Module III – Œuvres d'art médiatiques : Études de cas

1. David Rokeby : Vu ()

1.1. Introduction

L'étude de cas Vu () de David Rokeby traite de :

  • l'Une introduction à l'artiste et son œuvre;
  • La mise en œuvre des l'application des recommandations pour l'acquisition et la gestion à long terme des collections d'œuvres d'art médiatique.

1.1.1. Contexte de l'acquisition

À l'automne 2007, le Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) a présenté l'exposition e-art : nouvelles technologies et art contemporain – Dix ans d'action de la fondation Daniel Langlois. Note en bas de page 1 La tenue de cette exposition d'art médiatique a été une expérience innovatrice et concrète d'apprentissage pour le MBAM. La fin de l'exposition coïncidait avec le début du processus d'acquisition par le MBAM de Vu de David Rokeby—une œuvre numérique figurant dans l'exposition.

1.1.2. David Rokeby

David Rokeby réside à Toronto, Ontario. Né en 1960 à Tillsonburg, Ontario, Rokeby a étudié l'art expérimental à l'Ontario College of Art and Design. Depuis les années 1980, il crée des installations sonores et vidéo interactives et travaille avec des ordinateurs et des caméras vidéo. Ses œuvres plongent le public de façon physique et conceptuelle dans un dialogue avec la technologie. Note en bas de page 2 Certaines œuvres de Rokeby ont été exposées dans le monde entier et lui ont valu plusieurs prix en art médiatique, interactif et technologique.

1.1.3. Vu ()

Image couleur de « Vu » par David Rokeby
David Rokeby
Vu,
Vue de l'installation de l'exposition
Ordinateur, 2 projecteurs, images numériques et logiciel créé par l'artiste, 2 murs adjacents avec un angle central entre 190 et 220°
Les Vases communicants - e-art : nouvelles technologies et art contemporain – Dix ans d'action de la fondation Daniel Langlois
Pavilion Jean-Noël Desmarais, Musée des beaux-arts de Montréal

Photo  MBAM, Christine Guest

David Rokeby, Vu () à l'exposition au Musée des beaux-arts de Montréal Les Vases communicants - e-art : nouvelles technologies et art contemporain

Durée 38 sec.

Vidéo – David Rokeby, Vu (2002), à l'exposition au Musée des beaux-arts de Montréal Les Vases communicants - e-art : nouvelles technologies et art contemporain – Dix ans d'action de la fondation Daniel Langlois (2007).

Vu a été conçue pour le pavillon canadien de la Biennale d'architecture de Venise en 2002. L'œuvre examine la perception visuelle et le passage du temps en cartographiant les mouvements des gens et des pigeons dans la Piazza San Marco, Venise, Italie. L'installation cinématique consiste en quatre projections vidéo présentées à l'horizontale sur deux murs formant un angle dont les images renversées reflètent celles du mur voisin.

Vu est une œuvre numérique qui dépend beaucoup de son programme informatique. Le logiciel fait en sorte que chacune des quatre projections présente des variations des mêmes séquences en temps réel filmées à la Piazza. Vu a été produite en trois éditions.

Dans l'extrait vidéo suivant, David Rokeby explique la fonction des projections de Vu (2002) et la relation entre elles Note en bas de page 3 (disponible en anglais seulement).

David Rokeby, Vu () à l'exposition au Musée des beaux-arts de Montréal Les Vases communicants - e-art : nouvelles technologies et art contemporain

Durée 1:46

Transcript

Transcription

David Rokeby explique la fonction des projections de Vu () et la relation entre elles

Au départ, « Seen » (Vu) a été commandé sous le titre de « Watch » (Regarde). Le conservateur m'a demandé de présenter « Watch » à la Biennale de l'architecture de Venise, et j'ai eu envie d'aller plus loin. Les limites extérieures sont essentiellement « Watch ». C'est un métrage source, ici, la place Saint-Marc à Venise. On extrait tous les objets immobiles pour ne laisser que ce qui est en mouvement, soit essentiellement les personnes et les pigeons, après quoi on trace la trajectoire de chaque chose dans l'espace. Ainsi, quand les objets sont au plus sombre, c'est leur situation présente et il y a un fondu vers le lointain, dans le temps, de sorte que vous voyez la trajectoire et la direction du mouvement de chaque chose à la place Saint-Marc. Les petites choses que vous voyez ici sont des pigeons et cette configuration là-bas est une grande bataille dont l'enjeu est le maïs des touristes. Et ensuite, toujours à partir de cette image, mais en la bouclant sur elle-même, nous obtenons un genre d'étude instantanée à mouvements variables de tout ce qui se passe sur la place Saint-Marc, chaque personne devenant une sorte de procession en soi, faisant peut-être ainsi écho à l'histoire militaire et religieuse de cette place. Et finalement, nous avons le lointain, l'aspect immobilité, qui élimine tout ce qui bouge pour ne laisser voir que ce qui est fixe dans l'image. De sorte que le premier et le dernier sont des éléments de « Watch », et les éléments du milieu constituent de nouvelles tentatives de visualiser des aspects du temps en mouvement. À un certain niveau, je passe actuellement beaucoup de temps dans ma vie à tenter ainsi d'imaginer le mouvement à travers le temps, et il y a eu un bref instant, toujours par la fenêtre de mon studio à Spedina, où j'ai réellement vu le passé et le futur des automobiles qui passaient devant moi sur la rue, et d'une certaine manière, une œuvre comme celle-ci constitue une tentative de rendre cette expérience tangible et visible.

1.2. Application des recommandations

Avant d'acquérir Vu de Rokeby, le Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) a suivi les La mise en œuvre des Recommandations pour l'acquisition et la gestion à long terme des collections d'œuvres d'art médiatique :

Étape 1 : Assemblage et analyse de la documentation concernant Vu

Lors de l'acquisition de Vu, le MBAM a commencé à assembler la documentation nécessaire à inclure dans le dossier d'archive de l'œuvre. Il restait toutefois de la recherche et de l'analyse à effectuer par rapport à l'historique d'exposition de Vu, à la description technologique, et à l'entente contractuelle avec le MBAM.

