Alicia Barin à l’Association Québécoise de la Production Médiatique (AQPM)

Discours

Saint-Sauveur (Québec)
26 avril 2023

Alicia Barin, vice-présidente de la Radiodiffusion
Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC)

Le discours prononcé fait foi

Bonjour et merci pour cet accueil chaleureux. C’est pour moi un plaisir d’être ici aujourd’hui, et je remercie l’AQPM de m’avoir invitée à m’adresser à vous tous ici présents.

Avant de commencer, j’aimerais reconnaître que nous sommes rassemblés aujourd’hui sur les territoires traditionnels non-cédés du peuple Algonquin. Je tiens à remercier leurs Aînés et à leur rendre hommage.

Tout au long de ma carrière, tant dans l’industrie qu’en tant que régulateur, j’ai toujours eu une profonde admiration pour la familiarité et l’énergie qui imprègnent ce rassemblement annuel des producteurs québécois. Votre présence ici représente l’essence même de la raison pour laquelle je me suis consacrée à cette profession.

Le CRTC réglemente pour que vous puissiez produire des émissions de grande qualité et que les Canadiens et les peuples autochtones, puissent les apprécier. En tant que producteurs canadiens, vous êtes au premier plan de nos efforts visant à établir un cadre réglementaire moderne et flexible. Nous en sommes précisément là - à l’aube d’une nouvelle ère réglementaire dont l’objectif est de soutenir la création d’une programmation canadienne audio et audiovisuelle de qualité et d’assurer son succès continu dans les décennies à venir.

Je sais que plusieurs d’entre vous espérez m’entendre parler du projet de loi C-11 aujourd’hui, mais permettez-moi de commencer par dire qu’en tant que décideur, il m’est impossible de spéculer sur l‘adoption ou le calendrier du projet de loi. Toutefois, j‘ose espérer que le printemps et l’été seront bien remplis pour nous au CRTC, et que nous serons en mesure d’entamer nos processus de consultation.

Je tiens à vous assurer que le CRTC s’efforce d’assurer une transition fluide pour les secteurs de la radiodiffusion et de la production dans leur ensemble. Ainsi, bien que je ne puisse pas m’exprimer sur le fond du projet de loi C-11, je peux vous dire ce que je sais avec certitude : s’il est adopté, de nouveaux principes directeurs nous guideront, et vous pourrez vous préparer en conséquence.

Un vent de changement souffle présentement sur l’environnement de la radiodiffusion et de la production, et nous devrons tous nous faire un nouveau feuillage (pardonnez la métaphore printanière). Nous allons examiner le système de réglementation actuel pour nous assurer qu’il soit toujours pertinent, efficace et capable de résister à l’épreuve du temps, de la technologie et de l’évolution de l’auditoire, qui comprend tous les Canadiens.

Mon message est simple : tenez-vous prêts, car d’une façon ou d’une autre, le changement réglementaire est imminent. Mais surtout, je vous invite à participer activement à cette période effervescente à venir. Nous avons besoin de votre expertise et, plus que jamais, de votre vision afin de façonner l’avenir de la programmation canadienne et de la réglementation qui la supporte.

Qu’est-ce qui, dans le cadre réglementaire du CRTC, fonctionne pour les producteurs?

Qu’est-ce qui ne fonctionne pas? Peut‑il être encore amélioré et, dans l’affirmative, quels de ses aspects doivent l’être?

De quoi avez-vous besoin pour continuer à créer un contenu canadien qui trouve un écho auprès du public canadien et à l’étranger?

Une chose ne changera pas : le rôle du CRTC demeurera de mettre en œuvre l’ensemble des objectifs énoncés dans la Loi sur la radiodiffusion. C’est le cœur-même de notre mandat dans l’intérêt public.

J’ai toujours cru que le Conseil avait un rôle essentiel dans la mise en valeur de notre culture – soit celui de supporter et d’encourager la capacité de notre nation à s’exprimer, à communiquer et à connecter par le biais de mots, d’idées, d’images et de musique. Et c’est là que vous êtes interpelés. En tant que producteurs de contenus audiovisuels, vous jouez le rôle principal dans la réalisation de ces objectifs et dans l’établissement d’un lien fort et durable avec et entre le public canadien.

Advenant l’adoption du projet de loi C-11, la Loi sera modifiée afin d’assurer que les services de diffusion en ligne contribuent au contenu canadien et autochtone. Il vise également à donner aux créateurs canadiens et autochtones la possibilité de raconter leurs histoires, et à mieux refléter la diversité au sein de notre culture canadienne. En particulier, le projet de loi accorde une grande importance à la participation et au reflet des peuples autochtones, ainsi que les groupes en quête d’équité, les communautés de langue officielle en situation minoritaire et les Canadiens s’identifiant comme 2SLGBTQIA+.

