Recommandations pour la collectivité du patrimoine culturel

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Bien que les règles du droit d'auteur semblent définir le mieux ce qu'on ne peut pas faire, le présent document a pour but de préciser ce qui est possible. Ci-dessous se trouve une liste de mesures et de pratiques recommandées pour la collectivité du patrimoine culturel, notamment les artistes, les collectionneurs, les regroupements d'art électronique, les éducateurs, les bailleurs de fonds, les centres d'art, les festivals et les musées. La plupart de ces recommandations ont été exposées plus à fond dans les sections antérieures et elles sont présentées ci-après suivant une séquence thématique plutôt qu'un ordre de priorité.

  • Même si la législation sur le droit d'auteur semble être un jeu de règles nettes coulées dans le béton, dans les faits la loi est souvent une question d'interprétation. C'est particulièrement vrai dans le domaine des droits d'auteur numériques, où il existe peu de jurisprudence. Faute de précédents sur lesquels se baser, les tribunaux peuvent trancher une affaire à la lumière des pratiques collectives établies. Cela signifie que, dans une cause floue, un défendeur qui ne faisait que suivre les pratiques de ses pairs, en toute bonne foi, ferait l'objet d'un jugement plus indulgent. Puisque les pratiques de la collectivité culturelle sont toujours en émergence, il serait mutuellement bénéfique d'instaurer des pratiques communes libérales plutôt que restrictives en matière de droits d'auteur. On entend par là que tout artiste ou musée qui prend une décision libérale touchant le droit d'auteur contribue à envelopper d'une protection soi-même et les autres à l'avenir. Cette réalité est présente dans une décision d'un tribunal canadien. La Cour suprême du Canada, dans son jugement dans l'affaire Barreau du Haut-Canada c. Publications CCH Ltée a statué que l'établissement d'une politique par écrit sur l'utilisation équitable appliquée de manière systématique constituait une preuve prima facie de la pratique de cette notion et qu'il revenait aux éditeurs plaignants d'assumer le fardeau de la preuve et de dissuader les tribunaux par ailleurs.
  • Diane Zorich déclare que les lois sont façonnées par les précédents et les pressions sociales. Elle ajoute que les musées sont naturellement des organismes conservateurs qui peuvent ne pas exercer pareilles pressions, mais que les artistes sont plus libres de le faire. Elle conclut que l'artiste, à titre de parangon de la « créativité originale », serait plus protégé par les tribunaux ou vu de manière sympathique par eux et plus protégé aussi dans l'opinion publique. Jon Ippolito a également incité les artistes, en tant que mécanismes critiques de la société, à relever le défi. Susan Miller estimait que si la cible culturelle était trop imposante, comme le devient le droit d'auteur, les artistes viseront la vérité de toute manière.
  • Les agents culturels, tels que les artistes, sont encouragés à partager et à promouvoir activement le contenu original aussi souvent qu'ils en assurent la protection. Les artistes pourraient envisager des formules de mise en commun innovatrices comme une licence de Creative Commons ou de Libre Commons ou étudier la possibilité de diffuser une partie de leur contenu dans le domaine public en tant que carte d'appel de type « partagiciel ».
  • Les artistes sont invités à considérer des modes innovants de protection juridique ainsi que les formules de partage. Michael Katchen suggérait que les artistes pourraient constituer des sociétés par actions à responsabilité limitée (SARL) qui départagent les actifs de leurs pratiques artistiques ou « entreprises » et protégeraient leurs biens personnels contre des poursuites en violation du droit d'auteur. Sanh Tran, juriste à San Francisco, confirmait que pour être légitimes, les SARL ont besoin d'un financement et d'une assurance convenables. Le financement d'une pratique artistique individuelle ne doit couvrir que les coûts de production, et Rina Pantalony suggère que les organismes artistiques se prévalent déjà d'une assurance auprès d'assureurs que l'on pourrait convaincre d'élargir leurs services.
  • Les musées, les milieux universitaires et les organismes culturels sont invités à participer de manière égale au contenu culturel ainsi qu'à le protéger. Les musées sont encouragés à respecter les volontés de l'artiste et à partager leur contenu muséal original (données de catalogage et textes scientifiques) ouvertement dans l'intérêt du public.
