ARCHIVÉ - Maladies chroniques au Canada

 

Volume 29 · Supplément 2 · 2010

La fumée de tabac ambiante (FTA)

Kenneth C. Johnson

https://doi.org/10.24095/hpcdp.29.S2.05f

Il a été établi que la fumée de tabac ambiante (FTA), aussi appelée fumée secondaire ou tabagisme passif, est un facteur de risque causal d’un certain nombre de problèmes de santé, principalement cardiovasculaires, respiratoires et liés au cancer. La FTA est un mélange de fumée principale et de fumée latérale : la fumée latérale est celle qui émane directement de l’extrémité de la cigarette, tandis que la fumée principale est celle que le fumeur expire dans l’air. Plus de 50 études, réalisées entre 1980 et 2005, ont examiné la relation entre le cancer du poumon et l’exposition à la FTA et, au cours des 20 dernières années, au moins huit comités d’experts ont conclu de façon indépendante que la FTA cause le cancer du poumon chez les personnes qui n’ont jamais fumé. Une méta-analyse récente (synthèse systématique) des études sur le risque de cancer du poumon chez des femmes qui n’avaient jamais fumé, mais dont le conjoint fumait, a estimé que le risque relatif (RR) s’établissait à 1,24 (c.-à-d. une augmentation de 24 % du risque comparativement aux femmes dont le conjoint n’avait jamais fumé). Des méta-analyses récentes du risque de cancer du poumon associé à la FTA en milieu de travail ont estimé qu’il y avait une augmentation de 19 % et de 39 % du risque de cancer du poumon chez les personnes qui n’avaient jamais fumé mais qui étaient exposées régulièrement à de la fumée secondaire dans leur milieu de travail. Dans les cas où l’exposition à la FTA a été examinée à la fois à la maison et en milieu de travail, il a été établi que le risque croît avec l’exposition; le risque relatif résumé de cancer du poumon des femmes n’ayant jamais fumé et étant les plus exposées à la FTA pendant toute leur vie, à la fois à la maison et en milieu de travail, a été estimé à 1,78 (intervalle de confiance (IC) à 95 % : 1,49-2,12) et, dans le cas des femmes qui se trouvaient dans la catégorie d’exposition professionnelle la plus élevée, le risque relatif résumé s’établissait à 2,25 (IC à 95 % : 1,81-2,79).

Plus récemment, un nombre croissant d’articles scientifiques ont été consacrés à  la relation éventuelle entre la FTA et le cancer du sein, et on dénombre aujourd’hui  plus de 20 études publiées sur le sujet. Une méta-analyse récente a révélé que l’exposition régulière à la FTA chez les femmes qui n’avaient jamais fumé au cours de  leur vie était associée à un risque accru  de cancer du sein (estimation groupée du risque résumé de 1,27 (IC à 95 % : 1,11-1,45). L’estimation du risque dans les cinq études comprenant un évaluation plus complète de l’exposition (données quantitatives à long terme sur les trois principales sources d’exposition passive à la fumée : exposition pendant l’enfance, exposition à l’âge adulte, à domicile et au travail) s’établissait à 1,90 (IC à 95 % : 1,53-2,37); tandis que dans les 14 études où les mesures de l’exposition à la FTA étaient moins complètes, il s’établissait à 1,08 seulement (IC à 95 % : 0,99-1,19). Le risque global de cancer du sein associé à la FTA avant la ménopause était de 1,68 (IC à 95 % : 1,33-2,12), et il était de 2,19 (IC à 95 % : 1,68-2,84) dans les cinq études qui intégraient trois sources d’exposition. Chez les femmes qui avaient déjà fumé, le risque estimatif de cancer du sein s’établissait à 1,53 (IC à 95 % : 1,22-1,91) comparativement aux femmes n’ayant jamais subi d’exposition active ni d’exposition passive régulière à la fumée du tabac; il s’établissait à 2,08 (IC à 95 % : 1,44-3,01) dans les cas d’évaluation plus complète de l’exposition passive. Bien que le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) ait conclu en 2002 que les données globales sur la FTA et le cancer du sein n’évoquaient pas une relation causale, en 2005, l’Environmental Protection Agency de la Californie est devenue le premier organisme soucieux de l’hygiène du milieu à évaluer l’association entre le cancer du sein avant la ménopause et la FTA et à juger les preuves concluantes.

La relation entre la FTA et d’autres types de cancer a été moins bien étudiée. Les données provenant de quelques études sur le cancer du cerveau chez l’adulte et la FTA ne sont pas concluantes. Les études sur les cancers infantiles ont donné des résultats équivoques et sont probablement minées par des biais importants liés au rappel et à la participation; il existe un nombre limité d’études sur la relation avec les autres cancers. La FTA pourrait revêtir une importance particulière au Canada, en raison de la rigueur du climat, qui oblige à passer une grande partie de l’année à  l’intérieur dans des espaces fermés  où la ventilation est limitée. En raison du  nombre important de personnes qui ont été exposées régulièrement, même de faibles augmentations du risque individuel associé à l’exposition à la FTA pourraient avoir des répercussions sur un grand nombre de Canadiens. Il existe des preuves convaincantes qui justifient la mise en place de nouvelles mesures destinées à réduire l’exposition à la FTA au Canada.

Introduction

Les effets sur la santé de la fumée de tabac ambiante (FTA) ont fait l’objet d’un grand nombre d’études et de plusieurs revues approfondies au cours des vingt-cinq dernières années1a,2a. La FTA a été reconnue comme un facteur de risque causal de plusieurs problèmes de santé. Plus de 50 études3a, ainsi que plusieurs groupes d’experts1b-5 se sont penchés sur la relation entre la FTA et le cancer du poumon. Il existe actuellement plus de  20 études publiées sur le cancer du sein et la FTA3b, plus de 30 sur les cancers infantiles et l’exposition par les parents3c et quelques études sur le cancer du cerveau3d. On a également fait état d’études sur les cancers de la fosse nasale, de la tête et du cou, de l’estomac, du col de l’utérus, de la vessie et sur la leucémie chez l’adulte3e,6,7a. On dispose de très peu d’information sur une relation éventuelle entre la FTA et l’apparition d’autres cancers. Une étude n’a fait ressortir aucune association avec le cancer de la vessie, et une étude a signalé des résultats variables8,9.

