Page 7 : Recommandations pour la qualité de l'eau potable au Canada : document technique – paramètres radiologiques
Partie II : Science et considérations techniques
L'approche utilisée pour évaluer les radionucléides dans l'eau potable est basée sur une dose annuelle et un risque annuel de cancer, ce qui est similaire à l'approche adoptée à l'échelle internationale. Cette approche est appropriée, puisque tout dépassement doit faire l'objet d'une enquête et être corrigé immédiatement, éliminant ainsi une exposition à vie à ces dépassements. Les recommandations pour l'eau potable relatives aux radionucléides sont établies en fonction d'une dose de référence de 0,1 mSv/an, soit un dixième de la limite de dose recommandée par la CIPR pour le public (c.-à-d. une personne du grand public n'ayant pas été exposée professionnellement aux rayonnements) et incorporée à la réglementation canadienne émanant de la CCSN. Ceci est en accord avec la dose de référence de 0,1 mSv/an adoptée par l'OMS (2008) pour élaborer ses recommandations pour la qualité de l'eau potable. L'OMS fait l'hypothèse prudente que seulement 10 % de la dose totale ingérée provient de l'eau potable, les 90 % restants provenant des aliments. De plus, la limite établie pour l'eau potable englobe tous les radionucléides qui y sont présents naturellement ou dus à l'activité humaine. Une dose de 0,1 mSv correspond à moins de 5 % de la dose annuelle associée au fond naturel de rayonnement.
On peut estimer que le risque à vie de développer un cancer mortel ou d'autres problèmes de santé provenant de 0,1 mSv est inférieur à 1 sur 100 000 (< 10-5). Ce très faible niveau de risque permet de conclure qu'aucune mesure supplémentaire ne devra être mise en place afin de réduire la quantité de radioactivité dans la source d'eau potable.
où :
- 0,1 mSv/an représente la dose de référence correspondant à la consommation d'eau potable pendant une année.
- 730 L/an représente la consommation annuelle d'eau potable d'un adulte (à raison de 2 L/j). Cette valeur est en accord avec l'approche adoptée par l'OMS et la U.S. EPA, mais quelque peu supérieure à la consommation moyenne de 1,5 L/j utilisée par Santé Canada pour calculer les recommandations relatives aux paramètres chimiques.
- Le CD représente le coefficient de dose, fondé sur la dose engagée sur 50 ans de la CIPR (1996). Il fournit une estimation de la dose efficace engagée sur 50 ans pour les adultes, qui provient de l'absorption de 1 Bq d'un radionucléide donné. L'annexe D contient des renseignements précis sur les radionucléides pour lesquels une CMA a été établie.
On suppose que le coefficient de dose pour les adultes protègent adéquatement les enfants et les adultes pour les raisons suivantes :
- Les CMA sont fondées sur une dose de 0,1 mSv/an seulement, qui représente une petite partie de la dose annuelle provenant du fond naturel de rayonnement.
- Les coefficients de dose plus élevés établis en fonction de l'âge, calculés pour les enfants, ne conduisent pas à des doses sensiblement plus élevées, car les nourrissons et les enfants consomment des volumes moyens d'eau potable moins importants et ont des taux métaboliques supérieurs.
Bien que des CMA aient été établies pour les radionucléides qui sont le plus souvent décelés dans l'eau potable, l'annexe A fournit de l'information pour 78 radionucléides additionnels pour lesquels il existe des coefficients de dose de la CIPR, mais qui ne devraient pas se retrouver dans les sources d'eau potable. Il n'est pas recommandé de surveiller ces radionucléides. Des concentrations ont été calculées à titre d'information, en utilisant les coefficients de dose et les mêmes équations et hypothèses utilisées pour calculer les CMA. Elles représentent le niveaux à lequel des effets possible sur la santé pourraient théoriquement survenir suite à une exposition de longue durée à un radionucléide spécifique par l'eau potable.