  • Les organisations qui commandent de l'art numérique sont incitées à inclure des mécanismes pour s'assurer que leur investissement dessert le public tout en protégeant l'artiste. Par exemple, les galeries universitaires peuvent commander de l'art et exiger que l'œuvre numérique qui en résulte soit accessible pour fins de réutilisation par les étudiants locaux (de manière similaire à l'exemple du laboratoire V2 mentionné précédemment).
  • Neeru Paharia de Creative Commons soulignait que l'attention populaire se résume aux fortes concentrations de contenu et suggère que la collectivité des arts offre une ou plusieurs ressources agrégées d'art numérique sous licence en vertu de formules d'octroi de licences innovatrices. Par exemple, le milieu artistique pourrait créer une version visuelle de la ressource musicale CC Mixter de Creative Commons.
  • Les bailleurs de fonds sont encouragés à stimuler la sensibilisation au droit d'auteur sans étouffer l'expérimentation ou le choix artistique. Par exemple, Zainub Verjee affirmait que le Conseil des Arts du Canada inclut du financement dans ses subventions aux artistes pour qu'ils consultent un avocat quant aux droits d'auteur sur l'œuvre appuyée.
  • Le droit d'auteur offre un juste équilibre entre le droit des créateurs de retirer des recettes de leur œuvre et l'intérêt du public dans la réutilisation de l'objet. Les bailleurs de fonds pourraient satisfaire les deux besoins rapidement en considérant de financer des œuvres d'art qui se retrouveraient immédiatement dans le domaine public. Cette solution s'apparenterait à la formule selon laquelle les bailleurs de fonds exigeraient que les activités financées demeurent libres et accessibles au public, compensant la rémunération immédiate du créateur pour assurer une plus grande utilisation par le public.
  • Les collectionneurs, y compris les individus et les musées, sont démotivés à s'en remettre aux anciennes politiques sur les collections et les droits d'auteur au moment de compiler un fonds sur l'art numérique. Ils sont poussés à considérer la nature du support et les pratiques culturelles récentes connexes au moment de mettre à jour les politiques en question.
  • Les collectionneurs sont encouragés à affirmer les droits pertinents dans l'infrastructure sous-jacente, notamment un logiciel, au moment de rassembler l'art numérique.
  • Les collectionneurs sont incités à se préparer à négocier des droits plus complexes pour l'art numérique, dont différents droits sur différentes composantes d'œuvres multiples, et les droits des collaborateurs et participants.
  • Les collectionneurs sont invités à prévoir le fait que les œuvres sur supports numériques dans leur collection évolueront au fil du temps. Les collectionneurs devraient préciser et obtenir les autorisations appropriées leur permettant d'apporter des modifications pour préserver l'œuvre. Cela peut comprendre la tenue d'une entrevue détaillée auprès de l'artiste au moment de l'acquisition ou de la documentation vidéo des explications de l'artiste. Cela peut comprendre aussi l'obtention des droits de rétroconcevoir ou de percer les chiffrements présents dans l'œuvre à des fins de préservation.
  • Les collectionneurs qui préserveront l'œuvre pour la postérité sont encouragés à obtenir la version de l'œuvre d'art qui se rapproche le plus de la source. Cela signifie obtenir le code source de l'art logiciel si possible. Dans le cas contraire, obtenir les fichiers numériques les plus aptes à permettre de produire de nouvelles versions de l'œuvre (par exemple, fichiers .fla plutôt que fichiers .swf de l'art en mode Flash). Les collectionneurs devraient éviter les versions fixes ou bloquées des œuvres telles que les films sur DVD. Les collectionneurs devront rassurer les artistes quant à leurs droits sur l'œuvre qui sont protégés en déployant les droits différés susmentionnés ou des conventions sur l'utilisation limitée.
  • Les musées et autres collectionneurs d'art numérique sont dissuadés de demander la propriété exclusive. Ils sont incités à permettre de multiples copies de l'œuvre d'art que doivent colliger différents agents, répartissant ainsi la charge de préservation de l'œuvre. Jon Ippolito enjoint les musées à envisager les intérêts à long terme afférents aux œuvres dont ils ont la garde avant de considérer leur propre réputation reposant sur leurs collections uniques. En fait, les musées pourraient considérer l'achat comme un financement pour confier l'œuvre au domaine public avec des exigences rigoureuses de créditer l'artiste et le collectionneur. La société bénéficierait de l'utilisation immédiate de l'œuvre sans priver le musée de sa copie pour fins d'expositions et de recherches. Tant l'artiste que le musée retireraient des avantages de la notoriété et du service à la population.