Dans cette revue, nous aborderons d’abord l’importance d’étudier la relation entre la FTA et le cancer, les risques de cancer associés au tabagisme actif, les différences dans les composantes de la fumée primaire et de la fumée secondaire, la mesure de l’exposition individuelle, l’exposition  de la population à la fumée secondaire et  l’importance particulière de la FTA au Canada en raison de la rigueur du climat. Ensuite, nous analyserons l’association entre la FTA et le cancer du poumon, en soulignant les difficultés inhérentes à l’étude de cette relation, les méta-analyses récentes de l’exposition par le conjoint et de l’exposition en milieu de travail, et l’ensemble plus restreint d’études, pour la plupart récentes, qui tentent d’estimer de façon quantitative l’exposition domestique et professionnelle à la FTA pendant toute la vie. Troisièmement, nous examinerons plus en profondeur la question du cancer du sein et de la FTA, un domaine où les connaissances sont en train de progresser rapidement et pourraient revêtir une importance considérable pour la santé publique. Cela peut aussi nous aider à mieux comprendre les causes du cancer du sein. Les recherches sur les cancers infantiles et la FTA, dont les résultats sont équivoques, et les recherches sur la FTA et le cancer du cerveau chez l’adulte, qui sont limitées, seront abordées rapidement par la suite. Le chapitre se termine sur une brève analyse des initiatives de santé publique destinées à réduire l’exposition à la FTA.

Méthodes et contexte des études  épidémiologiques examinées

Nous avons effectué une recherche dans MEDLINE (mots clés : passive smoking, second-hand smoke, environmental tobacco smoke et cancer) afin de trouver des études sur les risques de cancer chez les personnes qui n’avaient jamais fumé et qui avaient des antécédents d’exposition domestique et professionnelle à la FTA au cours de leur vie.

Il est souvent difficile de caractériser de vastes corpus disparates de données épidémiologiques de qualité variable. Les résultats présentés ici relativement au cancer du poumon et au cancer du sein sont fondés sur des méta-analyses structurées publiées, alors que nous disposions d’analyses moins rigoureuses et plus descriptives pour les autres sièges du cancer. La qualité des études incluses dans une méta-analyse influera sur la qualité  de cette dernière et, dans ce domaine d’étude, on a souvent observé une classification erronée de l’exposition à la FTA dans les études individuelles, ce qui a des répercussions sur les méta-analyses.

Contexte

Recherche sur la FTA et ses effets  sur la santé

Les premières revues détaillées portant sur la FTA et les risques pour la santé ont été effectuées de façon indépendante en 1986 par le National Research Council des États-Unis1c et le Surgeon General des États-Unis4. Les auteurs de ces deux revues ont conclu que la FTA pouvait causer le cancer du poumon chez des personnes qui n’avaient jamais fumé. En 1993, l’Environmental Protection Agency des États-Unis a produit un rapport volumineux10a fondé sur deux fois plus d’études que celles qui étaient disponibles en 1986. Au cours des six années suivantes, cinq autres revues approfondies ont été publiées par le National Health and Medical Research Council de l’Australie11, le Department of Health du Royaume-Uni12, l’Environmental Protection Agency de la Californie (Cal/EPA)2b, l’Organisation mondiale de la Santé13 et le National Toxicology Program des États-Unis14. Dans le cadre de sa série de monographies portant sur l’évaluation des risques cancérogènes pour l’humain, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a publié en 2004 un document intitulé Tobacco Smoke and Involuntary Smoking (volume 83)5a.

En 2005, la Cal/EPA a mis à jour son évaluation antérieure des effets sur la santé, comprenant des résumés fondés sur une approche tenant compte du poids de la preuve3f. À l’issue de cet examen, elle a conclu qu’il existait des données suffisantes établissant le lien de causalité entre l’exposition à la FTA et les effets sur la santé suivants (autres que le cancer) :

  • effets sur le développement – croissance fœtale réduite, faible poids la naissance, mort subite du nourrisson (MSN) et accouchement prématuré;
  • effets sur l’appareil respiratoire –  infections aiguës des voies respiratoires inférieures (p. ex. bronchite et pneumonie) chez les enfants, induction et exacerbation de l’asthme chez les enfants et les adultes, symptômes respiratoires chroniques chez les enfants, irritation oculaire et nasale chez les adultes, infections de l’oreille moyenne;
  • effets cardiovasculaires – mortalité par cardiopathie, morbidité associée aux cardiopathies aiguës ou chroniques et altération des propriétés des vaisseaux3g.

Les auteurs du rapport ont également conclu qu’il existait des données évoquant d’autres risques, notamment les suivants : avortement spontané, retard de croissance intra-utérin, impacts négatifs sur la cognition et le comportement, sensibilisation allergique, diminution de la croissance de la fonction pulmonaire, effets indésirables sur la fertilité et la fécondité, risque élevé d’accident vasculaire cérébral, symptômes respiratoires chroniques chez les adultes3h.

Tabagisme actif et cancer

L’intérêt que suscite la question de la FTA et du cancer n’est pas surprenant, étant donné la relation de causalité démontrée entre le tabagisme actif et un certain nombre de cancers. Dans sa monographie publiée en 1986, le CIRC a indiqué que le tabagisme causait les cancers du poumon, du larynx, de la cavité buccale, du pharynx, de l’œsophage (carcinome épidermoïde), du pancréas, de la vessie et du bassinet du  rein15. Les risques relatifs observés se situaient entre une augmentation de trois ordres de grandeur dans le cas du cancer du pancréas et de vingt ordres de grandeur dans le cas du cancer du poumon. Dans son évaluation de 2002, le groupe d’experts du CIRC a conclu que, de plus, il existait maintenant des indications suffisantes en faveur d’une relation causale entre le tabagisme et les cancers des fosses nasales et des sinus paranasaux, de l’œsophage (adénocarcinome), de l’estomac, du foie, du rein (hypernéphrome), du col utérin ainsi que la leucémie myéloïde. Les risques relatifs observés pour ces autres cancers reflétaient généralement des augmentations de deux à trois ordres de grandeur5b. On estime ainsi que le tabagisme actif serait à l’origine d’environ 45 % des cas de cancer chez les hommes et de 22 % chez les femmes aux États-Unis16. En 2002, plus de 36 000 décès (16,3 %) ont été attribués au tabagisme actif au Canada17a. Il s’agissait surtout de décès dus au cancer et aux coronaropathies.

