Cadre pour l’élaboration d’une politique de préservation numérique dans les musées

Ern Bieman

Avis de non-responsabilité

Les renseignements contenus dans ce document sont basés sur la compréhension actuelle des problèmes soulevés. Ils ne s’appliquent pas nécessairement à toutes les situations, et aucune des activités décrites n’assure une protection complète. Bien que des efforts raisonnables aient été faits pour s’assurer que les renseignements sont exacts et à jour, l’éditeur, le Réseau canadien d’information sur le patrimoine (RCIP), n’offre aucune garantie à cet égard et n’assume aucune responsabilité en cas de perte, de réclamation ou de revendication pouvant résulter, directement ou indirectement, de l’utilisation des renseignements ou de la confiance qui leur est accordée. Le RCIP ne cautionne aucun des produits, services ou matériaux indiqués dans ce document ou sur les sites Web externes auxquels ce document pourrait renvoyer. Par ailleurs, il ne fait aucune déclaration à leur sujet. Ces produits, services ou matériaux sont donc utilisés à vos propres risques.

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Introduction

Les processus liés à la préservation numérique dans les musées reprennent beaucoup d’éléments des normes et des pratiques exemplaires qu’utilisent les archivistes numériques. Il existe toutefois des différences. La plus importante distinction découle du fait que les musées ont tendance à avoir des systèmes d’information déjà configurés pour cataloguer les collections matérielles, généralement à l’aide d’un logiciel de gestion des collections. Dans le cas des archives numériques, on utilise plus souvent des systèmes se basant sur le modèle de référence largement reconnu du système d’information archivistique ouvert (OAIS pour « Open Archival Information System ») afin de s’assurer que les biens numériques demeurent fiables, authentiques et utilisables et de garantir que l’intégrité de l’objet est préservée. De toute évidence, les systèmes de gestion d’archives et de collections n’ont pas été conçus pour accomplir les mêmes tâches, mais ils ont des points en commun. L’instauration de ces deux systèmes au sein d’un établissement qui n’a aucun mandat officiel visant la gestion d’une archive numérique nécessite un niveau d’effort et une quantité de ressources peu pratiques (ou inenvisageables dans le cas des petits établissements).

Depuis 2012, le Réseau canadien d’information sur le patrimoine (RCIP) promeut l’usage des Lignes directrices sur l’élaboration d’un cadre stratégique pour la préservation numérique – Version 2.1, élaborées par Nancy Y. McGovern. Le RCIP continue à soutenir et à promouvoir ce cadre. Nous recommandons son utilisation si la gestion d’une archive officielle correspond au mandat de l’établissement et si ce dernier dispose des ressources nécessaires pour gérer une telle archive.

Le RCIP a créé ce cadre pour les musées qui n’ont pas le mandat de gérer une archive numérique officielle et qui ne disposent pas des ressources nécessaires pour en gérer une en plus de leur système de gestion des collections. Nous reconnaissons que les lignes directrices de 2012 ont inspiré certaines des sections du présent document.

Qu’est-ce qu’une politique de préservation numérique et pourquoi est-il important d’en avoir une?

Toute politique répond aux questions « Que devrait-on faire? » et « Pourquoi devrait-on le faire? ».

Une politique de préservation numérique est un document de haut niveau qui détermine les ressources numériques qui seront préservées aux fins de l’accès à long terme ainsi que les circonstances et l’état dans lesquels elles seront préservées. Il indique aussi clairement la raison pour laquelle une telle préservation est importante dans le cadre du mandat et des activités de l’établissement.

Il est important de détenir une politique de préservation numérique, car elle peut servir :

Qui devrait participer à la création d’une politique de préservation numérique?

Des représentants exerçant les fonctions suivantes devraient tous participer, à différents degrés, à l’élaboration de la politique :

Les employés de petits établissements ont tendance à occuper de nombreux rôles; dans le cas d’un petit musée, une ou deux personnes peuvent exercer toutes les fonctions susmentionnées. Dans le cas de grands établissements, beaucoup plus de personnes se partagent ces rôles.

À quel moment une politique devrait-elle être créée ou révisée?