Historique d'exposition

Vu a figuré dans quatre expositions avant sa présentation dans le cadre d'e-art : nouvelles technologies et art contemporain – Dix ans d'action de la fondation Daniel Langlois (20 septembre – 9 décembre 2007) et son acquisition ultérieure par le MBAM. La source des séquences utilisées, les dimensions et la résolution des projections, et la mise en vue pour le public diffèrent dans chaque installation. En passant en revue les installations qui suivent, le MBAM a pu établir les types de modèles de présentation qui ont existé pour Vu.

  • Pavillon canadien de la Biennale d'architecture de Venise, Venise, Italie
  • Commissaires : Michael Awad et John Knechtel
Vue de l'installation de « Vu » par David Rokeby
David Rokeby
Vu,
Vue de l'installation de l'exposition
Next Memory City / Toronto: Venice
Biennale d'architecture de Venise, Italie

Courtoisie de : David Rokeby

Commandée par la série Alphabet City Note en bas de page 4 et l'InterAccess Electronic Media Arts Centre, Note en bas de page 5 Vu a été exposée pour la première fois au pavillon canadien de la Biennale d'architecture de Venise en 2002. Un mur formant un angle d'environ 60º a été créé pour présenter les projections à l'horizontale. Les dimensions des projections étaient limitées par la largeur du pavillon. Les visiteurs abordaient latéralement Vu, exposée à côté de l'œuvre sonore d'Eve Egoyan, Channel, et de la photographie grand format Chinatown de Michael Awad.

Vu a été créée expressément pour la Biennale de Venise et cette installation a posé les bases pour toutes les présentations futures de l'œuvre. Rokeby décrit ici l'installation initiale de Vu :

Dans le pavillon, il semblait évident que présenter les quatre projections côte à côte serait le scénario le plus efficace. Il semblait aussi évident que les projections devaient recouvrir le mur interne du pavillon. La meilleure solution semblait être de créer un mur formant un angle au milieu et de projeter deux paires de projections, une sur chacun des murs, qui se rencontreraient dans le coin en angle. L'œuvre a évolué jusqu'au jour de l'inauguration, plusieurs variations des deux panneaux centraux demeurant des options jusqu'à la dernière minute. L'œuvre a en réalité été finie lorsqu'il ne m'a plus été possible d'y apporter d'autres ajustements. […] Le point d'entrée des gens à Venise les empêchait au début de voir le deuxième jeu d'images. C'était plutôt efficace, car cela obligeait les gens à se déplacer pour découvrir l'œuvre… à cet égard, sa présentation faisait écho à mon intérêt pour la manière dont les gens occupent l'espace, qui est la source d'inspiration de l'œuvre., Note en bas de page 6

Rokeby a utilisé trois différents angles de la Piazza San Marco dans l'installation de Venise. Dans des installations ultérieures, le contenu de Vu variait et était axé sur un extrait vidéo d'une seule source pris du même angle. Note en bas de page 7

  • David Rokeby, Oakville Galleries, Oakville, Ontario, Canada
  • Commissaire : Su Ditta

En raison de la grandeur de l'espace d'installation, l'ampleur de Vu aux Oakville Galleries était moins grande que celle de l'installation présentée à Venise. Par ailleurs, la résolution de Vu était inférieure à celle que préfère Rokeby, soit 1280 pixels verticalement et horizontalement.

  • David Rokeby: Silicon Remembers Carbon, Foundation for Art & Creative Technology (FACT), Liverpool, Angleterre, Royaume-Uni
  • Commissaire : Marta Rupérez
Vue de l'installation de « Vu » par David Rokeby dans Liverpool
David Rokeby
Vu,
Vue de l'installation de l'exposition
David Rokeby: Silicon Remembers Carbon
Foundation for Art & Creative Technology, Liverpool, Angleterre, Royaume –Uni

Courtoisie de David Rokeby
  • David Rokeby: Silicon Remembers Carbon, The Centre for Contemporary Arts (CCA), Glasgow, Écosse, Royaume-Uni
  • Commissaire : Peter Ride

Cette exposition itinérante présentait Vu dans un format plus grand que l'installation présentée à Venise. De plus, sa résolution était inférieure aux 1280 pixels entiers, tel que déjà expérimenté aux Oakville Galleries.

Les visiteurs abordaient l'œuvre de face à Liverpool, ce qui permettait de voir les quatre projections en même temps. À Glasgow, la présentation de Vu rappelait l'installation de Venise, où les visiteurs abordaient l'œuvre latéralement. Note en bas de page 8

Description technologique

Dans toutes les installations précédentes, le fonctionnement de Vu reposait sur les composants suivants :

  • les séquences vidéo de source numérique de Rokeby;
  • le logiciel personnalisé de Rokeby;
  • 2 (ou 4) projecteurs à traitement numérique de la lumière (DLP);
  • 1 ordinateur Intel MacPro de 2,66 GHz ;
  • 2 câbles pour carte vidéographique (carte VGA). Note en bas de page 9

Selon l'espace d'exposition, des composantes supplémentaires pourraient être nécessaires.

Rokeby a indiqué qu'en plus de la version informatisée qui précède, il est possible d'employer la version sur disque optique de l'œuvre. Concrètement, Vu existe donc de deux façons :

Version informatisée

La version informatisée est le mode originel de fonctionnement de Vu. Le logiciel personnalisé de Rokeby fait en sorte que chaque projection présente une variation des mêmes séquences en temps réel. Les séquences en boucle durent approximativement 6 minutes et demie.

Le logiciel nécessite des modifications usuelles lors de chaque installation. Rokeby, créateur du logiciel, effectue habituellement ces réglages. Or, si le MBAM acquiert la version informatisée, il lui reviendra de réaliser ces réglages complexes.

Version sur disque optique

Vu a toujours été exposée en version informatisée. Pendant le processus d'acquisition, Rokeby a recommandé que le MBAM acquière une version sur disque Blu-ray. Les disques Blu-ray, une forme plus récente du DVD (vidéodisque numérique), peuvent stocker plus de données et lire des vidéos à haute définition. Le disque Blu-ray stockerait les séquences préenregistrées de la version informatisée, pour faciliter leur présentation, ce qui simplifierait aussi la gestion à long terme de Vu par le MBAM. Note en bas de page 10

Finalement, le Musée a décidé d'acquérir les deux versions de Vu - version informatisée et version Blu-ray - ce qui assurera de la flexibilité dans la manière de conserver l'œuvre d'art à long terme.

