Page 3 : Recommandations pour la qualité de l'eau potable au Canada : document technique – acide (4-chloro-2-méthylphénoxy) acétique (MCPA)

Partie II. Science et considérations techniques

4.0 Propriétés, utilisation, sources et devenir dans l'environnement

Le MCPA est un herbicide à base d'acide phénoxyacétique, dont on produit diverses formulations; on peut le trouver sous forme d'acide libre, de sel de diméthylamine (MCPA-DMAS), de sel de sodium (sel sodique du MCPA) et d'ester (ester de 2-éthylhexyl du MCPA ou MCPA-EHE) (U.S. EPA, 2004b,d). Bien que le MCPA puisse être appliqué sous différentes formes, son effet herbicide est dû à un seul groupement fonctionnel (l'acide d'origine) (U.S. EPA, 2004c,e; ARLA, 2006). Le sel de diéthanolamine du MCPA, autre formulation sous forme de sel d'amine, n'est pas visé par ce document, étant donné qu'aucune information relative à sa toxicologie n'est disponible et que l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) de Santé Canada propose son élimination graduelle (ARLA, 2006).

Le MCPA est un régulateur de croissance des plantes; il est utilisé contre les mauvaises herbes à feuilles larges en postlevée en agriculture et en foresterie, ainsi qu'en milieu urbain et aquatique (CIRC, 1983; Weed Science Society of America, 1989; HSDB, 2003). Le MCPA est absorbé à la fois par les feuilles et les racines et atteint toutes les parties de la plante par translocation. En stimulant la synthèse des acides nucléiques et des protéines, le MCPA nuit aux activités enzymatiques, à la respiration et à la division cellulaire. Ainsi, les plantes traitées présentent des feuilles, des tiges et des racines mal formées (U.S. EPA, 1990).

Les propriétés physico-chimiques des diverses formes de MCPA à l'origine du comportement de ce composé dans l'environnement sont résumées dans le tableau 1.

Les propriétés physico-chimiques des formes de MCPA autres que l'acide varient grandement selon la formulation. En général, les sels sont hydrosolubles, alors que les esters sont lipophiles et moins hydrosolubles (U.S. EPA, 2004d,e). D'après la valeur de la constante de la loi d'Henry, le MCPA ne devrait pas se volatiliser à partir de l'eau ou des surfaces humides. Sa pression de vapeur indique également un faible potentiel de volatilisation et sa constante de dissociation montre qu'il se dissocie rapidement au pH environnemental (ARLA, 2006). Puisque les données disponibles relatives au devenir dans l'environnement montrent que toutes les formes de MCPA retournent à la forme acide, les propriétés physico-chimiques du MCPA dans l'environnement sont donc celles de la forme acide (U.S. EPA, 2004a).

Il faut noter que le MCPA est habituellement utilisé avec d'autres herbicides du type phénoxy tels que l'acide dichloro-2,4 phénoxyacétique (2,4-D), l'acide (2,4-dichlorophénoxy) butyrique (2,4-DB), l'acide (R)(+)-2-(4-chloro-2-méthylphénoxy)propanoïque (MCPP-p) et l'acide 4-(2-méthyl-4-chlorophénoxy)butyrique (MCPB) (U.S. EPA, 2004b).

Le MCPA est homologué au Canada pour être utilisé sur les terres agricoles, les gazons fins (parcs, terrains de jeu, de golf et d'athlétisme, jardins zoologiques et botaniques), les pelouses (propriétés résidentielles, terrains publics et commerciaux) et le gazon en plaques (cultivé dans les gazonnières et destiné à être transplanté), ainsi qu'en foresterie (jeunes plants d'épinette pour le reboisement) et sur des sites industriels (désherbage) (ARLA, 2005a). Au Canada, le MCPA est principalement utilisé en agriculture, notamment dans la production de céréales (orge, avoine, seigle, blé et lin), des graines à canaris, des légumineuses et des graminées, des asperges, du maïs sucré et du maïs de grande culture. Le MCPA sert également à traiter les champs en chaume et en jachère ainsi que les pâturages et les terrains de parcours (ARLA, 2005a). Le MCPA est utilisé partout au Canada, mais surtout dans les Provinces des Prairies (ARLA, 2005a).

Tableau 1 : Propriétés physico-chimiques Tableau 1 note de bas de page 1
Propriété MCPA MCPA-EHE MCPA-DMAS Sel sodique du MCPA
Forme Solide, flocons ou poudre de cristaux Liquide Liquide ind.Tableau 1 note de bas de page 2
Point de fusion 120 °C 260-265 °C 111 °C ind.
Constante de la loi d'Henry 7,46 × 10-5 Pa·m³/mol 2,56 Pa·m³/mol ind. ind.
Masse volumique à 20 °C 1,18-1,21 g/mL 1,06 g/mL 1,181 g/mL ind.
Pression de vapeur à 20 °C 8,18 × 10-5 à
1,36 × 10-4 Pa à 20 °C
3,43 × 10-6 à
1,63 × 10-3 Pa à 20 °C
ind. ind.
Hydrosolubilité Très solubleTableau 1 note de bas de page 3
  • 26,2 g/L à un pH de 5
  • 293 g/L à un pH de 7
  • 320 g/L à un pH de 9
Légèrement soluble (0,1 %, p/p)

Soluble; se dissocie rapidement, donnant le groupement acide phénoxy libre et le diméthylammonium

Soluble; retourne à la forme acide en milieu acide

Coefficient de partage octanol/eau
(log Kow)
1,43-2,82 5,37 1,415 à 25 °C ind.
Coefficient de partage carbone organique-eau
(log Koc)
0,98-2,07 ind. ind. ind.
Constante de dissociation (pKa) 3,07 ind. ind. ind.

Notes de bas de page

Note de bas de page 1

Tiré de Worthing et Hance (1991); USDA (2001); Struger et coll. (2004); U.S. EPA (2004a,d); ARLA (2006;2007).

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Note de bas de page 2

ind. = indéterminé.

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Note de bas de page 3

Solubilité telle qu'indiquée par l'ARLA (2006). Il faut cependant noter que d'autres sources dans la documentation scientifique signalent que ce composé est « pratiquement insoluble ». Comme ces sources n'indiquent toutefois pas le pH auquel les valeurs obtenues ont été mesurées, on n'a pas inclus ces dernières dans le tableau, vu que la solubilité varie en fonction du pH.

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Le MCPA figure parmi les 10 pesticides les plus vendus au Canada. Le tableau 2 présente les quelques données disponibles sur la vente et l'utilisation du MCPA au cours des dernières années. Brimble et coll. (2005) ont signalé que c'est en Saskatchewan qu'ont lieu environ 36 % de toutes les ventes de pesticides au Canada, ce qui fait de cette province l'utilisatrice la plus importante de ces produits dans le pays. Les données sur les ventes en Saskatchewan ne sont pas disponibles actuellement, mais une base de données destinée à recueillir ces informations est en cours d'élaboration. Au Québec, la législation interdit l'application de MCPA (et de certains autres pesticides) sur le terrain des établissements de garde de jour, des écoles, sur certains terrains publics et sur les espaces verts privés (Gouvernement du Québec, 2006).