Toxicité de la fumée secondaire comparativement à la fumée inhalée par le fumeur

Étant donné qu’entre les bouffées la cigarette brûle à une température bien inférieure (ce qui entraîne une combustion moins complète) et qu’une plus grande quantité de tabac est pyrolisée (par gramme de tabac) lorsque le feu couve que pendant l’inhalation (bouffée de  2 secondes comparativement à un intervalle de 60 secondes entre les bouffées), la fumée latérale d’une cigarette qui brûle contient de plus grandes quantités de plus de 40 agents cancérogènes connus et de dizaines d’agents cancérogènes possibles ou probables que le même volume de fumée principale. Par exemple, par gramme, la fumée latérale non diluée contient de 13 à 30 fois plus de nickel que la fumée principale non diluée provenant d’une cigarette sans filtre, jusqu’à 50 fois plus de formaldéhyde, de 2,5 à 3,5 fois plus de benzo[a]pyrène, 7,2 fois plus de cadmium, etc.10b,18 La plupart des Canadiens fument des cigarettes munies d’un filtre, lequel réduit l’exposition à certains agents cancérogènes dans la fumée principale mais ne réduirait en rien la nocivité de la fumée latérale. Ainsi, si la comparaison se fondait sur les cigarettes munies d’un filtre, le rapport entre les agents cancérogènes présents dans la fumée secondaire et dans la fumée principale serait généralement plus élevé. En outre, environ 80 % du tabac contenu dans une cigarette est habituellement brûlé entre les bouffées, de sorte que la pollution intérieure engendrée par la fumée de tabac provient surtout de la fumée latérale1d.

Toutefois, étant donné que la fumée latérale est diluée par l’air ambiant, la concentration réelle et, partant, l’exposition aux agents cancérogènes présents dans la fumée latérale sont considérablement plus faibles que dans le tabagisme actif. En outre, la concentration de fumée latérale dans l’air dépend d’autres facteurs, notamment : la superficie de la pièce, le taux de renouvellement d’air, le nombre de fumeurs présents dans la pièce et le nombre de cigarettes fumées. Habituellement, les non-fumeurs inhalent beaucoup moins de fumée de tabac que les fumeurs et sont exposés à des concentrations beaucoup plus faibles parce que, si le rythme de la respiration est le même, les fumeurs inhalent 35 ml par bouffée à une plus forte concentration, tandis que les fumeurs passifs inhalent environ 1 litre par respiration, à de plus faibles concentrations. On estime que l’exposition passive à la fumée chez les non-fumeurs représente, en moyenne, environ un pour cent de l’exposition à la fumée chez un fumeur actif, mais cette estimation est fondée principalement sur les taux de cotinine (un marqueur de l’exposition à la nicotine) mesurés dans l’urine10c,19. Il est beaucoup plus difficile de mesurer l’exposition relative aux agents cancérogènes entre les fumeurs et les non-fumeurs. Par exemple, une étude récente des métabolites de la 4(méthylnitrosamino)-1-(3-pyridyl)-1-butanone (NNK), un agent cancérogène spécifique du tabac, a révélé que les épouses non-fumeuses qui subissent une exposition passive à la fumée de leur conjoint fumeur présentaient une concentration urinaire moyenne des métabolites de la NNK correspondant à 5,6 % de celle de leur conjoint, et une concentration de cotinine correspondant à 0,6 % de celle de leur conjoint20.

Exposition à la FTA au Canada

La FTA pourrait revêtir une importance particulière pour les Canadiens qui, en raison de la rigueur du climat, passent une grande partie de l’année à l’intérieur. L’exposition aux contaminants de l’air intérieur, comme la FTA, dépend directement du nombre de renouvellements d’air à l’heure21. Un nombre supérieur de renouvellements d’air par temps froid entraîne une augmentation des coûts de chauffage, de sorte que le nombre de renouvellements d’air est maintenu au minimum acceptable, qui se limite généralement au contrôle de l’humidité et des odeurs22.

Près de 5,0 millions de Canadiens âgés de 15 ans ou plus (19 %) étaient des fumeurs actifs en 2005 (16 % des femmes et 22 % des hommes)23a. Ils fumaient en moyenne 15,7 cigarettes par jour23b. En outre, il y avait plus de 7,3 millions d’anciens fumeurs (28 % de la population adulte)23c. Par conséquent, un grand nombre de non-fumeurs canadiens sont toujours, ou étaient jusqu’à récemment, exposés régulièrement à la FTA à la maison (en tant qu’enfants ou adultes), dans leur milieu de travail et/ou socialement. En raison du grand nombre de personnes qui ont été exposées régulièrement, même de faibles augmentations du risque individuel associé à l’exposition à la FTA pourraient avoir des conséquences importantes sur un grand nombre de Canadiens.

Un moins grand nombre de Canadiens sont exposés à la FTA à la maison et au travail24. En 1996-1997, le tiers des enfants canadiens de moins de 12 ans (près de 1,6 million d’enfants), plus de 50 % des enfants des familles à faible revenu et 85 % des enfants vivant dans un ménage comptant un fumeur quotidien étaient exposés régulièrement à la FTA à la maison25. En 2005, la proportion des enfants canadiens âgés de moins de  12 ans qui étaient régulièrement exposés à la FTA au foyer avait diminué et s’établissait à 9 %23d.

Le Système national de surveillance accrue du cancer (SNSAC) a établi des estimations du pourcentage de Canadiens qui ont été exposés régulièrement à la FTA à un moment donné dans leur vie26. Le SNSAC a recueilli des données auprès d’un échantillon de population de plus de 5 000 sujets témoins âgés de 20 à 74 ans, issus de huit provinces canadiennes (Terre-Neuve, Nouvelle-Écosse, Île-du-Prince-Édouard, Ontario, Manitoba, Saskatchewan, Alberta et Colombie-Britannique) pour la période 1994-1997. Dans l’ensemble, 50 % des femmes avaient fumé activement à un certain moment dans leur vie, alors que 25 % étaient toujours des fumeuses au moment de l’entrevue. Sur les 50 % de femmes qui n’avaient jamais fumé, 84 % ont indiqué avoir vécu avec un fumeur pendant leur enfance ou à l’âge adulte ou encore avoir travaillé pendant au moins un an dans un milieu où leurs collègues fumaient régulièrement dans leur environnement immédiat. Le nombre médian d’années d’exposition passive signalé chez les femmes qui n’avaient jamais fumé s’établissait à 2727a. Le profil d’exposition à la FTA de ces participantes pourrait différer de celui de la population canadienne si certains facteurs corrélés au comportement tabagique (situation socio-économique, âge, etc.) influent sur la participation.