On créé la politique à l’étape 2 du déroulement des activités de la boîte à outils, après avoir fait l’inventaire des biens numériques que possède le musée. Autrement dit, il s’agit de la deuxième étape des démarches initiales qui visent :

Certaines sections de la politique doivent être créées avant l’étape 3 (sélection et conception du plan), tandis que d’autres éléments (ceux qui justifient les mesures prises) doivent être finalisés après l’élaboration du plan. Dans les prochaines sections, on indique clairement à quel moment la rédaction d’une section doit commencer et se terminer.

Contenu d’une politique de préservation numérique dans les musées

Les paragraphes ci-dessous résument les sections qui doivent se trouver dans toute politique de préservation numérique pour les musées.

Section 1 : Page couverture

On commence cette section pendant la rédaction de l’ébauche de la politique (étape 2 du déroulement des activités de la boîte à outils) et on la termine après avoir finalisé le cadre et le plan.

Les éléments de la page couverture sont les suivants :

Section 2 : Énoncé du problème

On commence et termine généralement cette section pendant la rédaction de l’ébauche de la politique de préservation numérique. L’expression « énoncé du problème » est empruntée au milieu de la gestion des affaires; elle n’indique pas nécessairement que la situation actuelle est problématique. L’expression fait simplement référence à l’enjeu (ou aux enjeux) qui sera abordé dans la politique et le plan qui en découle.

Cette section comprend des références qui indiquent où des problèmes ont été cernés. Ils peuvent provenir des sources suivantes :

L’énoncé du problème ne doit pas suggérer une solution en particulier.

Section 3 : Portée des buts et des objectifs

On crée et termine généralement cette section pendant la rédaction de l’ébauche de la politique de préservation numérique. Cependant, des révisions peuvent être nécessaires après qu’un plan a été choisi.

Cette section décrit l’objectif principal de la politique (habituellement, quelque chose comme « s’assurer que les biens numériques seront accessibles à long terme »), qui est ensuite étoffé avec des objectifs plus faciles à mesurer et qualifiant ce but; par exemple, « rendre les copies des biens numériques facilement accessibles au grand public ».

Cette section sert également de point de départ aux exigences qui seront définies à l’étape de l’élaboration du plan (étape 3 du déroulement des activités de la boîte à outils). Une réflexion approfondie doit donc être menée au moment de préparer cette section; il faut notamment consulter le plus d’intervenants possible. Les objectifs doivent toujours être axés sur l’enjeu (ce qui doit être fait et pourquoi) et non sur une solution particulière (la façon dont quelque chose sera fait).

Cette section doit servir à relever ce qui est manifestement hors de la portée de la politique (par exemple, « cette politique et le plan qui en découle n’abordent pas de plus gros enjeux liés à la stratégie du musée en matière de technologies de l’information »). En énonçant ce qui n’est pas inclus dans la portée, on aide à mieux définir l’objet de la politique et du plan, et l’on réduit le risque d’un glissement de la portée du projet lorsque celle-ci devient de plus en plus vaste. Les enjeux hors de la portée peuvent tout de même être liés à la solution de préservation numérique choisie (par exemple, le plan de préservation numérique peut devoir concorder avec la nouvelle stratégie du musée en matière de technologies de l’information), mais on ne doit pas résoudre ces enjeux dans la politique de préservation numérique.

Section 4 : Énoncé de conformité

On doit terminer cette section pendant la rédaction de l’ébauche de la politique (étape 2 du déroulement des activités de la boîte à outils).

Cette section décrit les normes, les principes et les pratiques exemplaires que suivront la politique et le plan. Contrairement aux Lignes directrices sur l’élaboration d’un cadre stratégique pour la préservation numérique – Version 2.1, le cadre ne sera peut-être pas conforme au modèle de référence de l’OAIS. Il peut plutôt se conformer à n’importe quelles normes, lignes directrices ou pratiques de préservation numérique généralement acceptées; par exemple, des documents se trouvant dans la Boîte à outils de la préservation numérique du RCIP, une norme concernant les métadonnées pour la préservation numérique et des documents utilisés dans le cadre d’un cours de préservation numérique. En énonçant les documents auxquels vous avez l’intention de vous conformer, vous indiquez la mesure dans laquelle vous vous engagez à respecter les normes et les pratiques exemplaires. Cependant, assurez-vous que la solution choisie est véritablement conforme aux documents énoncés dans cette section.