Tableau 2 : Vente et utilisation du MCPA (matière active) au Canada Tableau 1 note de bas de page 1
Province Année Vente/utilisation
(matière active, en kg)
% d'utilisation par rapport aux 20 matières actives les plus utilisées
Colombie-Britannique 2003 23 598 5,1
Alberta 1998 885 239 9,52
ManitobaTableau 1 note de bas de page 2 2003 450 091 12,48
OntarioTableau 1 note de bas de page 3 2003 129 337 3,07
QuébecTableau 1 note de bas de page 4 2002 80 000 (approx.) 31 (approx.)
Nouveau-Brunswick 2003 17 053 2,18
Nouvelle-Écosse 2003 6 109 1,38
Île-du-Prince-Édouard 2001 28 999 ind.

Notes de bas de page

Note de bas de page 1

Adapté de Brimble et coll. (2005).

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Note de bas de page 2

Les valeurs indiquées pour le MCPA comprennent également celles se rapportant au MCPB.

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Note de bas de page 3

Ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs du Québec (2007).

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Note de bas de page 4

ind. = indéterminé.

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4.1 Devenir dans l'environnement

4.1.1 Sol

Le MCPA n'est pas persistant dans le sol (U.S. EPA, 2004a), sa demi-vie variant entre 15 et 50 jours (Soderquist et Crosby, 1975; Sattar et Paasivirta, 1980). La vitesse de dégradation dépend de plusieurs facteurs tels que le type de sol, son pH et son degré d'humidité, la concentration de MCPA, les conditions climatiques et la teneur en matière organique (Sattar et Paasivirta, 1980). La dégradation du MCPA a pris de cinq à neuf semaines dans un sol acide, alors qu'elle était terminée au bout d'une semaine dans un sol neutre (pH d'au moins 6,3) (Sattar et Paasivirta, 1980).

La dégradation microbienne constitue le principal processus de transformation du MCPA dans le sol (Caux et coll., 1995); l'oxygène et une humidité adéquate sont importants pour la biodégradation de ce composé (Sattar et Paasivirta, 1980). En l'absence d'oxygène, la transformation du MCPA dans le sol est négligeable (ARLA, 2006). La photodécomposition et l'hydrolyse ne constituent pas des processus importants de dégradation du MCPA dans le sol (U.S. EPA, 2004a,b; ARLA, 2006). On a déterminé que, lorsque le MCPA est appliqué sur la surface du sol et exposé à la lumière du soleil, sa demi-vie est de 67 jours, ce qui montre que sa photodécomposition est très lente (U.S. EPA, 2004a,b).

Des études en laboratoire ont montré que le MCPA était mobile dans le sol (U.S. EPA, 2004a). Des études sur le terrain ont toutefois indiqué que le potentiel de lessivage du MCPA dans le sol était faible à une profondeur de plus de 15 cm (ARLA, 2007). Il semble que la mobilité du MCPA soit liée à la teneur du sol en matière organique et qu'elle augmente avec la diminution de cette dernière (OMS, 2003). Le MCPA peut se retrouver dans les eaux de surface vu qu'il peut être emporté par le vent ou les eaux de ruissellement; il peut également se retrouver dans les eaux souterraines du fait qu'il est mobile dans le sol et pourrait donc avoir un certain potentiel de lessivage (U.S. EPA, 2004a). La mobilité et le lessivage des formes de MCPA autres que l'acide (c.-à-d. sels d'amine et de sodium, esters) n'ont pas été déterminés.

Des études sur le terrain ayant porté sur le MCPA-EHE ont montré que, dans des conditions normales, une proportion importante de ce produit était convertie en MCPA sous forme acide le jour de l'application et que la conversion était pratiquement complète au jour 3 (U.S. EPA, 2004a). Cependant, dans des conditions sèches, le MCPA-EHE persiste pendant des jours, et il en reste encore plus de 90 % après 48 heures (Smith et Hayden, 1980). Dans un système sol:chlorure de calcium non stérile dont le pH était de 5,6 ou de 6,8, le MCPA-EHE a été adsorbé sur les particules du sol mais pouvait être dégradé en MCPA, avec une demi-vie de 12 heures ou moins (U.S. EPA, 2004a).

4.1.2 Eau

Des herbicides d'usage agricole comme le MCPA ont été détectés dans des lacs, des rivières et des mares artificielles pouvant servir de sources d'eau potable. La migration de ces herbicides du sol jusque dans les eaux est due à des mécanismes de transport directs ou indirects, et notamment à la dérive des produits vers des zones non ciblées pendant les pulvérisations aériennes ou effectuées au sol au moyen de rampes (vaporisation dans l'air), les dépôts d'origine atmosphérique, l'érosion du sol par le vent ou l'eau, le ruissellement et le lessivage. Dans certaines situations, le MCPA peut se retrouver dans l'eau par suite du déversement, accidentel ou délibéré, de résidus de réservoirs ou du lavage de pièces d'équipement (Caux et coll., 1995; Murray et coll., 2004). Le MCPA ne devrait pas se volatiliser à partir de l'eau, vu sa pression de vapeur (8,18 × 10-5 à 1,36 × 10-4 Pa) et sa constante de la loi d'Henry (7,46 × 10-5 Pa·cm³/mol). Par contre, le MCPA-EHE peut se volatiliser compte tenu de sa pression de vapeur faible à moyenne (3,43 × 10-4 à 1,63 × 10-3 Pa) et de sa constante de la loi d'Henry (2,56 Pa·m³/mol) (ARLA, 2007).

Dans l'eau, la biodégradation (en conditions aérobies) constitue un processus important qui influe sur le devenir du MCPA dans l'environnement (Soderquist et Crosby, 1975; Sattar et Paasivirta, 1980; Smith et Hayden, 1981; ARLA, 2006). Le MCPA qui se retrouve dans l'eau des rizières et à l'abri de la lumière est totalement dégradé par les microorganismes aquatiques en 13 jours (Soderquist et Crosby, 1975). Par contre, dans les systèmes aquatiques (sédiments/eau) anaérobies, la biodégradation est négligeable (ARLA, 2006). L'hydrolyse et la photodégradation ne sont pas des voies de dégradation importantes dans l'eau (ARLA, 2006). Dans une solution aqueuse (pH de 8,3), le MCPA a une demi-vie photolytique de 20 à 24 jours à la lumière du soleil. La photolyse de solutions aqueuses diluées de MCPA produit du 4-chloro-2-méthylphénol comme sous-produit principal; il se forme également de l'ortho-crésol et du 4-chloro-formylphénol (Soderquist et Crosby, 1975). Pendant les périodes de temps froid et de faible luminosité, la dégradation du MCPA par biodégradation ou photolyse est plutôt limitée (Byrtus et coll., 2004). Le MCPA sous forme acide ne s'hydrolyse pas vite dans une solution tampon stérile dont le pH varie entre 5 et 9 (U.S. EPA, 2004a). Le MCPA ne se lierait pas dans une mesure significative aux sédiments (Caux et coll., 1995).