Exposition à la FTA dans divers milieux

De nombreuses études ont examiné les niveaux d’exposition à la FTA dans différents environnements, et plusieurs synthèses de ces études ont été publiés. Près de 100 études ont été examinées par Guerin et coll. en 199228a. Les études sur l’exposition à la FTA ont systématiquement montré que l’exposition est particulièrement élevée dans les bars29a. Des mesures directes de certains contaminants spécifiques de l’air, comme la nicotine, le monoxyde  de carbone et les particules fines, de même que les mesures des taux de cotinine sérique et urinaire chez les non-fumeurs qui travaillent dans des bars indiquent également des expositions élevées.

Dans une analyse qui faisait la synthèse des études publiées sur l’exposition passive à la fumée dans le milieu de travail, Siegel30 s’est basé sur les revues existantes et a établi que les niveaux mesurés de fumée de tabac dans les bars étaient de 4,4 à 4,5 fois plus élevés que dans les résidences comptant au moins un fumeur, et entre 3,9 et 6,1 fois plus élevés que dans les bureaux. Chaque estimation de l’exposition en milieu de travail était fondée sur 10 à 22 études différentes. Une analyse récente des études qui examinaient les concentrations moyennes de nicotine a déterminé que les taux de nicotine se situaient généralement entre 1 et 3 µg/m3 dans les maisons, entre 2 et 6 µg/m3 dans les bureaux, entre 3 et 8 µg/m3 dans les restaurants et entre 10 et 40 µg/m3 dans les bars28b. (Le lecteur trouvera d’autres informations sur l’exposition à la FTA sur le site Web suivant [en anglais seulement] : http://www.repace.com/fact_exp.html).

Difficultés inhérentes à l’étude de la FTA et du cancer

Plusieurs difficultés inhérentes à l’étude de la FTA et du cancer contribuent à l’incertitude qui entoure l’ampleur du risque lié à la FTA; ces difficultés comprennent la taille de l’échantillon, la quantification de l’exposition à la FTA, les augmentations relativement limitées du risque relatif, les erreurs de classification des personnes qui ont déjà fumé, les différences socio-économiques entre les fumeurs et les non-fumeurs et le nombre limité d’études qui ont recueilli des données autres que celles relatives à l’exposition à la FTA due  au conjoint.

Taille de l’échantillon

La taille insuffisante de l’échantillon constitue une limite dans plusieurs études relatives à la FTA, en particulier celles qui portent sur le cancer du poumon. Parmi les personnes qui n’ont jamais fumé, le cancer du poumon est une maladie rare, qui frappe environ 12 femmes pour 100 000 par année31a. En revanche, on estime qu’au Canada, en 2002, 90 % des cancers du poumon chez les hommes et 63 % chez les femmes auraient été attribuables au tabagisme actif17b. Par conséquent, il est extrêmement difficile et coûteux d’obtenir un échantillon de plusieurs centaines de personnes qui n’ont jamais fumé mais ont été atteintes d’un cancer du poumon. Premièrement, plus de 60 % des candidats potentiels se révéleront inadmissibles mais, en général, il faudra les interviewer pour le déterminer. Deuxièmement, le cancer du poumon a une létalité importante, de sorte qu’il faut détecter et interroger rapidement les cas, et certains décéderont cependant avant l’entrevue. (L’utilisation de personnes agissant comme des répondants substituts n’est probablement pas valide lorsqu’il s’agit de décrire l’exposition historique à la FTA dans le milieu de travail ou pendant l’enfance). Troisièmement, il faut utiliser une population de taille très importante pour être en mesure de terminer la collecte des données dans un délai approprié. Jusqu’ici, l’échantillon le plus important a été celui de l’étude du CIRC (650 cas  et 1 300 témoins), qui se déroulait dans  12 centres de recherche situés dans sept pays différents. Les différences  dans les méthodologies utilisées dans les divers centres (p. ex. types de sujets témoins), ainsi que dans l’environnement et le climat, et aussi dans les pratiques de travail ont pu réduire la cohérence des résultats.

Quantification de l’exposition à la FTA

La quantification de l’exposition à la FTA est une tâche complexe qui dépend de nombreux facteurs, dont la durée de l’exposition, la taille de la pièce, la saison, la ventilation et la source de l’exposition. Les chercheurs ont élaboré des questionnaires fournissant des mesures valides de l’exposition à la FTA32a, qui correspondent à des biomarqueurs de l’exposition à la fumée de tabac, comme les taux de cotinine urinaire. Les coefficients de corrélation pour l’association entre les estimations de l’exposition fondées sur le questionnaire et les concentrations des biomarqueurs sont cependant bas, variant entre 0,19 et 0,29. L’exposition historique à la FTA est difficilement mesurable, étant donné qu’il n’existe aucun biomarqueur qui permet d’estimer les niveaux d’exposition à long terme32b. La plupart des études ont utilisé comme unique mesure le fait de vivre avec un conjoint fumeur. Des études plus raffinées ont évalué l’usage du tabac dans les milieux domestique, social et professionnel des sujets, sur une base annuelle à compter de l’enfance. En revanche, vu que les personnes qui fument le font en général pendant une longue période et selon un profil constant (généralement un certain nombre de cigarettes par jour, à des intervalles réguliers), il est possible que ces indices simples de l’exposition historique (années-fumeur d’exposition à la FTA) permettent d’obtenir suffisamment d’information pour déceler les risques importants et distinguer, pour la majeure partie de la population, des différences relatives dans l’exposition globale.

Augmentations faibles du risque relatif

Les augmentations du risque relatif associées à l’exposition à la FTA seront habituellement modestes, témoignant du fait que l’exposition moyenne globale aux agents cancérogènes est plus faible dans le cas de la FTA que dans le tabagisme actif. Les estimations du risque relatif (RR) de cancer du poumon associé à la FTA étant d’environ 1,2 pour l’exposition par le conjoint chez les femmes (femmes qui ne fument mais vivent avec un conjoint qui fume)5c, on peut se demander si un biais, même léger, dans les études pourrait expliquer l’augmentation observée. Par exemple, des erreurs dans la classification du statut à l’égard du tabagisme pourraient introduire un biais.

Classification erronée des personnes  ayant déjà fumé

Un faible pourcentage de personnes qui ont déjà fumé indiqueront qu’elles n’ont jamais fumé. Étant donné que le tabagisme entraîne un risque relatif élevé de cancer du poumon, même une légère erreur de classification de cette nature pourrait accroître le risque de cancer du poumon chez les individus classés comme non-fumeurs et donc réduire le risque relatif entre ce groupe et les sujets classés comme fumeurs. Hackshaw et coll. ont évalué cette question et déterminé que les erreurs de classification observées (1,9 % à 7 %) ne diminueraient que très peu le rapport de cotes (RC) sommaire, soit de 1,26 à une valeur se situant entre 1,19 et 1,2133a. En outre, souvent les personnes qui mentent au sujet de leur usage du tabac ont cessé de fumer bien des années auparavant et fumaient généralement très peu33b, deux facteurs qui limitent le risque lié à leur usage de tabac.