Section 5 : Référence au plan de préservation numérique choisi

On termine cette section après avoir choisi et conçu le plan d’action (étape 3 du déroulement des activités de la boîte à outils). On y montre que l’on a fait preuve de diligence raisonnable dans le cadre des catégories suivantes :

Section 6 : Facteurs de révision

On termine cette section après avoir finalisé le plan (étape 3 du déroulement des activités de la boîte à outils).

On y indique à quel moment la politique de préservation numérique doit être examinée et révisée. Les facteurs types qui entraînent habituellement une révision comprennent ce qui suit :

Section 7 : Définitions

Tous les membres du personnel, y compris les cadres de l’établissement, doivent être en mesure de comprendre la politique de préservation numérique. Tout terme technique propre à la préservation numérique qui risque de ne pas être connu de tous doit être inclus dans cette section.

Section 8 : Références

Toute référence à des documents externes ou internes doit être incluse dans cette section.

Addenda : Calendrier de conservation et d’aliénation des biens numériques

Si tous les biens numériques doivent être conservés indéfiniment (en tenant compte du fait que cela exige un certain travail), il faut l’indiquer dans la section des buts et des objectifs de la politique de préservation numérique. Le cas échéant, aucun addenda n’est nécessaire.

Dans toute autre situation, un addenda qui précise la durée de conservation des biens numériques peut être inclus dans cette section. On peut présenter l’information simplement à l’aide d’un calendrier de conservation et d’aliénation des biens numériques, c’est-à-dire un tableau qui énumère les catégories de biens numériques de l’établissement (choisies à l’étape 1 du déroulement des activités de la boîte à outils) et indique le nombre d’années pendant lesquelles les objets seront conservés.

Une autre méthode consiste à classer les objets selon des groupes utiles tels que « Objets de nature transitoire », « Objets à valeur continue » et « Objets à valeur opérationnelle ». On fournit ensuite les règles de conservation de chacune de ces catégories.

Peu importe la méthode utilisée, cet addenda doit être relativement court (une à deux pages habituellement).

Remerciements

Le RCIP aimerait remercier Paul Durand du Musée canadien de la guerre et Jean-Luc Vincent de Parcs Canada d’avoir examiné le présent document et d’y avoir contribué.

Glossaire

intégrité des objets
Caractéristique des objets qui ont été préservés sans modification ou, du moins, sans que des changements soient apportés à l’information qu’ils représentent. Par exemple, on peut prouver l’intégrité d’une copie numérique d’un article de journal si l’on peut déterminer que l’information représentée dans la copie n’a été modifiée d’aucune façon.
objet authentique
Objet authentifié, qui correspond réellement à ce que l’on prétend qu’il est. Par exemple, la copie électronique d’un article de journal est authentique si elle est effectivement une copie (image ou texte) de l’article auquel font référence les métadonnées.
objet fiable
Objet associé à un document complet, précis et contrôlé. Par exemple, la copie électronique d’un article de journal est fiable s’il s’agit d’une copie complète de l’article et si tous les renseignements (métadonnées) relatifs à l’article ont été consignés.
objet utilisable
Objet facilement accessible, c’est-à-dire un objet qui est, entre autres, disponible, repérable, consultable et complet.

Bibliographie

Lee, B. « Authenticity, Accuracy and Reliability: Reconciling Arts-related and Archival Literature » (format PDF) (en anglais seulement), document de travail, projet InterPARES 2, domaine 2, École de musique, Université de Windsor (Ontario), septembre 2005.

McGovern, N. Y. Lignes directrices sur l’élaboration d’un cadre stratégique pour la préservation numérique – Version 2.1, Réseau canadien d’information sur le patrimoine, s. d. Cet ouvrage est visé par la licence Attribution – Pas d'Utilisation Commerciale – Partage dans les Mêmes Conditions 3.0 non transposé de Creative Commons.

Réseau canadien d’information sur le patrimoine. Comment utiliser la Boîte à outils de la préservation numérique, Ottawa (Ontario), Réseau canadien d’information sur le patrimoine, 2018.

© Gouvernement du Canada, Réseau canadien d’information sur le patrimoine, 2021

Publié par :

Réseau canadien d’information sur le patrimoine
Ministère du Patrimoine canadien
1030, chemin Innes
Ottawa ON  K1B 4S7
Canada

No de catalogue : CH44-170/2021F-PDF
ISBN 978-0-660-38830-4

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