Le soin des spécimens naturalisés et des peaux – Notes de l'Institut canadien de conservation (ICC) 8/3

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Introduction

Un grand nombre de musées conservent, dans leurs collections, des spécimens naturalisés de mammifères et d’oiseaux, ainsi que des fourrures et des peaux. Des soins généraux et des mesures d’entretien réguliers, comme ceux décrits ci-après, aideront à mieux conserver ces objets.

Manipulation

Avertissement : Il se peut que la peau de certains spécimens naturalisés ait déjà été traitée avec des composés d’arsenic ou de mercure, ou avec des pesticides organiques, tel le DDT, utilisés comme insectifuges. Ces substances sont dangereuses et peuvent provoquer de graves irritations de la peau ou d’autres symptômes d’intoxication. Il est donc important d’adopter des mesures adéquates en matière de santé et de sécurité si des pesticides sont présents ou présumés être présents sur de tels objets. Il est recommandé de porter des gants jetables en caoutchouc nitrile, une tunique antipoussière ou une blouse de laboratoire en Tyvek ainsi qu’un masque filtrant antipoussière (grade N95 ou plus) lors de la manipulation de tels spécimens. Il est aussi important que les gants et autres articles qui entrent en contact avec les peaux ou les spécimens contaminés par des pesticides soient jetés en suivant le protocole recommandé pour se débarrasser de matières contaminées.

De mauvaises méthodes de manipulation constituent une cause importante de dommages, en particulier dans le cas des spécimens naturalisés, qui sont par nature rigides. En faisant des gestes brusques, il y a un risque de casser une aile, une patte ou une queue, ou encore d’endommager des plumes. Il faudrait manipuler ces objets en les soulevant par la base et s’assurer qu’ils restent bien stables et immobiles au moyen de sacs de sable.

Bien que les peaux soient généralement plus souples que les spécimens naturalisés, il faut les manipuler délicatement en prenant soin de ne pas les étirer ou de ne pas les plier outre mesure. Un support adéquat est nécessaire, surtout dans le cas des peaux lourdes ou de grandes dimensions. Pour éviter les dommages lors des déplacements, placer les objets sur un panneau rigide et les recouvrir d’une pellicule de polyester (Mylar ou Melinex) ou d’une feuille de polyéthylène.

Il arrive que des peaux ou des spécimens naturalisés perdent des poils, et ce, de façon continue. On ne peut pratiquement rien faire pour réimplanter les poils ou empêcher leur chute, sinon retarder celle-ci en manipulant les objets le moins possible. Il faut absolument protéger ces objets contre la poussière, car tout nettoyage ou dépoussiérage risquerait fort de déloger des touffes de poils et ne ferait qu’aggraver le problème. Un dépoussiérage prudent sans pertes de poils est possible, au besoin, mais la tâche est complexe et ardue, et demande beaucoup de temps. Si la gravité du problème le justifie, contacter l’Institut canadien de conservation (ICC) pour obtenir des conseils

Mise en réserve

Les insectes constituent un des risques principaux de dommages aux fourrures, aux peaux et aux plumes. Les larves des insectes nuisibles qu’on retrouve fréquemment dans les musées (p. ex. les mites et les anthrènes des tapis) peuvent détruire ces matériaux en l’espace de quelques jours. Pour prévenir une infestation, inspecter les spécimens naturalisés et les peaux aux trois mois afin de repérer tout indice de dommage causé par les insectes (consulter Agent de détérioration : Ravageurs ainsi que la Note de l’ICC 3/1 Stratégies de lutte préventive contre les infestations et méthodes de détection et la Note de l’ICC 3/2 Détection des infestations : inspection des installations et liste de contrôle de même que le Bulletin technique 29 La lutte contre les ravageurs des biens culturels. Il faut réagir immédiatement et mettre en œuvre des mesures adéquates dès qu’une infestation est détectée. Pour obtenir des conseils à ce sujet, contacter l’ICC.

Assurer une ventilation adéquate des réserves en utilisant, par exemple, des ventilateurs pour faire circuler l’air, car cela aide à éloigner les insectes et à prévenir la formation de moisissures.

La poussière, en plus d’être esthétiquement dérangeante, cause des dommages. La poussière est abrasive, elle peut accélérer la détérioration chimique et constituer une source de nourriture pour les insectes et un milieu de croissance pour les moisissures. La poussière peut, en outre, être difficile à éliminer si elle se loge entre les poils d’une fourrure ou dans la fine structure des plumes. La protection contre la poussière est primordiale dans le cas des fourrures et des peaux qui perdent des poils. Il est essentiel d’assurer la propreté et le bon entretien des réserves. L’entreposage des peaux et des spécimens naturalisés dans des armoires de rangement ou des boîtes fermées empêche la poussière de se déposer sur leur surface. D’autres solutions consistent à les couvrir lâchement de draps propres en coton à tissage serré. Il est également possible d’utiliser des feuilles de polyéthylène, tendues au-dessus des spécimens et sans contact direct avec eux.

Ne jamais déposer d’objets à des endroits où les conditions ambiantes sont mauvaises, par exemple près de radiateurs (températures élevées) ou de tuyaux non isolés (risques de condensation ou d’humidité relative élevée), ou sur un sol de béton. Il faut éviter d’entreposer les objets dans des endroits où des fuites d’eau peuvent survenir. Il faut aussi toujours les tenir éloignés de la lumière, car la chaleur localisée et un éclairage excessif risquent de les endommager. Afin d’éviter la décoloration, les spécimens doivent être conservés dans l’obscurité.