Situation socio-économique et FTA

Les personnes de faible niveau socio-économique courent un risque plus élevé de souffrir de cancer du poumon34, et plusieurs enquêtes ont montré que l’exposition à la FTA était également plus élevée dans ce groupe35. Si un autre facteur lié au niveau socio-économique augmentait le risque de cancer du poumon (p. ex. la qualité de l’air ou l’alimentation), une association entre le cancer du poumon et la FTA pourrait être, au moins en partie, le résultat factice découlant du fait que le cancer du poumon et la FTA sont tous deux liés au niveau socio-économique. Un certain nombre d’études ont fait ressortir des associations positives entre le cancer du poumon et les niveaux de pollution de l’air extérieur ainsi que les mesures de la densité de la circulation. En revanche, le risque de cancer du sein est positivement associé à la situation socio-économique; les études qui ne prennent pas adéquatement en compte la situation socio-économique ou les caractéristiques liées à la reproduction pourraient s’avérer impuissantes à faire ressortir une association vraie. La population de faible niveau socio-économique présente des taux plus élevés de tabagisme et, partant, une plus forte probabilité d’exposition à la FTA.

Usage du tabac par le conjoint  et cancer du poumon

Une grande partie des études portant sur la FTA et le cancer du poumon ont été axées sur le risque associé à l’usage du tabac par le conjoint. S’il est vrai qu’il était nécessaire, initialement, de mettre l’accent sur cette question vu que très peu des premières études disposaient de meilleures mesures de l’exposition, il est néanmoins regrettable qu’il en soit toujours ainsi parce que : 1) avec une mesure binaire de l’exposition (conjoint fumeur ou non), toutes les personnes « exposées » sont classées dans une catégorie, bien que le gradient d’exposition soit important; 2) d’autres sources d’exposition importantes sont négligées, en particulier les expositions à la FTA dues aux parents et au milieu de travail, qui peuvent être inexistantes, égales ou bien supérieures à l’exposition due au conjoint. Par conséquent, en l’absence d’information sur l’exposition pendant l’enfance et au travail, de nombreuses femmes qui pourraient avoir eu une exposition totale importante à la FTA seront placées dans la catégorie de référence « non exposée à la FTA » pour l’exposition due au conjoint.

FTA et cancer du poumon

L’accent sur l’exposition due au conjoint découle en partie du fait que deux des premières études importantes, une réalisée au Japon36a et une autre en Grèce37, ont relevé un risque accru associé au fait d’avoir un conjoint fumeur. À l’époque, les épouses japonaises n’auraient vraisemblablement pas été exposées à une quantité importante de FTA d’une autre source, aussi les antécédents de tabagisme du mari étaient-ils un bon indicateur substitut de l’exposition de l’épouse à la FTA. Cette étude de cohorte a déterminé que le taux de décès par cancer du poumon chez les femmes qui n’avaient jamais fumé, mais dont le mari fumait, était de 45 % supérieur à celui observé chez les femmes qui n’avaient jamais fumé et dont le mari était non-fumeur.

Après la publication de ces résultats, d’autres chercheurs qui avaient déjà des bases de données sur le cancer du poumon les ont rapidement utilisées pour effectuer des analyses semblables. Mais souvent, la seule question concernant la FTA que les chercheurs posaient visait à déterminer si le mari fumait, bien que les femmes puissent avoir eu une exposition importante à la FTA au travail ou pendant leur enfance. En 1986, 12 autres analyses avaient été publiées; celles-ci ont été synthétisées dans la méta-analyse de Wald et ses collègues38.

Entre 1981 et 1996, 20 études cas-témoins et trois études de cohorte qui examinaient l’exposition à la FTA à la maison ont été publiées. Toutes les études, sauf trois, comprenaient moins de 50 cas de cancer du poumon chez des non-fumeurs, et la plupart mettaient uniquement l’accent sur l’usage du tabac par le conjoint. En 1997, Hackshaw et coll. ont publié une deuxième méta-analyse qui confirmait essentiellement les résultats de la première méta-analyse33c. Toutefois, les chercheurs disposaient alors de sept fois plus de cas, et les données englobaient plusieurs études beaucoup plus rigoureuses, approfondies et de plus grande envergure. Quinze études satisfaisaient aux trois critères de qualité pour inclusion dans la méta-analyse. Hackshaw et coll. ont calculé un risque relatif non ajusté de 1,24 (intervalle de confiance (IC) à 95 % : 1,13-1,36) chez les femmes qui n’avaient jamais fumé au cours de leur vie et vivaient avec un conjoint qui était un fumeur comparativement à celles qui vivaient avec un conjoint n’ayant jamais fumé. Une estimation corrigée tenant compte du biais possible qui serait introduit si des fumeurs atteints de cancer du poumon se déclaraient non-fumeurs a donné une estimation de 1,17 (IC à 95 % : 1,05-1,45). Comme les femmes peuvent être exposées à la FTA par d’autres personnes que par leur conjoint, il y aura inévitablement des erreurs de classification de l’exposition à la FTA chez certaines femmes étudiées. Pour tenir compte de ce phénomène, Hackshaw et coll. ont estimé que le rapport de cotes (RC) aurait été de 1,42 (IC à 95 % : 1,21-1,66) si l’on avait comparé l’exposition due au conjoint uniquement à celle des femmes qui n’ont vraiment eu aucune exposition33d.

Une méta-analyse canadienne récente de la FTA et du cancer du poumon a relevé des estimations du risque relatif comparables à celles des méta-analyses antérieures et n’a découvert aucune différence statistiquement significative dans les estimations des risques relatifs lorsque les études étaient regroupées selon la méthodologie utilisée39. La méta-analyse réalisée par le CIRC (2004) a fait état d’une estimation groupée du risque relatif pour l’exposition due au conjoint de 1,24 (IC à 95 : 1,14-1,34) chez les femmes, en se fondant sur 46 études, et de 1,37 (IC à 95 : 1,02-1,83) chez les hommes en se fondant sur 11 études5d. Les auteurs du rapport concluent que les non-fumeurs adultes exposés à la FTA courent un risque plus élevé de cancer du poumon.

