CIMM – CIMM 87.5 - Cas des travailleurs agricoles vulnérables – 7 février 2024
Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 5 décembre 2023
Question
M. Alexis Brunelle-Duceppe : Madame Fox, lors de votre dernier passage au Comité, je vous ai parlé d'un problème soulevé par le RATTMAQ, soit le Réseau d'aide aux travailleuses et travailleurs migrants agricoles du Québec.
Dernièrement, nous avons entendu des représentants du RATTMAQ dans le cadre de notre étude sur les permis de travail fermés. Je leur ai parlé du problème qu'ils avaient observé, c'est-à-dire qu'un nombre important de demandes de permis de travail ouvert qu'ils avaient faites pour des travailleurs vulnérables avaient été refusées au début du mois de janvier 2023. Le RATTMAQ avait reçu huit décisions négatives. Pourtant, les dossiers ressemblaient beaucoup aux dossiers précédents, qui avaient toujours été acceptés.À la suite d'une intervention faite conjointement par mon bureau et celui de M. Lightbound, nous avions rencontré le cabinet du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration à ce moment. Il y avait ensuite eu un changement assez radical dans ce dossier. La situation était rentrée dans l'ordre peu de temps après notre intervention.
Par contre, nous n'avons pas su dans le détail ce qui s'était passé. Ce que j'ai appris, c'est que les refus provenaient du même fonctionnaire, puisqu'il s'agissait chaque fois du même numéro d'agent.
Quand je vous avais posé la question la dernière fois, j'avais l'impression que vous aviez des informations à ce sujet, à moins que je n'aie mal compris. Pourriez-vous nous en dire davantage?
Mme Christiane Fox : Quand vous avez soulevé ce problème la dernière fois, je vous ai dit que j'avais effectivement rencontré les gens du Réseau d'aide aux travailleuses et travailleurs migrants agricoles du Québec lors de nos consultations pour l'examen stratégique. Ils m'avaient alors parlé de certains cas qui avaient été refusés, sans me donner les détails, par contre.
Après que vous m'avez posé la question en comité, je suis retournée auprès de mon équipe pour connaître le taux d'acceptation des demandes. Comme vous l'aviez noté, ce taux était effectivement bas au Québec. C'était 47 % en 2022 et c'est maintenant 57 % en 2023.
Pour ma part, je regarde le programme dans son ensemble. Pour ce qui est de la preuve à démontrer, la barre est destinée à être plus basse, étant donné que ce sont des gens vulnérables. Nous avons délivré des permis ouverts aux travailleurs vulnérables, mais, selon moi, nous devons continuer la formation auprès de nos fonctionnaires qui prennent des décisions, afin qu'ils soient en mesure de prendre les bonnes décisions. À savoir s'il s'agissait d'un fonctionnaire en particulier, je n'ai pas ces détails aujourd'hui. Je vais poser la question à mon équipe. Je vous dirais cependant qu'il y a un besoin de formation continue pour nos agents qui prennent des décisions au sujet de cas très délicats.
M. Alexis Brunelle-Duceppe : Madame la sous-ministre, ma question est très précise. Elle porte vraiment sur un problème précis. Je ne veux pas connaître tous les chiffres ni le pourquoi du comment. Je vous le dis en tout respect.
Ma question porte sur l'agent en question. Si moi, je suis au courant du fait que c'était un seul et même agent, puisque c'était toujours le même numéro d'agent, qui refusait quasi systématiquement le même type de demandes alors qu'elles étaient normalement acceptées, je ne peux pas croire que le ministère n'est pas au courant de cette situation. Si le RATTMAQ est au courant, et si moi, un député de l'opposition, je suis au courant, alors vous devez nécessairement être au courant. Est-ce que je me trompe?
Mme Christiane Fox : À titre de sous-ministre, je ne sais pas si ces décisions ont été prises par un même fonctionnaire. Je vais faire le suivi. Non, je ne suis pas au courant.
M. Alexis Brunelle-Duceppe : Pourtant, j'en avais parlé la dernière fois en comité. Vous m'aviez dit que vous alliez nous fournir une réponse plus tard, mais je n'en ai pas reçu.