Entente contractuelle entre l'artiste et le Musée

Au moment de l'acquisition, il était crucial que le MBAM précise certaines questions d'ordre juridique avec Rokeby. Les préoccupations fondamentales ont été énoncées concrètement dans une entente écrite entre Rokeby, le MBAM et la Pari Nadimi Gallery (représentant commercial de Rokeby), dont certaines :

  • le droit d'exposer l'œuvre;
  • la reproduction de l'œuvre (photographies, médias imprimés et électroniques, Internet, etc.);
  • les éditions de l'œuvre;
  • la conservation et la disposition de l'œuvre. Note en bas de page 11

Étape 2 : Installation de Vu avec Rokeby et le personnel du Musée

  • e-art : nouvelles technologies et art contemporain – Dix ans d'action de la fondation Daniel Langlois
  • Musée des beaux-arts de Montréal, Montréal, Québec, Canada
  • Commissaire : Jean Gagnon
Vue de l'installation de « Vu » par David Rokeby dans 2007
David Rokeby
Vu,
Vue de l'installation de l'exposition
Les Vases communicants - e-art : nouvelles technologies et art contemporain – Dix ans d'action de la fondation Daniel Langlois
Pavilion Jean-Noël Desmarais, Musée des beaux-arts de Montréal

Photo  MBAM, Christine Guest

Avant son acquisition, Vu a figuré dans e-art : nouvelles technologies et art contemporain – Dix ans d'action de la fondation Daniel Langlois, exposition tenue au Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM). À cette occasion, les techniciens en audiovisuel du MBAM ont pu collaborer avec Rokeby et documenter le processus de l'installation.

Présentée seule dans la salle, l'installation au MBAM différait de plusieurs façons de celle de Venise :

  • les dimensions des projections étaient plus larges;
  • la résolution des images était moindre;
  • les visiteurs abordaient l'œuvre de face;
  • les murs formaient un angle d'environ 120º.

À propos de l'installation e-art, Rokeby a dit: « À mon avis, la présentation au MBAM est probablement la plus efficace de toutes jusqu'à ce jour, pour ce qui est de l'obscurité de la salle, des dimensions des projections et de l'échelle des projections par rapport à la grandeur de la salle. » Note en bas de page 12

Difficultés lors de l'installation

Durant l'installation de Vu, les techniciens en audiovisuel ont rencontré certaines difficultés :

Largeur requise de projection

La largeur complète de projection devrait mesurer dix mètres. En raison de la petite dimension de la salle, de la profondeur du lieu d'exposition d'e-art et de la lentille du projecteur, la largeur complète de projection s'en trouvait réduite. Pour atteindre la largeur souhaitée, il aurait fallu installer chaque projecteur à l'extérieur des paramètres de la salle.

Diagramme de l'installation de Vu dans la salle d'exposition e-art.
Plan de « Vu » dans la salle d'exposition e-art
Diagramme de l'installation de Vu dans la salle d'exposition e-art

Pour résoudre cette difficulté, les techniciens du MBAM ont installé deux miroirs plats de grande qualité (30,5 x 40,5 pouces) directement derrière chaque projecteur dans l'espace d'exposition. Note en bas de page 13 Chaque image du projecteur était ainsi reflétée sur le miroir, puis sur le mur de projection à la dimension désirée.

Projecteur et installation miroir de Seen dans l'exposition e-art.
Projecteur et installation miroir dans l'exposition e-art
Projecteur et installation miroir de Seen dans l'exposition e-art

La flexibilité et le poids des miroirs suspendus aux murs causaient des distorsions dans chaque projection, obligeant Rokeby à ajuster son logiciel plusieurs fois. Rokeby a décrit cette difficulté d'installation comme suit : « C'était un dispositif nécessaire pour obtenir la dimension d'image dans l'espace que nous avions. Mais c'était peut-être un peu déconcentrant. Qui plus est, c'était difficile à installer et cela prenait du temps à stabiliser. Un scénario de projection directe avec une projection en angle plus large serait plus simple. » Note en bas de page 14

Redémarrer l'ordinateur

L'ordinateur de Vu devait être redémarré chaque matin pour que le programme informatique de l'œuvre fonctionne comme il se doit.

Étape 3 : Préparation d'un questionnaire pour Rokeby

L'information rassemblée lors d'étapes antérieures a fait prendre conscience au Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) qu'il fallait constituer un dossier à partir des connaissances de Rokeby au sujet de Vu. À cette fin, le MBAM a préparé un questionnaire afin de répondre aux questions spécifiques liées aux différents services du Musée. Le questionnaire, soumis à l'artiste lors de l'acquisition, explore le concept de Vu, sa présentation, sa conservation et des questions de propriété intellectuelle.

Étape 4 : Développement des stratégies de conservation

Une fois le questionnaire rempli par Rokeby, les divers départements du Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) ont travaillé ensemble pour regrouper les meilleures stratégies de conservation en vue de la gestion à long terme de Vu. Les points suivants ont été soulevés :

Authenticité et intégrité

Pour Rokeby, la matérialité de Vu ne fait pas partie intégrante de l'œuvre. Même si sa fonctionnalité dépend de ses composants techniques, aux yeux de Rokeby ils n'ont aucune valeur pour ce qui est de l'esthétique ou de l'expérience des visiteurs. Selon lui,

« Le mécanisme d'exécution de la vidéo n'a aucune importance. Que l'œuvre soit présentée en temps réel par ordinateur ou par une vidéo statique est dépourvu de pertinence. Le système de projection devrait idéalement pouvoir présenter la vidéo en résolution intégrale. » Note en bas de page 15

Pour Rokeby, l'authenticité et l'intégrité de l'œuvre réside dans son expérience spatiale, c'est-à-dire dans la dimension et la résolution de la projection vidéo. Par conséquent, l'interchangeabilité des composants techniques permettra au MBAM de prolonger la durée de vie de l'œuvre.