Une association positive a été observée dans une vaste étude de cohorte européenne publiée en 2007. Les auteurs ont conclu que la FTA causait entre 16 et 24 % des cancers du poumon, principalement en raison de l’exposition liée au travail40. Une méta-analyse de la FTA en milieu de travail a fait ressortir une augmentation de 24 % du risque de cancer du poumon (RR 1,24, IC à 95 : 1,18-1,29) parmi les travailleurs exposés à la fumée de tabac ambiante41.

Exposition professionnelle à la FTA  et cancer du poumon

En 1994, 14 études avaient fourni des données sur les risques associés à l’exposition professionnelle à la FTA. Cinq méta-analyses sur la FTA en milieu de travail et le cancer du poumon ont été publiées entre 1994 et 1996, et chacune faisait état de ces 14 études. Dans les cinq méta-analyses, le risque relatif résumé lié à l’exposition à la FTA au travail était à peu près égal à 1. Notons cependant que ces méta-analyses ont toutes été réalisées par des employés ou des experts-conseils travaillant pour l’industrie du tabac42a. Parmi les 14 études incluses dans la méta-analyse, plusieurs présentaient des lacunes importantes sur le plan méthodologique en ce qui concerne l’exposition professionnelle à la FTA42b. Certaines études ne tenaient compte que de l’exposition actuelle en milieu de travail, tandis que d’autres avaient largement recours à des répondants substituts (ces personnes sont vraisemblablement incapables de fournir des données exactes sur les antécédents d’exposition professionnelle à la FTA à long terme) et d’autres encore incluaient des ex-fumeurs dans le groupe analysé. Une méta-analyse plus récente réalisée par Wells42c a établi des critères de qualité plus rigoureux et revu la pondération des études individuelles dans l’estimation résumée. En se fondant sur cinq études qui satisfaisaient à six critères de qualité, Wells a obtenu une estimation du risque résumé de 1,39 (IC à 95 % : 1,15-1,68). La méta-analyse réalisée par le CIRC (2004) a fait état d’une estimation groupée du risque relatif pour l’exposition en milieu de travail de 1,19 (IC à 95 % : 1,09-1,30) chez les femmes, en se fondant sur 19 études, et de 1,12 chez les hommes (IC à 95 % : 0,80-1,56) en se fondant sur 6 études5e.

Exposition professionnelle et domestique à la FTA pendant toute la vie et risque de cancer du poumon

Le tableau 1 résume les études récentes sur le cancer du poumon et la FTA chez les femmes, qui comprennent des mesures de l’exposition domestique et professionnelle à la FTA pendant toute la vie. L’étude de Fontham43a est la plus grande étude réalisée aux États-Unis et comporte des mesures détaillées de l’exposition; l’étude de Boffetta était une vaste étude menée dans 12 pays européens par l’entremise du CIRC32c, et des données de plusieurs autres études européennes figurant dans le tableau sont incluses dans l’étude de Boffetta.

Lorsque l’usage du tabac en milieu de travail n’est pas restreint, les concentrations moyennes mesurées de nicotine dépassent généralement celles qui sont notées dans les résidences des fumeurs et, dans certains milieux de travail, les concentrations  peuvent être plusieurs fois supérieures à la concentration moyenne dans les maisons29b. Le tableau 1 compare les risques dus au conjoint et les risques pour la catégorie la plus élevée (habituellement le quartile le plus élevé) d’exposition professionnelle et totale à la FTA. L’exposition à la FTA due au conjoint était généralement associée à des augmentations du risque pouvant atteindre 25 % dans les études individuelles, et un risque relatif résumé a été établi à 1,20 (IC à 95 % : 1,01-1,43). En revanche, les estimations du risque des études individuelles pour le quartile le plus élevé d’exposition professionnelle et d’exposition domestique combinées – et aussi pour les estimations de l’exposition professionnelle élevée – étaient souvent statistiquement significatives et montraient généralement des augmentations d’environ 50 % à 200 % (RC de 1,5 à 3,0). Les résultats d’une analyse récente réalisée au Canada44a concordent avec ceux d’autres analyses, bien que la taille de l’étude ait été relativement restreinte, ce qui rend les risques estimatifs quelque peu instables. Une estimation du risque résumé basée sur les neuf études chez les femmes n’ayant jamais fumé, mais qui faisaient partie de la catégorie d’exposition la plus élevée à la FTA domestique et professionnelle, pendant toute la vie, s’établissait à 1,78 (IC à 95 % : 1,49-2,12). Dans le cas des femmes qui faisaient partie de la catégorie la plus élevée d’exposition professionnelle, le risque résumé était de 2,25 (IC à 95 % : 1,81-2,79).

Il n’est pas étonnant d’observer un risque accru principalement chez les sujets qui ont été probablement les plus exposés. Ainsi, les études portant sur les non-fumeurs indiquent que seuls ceux qui font partie du quartile supérieur d’exposition passive présentent une élévation significative de la cotinine urinaire45a.

Tableau 1
Risque de cancer du poumon associé à l’exposition passive au tabac due au conjoint, en milieu de travail et totale chez les femmes n’ayant jamais fumé – études en population comportant au moins une évaluation de l’exposition domestique et professionnelle à la FTA à l’âge adulte
Étude Exposition due au conjoint Expositions domestique et professionnelle combinées – catégorie d’exposition élevée Exposition professionnelle – catégorie d’exposition élevée
Fontham et coll. 1994 (É.-U.)43b 1,23 (0,96-1,57) 1,74 (1,14-2,65) 1,86 (1,24-2,78)
Boffetta et coll. 1998 (Europe)32d a 1,11 (0,88-1,39) 1,49 (0,93-2,38) 1,87 (1,10-3,28)
Nyberg et coll. 1998 (Suède)86 1,05 (0,65-1,68) 2,52 (1,28-4,9) 2,51 (1,28-4,9)
Jockel et coll. 1998 (Allemagne)45b 1,12 (0,54-2,32) 3,24 (1,44-7,32) 3,10 (1,12-8,60)
Zhong et coll. 1999 (Chine)87 1,1 (0,8-1,5) 1,8 (1,1-2,8) 2,9 (1,8-4,7)
Kreuzer et coll. 2000 (Allemagne)88 0,96 (0,70-1,33) 1,39 (0,96-2,01) 2,52 (1,12-5,71)
Lee et coll. 2000 (Taïwan)89 2,2 (1,5-3,3) 2,8 (1,6-4,8) non signalé
Wang et coll. 2000 (Chine)90 non mentionné 1,51 (0,9-2,7) 1,93 (1,04-3,58)
Johnson et coll. 2001 (Canada)44b 1,21 (0,6-4,0) 1,82 (0,8-4,2) 1,58 (0,6-4,0)
Risques relatifs résumésb 1,20 (1,01-1,43) 1,78 (1,49-2,12) 2,25 (1,81-2,79)

a Les données de Nyberg, Jockel et les données antérieures de Kreuzer (173 cas sur 292) sont incluses dans l’étude européenne effectuée dans 12 centres, dans 7 pays.

b Calculés à l’aide de la méthode de DerSimonian et Laird91.