On a montré que les dérivés du MCPA se dissociaient dans l'eau et donnaient du MCPA sous forme acide. Dans l'eau désionisée, le MCPA-DMAS se dissocie complètement en 1 min 30 s, ce qui donne du MCPA sous forme acide et l'ion diméthylammonium (U.S. EPA, 2004a). Dans les solutions tampons stériles, l'hydrolyse du MCPA-EHE dépendait du pH (demi-vie < 117 heures à un pH de 9, mais il n'y a pas eu d'hydrolyse aux pH de 5 et de 7).

4.1.3 Atmosphère

Les pesticides peuvent pénétrer dans l'atmosphère par suite d'un phénomène de dérive durant l'épandage, par évaporation, par sublimation ou par érosion d'un sol traité. Une fois dans l'air, ils peuvent être transportés, redistribués ou dégradés, ou se déposer sur la surface terrestre par dépôt humide (dans la pluie) et sec (sous forme de gaz ou d'aérosols ou encore sorbés à des macro-particules solides) (Hill et coll., 2002; Waite et coll., 2005). On ne dispose toutefois que de peu d'informations sur le devenir du MCPA. Waite et coll. (2005) ont démontré, par l'analyse de grands volumes d'air échantillonnés à des hauteurs variées au-dessus du niveau du sol dans les Prairies canadiennes, que les concentrations atmosphériques de MCPA étaient fortement influencées par le transport atmosphérique régional et que l'adsorption aux particules solides de l'atmosphère constituait le principal mécanisme de transport. La volatilisation du MCPA sous forme acide ou de sel est faible (Weed Science Society of America, 1989; Caux et coll., 1995). La demi-vie de photooxydation du MCPA a été estimée à 2,2 jours (Caux et coll., 1995).

5.0 Exposition

Il se peut que les Canadiens soient exposés à du MCPA en raison de la présence de ce composé dans l'eau potable, l'air et la nourriture. De plus, certains segments de la population peuvent être exposés par suite de l'utilisation de certains produits de consommation ou dans les milieux de travail où l'on utilise des pesticides. Bien que certaines données sur l'exposition soient disponibles, elles sont jugées insuffisantes pour justifier une modification du facteur d'attribution par défaut de 20 % pour l'eau potable (c.-à-d., le pourcentage de la dose journalière totale de MCPA attribué à l'eau potable).

5.1 Air

En 1989 et 1990, le MCPA a été détecté dans seulement 4 % des échantillons atmosphériques prélevés sur le site de deux mares artificielles, près de Regina (Saskatchewan) où ce produit était appliqué localement, la concentration maximale mesurée étant de 0,39 ng/m³ (Waite et coll., 2004); le produit a été détecté dans 24 % des dépôts atmosphériques bruts (secs et humides) sur ces mêmes sites, le taux de dépôt moyen atteignant 129 ng/m³ par jour.

Dans un petit bassin versant du sud du Manitoba, le MCPA a été détecté à des concentrations pouvant atteindre 13 ng/m³ dans des échantillons atmosphériques prélevés entre 1993 et 1996 (Rawn et coll., 1999).

Dans une enquête menée à l'échelle de l'Alberta, entre avril et septembre (1999-2000) sur les concentrations d'herbicides dans les précipitations, le MCPA a été détecté dans moins de 50 % des échantillons prélevés (Hill et coll., 2002). Le niveau de MCPA était le deuxième le plus élevé (quantité totale) parmi les principaux pesticides, les concentrations maximales variant entre 38 et 84 µg/m². La quantité totale de dépôts de MCPA provenant des précipitations a varié au cours de la saison, les concentrations les plus élevées ayant été observées durant les mois de juin et de juillet (saison des pulvérisations); on a également constaté des variations selon la région; la concentration la plus élevée a été mesurée dans le secteur rural du centre de l'Alberta, la deuxième valeur en importance, dans le sud, également en zone rurale, tandis que les concentrations les plus faibles ont été relevées dans des régions éloignées et dans des villes.

En Alberta, en 2000, on a détecté du MCPA dans 7 des 68 échantillons d'air ambiant (10 %) prélevés dans quatre sites à travers la province (Kumar, 2001). Les concentrations mesurées allaient de 0,03 à 0,46 ng/m³. Les concentrations et fréquences de détection du MCPA étaient relativement faibles par rapport à celles d'autres pesticides plus volatiles.

5.2 Eau

5.2.1 Eau potable

En Alberta, le MCPA n'a été détecté qu'à de rares occasions (11 %) entre 1995 et 2003, dans le cadre d'un programme de surveillance de l'eau (Byrtus et coll., 2004). On en a trouvé dans 190 des 1 788 échantillons d'eau prélevés à des fins d'analyse au cours de cette période. Les quantités détectées étaient plus importantes dans les stations de traitement recevant des eaux de surface (13,7 %) que dans celles qui recevaient des eaux souterraines (2 %); les concentrations maximales mesurées étaient de 571 ng/L et de 5 ng/L, respectivement. Les données recueillies n'ont montré aucune tendance générale ou saisonnière au cours des neuf années pour ce qui est de la fréquence de détection ou de la concentration, ce qui laisse penser que le MCPA pourrait être détecté tout au long de l'année dans les approvisionnements d'eau traités.

Au Manitoba, du MCPA a été détecté dans 2 des 403 échantillons d'eau potable municipale lors d'enquêtes menées de 1981 à 1999 (Manitoba Conservation, 2000). La concentration maximale mesurée était de 49 µg/L.

On a détecté du MCPA dans 4 des 29 échantillons d'eau brute prélevés dans différentes villes de l'Ontario en 2004 (concentrations allant de 27 à 49 ng/L) et dans 2 des 132 échantillons d'eau traitée prélevés au cours de l'année 2004 et en janvier 2005 (concentrations allant de 27 à 66 ng/L) (Ministère de l'Environnement de l'Ontario, 2005). La limite de détection était de 20 ng/L.

En Nouvelle-Écosse, le MCPA n'a été détecté dans aucun des échantillons d'eau brute ou traitée de Dartmouth (limite de détection de 2 µg/L) ou de Stellarton (limite de dosage effective de 50 µg/L) prélevés au cours de l'échantillonnage effectué en juin 2003 (Nova Scotia Department of Environment and Labour, 2005).

À Terre-Neuve-et-Labrador, le MCPA n'a été détecté dans aucun des échantillons prélevés en 1982 dans deux puits (limite de détection de 2 µg/L) (Newfoundland and Labrador Department of Environment and Conservation, 2005).

Le MCPA n'a été détecté dans aucun des 10 échantillons d'eaux souterraines prélevés à l'Île-du-Prince-Édouard en 1998 (Blundell et Harman, 2000).

5.2.2 Sources potentielles d'eau potable

En Colombie-Britannique, le MCPA a été détecté dans l'un des 13 échantillons d'eau de ruissellement prélevés dans la vallée du Bas-Fraser en 2003. La concentration maximale mesurée était de 110 ng/L (Tuominen et coll., 2005).