Contexte idéal d'exposition

En se fondant sur les commentaires de Rokeby concernant les installations antérieures de Vu, le MBAM a pu préciser les détails d'une présentation satisfaisante. Par ailleurs, Rokeby définit l'installation idéale de Vu comme suit :

L'œuvre est silencieuse et devrait être présentée dans un espace raisonnablement paisible. La largeur idéale de l'ensemble complet des projections est d'environ 10 mètres. Les murs devraient être blancs derrière les projecteurs et d'un gris plus foncé ailleurs (de 60 à 90 % noir). Les matériaux de construction sont négligeables. L'angle au centre de la projection devrait être entre 190 et 220 °, mais peut être ajusté quelque peu selon l'espace. La distance entre la projection et le mur qui lui fait face doit être d'au moins cinq mètres et elle doit permettre une distance de projection suffisante pour atteindre la dimension désirée d'image. L'éclairage additionnel dans l'espace doit être limité autant que possible. Prévoir des bancs pour le public est une bonne idée, mais c'est facultatif. Note en bas de page 16
Expérience optimale du public

Rokeby décrit comme suit l'expérience qu'il désire pour le public de Vu :

Cette œuvre est d'abord ressentie dans le cortex visuel du spectateur. Au départ, vous n'êtes pas certain de ce que vous voyez, mais les diverses images engagent différentes parties de votre perception de manière assez directe. En général, les gens comprennent lentement ce qu'ils voient, et commencent à comparer les canaux et à déchiffrer le tout de cette façon. Dans un scénario idéal, le mur formant un angle et le plan de l'espace encouragent le spectateur à faire le tour du lieu pour découvrir l'œuvre. Cette dernière devrait être plutôt impressionnante… son ampleur y contribue. Chaque panneau devrait être assez large pour dominer votre champ de vision si vous êtes debout au milieu de la salle. Vous devriez pouvoir vous immerger dans chaque panneau. Note en bas de page 17
Problèmes potentiels de conservation

Aux fins de la conservation à long terme, Rokeby recommande que le MBAM acquière la version sur disque optique (Blu-ray) plutôt que la version informatisée. Rokeby explique les problèmes potentiels de chaque version :

La version informatisée est exposée à une défectuosité de l'ordinateur et à l'[obsolescence] éventuelle de l'ordinateur. La version prétraitée sur Blu-ray et DVD-R est exposée à des problèmes de détérioration du support optique, qui peuvent être traités comme ceux qui touchent toute œuvre vidéo. Le lecteur à circuits intégrés serait l'option qui causerait le moins de problèmes. La mémoire flash pourrait finir par se dégrader, mais les fichiers de format mpeg-2 du DVD-R pourront être rechargés sur une mémoire flash si la mémoire d'origine est défectueuse. Note en bas de page 18

Finalement, le musée a décidé d'acquérir les deux versions de Vu - la version informatisée ainsi que la version sur disque optique (Blu-ray). Cela offrira plus de flexibilité quant aux moyens de conserver l'œuvre à long terme.

Étape 5 : Classement de la documentation dans la base de données et le dossier d'archives de l'œuvre

Dans l'extrait vidéo suivant, David Rokeby commente le manque de documentation qu'il a accumulé au fil des ans au sujet de ses œuvres (disponible en anglais seulement). Note en bas de page 19

David Rokeby commente le manque de documentation qu'il a accumulé au fil des ans au sujet de ses œuvres (en anglais seulement)

Durée 56 sec.

Transcript

Transcription

David Rokeby commente le manque de documentation qu'il a accumulé au fil des ans au sujet de ses œuvres

Habituellement, je ne prends pas beaucoup de notes. Je m'en souviens… je tente d'enregistrer les expositions afin de pouvoir regarder ce que j'ai fait et je conserve des copies du code et de la version modifiée du programme. Pour beaucoup d'œuvres, comme pour une œuvre interactive, il ne s'agit que d'en modifier le seuil pour, par exemple, la rendre plus ou moins sensible. Puis, je conserve des copies de tout cela. Au départ, c'était au cas où il surviendrait quelque chose pendant l'exposition, mais c'est aussi pour avoir des éléments auxquels je peux revenir si je me retrouve dans une situation semblable, avec un dispositif semblable; j'ai certains exemples de la façon dont j'ai déjà résolu cette situation. Oui, je n'ai pas… la plupart des notes se trouvent ici (indique sa tête)… elles ne sont pas… je n'ai pas un bon archivage de l'exposition numéro X, des changements observés…

Il est donc crucial que le Service des archives du Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) conserve des copies papier de toute documentation pertinente se rapportant à Vu. Rokeby recommande au MBAM d'assembler de la documentation photographique et vidéo ainsi que des schémas de montage de présentations antérieures de l'œuvre à titre de référence. Note en bas de page 20 Le catalogueur, l'archiviste et le conservateur du MBAM doivent organiser et consigner la documentation assemblée dans la base de données de gestion des collections internes du MBAM, Mimsy XG. Cette base de données est utilisée pour toutes les œuvres de la collection du MBAM, dont les œuvres d'art médiatique.

Les études de cas menées par le comité de recherche de DOCAM sur la structure de catalogage ont permis au Service des archives du MBAM de procéder à un examen de sa base de données Mimsy XG en 2008. Le catalogueur du MBAM a analysé comment intégrer certains types d'information concernant les collections du MBAM, en particulier d'art médiatique, dans des catégories existantes. Les renseignements suivants ont été ajoutés par la suite à la base de données.

  • Description de l'œuvre : cite des publications qui comportent des interprétations de l'œuvre;
  • Description technique de l'œuvre : permet de comprendre ses modes de fonctionnement;
  • Composants de l'œuvre : décrit l'évolution et la détérioration de la condition de l'œuvre matérielle depuis son acquisition jusqu'à son état actuel;
  • Historique d'exposition : comprend de l'information, des photographies et des diagrammes de différents contextes d'exposition de l'œuvre;
  • Instructions pour l'installation : expose en détail les diverses installations de l'œuvre;
  • Historique de conservation : comprend de l'information et des rapports sur l'état de conservation de l'œuvre (notamment ses modifications) et des recommandations pour l'entretien et la sécurité de l'équipement;
  • Spécifications pour l'entreposage : décrit les conditions à observer pour l'entreposage et l'expédition de l'œuvre;
  • Entrevue avec l'artiste : porte sur le concept, la présentation, la conservation et des questions de propriété intellectuelle de l'œuvre.