Humidité relative et température

En ce qui a trait aux taux d’humidité relative (HR), la plage recommandée est de 45 à 55 %. Si la valeur de l’HR est supérieure à 65 %, des moisissures risquent de se développer à la surface des spécimens naturalisés et des peaux. Par ailleurs, à de très bas taux d’HR, l’état de dessiccation des objets peut entraîner des fissures ou des déchirures, ou rendre les peaux fragiles et cassantes. Les variations abruptes d’HR ont aussi des effets nocifs, particulièrement pour les spécimens naturalisés. Les fluctuations rapides créent en effet des tensions ou des contraintes dans les divers matériaux assemblés constituant le spécimen, lesquelles peuvent entraîner des dommages (fissures, déchirures, etc.).

Il est aussi préférable que la température n’excède pas 25 °C, mais ce facteur est moins critique si l’HR est maintenue dans la plage de valeurs susmentionnée. Vérifier en particulier la chaleur que peuvent dégager les projecteurs. Il faut s’assurer que la chaleur rayonnante dégagée par des projecteurs ne provoque pas une hausse de la température à l’intérieur des vitrines hermétiques ou à la surface des spécimens exposés. Il est possible d’éviter de tels problèmes en modérant l’intensité de l’éclairage et en employant des ampoules qui ne dégagent pas beaucoup de chaleur rayonnante. Les fluctuations de la température peuvent provoquer d’importantes variations de l’HR, lesquelles entraînent des dommages aux objets.

Les publications de l’ICC Agent de détérioration : Humidité relative (HR) inadéquate et Agent de détérioration : Température inadéquate offrent une introduction aux méthodes actuelles recommandées par l’ICC pour contrôler l’HR et la température ambiantes dans les musées.

Éclairement

Toutes les fourrures et les plumes peuvent voir leurs couleurs s’altérer sous l’effet de la lumière (lumière visible et rayonnement ultraviolet). Les couleurs sombres perdent leur éclat et les couleurs claires jaunissent. Les couleurs les plus fugitives vont s’estomper et se décolorer même à de faibles degrés d’éclairement après 20 d’ans d’exposition à la lumière (à raison de 8 heures par jour). Ces transformations photochimiques sont irréversibles. Les seules mesures permettant de prévenir le phénomène consistent à contrôler l’exposition à la lumière des objets.

Dans des conditions idéales, les fourrures et les plumes ne devraient pas être exposées à une intensité lumineuse supérieure à 50 lux; quant au rayonnement ultraviolet, il ne devrait pas excéder 75 W/µm. La période d’exposition à la lumière des fourrures et des plumes devrait être restreinte et dosée, et faire l’objet de vérifications périodiques. Pour obtenir plus de renseignements sur la mesure de l’intensité lumineuse, consulter Agent de détérioration : Lumière, ultraviolet et infrarouge.

Nettoyage

Objets pour lesquels l'absence de pesticide a été établie

Les spécimens exposés ou mis en réserve à l’air libre (en dehors d’une vitrine ou d’une armoire fermée) doivent être époussetés au moins deux fois l’an. Pour ce faire, une brosse à soies douces peut être utilisée. Le brossage doit toujours se faire dans le sens du poil ou des plumes, et la poussière doit être dirigée vers l’embout d’un aspirateur muni d’un tissu gaze ou d’un grillage de plastique pour éviter la perte de fragments instables. Ne jamais appliquer directement l’embout de l’aspirateur sur le spécimen.

Les fourrures de cervidés exigent des précautions particulières. Les poils de spécimens naturalisés depuis longtemps peuvent être extrêmement fragiles; ils risquent donc de tomber ou de casser sous la pression de la brosse ou de l’embout de l’aspirateur.

Pour obtenir des conseils sur le nettoyage d’objets encrassés ou sur la remise en état d’objets, contacter les spécialistes du Laboratoire des objets de l'ICC.

Objets contaminés par des pesticides ou qui sont présumés l'être

Ne pas entreprendre le nettoyage de ces objets! Pour obtenir de plus amples renseignements sur les problèmes associés à l’élimination des pesticides, contacter l'ICC ou un restaurateur expérimenté.

Fournisseurs

Remarque : Les renseignements qui suivent sont uniquement fournis au lecteur pour l’aider dans ses recherches. Le fait qu’une société ou une entreprise apparaisse dans la présente liste ne constitue pas une approbation de l’Institut canadien de conservation.

Masques filtrants antipoussière, gants en caoutchouc nitrile
Fournisseurs de produits de sécurité, dont :
www.Uline.ca/Cls_30/Gloves (en anglais seulement)
www.WayneSafety.com (en anglais seulement)
www.AcklandsGrainger.com/Safety
Pellicule de polyester (Mylar ou Melinex) ou feuilles de polyéthylène
fournisseurs de produits de plastique ou de matériaux de construction.

Par Tom Stone
Révision effectuée par Carole Dignard, 2015

Première date de publication :
Révision : ,

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Également publié en version anglaise.

© Gouvernement du Canada, Institut canadien de conservation,
ISSN 1928-5272


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