En Alberta, du MCPA a été détecté dans 1 150 des 3 062 échantillons (37,6 %) prélevés dans les eaux de surface (fleuves et autres cours d'eau, lacs, etc.) entre 1995 et 2002 (Anderson, 2005). Les concentrations mesurées allaient jusqu'à 8,5 µg/L, la concentration moyenne étant de 0,02 µg/L (limite de détection de 0,005 µg/L).

En Saskatchewan, l'eau de ruissellement provenant de champs irrigués par submersion s'écoule dans un système de fossés de drainage qui se déversent dans la rivière Saskatchewan Sud, ce qui peut influer sur la qualité de l'eau en aval. On a mesuré les concentrations de MCPA et d'autres herbicides pendant les saisons de croissance de 1994 à 1996 en prélevant des échantillons d'eau dans deux fossés de drainage situés dans un périmètre irrigué dont les eaux se déversent dans la rivière Saskatchewan Sud (Cessna et coll., 2001). La concentration maximale de MCPA dans les eaux de drainage était de 2,8 µg/L. Le MCPA présent dans la rivière correspondait à environ 0,06 % des quantités appliquées; durant chacune des trois années de l'étude, du MCPA a été utilisé sur des terres irriguées par submersion par les deux fossés échantillonnés. Malgré cette utilisation, aucune augmentation significative de la concentration d'herbicides n'a été observée dans la rivière, celle-ci ayant un important débit.

Dans une étude préliminaire de surveillance menée dans les Provinces des Prairies en 2003 sur l'utilisation de pesticides pendant la saison printemps-été, on a détecté du MCPA dans chacune des 15 petites mares artificielles échantillonnées (Murray et coll., 2004). Les concentrations moyennes de MCPA dans la plupart des mares se situaient entre 13 et 108 ng/L. La limite de détection était de 0,58 ng/L. Deux mares présentaient les concentrations les plus élevées, entre 200 et 320 ng/L, ce qui peut s'expliquer par l'application de produits commerciaux (dont le MCPA) dans le bassin versant (Murray et coll., 2004).

Du MCPA a été détecté dans 10 des 49 échantillons d'eau de surface prélevés dans trois des Grands Lacs (soit les lacs Ontario, 1998-1999; Érié, 1994, 1998, 2000; et Huron, 1999-2000), et la concentration maximale de MPCA était de 5,4 ng/L; par contre, on n'a pas détecté de MCPA dans les neuf échantillons prélevés dans le lac Supérieur (1996-1997) (Struger et coll., 2004). La limite de détection se situait entre 0,27 et 0,30 ng/L. Les variations spatiales et saisonnières observées étaient liées aux modalités d'utilisation du MCPA.

Par ailleurs, du MCPA a été détecté dans 127 des 217 échantillons prélevés en 2004 dans les secteurs préoccupants des Grands Lacs, avec une concentration maximale de 350 ng/L (Struger et coll., 2005). La limite de détection était de 5,8 ng/L. Du MCPA a été détecté dans 120 des 171 échantillons d'eau de surface prélevés autour des secteurs préoccupants des Grands Lacs et de petits cours d'eau des régions de Niagara et de Burlington en 2003; la concentration maximale était de 1,23 µg/L, avec une moyenne de 0,0139 µg/L. Du MCPA a été détecté dans 27 des 59 échantillons d'eau de surface prélevés dans les secteurs préoccupants des Grands Lacs et dans les voies interlacustres en 2002, avec une concentration maximale de 40 ng/L (concentration moyenne de 2,9 ng/L). Du MCPA a été détecté dans 11 des 47 échantillons prélevés en 2002 dans les affluents du lac Huron, avec une concentration maximale de 80 ng/L (Struger et coll., 2005). Par contre, on n'en a détecté dans aucun des 133 échantillons prélevés entre 1998-2000 dans la région des bassins versants des rivières Don et Humber (limite de détection de 100 ng/L) (Struger et coll., 2002).

Au Québec, le MCPA n'a été que rarement détecté (11 %) au cours de l'été 2003 dans les affluents du fleuve Saint-Laurent; la concentration maximale mesurée était de 120 ng/L (Murray et coll., 2004). Ces affluents drainent des zones agricoles où le MCPA est utilisé dans les cultures de céréales et de légumes et dans les pâturages.

Du MCPA a été détecté dans 37 % des 481 échantillons prélevés entre 2002 et 2004 dans quatre rivières coulant dans des régions du Québec où sont cultivés le maïs et le soya; la concentration maximale mesurée était de 4,9 µg/L, et la limite de détection de 0,01 µg/L (Giroux et coll., 2006). Le même pourcentage (37 % de 1447 échantillons) avait été détecté dans ces mêmes rivières durant des échantillonnages précédents (1993-2001); la concentration maximale mesurée était légèrement plus élevée, soit 7,0 µg/L, et la limite de détection variait entre 0,02 et 0,05 µg/L (Giroux et coll., 1997; Giroux, 1999, 2002). Du MCPA a également été détecté dans 69 des 122 échantillons prélevés dans cinq autres cours d'eau (eaux de surface) de régions agricoles du Québec, lesquelles ont fait l'objet d'une enquête en 1996 et 1997; la concentration maximale mesurée était de 2,6 µg/L et la limite de détection de 0,05 µg/L (Giroux, 1998).

Dans les provinces Maritimes, le MCPA n'a été détecté dans aucun des 60 échantillons d'eau de surface prélevés au Nouveau-Brunswick (2003 et 2004), en Nouvelle-Écosse (2004) et dans l'Île-du-Prince-Édouard (2003 et 2004); la limite de détection était de 1 µg/L (Murphy et Mutch, 2005). On n'a pas détecté de MCPA non plus en 2004 dans les rivières de huit municipalités du Nouveau-Brunswick ayant des activités agricoles ou urbaines (Ministère de la santé du Nouveau-Brunswick, 2005).

5.3 Aliments

Au Canada, on ne dispose que de données limitées sur la concentration de MCPA dans les aliments. Entre 1980 et 1985, 354 échantillons composés de neuf légumes ont été prélevés dans des livraisons provenant de fermes ontariennes. Du MCPA a été détecté dans l'un des six échantillons d'asperges, à une concentration de 0,06 mg/kg, valeur inférieure à la limite maximale de résidus (LMR), qui est de 0,1 mg/kg (Frank et coll., 1987a). Lors d'études de surveillance menées entre 1980 et 1982 en Ontario, on a mesuré des concentrations de 0,01 mg/kg de MCPA dans des pêches et de 0,02 mg/kg dans des fraises, ce qui représentait, dans les deux cas, des valeurs inférieures à la LMR (Frank et coll., 1987b).