Étape 6. Documentation des installations futures de Vu

Afin d'assurer, de conserver et de re-créer une expérience optimale de Vu pour ses visiteurs, le Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) reconnaît l'importance de documenter de futures expositions de l'œuvre. Outre des diagrammes, photographies et vidéos d'installation, cette documentation devrait comprendre des entrevues enregistrées avec l'artiste, du personnel et des visiteurs du Musée. Ces documents seraient ensuite ajoutés à la base de données Mimsy XG du MBAM.

Les musées commencent à consigner l'expérience du public comme forme complémentaire de documentation. Les entrevues avec des visiteurs révèlent l'expérience subjective de l'œuvre. Dans le cadre de sa résidence de recherche à la fondation Daniel Langlois, Note en bas de page 21 Lizzie Muller a documenté l'expérience de visiteurs en regard d'œuvres d'art médiatique de Rokeby, n-cha(n)t (2001), et Le donneur de noms (1991-) durant l'exposition e-art : nouvelles technologies et art contemporain – Dix ans d'action de la fondation Daniel Langlois (automne 2007).

Malheureusement, Vu ne faisait pas partie de cette recherche. Néanmoins, les résultats de la recherche de Muller soulignent l'importance de consigner l'expérience des visiteurs. Leurs réactions seraient ensuite intégrées au dossier d'archive de l'œuvre.

2. Daniel Dion (en collaboration avec Su Schnee) : Le minute de vérité ()

Au moyen de Le minute de vérité (1991) de Daniel Dion, cette étude de cas traite de :

  • l'artiste et son œuvre;
  • la mise en œuvre des La mise en œuvre desapplication des recommandations pour l'acquisition et la gestion à long terme des collections d'œuvres d'art médiatique.

2.1. Introduction

2.1.1. Contexte d'acquisition et de gestion à long terme des collections

Afin d'enrichir sa collection d'art vidéo canadien, le Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) a acquis Le minute de vérité de Daniel Dion en 1999. Depuis son acquisition, Le minute de vérité a figuré dans deux expositions du MBAM présentant sa collection d'art contemporain.

2.1.2. Daniel Dion et Su Schnee

Né en 1958 à Montréal, Québec, Daniel Dion a étudié en communications à l'Université du Québec à Montréal. Travaillant avec la photographie, la vidéo, la performance et l'installation, Dion axe sa pratique artistique sur des paradigmes théoriques, esthétiques et spirituels qui marient art et communications. Dion a exposé ses œuvres au Canada, en Europe et en Asie et a pris part à des échanges artistiques interculturels avec l'Inde, Cuba et le Japon. Note en bas de page 22

L'artiste Su Schnee a collaboré avec Dion pour créer Le minute de vérité. Née à Toronto, Ontario, en 1959, elle a étudié au Capilano College of Art and Design, North Vancouver, et à la Vancouver School of Art (maintenant appelée Emily Carr University of Art + Design). Note en bas de page 23 Les œuvres de Schnee combinent différents médiums artistiques, tels que la peinture et le dessin. Elle a exposé ses œuvres au Canada et en Europe. En 1982, Dion et Schnee ont cofondé OBORO, un centre d'artiste autogéré dédié à la présentation et la production de l'art, des pratiques contemporaines et des nouveaux médias.

2.1.3. Le minute de vérité (1991)

La minute de vérité (1991)

Durée 1:40

Transcript

Documentation vidéo: Daniel Dion, Le minute de vérité ()

Le minute de vérité est une installation composée d'un lecteur vidéo portable fixé à un mur qui projette une vidéo en boucle de 100 secondes. Le montage vidéo comprend des images d'eau de mer, d'arbres ondoyants, d'un feu, de boules chinoises de méditation roulant dans le creux d'une main et d'un sentier en forêt.

Vue de l'installation de « La minute de vérité »
Daniel Dion
Le minute de vérité

Baladeur vidéo SONY (32 cm x 13 cm x 7 cm), pellicule vidéo sur une cassette vidéo 8 mm, batteries rechargeables, durée : 100 secondes
Musée des beaux-arts de Montréal
Achat, legs Harold Lawson, Marjorie Caverhill, Harry W. Thorpe et Mona Prentice Bequests
Photo MBAM, Brian Merrett

Transcription

Le composant audio émet des sons produits par un synthétiseur qui retentissent en crescendo. Durant la vidéo, une voix répète, en anglais, douze fois le mantra qui suit : « Soixante-dix-sept milliards d'humains ont vécu sur cette planète ». La séquence vidéo se termine comme suit : « Quatre milliards y vivent maintenant. »

Cette œuvre poétique est une réflexion sur l'immensité de l'humanité. Elle propose une réflexion sur les effets de la mondialisation et de l'ère électronique. Le mantra répétitif met de l'avant tant l'état actuel de la planète que son passé.

Dans l'extrait vidéo suivant, Daniel Dion explique son processus artistique et sa méthodologie pour Le minute de vérité. Note en bas de page 24

Daniel Dion explique son processus artistique et sa méthodologie pour La minute de vérité

Durée 2:23

Transcript

Transcription

Daniel Dion explique son processus artistique et sa méthodologie pour La minute de vérité.