La FTA et le cancer du sein

Le cancer du sein est le cancer le plus souvent diagnostiqué chez les femmes au Canada, et les taux d’incidence chez les femmes de 50 ans et plus ont grimpé graduellement entre 1975 et 1992, mais ils se sont stabilisés à compter de 199346. Les facteurs de risque connus et éventuellement modifiables du cancer du sein chez la femme (principalement les facteurs associés à la reproduction et la sédentarité) sont à l’origine de moins de la moitié du risque de cancer du sein47. Les études publiées sur le cancer du sein et le tabagisme passif fournissent certaines données contradictoires concernant l’impact de l’exposition régulière prolongée à la FTA sur le risque de cancer du sein.

Dans le passé, la majorité des études qui se sont penchées sur le tabagisme actif et le cancer du sein n’ont pas observé d’association; certaines ont même indiqué un risque réduit48. Palmer et Rosenberg49a, dans leur revue de 19 études sur le cancer du sein qui satisfaisaient à certains critères de qualité précis, concernant leur capacité d’évaluer le risque lié au tabagisme, ont découvert que les risques relatifs variaient entre 0,93 et 1,3 pour les femmes qui fumaient au moins un paquet de cigarettes par jour comparativement à celles qui n’avaient jamais fumé. Ils ont conclu que les données actuelles semblaient confirmer l’absence de risque de cancer du sein lié au tabagisme. Toutefois, on a avancé que l’incapacité de faire ressortir un risque accru lié au tabagisme actif pourrait être attribuable au choix du groupe de référence50a. Dans les 19 études portant sur le tabagisme actif et le cancer du sein, le groupe de référence était exclusivement composé de personnes qui n’avaient jamais fumé, dont beaucoup avaient été invariablement exposées à la FTA.

Les tableaux 2 et 4 présentent un résumé des études publiées sur le cancer du sein et la FTA. Les caractéristiques de base de l’étude sont présentées au tableau 2; le tableau 3 résume les mesures de l’exposition, tandis que le tableau 4 présente les résultats en ce qui a trait au risque. Les études devaient satisfaire à deux critères de qualité de base :  1) elles devaient comprendre une mesure quantitative de l’exposition des adultes à la FTA et 2) n’inclure dans l’analyse que les femmes qui n’avaient jamais fumé activement. On trouvera ci-dessous une brève description des études, par ordre chronologique, suivie d’un résumé d’une méta-analyse récente faisant la synthèse des résultats.

Tableau 2
Études publiées sur le tabagisme passif et le risque de cancer du sein
Personnes n’ayant jamais fumé
Étude Pays Années Type d’étude Résultat Groupe d’âge Nombre de cas Nombre de témoins
Hirayama 199251a, a Japon 65-81 Prospective Décès 40+ 115 91 540
Sandler et coll. 198553a, a É.-U. – Caroline du Nord 79-81 Cas-témoins Diagnostic 15-59 32 177
Smith et coll.199454a, a Royaume-Uni 85-88 Cas-témoins Diagnostic < 36 94 100
Morabia et coll. 199655a Suisse 92-93 Cas-témoins Diagnostic < 75 126 620
Millikan et coll. 199863a É.-U. – Caroline du Nord 93-96 Cas-témoins Diagnostic 20+ 247 253
Lash et coll.199956a É.-U. – Massachusetts 83-86 Cas-témoins Diagnostic tous 120 406
Zhao et coll. 199957a Chine – Chengdu 94-97 Cas-témoins Diagnostic 26-82 252 259
Jee et coll. 199958a Corée 94-97 Prospective Diagnostic 18-65 138 157 298
Johnson et coll. 200027b Canada – 8 provinces 94-97 Cas-témoins Diagnostic 20-74 608 727
Wartenberg et coll. 200059a É.-U. 82-94 Prospective Décès 30-70+ 669 146 488
Delfino et coll. 200066a É.-U. ND Cas-témoins Diagnostic 40+ 64 60b
Marcus et coll. 200062a É.-U. – Caroline du Nord 93-96 Cas-témoins Diagnostic 20-74 445 423
Nishino et coll. 200161a Japon 84-92 Prospective Diagnostic 40+ 67 9 671
Egan et coll. 200260a É.-U. 82-96 Prospective Diagnostic 36-61 1 138 78 206
Kropp et coll. 200265a Allemagne 92-95 Cas-témoins Diagnostic < 51 197 454
Lash et coll. 200264a É.-U. – Massachusetts 87-93 Cas-témoins Diagnostic tous 305 249
Gammon et coll. 200467a É.-U. – Long Island NY 96-97 Cas-témoins Diagnostic tous 443 457
Reynolds et coll. 20043i,68a É.-U. – Californie 95-2000 Prospective Diagnostic tous 1 174 76 534
Shrubsole et coll. 20043j,70b Chine – Shanghai 96-98 Cas-témoins Diagnostic 25-64 1 013 1 117
Hanaoka et coll. 200571b Japon 90-99 Prospective Diagnostic 40-59 162 20 169

a Les estimations du risque ont été obtenues par suite de communications personnelles de Wells avec des auteurs52a.

b Delfino et coll. Les cas et les témoins ont été choisis parmi 391 femmes présentant une masse suspecte au sein détectée à la mammographie ou à l’examen clinique. Les cas étaient les 113 femmes souffrant d’un cancer du sein confirmé par l’examen histopathologique, tandis que les témoins étaient les 278 femmes présentant une affection mammaire bénigne. Pour cette recension, les témoins étaient les 107 « témoins à faible risque » présentant des seins normaux ou une affection mammaire bénigne à l’examen histopathologique, non proliférative.