Aucune donnée récente provenant des États-Unis n'a été trouvée. Dans le passé, dans le cadre de la surveillance des pesticides dans les aliments effectuée en application du programme Total Diet Study, on avait échantillonné des aliments prêts-à-manger (de juin 1964 à avril 1969) : du MCPA avait été détecté, en de rares occasions, à faible concentration (concentration maximale de 0,4 mg/kg) dans des denrées telles que les produits laitiers, les graines et céréales ainsi que les sucres (Bovey, 1980a). Par contre, on n'en avait pas détecté dans les échantillons d'aliments composés prélevés entre juin 1969 et l'année 1976 (CIRC, 1983; HSDB, 2003).

On n'a pas détecté de MCPA-DMAS dans le grain 56 jours après l'application de cet herbicide sur du blé traité au stade du tallage (Chow et coll., 1971).

6.0 Méthodes d'analyse

La seule méthode de dosage du MCPA dans l'eau potable qui soit approuvée par l'Environmental Protection Agency (EPA) des États-Unis est l'EPA Method 555 (Rev. 1.0), qui consiste en une chromatographie liquide haute performance (CLHP) avec détecteur ultraviolet à barrette de photodiodes (PDA-UV). Les échantillons subissent une hydrolyse, une acidification, une filtration et une extraction suivies d'une séparation et de l'analyse par CLHP avec détecteur UV. La limite de détection de la méthode est de 0,8 µg/L (U.S. EPA, 1992).

L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) reconnaît l'extraction liquide-liquide au dichlorométhane suivie d'une réaction avec du diazométhane par chromatographie en phase gazeuse (CG) avec spectrométrie de masse (SM) ou détecteurs à capture d'électrons. La limite de détection est d'environ 0,1 µg/L (OMS, 2003). Cette méthode est considérée comme très courante pour le dosage du MCPA (Hernandez et coll., 1993; Tekel et Kavacicová, 1993).

Le Centre d'expertise en analyse environnementale du Québec (CEAEQ, 1999) fait état d'une méthode de mesure du MCPA dans l'eau potable (MA.403-P.Chlp 2.0) ayant une limite de détection de 0,01 µg/L. Cette méthode emploie l'extraction en phase solide d'un échantillon acidifié avec colonne C-18, suivie de l'estérification et de la purification de l'extrait sec. L'échantillon est analysé par chromatographie en phase gazeuse couplée à un spectromètre de masse (CG-SM).

7.0 Techniques de traitement

7.1 Traitement à l'échelle municipale

Les techniques de traitement qui sont décrites comme étant efficaces pour la réduction des concentrations de MCPA dans l'eau potable comprennent l'adsorption sur charbon actif et/ou l'ozonation, la filtration sur membrane, l'irradiation aux rayons UV et les procédés d'oxydation avancée (POA). Des études à pleine échelle et des études pilotes ont démontré qu'il était possible d'obtenir des concentrations de MCPA bien inférieures à la CMA de 0,1 mg/L (100 µg/L) dans les eaux traitées en utilisant les méthodes décrites ci-après. La sélection d'un procédé de traitement approprié pour un approvisionnement en eau donné dépend de nombreux facteurs, parmi lesquels figurent notamment les caractéristiques de l'approvisionnement en eau brute et les conditions dans lesquelles le procédé est employé.

7.1.1 Traitement conventionnel

Peu de données scientifiques ont été publiées sur l'efficacité des techniques conventionnelles de traitement des eaux de surface pour la réduction des concentrations de MCPA dans l'eau potable. On estime que ces techniques sont inefficaces pour réduire la concentration de diverses classes de pesticides dans l'eau potable, en particulier des composés hydrophiles ou lipophobes (Robeck et coll., 1965; Miltner et coll., 1989; Foster et coll., 1991, 1992; Haiste-Gulde et coll., 1993). Les concentrations de composés organiques, comme les pesticides, peuvent être réduites par coagulation/floculation lorsqu'il s'agit de composés hydrophobes ou comportant des groupements fonctionnels acides de faible poids moléculaire (Randtke, 1988). Les propriétés chimiques du MCPA (modérément lipophile; acide acétique de substitution) pourraient expliquer l'efficacité limitée des techniques de traitement conventionnelles de l'eau.

Les données d'exploitation recueillies au sujet d'un procédé de traitement conventionnel ont révélé une réduction de 50 % des concentrations de MCPA, les valeurs baissant à moins de 0,033 µg/L (Byrtus et coll., 2004). Foster et coll. (1992) ont observé une certaine réduction de faibles concentrations d'acide chlorophénoxy dans une usine procédant à un traitement conventionnel des eaux de surface. De même, Lambert et Graham (1995) ont signalé une réduction de la concentration de MCPA (niveau non communiqué) dans l'eau brute à moins de 1 µg/L après filtration lente sur sable.

7.1.2 Adsorption

L'adsorption sur charbon actif a été largement utilisée pour réduire la concentration de pesticides dans l'eau potable et est considérée par l'OMS comme une technique de traitement appropriée pour abaisser la concentration de MCPA à moins de 0,1 µg/L (Robeck et coll., 1965; Miltner et coll., 1989; Foster et coll., 1992; Duguet et coll., 1994; OMS, 2004). La capacité du charbon actif à éliminer les pesticides par adsorption dépend de divers facteurs tels que la concentration, le pH, la compétition d'autres contaminants ou de matières organiques naturelles, le temps de contact et les propriétés physico-chimiques du pesticide. L'efficacité de la filtration sur charbon actif en grains (CAG) dépend également du temps de contact en fût vide (EBCT), du débit et de la durée du cycle de filtration. L'efficacité du charbon actif en poudre dépend également de la quantité de charbon utilisée.

Les données d'exploitation provenant d'une usine de traitement municipale qui utilise les techniques conventionnelles avec un filtre d'adsorbtion au CAG ont montré que ce système de traitement pouvait faire passer de faibles concentrations de MCPA (de l'ordre de 0,47 µg/L) à moins de 0,02 µg/L (Frick et Dalton, 2005) dans l'eau traitée. Aucune information n'a été fournie sur les conditions d'exploitation du système d'adsorbtion au CAG utilisé dans cette étude. Les résultats d'études pilotes indiquent que l'utilisation de ce système après la filtration pouvait faire baisser des concentrations de MCPA de l'ordre de 2 µg/L à moins de 0,1 µg/L. Aucune trace de MCPA n'a été observée sur une période supérieure à 400 jours lorsque l'EBCT était de 20 minutes (Schippers et coll., 2004). D'autres études pilotes ont également montré que la filtration au CAG permettait de faire passer les concentrations de MCPA dans l'eau brute de 1 µg/L à moins de 0,1 µg/L; cependant, la durée de vie du lit de filtration n'a pas été déterminée car le MCPA n'était présent que de temps à autre dans l'approvisionnement en eau (Hart, 1989; Hart et Chambers, 1991).