PRIM [Centre d'arts médiatiques] avait lancé un appel aux gens à produire une minute, de création d'une minute, c'était ouvert. Alors, je me suis laissé tenter par l'expérience et puis j'essayais de faire quelque chose de différent de ma pratique en vidéo. Ma pratique en vidéo a toujours été comme à la limite de l'installation, de la performance. J'ai toujours essayé de travailler la matière, pas simplement comme, de façon narrative, mais de façon que je puisse construire avec ça. C'est presque une architecture, d'une certaine façon. Ça, c'est un aspect. L'autre aspect, c'était surtout des recherches théoriques. Je m'intéressais à tout l'aspect bouddhiste, il y a peut-être une vingtaine d'années. Je m'y intéresse encore là, c'est pas que je m'y intéressais et puis que je ne m'y intéresse plus, mais toute l'idée de transformation d'idées…pas l'idée de vie après la mort, mais de continuité…l'idée de cycle, l'idée de répétition et tout ça, et puis je documentais, à la télévision, souvent des trucs qui passaient. Je travaillais sur un autre projet en parallèle avec un ami, sur lequel on faisait du repiquage, donc c'était avant un peu le « scratch vidéo », et tout ça. On faisait du repiquage de la télévision puis, il y avait eu cette phrase dans un documentaire qui m'avait beaucoup marquée, c'était « 77 millions humans have lived on this planet, 6 billion live here now ». Et puis là, ça m'était resté en tête, l'espèce d'accumulation là, le passage du temps et tout ça. Alors l'idée est venue, je me suis dit : « Tiens, ça ferait comme une espèce de belle minute, l'idée du cycle, il y a l'idée de la minute qui est une horloge, tu sais, c'est le cycle d'une montre, d'une horloge, le temps qui passe. L'idée m'est venue et puis j'ai produit ça. À partir de séquences qui, elles, ne sont pas repiquées de la télévision, mais plutôt des séquences que j'ai tournées. La plupart d'entre elles étant des séquences de déambulation. Donc depuis, là aussi j'ai une banque, des archives, mon dieu, qui doit dater des années, du début des années 80, dans mes nombreux voyages que j'ai fait un peu partout à travers le monde. Donc, j'accumulais, soit en train, soit en marchant, des heures et des heures de documents où l'on ne voit rien, sinon que le paysage ou la route ou le chemin ou le ciel ou la bordure de la route qui défile. Alors, cette idée-là, l'idée de répétition, l'idée du temps qui passe, m'a amené à construire ça.

2.2. Application des recommandations

Pour assurer la conservation à long terme et la documentation de Le minute de vérité, le Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) a suivi les La mise en œuvre des Recommandations pour l'acquisition et la gestion à long terme des collections d'œuvres d'art médiatique.

Étape 1 : Assemblage et analyse de la documentation actuelle concernant Le minute de vérité

Afin d'enrichir sa compréhension de la gestion de Le minute de vérité, le Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) a évalué l'état actuel de sa documentation de l'œuvre. Après analyse, le Musée a constaté des différences entre la description technologique et l'historique d'exposition de Le minute de vérité.

Description technologique

Au moment de l'acquisition de Le minute de vérité, le MBAM a reçu les composants suivants :

  • un baladeur vidéo Watchman Walkman de Sony (modèle GV-300);
  • un adaptateur Sony (modèle AC-V50);
  • une séquence en boucle de 2 heures sur format vidéo 8 mm;
  • une version de qualité professionnelle de la séquence vidéo sur Betacam SP (source maîtresse de l'œuvre);
  • câblage électrique. Note en bas de page 25
Historique d'exposition

Le minute de vérité a d'abord été présentée lors d'une exposition de groupe en 1992 à la Galerie Brenda Wallace à Montréal, Québec, Canada. Installée dans une petite alcôve, l'œuvre et sa séquence vidéo ont été présentées sur un baladeur vidéo Sony utilisant une cassette 8  mm. Celui-ci était alimenté par piles. Après avoir présenté la séquence en boucle pendant 56 minutes, la cassette devait être rembobinée et remise en marche par un préposé de la galerie. Note en bas de page 26

Avant son acquisition par le MBAM, Le minute de vérité a figuré dans plusieurs expositions, notamment :

  • Terra Incognita, Expression (Saint Hyacinthe, Québec, 1993);
  • Cent jours d'art contemporain de Montréal, CIAC (Centre international d'art contemporain (Montréal, Québec, 1994);
  • Videofiesta, Expoarte Guadalajara (Guadalajara, Mexique, 1996);
  • Convergence 96 (Mysore, Inde, 1996). Note en bas de page 27

Le minute de vérité a seulement été exposée sur le baladeur vidéo Sony pour une courte période de temps en raison d'un bris d'équipement. Conséquemment, le MBAM a dû recourir à une façon différente de présenter les séquences vidéo. Utilisant un modèle de téléviseur portatif Casio, la vidéo a été présentée au moyen d'un lecteur DVD externe dans un hall d'exposition à côté d'autres œuvres contemporaines. Le MBAM a présenté Le minute de vérité lors des deux expositions suivantes :

  • Projections lumineuses de la collection d'art contemporain du Musées des beaux-arts de Montréal (2002);
  • Repères : art canadien contemporain, dix ans d'acquisition (2004).
Vue de l'installation de « La minute de vérité »
Daniel Dion
Le minute de vérité

Vue de l'installation (avec le nouveau modèle de téléviseur portatif Casio) dans l'exposition
Repères : Art canadien contemporain. Dix ans d'acquisitions.
Musée des beaux-arts de Montréal
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Photo MBAM, Brian Merrett
Évolution technologique

Baladeur vidéo : de Sony à Casio

Ces photographies montrent Le minute de vérité dans sa boîte de rangement avant et après le changement d'équipement :

Gros plan de la version originale d'équipement Sony
Daniel Dion, Le minute de vérité en entreposage, version originale, équipement Sony.
Gros plan de la version mise à jour d'équipement Casio
Daniel Dion, Le minute de vérité en entreposage, version mise à jour, équipement Casio.

Comme Le minute de vérité a été exposée plusieurs fois, le baladeur vidéo Sony utilisé pour afficher la séquence vidéo a commencé à se dérégler. Plus particulièrement, l'écran ACL ne restait pas allumé et s'éteignait après quelques secondes seulement.

Dès 2001, le conservateur de l'art contemporain, du MBAM, Stéphane Aquin, a travaillé de concert avec Dion pour trouver une solution qui permettrait de réexposer Le minute de vérité. Deux solutions ont été proposées :

  1. soit réparer le baladeur vidéo Sony ou
  2. le remplacer.

Dion espérait avant tout que le baladeur vidéo Sony puisse être réparé — afin de conserver l'apparence de l'époque de la conception de l'œuvre en 1991, faisant ainsi de l'historicité technologique une valeur primordiale de l'œuvre. La technologie du modèle Sony permettait aux utilisateurs de regarder la vidéo alors qu'ils se déplaçaient. Les utilisateurs devaient faire leurs propres cassettes, le matériel préenregistré n'existant pas à l'époque pour le format vidéo 8  mm.