Il y a une hypothèse qui circule, mais elle n'est peut-être pas fondée. Selon cette hypothèse, un fonctionnaire de votre ministère détenant le pouvoir de décider d'accepter ou de refuser des demandes de permis ouverts pour des travailleurs vulnérables aurait eu des opinions d'extrême droite. Soudainement, le ministère en serait venu à la conclusion que c'était ce qui était arrivé. On aurait réglé le problème, finalement, sans en faire état sur la place publique. Ce n'est qu'une hypothèse.
Je vous pose donc la question : est-ce une hypothèse crédible? Est-ce une possibilité, madame la sous-ministre?
Mme Christiane Fox : …Il y a souvent des gens qui présument que certaines activités découlent de mauvaises intentions, mais parfois il peut y avoir d'autres raisons. Par exemple, il peut s'agir d'une question de formation, d'un nouveau dossier à apprendre ou d'un employé nouvellement arrivé. Je ne serais pas prête à vous dire aujourd'hui qu'il y avait une intention néfaste. Cependant, je suis prête à vous dire que nous parlons souvent du Code de valeurs et d'éthique du secteur public, parce que c'est important au sein d'une organisation comme la nôtre.
M. Alexis Brunelle-Duceppe : …Si jamais il s'avère qu'une telle activité s'est produite dans votre ministère, c'est-à-dire qu'une personne ayant un pouvoir décisionnel a refusé systématiquement toutes les demandes de permis ouverts pour des personnes vulnérables en s'appuyant purement sur son opinion qui frôle l'extrême droite, est-ce que vous vous engagez aujourd'hui à revenir devant le Comité pour nous le dire publiquement? Vous engagez-vous à nous dire en toute transparence, une fois que cela aura été découvert, ce qui est réellement arrivé au sein du ministère et quelles ont été les conséquences?
Mme Christiane Fox : Absolument. Je suis prête non seulement à en faire rapport au Comité si c'est le cas, mais aussi à faire rapport au Comité des mesures qui auront été prises à l'égard de cet agent ou cette agente.
Réponse
Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) prend de telles allégations au sérieux et nous M. remercions M. Brunelle-Duceppe de nous avoir fait part de ses préoccupations.
Il n’y a aucun élément de preuve attestant que l’allégation selon laquelle un agent a refusé de façon disproportionnée des demandes en raison de préjugés.
IRCC offre systématiquement à tous ses employés une formation qui reflète les valeurs et l’éthique de la fonction publique. Dans le cadre de notre engagement à créer une culture de lutte contre le racisme et de promotion de la diversité, de l’équité et de l’inclusion, IRCC donne une formation obligatoire sur les préjugés conscients et inconscients à l’ensemble du personnel; les agents reçoivent de plus une formation ciblée sur les préjugés dans la prise de décision. Ceux-ci doivent prendre des décisions en fonction du bien-fondé des cas individuels, en tenant compte notamment de l’ensemble des éléments de preuve disponibles, des faits et des lois, des politiques et des procédures en vigueur. Nous passons aussi systématiquement en revue les sources possibles de préjugés dans l’exécution de nos programmes et politiques, et nous cherchons de manière continue de nouvelles façons d’atténuer les risques en contexte opérationnel. De plus, une formation spécialisée fondée sur des approches tenant compte des traumatismes a été conçue en vue d’aider les agents d’immigration à évaluer les demandes de permis de travail ouvert pour les travailleurs vulnérables en utilisant un processus décisionnel en deux étapes, à recevoir les clients vulnérables en entrevue et à traiter leurs demandes avec empathie.
Après un examen préliminaire des taux d’approbation par agent propre au bureau en question, nous pouvons confirmer que nous n’avons trouvé aucune preuve de partialité, de discrimination ou de racisme dans les demandes refusées. Toutefois, il y a eu des cas d’incohérence ou d’irrégularité dans l’évaluation, alors IRCC mène un examen élargi des procédures de tous nos bureaux pour veiller à ce que toute autre irrégularité soit traitée rapidement.
Le Ministère a mis en place un programme d’assurance de la qualité qui prévoit la surveillance de la qualité des décisions prises par les agents afin d’en assurer l’uniformité et de cerner les préjugés possibles dans le processus. Lorsque des erreurs ou des lacunes sur le plan de la formation ou de l’uniformité sont établies, des mesures sont immédiatement prises pour corriger la situation, qui peuvent inclure la révision des décisions, la prestation de formation supplémentaire ou la clarification des procédures.
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