7.1.3 Ozonation et ozonation/adsorption

L'OMS (2004) reconnaît également l'ozonation comme étant une technique de traitement appropriée pour la réduction des concentrations de MCPA à moins de 0,1 µg/L. Bonné et coll. (2000) ont observé une réduction de 65 % des concentrations de MCPA, les concentrations de 20 µg/L étant passées à moins de 7µg/L dans l'eau brute après une simple ozonation; par ailleurs, la combinaison de l'ozonation à une filtration au charbon actif biologique a permis d'obtenir des concentrations inférieures à 0,1 µg/L dans l'eau traitée. Dans d'autres études pilotes, on a eu recours à l'ozonation suivie d'un traitement au CAG et on a mesuré des taux d'élimination de 100 % à des doses d'ozone de 2 à 4 mg/L et un temps de contact inférieur à 15 minutes (Foster et coll., 1992). La présence possible d'acides aliphatiques, d'aldéhydes, de cétones et d'autres sous-produits d'ozonation tels que les bromates et le carbone organique assimilable (COA) peut nécessiter un traitement supplémentaire après l'ozonation et/ou l'optimisation du traitement afin de réduire au minimum la formation de sous-produits. Camel et Bermond (1998) ont signalé que la minéralisation des pesticides par ozonation ou d'autres techniques d'oxydation est généralement incomplète; par conséquent, dans la conception d'un procédé de traitement de l'eau faisant intervenir cette méthode, on devrait prévoir une filtration sur sable ou au CAG après l'oxydation. Selon certains auteurs, le recours à l'ozonation avant l'adsorption sur CAG augmenterait l'activité biologique du filtre et pourrait prolonger la durée de vie du lit de filtration aux fins de l'élimination des pesticides (Lambert et Graham, 1995).

7.1.4 Irradiation aux ultraviolets

Dans des études pilotes sur l'efficacité du traitement aux ultraviolets pour réduire la quantité de pesticides dans les eaux souterraines, on a constaté qu'une dose d'UV de 300 Wh/m³ donnait un taux d'élimination de 94 % dans l'eau traitée et permettait d'abaisser la concentration de MCPA à moins de 0,1 µg/L. Selon ces mêmes études, l'efficacité de l'élimination dépend de la dose d'UV et n'est pas influencée par la concentration initiale de pesticides. De plus, on a signalé que les sous-produits du MCPA découlant de l'irradiation aux rayons UV pouvaient comprendre des composés organiques et des nitrites (Bourgine et coll., 1997). Des expériences en laboratoire sur l'efficacité de l'irradiation aux rayons UV ont permis d'observer la dégradation complète du MCPA avec un traitement administré au moyen d'une lampe à basse pression à une longueur d'onde de 254 nm. On a observé des taux d'élimination de 90 % et de 100 % des concentrations initiales de MCPA (50 mg/L) après 20 et 40 minutes de temps de réaction, respectivement (Benitez et coll., 2004).

7.1.5 Irradiation aux ultraviolets et oxydation par le peroxyde d'hydrogène

On a évalué des POA à pleine échelle tels que le traitement combiné UV/peroxyde d'hydrogène pour déterminer leur capacité à réduire la concentration de différentes classes de pesticides (Kruithof et coll., 2002a,b). Le MCPA lui-même n'a pas été examiné, mais d'autres herbicides chlorophénoxy l'ont été. Les résultats ainsi obtenus ont indiqué que différentes doses d'UV (< 1 200 mJ/cm²) et de peroxyde d'hydrogène (< 15 g/m³) ont entraîné une dégradation d'au moins 80 % dans le cas de plusieurs herbicides chlorophénoxy (p. ex., le 2,4-D), soit un abaissement à moins de 0,1 µg/L de la concentration dans les eaux traitées. La formation de bromates et de métabolites était négligeable; cependant, il fallait une filtration sur CAG après le traitement par UV/peroxyde d'hydrogène afin d'éliminer le COA et le peroxyde d'hydrogène résiduel. Cette étude a également révélé que les doses d'UV requises pour l'oxydation des pesticides étaient bien plus élevées que celles nécessaires à la désinfection (Kruithof et coll., 2002a,b).

Des études en laboratoire ont montré que la dégradation du MCPA était plus rapide avec la méthode UV/peroxyde d'hydrogène qu'avec les UV seulement. En moins de 12 minutes, un taux de dégradation de 90 % a été observé; cependant, les concentrations initiales étaient relativement élevées (50 mg/L) et les résultats ne comprenaient pas d'informations relatives aux concentrations finales dans l'eau traitée (Benitez et coll., 2004).

7.1.6 Filtration sur membrane

Il a été prouvé que les différentes techniques de filtration sur membrane, y compris l'ultrafiltration, la nanofiltration et l'osmose inverse, étaient des méthodes efficaces pour la réduction des concentrations de MCPA dans l'eau potable (Taylor et coll., 1995, 2000; Hofman et coll., 1997; Schippers et coll., 2004). Dans des études pilotes portant sur les membranes utilisées en ultrafiltration, on a constaté des taux d'élimination moyens de 99 % ou plus, la concentration dans les eaux traitées étant abaissée à moins de 0,1 µg/L (Schippers et coll., 2004). De manière similaire, des études pilotes sur les membranes utilisées en osmose inverse ont montré que les taux moyens d'élimination étaient compris entre 97 et 99 % et que les concentrations obtenues étaient inférieures à 0,2 µg/L dans les eaux traitées. Les résultats de ces études ont également indiqué que l'élimination des pesticides ne diminuait pas avec le vieillissement de la membrane (Bonné et coll., 2000). Taylor et coll. (2000) ont mené des études pilotes sur l'osmose inverse dans le but d'évaluer différents facteurs influant sur l'élimination des pesticides. Un taux moyen d'élimination de 97,5 % a été observé dans diverses conditions de débit, de récupération et de qualité de l'eau de la source d'approvisionnement, permettant d'obtenir des concentrations inférieures à 0,3 µg/L dans l'eau traitée. Le rejet de pesticide dépendait d'une variété de composantes du système, dont le type de système de membrane, le débit, la récupération, ainsi que la solubilité, la charge et le poids moléculaire du pesticide. Les résultats de cette étude ont également montré qu'il faut utiliser des eaux de qualité représentative et des membranes servant aux expériences en laboratoire et aux études pilotes pour la sélection des membranes destinées aux applications à pleine échelle.

7.1.7 Techniques de traitement émergentes

Plusieurs techniques de traitement de l'eau potable destinées à éliminer le MCPA sont en cours de développement, mais la plupart en sont essentiellement au stade expérimental; ou encore, l'information sur l'efficacité observée à l'échelle pilote ou à pleine échelle n'a pas été publiée. Certaines des techniques émergentes comprennent :

  • Autres POA - Des expériences ayant porté sur les voies de dégradation du MCPA par l'ozone et l'irradiation aux UV indiquent que l'ajout des UV entraîne une dégradation plus rapide du MCPA comparativement à l'ozone seul (Benoit-Guyod et coll., 1986). D'autres POA, tels que l'ozone combiné avec le peroxyde d'hydrogène, ont permis d'éliminer plusieurs classes de pesticides, dont les herbicides chlorophénoxy; cependant, aucune information relative à l'élimination du MCPA n'a été trouvée (Ijpelaar et coll., 2002; Kruithof et coll., 2002b; Benitez et coll., 2004). Des études en laboratoire ont montré que le procédé Fenton constituait également un POA efficace pour la dégradation du MCPA (Fdil et coll., 2003).
  • Dégradation électrochimique - Différentes techniques de dégradation électrochimique ont été examinées. Des études en laboratoire ont montré que la dégradation électrochimique par peroxy-coagulation et photoperoxy-coagulation était efficace pour éliminer le MCPA (Boye et coll., 2003). La dégradation électrochimique par oxydation anodique et la méthode électro-Fenton, réalisée avec une électrode de diamant dopée au bore, est également efficace pour éliminer le MCPA (Brillas et coll., 2004).
  • Autres adsorbants - L'adsorption du MCPA présent dans des solutions aqueuses a également été démontrée à l'aide de terre décolorante usée activée à l'acide, d'argiles organiques et d'un adsorbant produit à partir d'élutrilithe (Akçay et Yurdakoç, 2003; Mahramanlioglu et Güçlü, 2003; Mahramanlioglu et coll., 2003).

