œuvre pour des dispenses de frais et pour renoncer aux critères d’admissibilité liés aux visas de visiteur et aux permis de travail et d’études; elles peuvent également prévoir des exemptions aux interdictions de territoire.
En vertu de politiques d’intérêt public, on peut accorder la résidence permanente à un groupe donné de personnes affichant des critères d’admissibilité communs (au Canada) ou exempter les demandeurs de certains ou de la totalité des critères d’admissibilité d’une catégorie ou d’un programme d’immigration (principalement à l’étranger), et peut aussi inclure des exemptions aux interdictions de territoire et des dispenses de frais.
Les voies d’accès complémentaires offrent aux réfugiés et aux personnes déplacées d’autres moyens de trouver des solutions durables, en dehors des programmes de réinstallation traditionnels et des définitions du terme « réfugié ». Ces voies aident les personnes déplacées à se rendre en toute sécurité dans des pays tiers par l’intermédiaire de programmes de migration régulière non destinés aux réfugiés (programmes économiques, permis d’études, etc.).
Les impacts
La catégorie « CH et autres » (c.-à-d. les politiques d’intérêt public) dans le Plan des niveaux d’immigration représente traditionnellement environ 1,5 % des admissions globales. Ce chiffre est passé à 2,8 % en 2021, à 2 % en 2022, et à 3 % en 2023 principalement en raison des admissions dans le cadre de politiques d’intérêt public (p. ex. les membres de la famille élargie d’anciens interprètes afghans, les membres de la famille de victimes de récentes catastrophes aériennes, des ressortissants de Hong Kong).
Avant 2020, moins de dix politiques d’intérêt public par an étaient adoptées. Ce nombre est passé à 26 en 2020, à 53 en 2021, à 25 en 2022 et à environ 32 en 2023.
Cette catégorie d’admissions fait l’objet de plus de demandes que prévu, car il est difficile de prévoir les niveaux d’immigration pour les nouvelles situations prioritaires qui nécessitent une réponse rapide en matière d’immigration.
Les politiques d’intérêt public sont utilisées pour faciliter le regroupement familial dans des circonstances particulières (comme des situations humanitaires), offrir une « solution » temporaire en vue de résoudre les problèmes opérationnels, répondre à des cas d’intérêt national, mettre en œuvre des programmes pilotes ou sur mesure (y compris des voies d’accès complémentaires) ou offrir un mécanisme de transition jusqu’à ce qu’une modification réglementaire puisse être effectuée.
Bien que les politiques d’intérêt public représentent un outil utile et efficace, l’augmentation significative de leur nombre au cours des dernières années contribue aux pressions opérationnelles, y compris sur le traitement et les capacités informatiques, et pourrait venir empiéter sur les admissions dans d’autres programmes.
Programme actuel
Voies pour considérations d’ordre humanitaire
Lorsque l’on répond à des événements mondiaux, il y a souvent des similitudes dans la mesure où les personnes fuient l’instabilité et recherchent la sécurité. Les réponses en matière d’immigration sont adaptées à chaque contexte différent afin de répondre aux besoins uniques des personnes qui ont besoin d’aide.
Plus récemment, une politique d’intérêt public a été utilisée pour faciliter la délivrance de visas de résident temporaire ou permanent à des personnes touchées par une crise humanitaire. Un modèle courant a consisté à faciliter la venue au Canada de personnes ayant des liens familiaux avec un citoyen canadien ou un résident permanent « ancré » qui est prêt à soutenir les demandeurs une fois arrivés au Canada. Ce modèle d’ancrage familial a été utilisé pour les personnes touchées par les crises en Afghanistan, à Gaza, au Soudan et dans les Amériques.
Ce modèle permet de s’assurer que les clients de ces interventions humanitaires bénéficient d’un soutien à leur arrivée au Canada, car ils ne seraient autrement pas visés par les programmes prévus par la version actuelle du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (RIPR) (c’est-à-dire qu’ils ne sont pas membres de la catégorie du regroupement familial ou des réfugiés). Cette approche a été adoptée pour plusieurs raisons, notamment pour tirer parti des moyens et de la volonté des communautés de la diaspora qui souhaitent apporter leur aide, et pour veiller à ce que les personnes ayant besoin de sécurité bénéficient du soutien nécessaire pour faciliter leur intégration au Canada.
Voies d’accès complémentaires
Le Ministère a également eu recours à une politique d’intérêt public pour mettre à l’essai la conception des voies d’accès complémentaires. Ces voies permettent aux réfugiés et aux personnes déplacées de trouver des solutions durables en dehors des programmes de réinstallation traditionnels. Il s’agit notamment du Projet pilote sur la voie d’accès à la mobilité économique du Canada, conçu pour aider les personnes déplacées et les réfugiés qualifiés à immigrer au Canada par l’intermédiaire des programmes économiques existants.
La conception d’une nouvelle voie d’accès pour les étudiants réfugiés et déplacés, soit le projet pilote pour les universitaires déplacés, est également en cours. Cette voie facilitera la délivrance de permis d’études aux réfugiés et aux étudiants déplacés, ainsi que leur accès au système d’éducation canadien.
Le Canada démontre également son leadership en matière de voies d’accès complémentaires en tant que premier président de l’Alliance mondiale pour la mobilité des travailleurs réfugiés (Alliance). L’Alliance est une initiative mondiale multisectorielle qui défend les voies d’accès à la mobilité de la main-d’œuvre pour les réfugiés et les personnes déplacées et qui en fait la promotion auprès d’eux. L’Alliance est composée de représentants des gouvernements, du secteur privé et des employeurs, ainsi que de partenaires non gouvernementaux et d’un comité consultatif constitué de réfugiés ayant une expérience vécue de l’utilisation des voies d’accès complémentaires.
Développements récents
La liste des politiques d’intérêt public publiées se trouve sur le site Web. Les politiques d’intérêt public les plus récentes pour faciliter ou accorder la résidence permanente dans des situations humanitaires en dehors du Programme des réfugiés sont notamment les suivantes :
une politique d’intérêt public accordant la résidence permanente à certains ressortissants colombiens, haïtiens et vénézuéliens qui ont de la famille au Canada a été lancée le 17 novembre 2023;
une politique d’intérêt public visant à faciliter l’octroi de la résidence permanente à certains étrangers touchés par le conflit au Soudan ayant de la famille au Canada a été annoncée le 29 décembre 2023 et entrera en vigueur le 27 février 2024.
La politique d’intérêt public la plus récente visant à faciliter la délivrance de visas de résident temporaire dans des situations humanitaires est la politique d’intérêt public temporaire qui permet de délivrer des visas à certains membres de la famille élargie touchés par la crise à Gaza; cette politique est entrée en vigueur le 9 janvier 2024.
Une politique d’intérêt public est en cours d’élaboration pour la mise en place du projet pilote pour les universitaires déplacés, qui vise à faciliter le processus de demande de permis d’études pour les réfugiés et les personnes déplacées qui souhaitent venir au Canada en tant qu’étudiants.
Le Ministère entreprend actuellement une réflexion sur l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi des politiques d’intérêt public afin de faire le bilan des leçons tirées et d’évaluer les effets cumulatifs des politiques d’intérêt public instaurées au cours des dernières années.