Après inspection, le baladeur vidéo Sony a été jugé inutilisable. La réparation n'étant plus une option, Dion a recommandé un plus petit modèle de téléviseur portatif Casio—une version plus récente et modifiée du baladeur vidéo. En 2002, le Casio a été acheté et a remplacé le modèle Sony pour toutes les installations futures. Note en bas de page 28

À la différence du baladeur vidéo original Sony, le modèle Casio présente les vidéos au moyen d'un lecteur VHS (système vidéo maison) ou DVD à connexion externe dissimulé derrière un mur. Il ne comprend donc pas de lecteur de cassettes 8 mm. En conséquence, il a fallu que le Service de l'audiovisuel du MBAM fasse migrer la séquence vidéo du format vidéo 8  mm au DVD.

Source vidéo : du format vidéo 8  mm au DVD

Pour suivre l'évolution des technologies, le Service de conservation du MBAM a demandé en 2000 au Service de l'audiovisuel de faire migrer la version vidéo 8  mm de Le minute de vérité au format DVD.

Le MBAM possède actuellement une copie archive et exposition de Le minute de vérité en format DVD en plus de la copie originelle en 8  mm et de la bande de première génération Betacam SP qu'il a reçues de Dion au moment de l'acquisition. La migration a été effectuée à partir de la bande de première génération Betacam SP.

Entreposage

Pour conserver le contexte technologique de Le minute de vérité, le baladeur vidéo Sony a été entreposé.

Étape 2 : Installation de  Le minute de vérité avec le personnel du Musée Guide pour l'installation

Instructions pour l'installation

Compte tenu des connaissances et de l'expérience en audiovisuel nécessaires pour le montage d'œuvres d'art médiatique, un guide facilite les installations futures. Le MBAM a préparé le guide qui suit pour le modèle Casio :

  • retirer les composants de l'œuvre de son rangement;
  • attacher le dispositif de fixation en plexiglas au mur en insérant deux vis dans les trous prépercés à l'arrière du support. Note : S'assurer que le centre de l'écran soit à 64 pouces du sol;
  • insérer le modèle Casio dans le support et brancher le câble d'alimentation du transformateur à l'appareil;
  • dissimuler le câble d'alimentation et le câble du signal vidéo/audio à l'arrière du mur le long de la base de l'appareil;
  • brancher les signaux vidéo et sonores d'une source DVD au lecteur vidéo portable Casio externe dissimulée derrière le mur. Brancher le transformateur à une source d'alimentation électronique;
  • selon la salle et sa configuration spatiale, ajuster le niveau sonore sur le modèle Casio pour qu'on l'entende parfaitement à une distance de 20 pouces. Note : il faudra peut-être lever l'appareil de son support pour ce faire;
  • utiliser la fonction lecture ou boucle sur la source DVD pour éliminer la gestion technique de l'œuvre pendant son exposition publique.

L'intensité et le contraste de l'écran du modèle Casio doivent être ajustés à « normal » lorsqu'on regarde directement l'écran. Le volume doit être réglé à bas au début de la séquence vidéo et doit augmenter progressivement. Pour aider les techniciens à accrocher l'œuvre, Dion a marqué d'un morceau de ruban-cache l'écran et les stabilisateurs audio aux niveaux appropriés. Le ruban-cache doit être retiré lorsque l'œuvre est installée.

Étape 3 : Préparation d'un questionnaire pour Dion

L'information rassemblée lors d'étapes antérieures a fait prendre conscience au Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) qu'il fallait constituer un dossier à partir des connaissances de Dion de tous les aspects de l'œuvre. À cette fin, le MBAM a préparé un questionnaire expressément pour Dion et Le minute de vérité, afin de répondre aux questions spécifiques liées aux différents services du Musée. Le questionnaire explore le concept de Le minute de vérité, sa présentation, sa conservation et des questions de propriété intellectuelle. En 2008, le MBAM a eu l'occasion de réaliser une entrevue vidéo avec Dion et d'obtenir des réponses au questionnaire.

Étape 4 : Développement des stratégies de conservation

Après avoir réalisé l'entrevue avec Dion, les divers services du Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) ont travaillé ensemble pour regrouper les meilleures stratégies de conservation en vue de la gestion à long terme de Le minute de vérité. Les points suivants ont été soulevés :

Authenticité et intégrité

Dion estime que l'intégrité de Le minute de vérité réside dans son baladeur vidéo et désire que la séquence vidéo soit vue au moyen de l'équipement qui représente l'époque lors de sa création. Dion veut conserver l'apparence d'origine de Le minute de vérité pour qu'elle fasse référence à la génération analogique. Convertir l'œuvre à la technologie numérique—comme un iPod—n'est pas une option pour l'artiste. Note en bas de page 29

Contexte idéal d'exposition

Comme Le minute de vérité a été exposée de diverses façons, il était important pour le MBAM de déterminer le contexte optimal d'exposition de l'œuvre avec Dion. C'est pourquoi le MBAM a discuté de l'installation de Le minute de vérité avec lui.

L'espace d'exposition pour Le minute de vérité est intime. Dans une salle paisible et faiblement éclairée, le baladeur vidéo est accroché à un mur. Le spectateur entend des sons et une voix à peine audibles. Les images et le son se précisent à mesure que le spectateur s'approche du baladeur vidéo. Lorsque l'œuvre est exposée, un énoncé de Dion l'accompagne :

Le minute de vérité est celle que la race humaine vit depuis des millions d'années; celle qui a lieu tous les jours de notre vie; celle qui nous rend conscients de l'immensité d'où surgit notre conscience. Elle est à la fois poème et canon, un tourbillon qui se rapporte à la virtualité de notre existence : « Soixante-dix-sept milliards d'êtres humains ont vécu sur cette planète, quatre milliards y vivent maintenant. »(1991). Note en bas de page 30

Dans l'extrait vidéo suivant Daniel Dion parle du contexte idéal d'exposition de Le minute de vérité. Note en bas de page 31

Daniel Dion parle du contexte idéal d'exposition de La minute de vérité

Durée 1:16

Transcript

Transcription

Daniel Dion parle du contexte idéal d'exposition de La minute de vérité.