7.2 Traitement à l'échelle résidentielle

Le traitement municipal de l'eau potable vise à réduire les contaminants de sorte que leur concentration soit égale ou inférieure à la valeur de la recommandation établie. Par conséquent, l'emploi de dispositifs résidentiels pour le traitement de l'eau déjà traitée par les municipalités n'est généralement pas nécessaire et relève essentiellement d'un choix individuel. Dans les cas où l'eau potable d'une résidence provient d'un puits privé, un dispositif privé de traitement résidentiel pourrait être employé pour réduire les concentrations de MCPA dans l'eau potable.

Santé Canada ne recommande pas de marques particulières de dispositifs de traitement de l'eau potable, mais conseille vivement aux consommateurs de n'utiliser que les dispositifs certifiés par un organisme de certification accrédité comme étant conformes aux normes appropriées de NSF International (NSF) et de l'American National Standards Institute (ANSI). Ces normes visent à préserver la qualité de l'eau potable en aidant à assurer l'innocuité des matières et l'efficacité des produits qui entrent en contact avec elle. Les organismes de certification, qui doivent être accrédités par le Conseil canadien des normes (CCN), garantissent qu'un produit ou service est conforme aux normes en vigueur. Au Canada, les organismes suivants ont été accrédités par le CCN pour la certification de la conformité aux normes NSF/ANSI des dispositifs de traitement de l'eau potable et des produits liés à l'eau potable (CCN, 2003) :

On trouve sur le site Web du Conseil canadien des normes une liste à jour des organismes de certification accrédités.

Bien qu'aucun dispositif de traitement certifié ne soit actuellement offert sur le marché pour réduire la concentration de MCPA dans l'eau non-traitée (p.ex., l'eau d'un puits privé), les dispositifs qui comprennent des filtres à charbon actif ou un système d'osmose inverse peuvent être efficaces. Les dispositifs de traitement certifiés conformes à la norme 53 de NSF International et de l'American National Standards Institute (NSF/ANSI) (Effets sur la santé des dispositifs de traitement de l'eau potable) relative à la réduction de la concentration de composés organiques volatils, ou à la norme 58 de NSF/ANSI (Systèmes de traitement de l'eau potable par osmose inverse) relative à la réduction de la concentration des composés organiques, peuvent convenir pour réduire les concentrations de MCPA. Avant d'installer un dispositif de traitement, il faut faire analyser l'eau du puits pour en déterminer la composition chimique générale et pour sélectionner le type de dispositif approprié.

Il faut soumettre périodiquement à des analyses de laboratoire à la fois l'eau qui pénètre dans un dispositif de traitement et celle qui en sort pour s'assurer que le dispositif est efficace. La capacité d'élimination des dispositifs pouvant diminuer avec l'usage et le temps, ceux-ci doivent donc être entretenus régulièrement ou remplacés. Les consommateurs doivent vérifier la longévité des composantes de leur dispositif de traitement selon les recommandations du fabricant et veiller à l'entretien du système.

8.0 Cinétique et métabolisme

Chez les rats, les chiens et les humains, le MCPA est rapidement absorbé après son ingestion, mais n'est pas fortement métabolisé et est éliminé surtout dans l'urine, en grande partie sous forme de MCPA inchangé. Chez les chiens, la demi-vie plasmatique est cependant plus longue et l'élimination plus lente que chez d'autres espèces, dont les humains. Dans les études sur des rats, le MCPA-DMAS et le MCPA-EHE ont été rapidement convertis en MCPA, et le métabolisme et la toxicocinétique de ces substances étaient similaires à ceux du MCPA.

8.1 Absorption

Chez les rats, les chiens et les humains, le MCPA est facilement absorbé dans le tube digestif (par gavage et après intubation gastrique directe) (Elo, 1976; Fjeldstad et Wannag, 1977; Kolmodin-Hedman et coll., 1983a,b; Jahanshahi et Stow, 1995; Hardwick, 1999, 2000; Lappin et coll., 2002).

Les concentrations plasmatiques de pointe ont été atteintes dans les 2 à 4 heures qui ont suivi l'administration orale d'une dose unique de 5 ou de 100 mg/kg p.c. de MCPA chez les rats et dans les 4,5 à 7 heures chez les chiens beagle (Lappin et coll., 2002). Des concentrations plasmatiques de pointe similaires ont été obtenues chez les rats dans les 2 à 3 heures suivant l'administration d'une seule dose de 5 mg/kg p.c. de MCPA-DMAS ou de MCPA-EHE (van Ravenzwaay et coll., 2004). Les volontaires humains qui ont reçu une dose de MCPA de 0,015 mg/kg p.c. par jour ont présenté une concentration plasmatique de pointe après 1 heure (Kolmodin-Hedman et coll., 1983a). Dans une recension comparative de ces études métaboliques chez les rats, les chiens et les humains, Timchalk (2004) a montré que la demi-vie plasmatique était plus longue chez les chiens que chez les rats et les humains. À une dose de 5 mg/kg p.c., la demi-vie plasmatique atteignait 63 heures chez les chiens, ce qui était beaucoup plus long que chez les rats (6 heures) ou les humains (11 heures), mais les humains avaient reçu une dose plus faible de MCPA (0,015 mg/kg p.c.).

8.2 Distribution

Une fois absorbé, le MCPA se diffuse facilement à travers les membranes biologiques et est largement distribué dans les divers tissus et organes par l'appareil circulatoire. Les concentrations diminuent en peu de temps; chez les rats, le MCPA est rapidement excrété, principalement sous forme inchangée, dans l'urine (Elo, 1976; Jahanshahi et Stow, 1995; van Ravenzwaay et coll., 2004). On n'a observé aucune accumulation importante de MCPA dans les tissus.

Chez les rats auxquels on a administré du [14C]MCPA par intubation gastrique directe à raison d'une dose unique de 11,5 mg/kg p.c., la concentration de pointe dans les tissus a été atteinte entre 2 et 8 heures après l'administration de la dose, puis les concentrations ont chuté rapidement (Elo, 1976). Les tissus ou organes où l'on retrouvait les concentrations les plus fortes étaient le sang, le rein, la surrénale, le poumon, le coeur, le foie, la glande thyroïde et la moelle osseuse. Le cerveau, le tissu adipeux, les testicules et les muscles contenaient pour leur part les concentrations les plus faibles.