  • Puisque la documentation est cruciale à la préservation et à l'utilisation de l'art numérique, les collectionneurs sont encouragés à acquérir la documentation accessoire (courriels entre les collaborateurs, premières itérations du code) en même temps que l'œuvre. Les collectionneurs devraient déterminer ou négocier l'état du droit d'auteur et des mesures de protection de la vie privée par rapport à cette documentation et le faire tôt de sorte que ces aspects soient accessibles et utiles.
  • Les collectionneurs devraient prévoir un catalogage et une documentation plus poussés de l'art sur supports numérisés. Ils pourraient employer une norme de métadonnées proposées pour l'art numérique telle que le Media Art Notation System suggéré dans le cadre du projet Archiving the Avant-Garde.
  • La collectivité du patrimoine culturel est incitée à poursuivre et à parfaire les occasions de perfectionnement professionnel en matière de droit d'auteur numérique. En ce qui a trait au domaine propre au présent document, les organismes culturels sont encouragés à amener les discussions au-delà des reproductions numériques des objets physiques afin d'inclure l'art né sous forme numérique. Ces discussions devraient inclure les artistes de l'électronique et les représentants des collectivités juridiques et industrielles connexes.
  • La collectivité du patrimoine culturel est en outre encouragée à fournir de plus amples tribunes pour la tenue de débats publics élargis entourant les questions de droit d'auteur et de « fabrication de biens ». Cette discussion peut prendre la forme de nouvelles œuvres commandées, d'expositions, de programmes didactiques, d'articles professionnels ou de documents populaires. À tout le moins, le milieu culturel dans son ensemble est incité à fournir une rétroaction à des projets permanents tels que Creative Commons ou l'Open Art Network.
  • Puisque le fair use et l'utilisation équitable sont des conceptions de droit d'auteur qui reviennent assidûment en matière d'arts, un projet de recherche ou un mémoire unique traitant de ce thème particulier desservirait grandement la communauté.
  • Les artistes et surtout les organismes artistiques sont invités à participer à l'élaboration et à la mise à l'essai de modèles économiques innovateurs touchant les arts numériques. Parmi ces modèles se trouvent les commandes d'œuvres d'art, la vente d'art numérique aux musées (mais selon les plus récentes pratiques mentionnées précédemment), les modèles de recettes réparties en ligne, etc. Les organismes culturels sont encouragés spécifiquement à explorer la notion de financement des procédés artistiques plutôt que les produits et à s'assurer que le créateur en bénéficie directement.
  • Les musées et les autres organisations culturelles sont invités à rendre explicites les intérêts qu'ils protègent à la fois en termes de règles de droit et en termes de politiques et de valeurs sociales. Le musée est-il un protecteur non seulement des droits d'auteur mais également de l'image de l'artiste ou de l'œuvre artistique dans la société? Si oui, quels usages de l'art sont acceptables et lesquels ne le sont pas? Y a-t-il un réel intérêt économique à octroyer une licence que le musée devrait préserver pour soi? Les revenus issus de la délivrance de la licence équilibrent-ils tout impératif à rendre l'œuvre aussi accessible et visible que possible? Au lieu de laisser pareils caprices implicites dans les décisions d'un ou deux employés quant à chaque demande de licence, le musée devrait rendre explicites ses politiques et valeurs touchant les applications intellectuelles de l'art dont il a la garde. En plus d'accroître l'imputabilité officielle, cela servira de sorte de discours et de défense dans le secteur de la culture.
  • Le secteur culturel a besoin de démontrer pourquoi les décideurs devraient écouter leurs propres opinions sur la propriété intellectuelle. Il est prudent d'affirmer que le marché de l'art n'est pas une industrie assez puissante pour affecter les règles du droit d'auteur suivant la force du nombre seulement. Cependant, les artistes et les organismes artistiques sont à l'avant-plan de la « création de contenu » et sont perçus comme des modèles par les autres créateurs de contenu, qu'ils soient de nature commerciale ou non. De plus, les artistes et le milieu des arts font directement appel à l'impératif social de base derrière le droit d'auteur : celui de « promouvoir l'innovation et la créativité ». Les artistes et les organismes voués aux arts peuvent ne pas être puissants sur le plan économique, mais ils sont des institutions fiables qui pourraient avoir voix au chapitre dans le débat social entourant la propriété intellectuelle.

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