Je l'ai présenté dans un contexte aussi le plus neutre possible, donc je ne voulais pas vraiment faire quelque chose de théâtrale. Je voulais quand même que la lecture soit bonne, parce que ces écrans-là ne sont tout de même pas géniaux. Ultimement, ça s'est beaucoup amélioré aujourd'hui, les écrans. Euh, donc j'ai essayé d'arranger l'éclairage du mieux que je peux, pour qu'il y ait une bonne lecture, mais ce n'était pas quelque chose dans le noir complètement avec un couloir ou qu'il fallait le silence complet autour ou quoi que ce soit. J'essayais de garder ça le plus neutre, le plus simple possible. On arrive et puis on fait : « Ah, tiens… ». Et puis là on est un tout petit peu attiré. Le bruit n'est pas très fort aussi. Au début on… et ça c'était volontaire que ce ne soit pas très très prenant… on a tendance à vouloir s'approcher. C'est petit. Et puis quand on s'approche, ah, là on entend bien ce qui se passe. Et je pense qu'il y a une petite, si je ne me trompe pas, il y a une petite progression dans le volume, aussi, qui a lieu, juste pour, encore une fois, juste pour un peu attirer le spectateur…ce sentiment-là. Mais de façon légère, donc c'est pas le crescendo, mais simplement pour marquer une espèce de moment.
Problèmes potentiels et stratégies de conservation

Tel que mentionné précédemment, les composants technologiques de Le minute de vérité ont subi deux grandes transformations :

  • le baladeur vidéo Sony a été remplacé par le modèle de téléviseur portatif Casio;
  • la séquence vidéo a été migrée du format vidéo 8  mm au DVD.

L'avenir de Le minute de vérité dépend de la durée de vie de ses composants technologiques. En cas de défectuosité ou d'obsolescence, les divers services du MBAM devront collaborer pour gérer, conserver et remplacer les composants de l'œuvre et baser leurs décisions sur les réponses que Dion a fournies dans l'entrevue.

Duplication

Au début de 2009, le MBAM a entamé la recherche d'un baladeur vidéo Sony en bon état. Pendant l'entrevue, Dion a indiqué qu'il préférait utiliser un baladeur vidéo d'époque lors de futures expositions. Les sites Web d'enchères et d'achat en ligne, tels qu'eBay, augmentent les chances du MBAM de trouver un autre baladeur vidéo Sony. Richard Gagnier, Chef du Service de la restauration, a suggéré d'acquérir deux modèles Sony et un modèle Casio à garder en réserve jusqu'à ce qu'il s'avère nécessaire de changer l'équipement actuel. À l'hiver 2009, les deux modèles étaient en vente.

Émulation

Le remplacement d'un composant spécifique du lecteur vidéo peut aussi être considéré comme une stratégie de conservation. Par exemple, ce fait peut supposer d'enchâsser un nouvel écran plat à cristaux liquides (ACL) dans le vidéo baladeur original Sony. Le remplacement de l'écran permettrait de conserver le lecteur vidéo portable d'origine.

Migration

Les technologies de stockage vidéo ne cessent d'évoluer. Lorsque les DVD seront remplacés par de nouvelles technologies, comme les disques Blu-ray, le MBAM migrera la séquence vidéo de Le minute de vérité sur une version moderne de stockage vidéo.

Étape 5 : Classification de la documentation dans la base de données et le dossier d'archives de l'œuvre

Au fil des ans, Dion a archivé très peu de documentation sur ses œuvres. Il est donc important que le Service des archives du Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) conserve des copies papier de toute documentation pertinente se rapportant à Le minute de vérité. Le catalogueur, l'archiviste et le conservateur du MBAM doivent organiser et consigner la documentation assemblée dans la base de données de gestion des collections internes du MBAM, Mimsy XG. Cette base de données est utilisée pour toutes les œuvres faisant partie de la collection du MBAM, dont les œuvres d'art médiatique.

Les études de cas menées par le comité de recherche de DOCAM sur la structure de catalogage ont permis au Service des archives du MBAM de procéder à un examen de sa base de données Mimsy XG en 2008. Le catalogueur du MBAM a analysé comment intégrer certains types d'information concernant les collections du MBAM, en particulier d'art médiatique, dans des catégories existantes. Les renseignements suivants ont été ajoutés par la suite à la base de données :

  • description de l'œuvre : cite des publications sur la conservation qui comportent des interprétations de l'œuvre
  • description technique de l'œuvre : permet de comprendre les modes de fonctionnement;
  • composantes de l'œuvre : décrit l'évolution et la détérioration de la condition de l'œuvre matérielle depuis son acquisition jusqu'à son état actuel;
  • historique d'exposition : comprend de l'information, des photographies et des diagrammes de différents contextes d'exposition de l'œuvre;
  • instructions pour l'installation : expose en détail les diverses installations de l'œuvre;
  • historique de conservation : comprend de l'information et des rapports sur l'état de conservation de l'œuvre, (notamment ses modifications) et des recommandations pour l'entretien et la sécurité de l'équipement;
  • spécifications pour l'entreposage : décrit les conditions à observer pour l'entreposage et l'expédition de l'œuvre;
  • entrevue vidéo avec l'artiste : porte sur le concept, la présentation, la conservation et des questions de propriété intellectuelle de l'œuvre.

Étape 6 : Documentation des installations futures de Le minute de vérité

Afin d'assurer, de conserver et de re-créer une expérience optimale de Le minute de vérité pour ses visiteurs, le Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) reconnaît l'importance de documenter de futures expositions de l'œuvre. Outre des diagrammes, photographies et vidéos d'installation, cette documentation devrait comprendre des entrevues enregistrées avec l'artiste, du personnel et des visiteurs du musée. Ces documents seraient ensuite ajoutés à la base de données Mimsy XG du MBAM.

Les musées commencent à consigner l'expérience du public comme forme complémentaire de documentation. Note en bas de page 32 Les entrevues avec des visiteurs révèlent l'expérience subjective de l'œuvre. Par exemple, dans le cadre de sa résidence de recherche à la fondation Daniel Langlois, Lizzie Muller a documenté l'expérience de visiteurs en regard de diverses œuvres d'art médiatique durant l'exposition e-art : nouvelles technologies et art contemporain – Dix ans d'action de la fondation Daniel Langlois (automne 2007) au MBAM. Note en bas de page 33 Les résultats de sa recherche soulignent l'importance de consigner l'expérience des visiteurs. Ces réactions sont ensuite intégrées au dossier d'archive de l'œuvre.

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