Chez les rats qui ont reçu du [14C]MCPA à raison d'une seule dose orale de 5 ou de 100 mg/kg p.c., la radioactivité dans les tissus et les carcasses représentait ≤ 2,3 % de la dose au moment où les sujets ont été sacrifiés (Jahanshahi et Stow, 1995; van Ravenzwaay et coll., 2004). Chez les rats sacrifiés qui avaient suivi les régimes comportant la dose plus faible (sacrifiés le jour 4), le MCPA n'était pas détectable dans la plupart des tissus, sauf dans la graisse, la peau et les reins. Chez les rats sacrifiés qui avaient reçu la dose plus forte (sacrifiés le jour 7), le niveau de radioactivité était également le plus élevé dans la graisse, la peau et les reins, mais le MCPA a été détecté dans ce groupe à des concentrations plus fortes et dans un plus grand nombre d'organes que chez les rats ayant reçu la dose plus faible. En outre, les femelles présentaient des niveaux plus élevés de radioactivité que les mâles. Les auteurs ont constaté que les faibles niveaux d'activité résiduelle détectés dans le rein reflétaient l'excrétion continue du composé (van Ravenzwaay et coll., 2004).

8.3 Métabolisme

Le métabolisme et la toxicocinétique du MCPA-DMAS et du MCPA-EHE ont été étudiés chez les rats qui avaient reçu des doses uniques de 5 mg/kg p.c. chacun et ont été comparés avec ceux du MCPA (van Ravenzwaay et coll., 2004). La toxicocinétique et le métabolisme de ces deux substances n'étaient pas distinguables de ceux du MCPA. Le MCPA, le MCPA-DMAS et le MCPA-EHE n'ont pas été fortement métabolisés chez les rats après leur administration par voie orale.

Dans l'intoxication mortelle d'un homme de 23 ans, l'autopsie médico-légale a trouvé du 4-chloro-2-méthylphénol dans les liquides corporels et les tissus des organes, suggérant un métabolite du MCPA (Takayasu et coll., 2008). Dans une étude où l'on a injecté 15 µg/kg p.c. de MCPA à cinq volontaires en santé, l'analyse approfondie du MCPA sous forme d'acide libre ou de conjugué chez l'un des individus a montré que la conjugaison variait de 56 à 73 % sur une période de prélèvement de 72 heures (Kolmodin-Hedman et coll., 1983b).

Lappin et coll. (2002) ont rapporté que des rats exposés par voie orale à 5 et 10 mg/kg/j de MCPA excrétaient le composé d'origine principalement dans l'urine (environ 65 % de la dose). Le seul métabolite présent en quantités importantes dans l'urine des rats était l'acide (4-chloro-2-hydroxyméthylphénoxy) acétique (HMCPA). On a également détecté le conjugué de la glycine du MCPA, mais la concentration était trop faible pour être quantifiée avec précision. L'urine contenait moins de MCPA (2 à 29 %) chez les chiens que chez les rats; par contre, elle contenait des concentrations beaucoup plus élevées du conjugué de la glycine du MCPA (jusqu'à 37 % de la dose). Le conjugué de la taurine, absent dans l'urine des rats, a également été détecté (jusqu'à 7 % de la dose).

8.4 Excrétion

Selon des rapports, l'excrétion rénale serait la principale voie d'élimination du MCPA chez les rats et les chiens ayant reçu une dose orale de MCPA (Elo, 1976; Jahanshahi et Stow, 1995; Lappin et coll., 2002; van Ravenzwaay et coll., 2004). Les chiens et les rats présentent des profils de récupération différents. Des études ont montré que la clairance rénale chez les chiens était plus lente et moins importante que chez les rats (Lappin et coll., 2002) ou les humains (Fjeldstad et Wannag, 1977; Kolmodin-Hedman et coll., 1983a,b).

Chez les rats, de 75 à 80 % de la dose administrée était excrétée dans l'urine en l'espace de 24 heures, peu importe la dose. Chez les chiens, l'élimination n'était pas complète 120 heures après l'administration orale de doses uniques de 5 ou de 100 mg/kg p.c. de MCPA (Lappin et coll., 2002).

Chez les rats, le composé d'origine (MCPA) était le principal composé excrété dans l'urine; on retrouvait également dans celle-ci des quantités plus faibles d'un produit d'oxydation (acide (4-chloro-2-hydroxyméthylphénoxy) acétique [HMCPA]) et des quantités infimes d'un conjugué de la glycine (Lappin et coll., 2002). Chez les chiens, le composé d'origine était également présent dans l'urine, mais à de plus faibles concentrations que chez le rat. En outre, trois métabolites ont été récupérés dans l'urine : le conjugué de la glycine, à des concentrations plus élevées que chez le rat, et, en quantité moindre, le HMCPA et un conjugué de la taurine (Lappin et coll., 2002).

L'élimination fécale était une voie mineure d'élimination chez les deux espèces, mais on retrouvait une plus forte proportion de MCPA dans les excréments des chiens que dans ceux des rats. Aucune radioactivité n'a été détectée dans l'air expiré par des rats ayant reçu par voie orale une dose de 5 mg/kg p.c. de [14C]MCPA (van Ravenzwaay et coll., 2004).

Chez des volontaires humains ayant reçu 0,015 mg/kg p.c. de MCPA, 40 % en moyenne de la dose administrée a été excrétée dans l'urine au cours des 24 premières heures (Kolmodin-Hedman et coll., 1983b). Dans une autre étude, des volontaires ayant reçu 5 mg de MCPA ont excrété 50 % de la dose dans l'urine en l'espace de 48 heures et 55 % en l'espace de 96 heures; au cinquième jour, la concentration urinaire était inférieure à la limite de détection (Fjeldstad et Wannag, 1977). Dans aucune des deux études sur les humains, on n'a essayé d'analyser les métabolites ni radiomarqué les doses au moyen du [14C]MCPA.

Dans une recension comparative des études métaboliques chez les rats, les chiens et les humains, Timchalk (2004) a montré que la demi-vie plasmatique était plus longue et l'élimination plus lente chez les chiens que chez les rats et les humains, ce qui entraînait, pour des doses comparables, une charge corporelle de MCPA beaucoup plus grande chez les chiens que chez les autres espèces. Dans des études antérieures portant sur des acides organiques aux propriétés pharmacocinétiques similaires, les chiens avaient une capacité plus limitée que d'autres espèces d'excréter les acides organiques par le rein. Selon les auteurs, les deux mécanismes suivants pourraient être responsables de cette diminution de la clairance rénale : la saturation de la sécrétion rénale et l'augmentation de la réabsorption par les tubules rénaux. Ces différences dans la pharmacocinétique du MCPA et d'autres acides organiques apparentés chez les chiens et d'autres espèces semblent indiquer qu'il peut ne pas être approprié d'utiliser les données de toxicité chez les chiens pour déterminer le risque pour la santé humaine.

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