Les effets radiologiques de deux ou plusieurs radionucléides dans la même source d'eau potable sont présumés additifs. Par conséquent, pour qu'il y ait conformité aux recommandations, la formule de sommation suivante doit être satisfaite :
où Ci et CMAi représentent respectivement les concentrations observées et maximales acceptables de chaque radionucléide présent. La sommation devrait uniquement inclure les radionucléides détectés avec un intervalle de confiance à 95 % au minimum. Les limites de détection de radionucléides non détectés ne devraient pas être utilisées pour remplacer les concentrations Ci, car, dans certains cas, un échantillon pourrait ne pas satisfaire au critère de sommation même s'il n'y a aucun radionucléide.
La limite inférieure de détection (LID) d'un radionucléide donné devrait, par conséquent, être toujours inférieure à sa CMA. La LID d'un procédé donné (Currie, 1968) signifie que si un radionucléide n'est pas détecté, on peut être confiant à 95 % que sa concentration est inférieure à la LID. S'il n'y a qu'un seul radionucléide préoccupant, il serait théoriquement acceptable que la LID soit égale à la CMA. Le problème se présente lorsque plus d'un radionucléides est présent dans l'eau potable, ce qui est souvent le cas des radionucléides naturels. On suppose alors qu'il est peu probable que plus de cinq radionucléides soient présents à des concentrations proches de leurs CMA respectives. Par conséquent, la LID de toute méthode d'essai ne devrait pas dépasser 20 % de la CMA de tout radionucléide susceptible d'être présent dans le milieu. Selon la plupart des laboratoires spécialisés en analyse radiologique d'échantillons d'eau potable, ces limites de détection sont facilement réalisables.
Les limites chimiques ne devraient pas être utilisées dans la formule de sommation radiologique, particulièrement dans le cas des isotopes de l'uraniumNote de bas de page 2 pour lesquels des limites radiologiques et chimiques peuvent s'appliquer. Les CMA des substances chimiques cancérogènes sont déterminées à partir de différentes hypothèses, et il ne convient donc pas de les combiner aux CMA radiologiques dans la formule de sommation.
Des CMA dans l'eau potable ont été établies pour trois radionucléides naturels (le 210Pb, le 226Ra et l'uranium total sous une forme chimique) et quatre radionucléides artificiels (le tritium, le 137Cs, le 90Sr et le 131I), qui sont les plus couramment décelés dans les sources d'eau canadiennes. Les CMA sont déterminées au moyen d'équations et de principes reconnus à l'échelle internationale, et reposent exclusivement sur des considérations de santé. Elles sont calculées à partir d'une dose de référence provenant de la consommation d'eau potable pendant un an, en supposant une consommation de 2 L/j à la CMA.
Les CMA des radionucléides ne tiennent pas compte des limites inhérentes aux procédés de traitement ou d'analyse. Le traitement des sources d'eau contenant des radionucléides doit être régi par le principe maintenant l'exposition à la valeur la plus faible qu'il soit raisonnablement possible d'atteindre, tout en tenant compte des facteurs sociaux et économiques. Les CMA s'appliquent à des conditions d'utilisation normales des sources d'eau existantes et nouvelles, mais ne s'appliquent pas à la contamination durant une situations d'urgence où d'importantes quantités de radionucléides sont rejetées dans l'environnement.
Le risque pour la santé associé à l'ingestion d'eau potable contaminée au radon est jugé négligeable, puisque la plupart du radon fuit par le robinet ou la sortie d'eau, ne laissant ainsi qu'une quantité minime dans l'eau. Il convient néanmoins de noter que des concentrations suffisamment élevées de radon dans l'eau potable peuvent faire varier considérablement les concentrations de radon dans l'air. Lorsque les concentrations annuelles moyennes de radon dans l'air intérieur des aires d'habitation normales sont supérieures à 200 Bq/m3, la source de radon devrait être examinée, notamment par la surveillance des concentrations dans l'eau potable. Si les concentrations de radon dans l'eau potable dépassent 2 000 Bq/L, il est alors recommandé de prendre des mesures visant à limiter la migration du radon dans l'eau potable vers l'air intérieur.
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