Cela aura un impact sur la création et la diffusion de productions canadiennes. Au Québec, aujourd’hui, 16,1 % de la population appartient à une minorité visible, 2,5 % fait partie des Premières Nations, et une grande partie de la population est composée d’immigrants (14,6 %), ou de personnes dont la langue maternelle est autre que l’anglais ou le français (13,9 %).1

Il est essentiel de refléter la diversité de notre société. Le CRTC sera chargé de créer et d’appuyer des opportunités pour de nouveaux producteurs issus de la diversité, et il sera important pour l’industrie et les membres de l’AQPM de refléter cette diversité dans leurs créations à l’écran et hors de l’écran, ainsi qu’au sein des personnes clés dans la production d’émissions audiovisuelles (c’est-à-dire les directeurs, scénaristes, principaux acteurs, etc.). En tant que membres du secteur de la production, seriez-vous en mesure d’aider à garantir que les besoins de la population diversifiée du Canada de même que des peuples autochtones du Canada soient comblés et reflétés dans tous genres de programmation, et que cette programmation qui devrait leur être pertinente le soit effectivement?

Considérez-donc que je vous en lance le défi, ici, aujourd’hui.

Un des grands mythes qui courent au sujet du projet de loi C-11 est celui à l’effet que le CRTC pourrait user d’un pouvoir de censure à l’égard du contenu en ligne, ou s’ingérer en mettant artificiellement de l’avant des contenus précis. Rien ne pourrait être plus loin de la vérité.

En ce qui concerne la découvrabilité, nous voulons que les auditoires soient en mesure de facilement trouver le contenu canadien et autochtone. Plusieurs outils s’offrent aux services de diffusion en ligne afin d’accroître la découvrabilité de notre contenu, et plusieurs stratégies peuvent être utilisées pour atteindre cet objectif.

Comme toujours, nous tiendrons des consultations publiques ouvertes et transparentes, et souhaitons obtenir une grande participation et diversité de points de vue.

Dans l’avenir de la règlementation (et c’est pour bientôt!), le CRTC veillera à ce que le système de radiodiffusion et tous les acteurs qui participent à l’écosystème de radiodiffusion contribuent à : refléter l’ensemble des Canadiens, notre dualité linguistique, et s’assurer que la programmation canadienne et autochtone offerte aux Canadiens et aux peuples autochtones est à la fois de grande qualité et inclusive.

Conclusion

En conclusion, je tiens à souligner que vous, en tant que producteurs, êtes le fer de lance de la transmission de ces principes grâce à vos créations et productions. Et, parmi tous les acteurs de l’environnement de la radiodiffusion, parce que vous êtes les bénéficiaires de la réglementation, vous avez la possibilité d’être à l’avant-garde de la formulation des nouvelles règles qui vous permettront de continuer à raconter nos histoires et à vous engager auprès du public canadien dans ce mégaphone mondial en ligne.

Mais pour cela, il vous faudra faire preuve d’ouverture face au changement, aux nouvelles idées et à la prise de risques. Rassurez-vous, il en ira de même pour le CRTC; nous devrons également démontrer de l’ouverture quant au changement, aux nouvelles idées et à la prise de risques réglementaires. Il faudra s’appuyer sur ce que nous avons réalisé et, surtout, ne pas sous-estimer ces réalisations : ensemble, nous avons créé un secteur de radiodiffusion traditionnelle viable dans un marché (en termes de population) dix fois plus petit que celui de notre voisin du sud.

Et plus impressionnant encore, ensemble, nous avons pu connaître un succès indéniable dans un marché francophone dont la taille est d’un peu moins de 20 % la taille du marché canadien et d’à peine plus de 2 % celle du marché américain. Le défi réglementaire futur consistera donc à utiliser cette rampe de lancement et à poursuivre sur cette base.

Je vous invite tous à jouer un rôle actif dans l’élaboration de l’avenir du secteur de la radiodiffusion et de la production. Partagez vos idées lors de nos consultations futures sur le nouveau cadre règlementaire. Continuez à raconter vos histoires et à refléter la diversité et la richesse de la société québécoise, et continuez à captiver et à inspirer les auditoires, ainsi que le CRTC, pour les générations à venir.

Je vous remercie!

Note de bas de page

[1 ] Source : Statistiques Canada

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