Tableau 3
Études publiées sur le tabagisme passif et le risque de cancer du sein

 

Évaluation de l’exposition passive à la fumée
Étude Mesures de l’exposition Exposition durant l’enfance Exposition domestique à
l’âge adulte
Exposition professionnelle Autre exposition
Hirayama 1992a Antécédents de tabagisme du mari Non Antécédents de tabagisme du mari Non  
Sandler et coll. 1985a Antécédents pendant l’enfance
et antécédents du mari
Oui Antécédents de tabagisme du mari Non  
Smith et coll.1994a Domestique et professionnelle pendant toute la vie Antécédents détaillés Antécédents détaillés Antécédents détaillés  
Morabia et coll. 1996 Domestique et professionnelle
et sociale pendant toute la vie
Antécédents détaillés Antécédents détaillés Antécédents détaillés Sociale
Millikan et coll. 1998 Domestique Années avec un fumeur à la maison Vie avec un fumeur Non  
Lash et coll.1999 Domestique pendant toute la vie Oui Oui Non  
Zhao et coll. 1999 Antécédents de tabagisme passif pendant toute la vie Oui Oui Oui Oui
Jee et coll. 1999 Antécédents de tabagisme du mari Non Antécédents de tabagisme du mari Non  
Johnson et coll. 2000 Domestique et professionnelle pendant toute la vie Nombre de fumeurs dans chaque résidence Nombre de fumeurs dans chaque résidence Nombre de fumeurs dans chaque emploi/lieu de travail immédiat  
Wartenberg et coll. 2000 Antécédents de tabagisme du mari Non Antécédents de tabagisme du mari Nonb  
Delfino et coll. 2000 Adulte, domestique Non Adulte, domestique Non Non
Marcus et coll. 2000 Domestique Oui Vie avec un fumeur Non  
Nishino et coll. 2001 Vie avec un fumeur en 1984 Non Vie avec un fumeur
en 1984
Non Non
Egan et coll. 2002 Tabagisme de la mère et/ou du père, années de vie à l’âge adulte avec
un fumeur, exposition domestique
et professionnelle actuelle (1982)
Tabagisme de la mère et/ou du père Années de vie avec un fumeur, actuelle, 1982 Actuelle, en 1982 seulement Non
Kropp et coll. 2002 Antécédents d’exposition pendant l’enfance et d’exposition domestique et professionnelle Antécédents détaillés Antécédents détaillés Oui Non
Lash et coll. 2002 Années d’exposition, âge au début
de la vie avec un fumeur
Oui Années de vie avec
un fumeur
Non Non
Gammon et coll. 2004 Exposition par les parents
ou le conjoint
Oui Oui Non Non
Reynolds et coll. 2004 Domestique Oui Oui Non Non
Shrubsole et coll. 2004 Antécédents de tabagisme du conjoint et exposition professionnelle Non Antécédents de tabagisme du conjoint Heures par jour
au cours des
5 dernières années
Non
Hanaoka et coll. 2005 Domestique et professionnelle Oui Oui Catégorielle Non

a Les estimations du risque ont été obtenues par suite de communications personnelles de Wells avec des auteurs52b.

b Pour l’analyse principale, aucune exposition professionnelle

Voir la citation au tableau 2.

Tableau 4
Études publiées sur le tabagisme passif et le risque de cancer du sein
  Tabagisme passif Tabagisme actif
  Exposition globale Catégorie d’exposition la plus élevée Exposition globale
Étude Total Préb Postb Total Pré Post Total Pré Post
Hirayama 199236ca 1,32
(0,83-2,09)
1,50
(0,5-4,2)
1,0
(0,3-3,6)
  1,53
(0,78-3,02)
Âge 50 à 69
1,97
(1,07-3,6)
1,59
(1,01-2,52)
   
Sandler et coll. 1985a 1,62
(0,76-3,44)
7,1
(1,6-31,3)
0,9
(0,4-2,2)
      1,21
(0,58-2,51)
   
Smith et coll.1994a 2,53
(1,19-5,36)
2,69
(0,85-9,3)
S/O S/O 2,24
(0,75-6,68)
S/O   2,00
(0,98-4,12)
 
Morabia et coll. 1996 2,3
(1,5-3,7)
3,6
(1,6-8,2)
  2,5
(1,5-4,2)
    3,0
(1,9-4,8)
3,5
(1,5-7,8)
 
Millikan et coll. 1998 1,3
(0,9-1,9)
1,5
(0,9-2,8)
1,2
(0,7-2,2)
      1,1
(0,7-1,7)
1,4
(0,8-2,6)
1,7
(1,1-2,6)
Lash et coll.1999 2,0
(1,1-3,7)
2,1
(1,0-4,1)
2,0
(1,1-3,7)
2,1
(1,0-4,1)
    2,0
(1,1-3,6)
   
Zhao et coll. 1999 2,36
(1,66-3,66)
2,56
(1,63-4,01)
2,38
(1,66-3,40)
      3,54
(1,36-9,18)
   
Jee et coll. 1999 1,3
(0,9-1,8)
    1,7
(1,0-2,8)
         
Johnson et coll. 2000 1,48
(1,06-2,07)
2,3
(1,2-4,6)
1,2
(0,8-1,8)
  2,9
(1,3-6,6)
1,4
(0,9-2,3)
  2,3
(1,2-4,5)
1,5
(1,0-2,3)
Wartenberg et coll. 2000 1,0
(0,8-1,2)
1,1
(0,8-1,6)
  1,0
(0,8-1,4)
    1,0
(0,8-1,2)
   
Delfino et coll. 2000 1,78
(0,77-4,11)
          1,25
(0,27-5,82)
   
Marcus et coll. 2000 0,8
(0,6-1,1)
          1,2
(0,8-1,6)
   
Nishino et coll. 2001 0,58
(0,32-1,1)
               
Egan et coll. 2002 1,07
(0,88-1,30)
    1,03
(0,86-1,24)
    1,15
(0,98-1,34)
   
Kropp et coll. 2002 1,61
(1,08-2,39)
    1,83
(1,16-2,87)
    1,45
(0,96-2,19)
   
Lash et coll. 2002 0,85
(0,63-1,10)
    0,75
(0,47-1,2)
    0,90
(0,8-1,0)
   
Gammon et coll. 2004 1,04
(0,81-1,35)
1,21
(0,78-1,90)
0,93
(0,68-1,29)
1,22
(0,90-1,66)
    1,33
(0,97-1,83)
0,98
(0,54-1,78)
1,08
(0,72-1,62)
Reynolds et coll. 2004c 0,94
(0,82-1,07)
0,93
(0,71-1,22)
    1,27
(0,84-1,92)
0,87
(0,73-1,03)
1,25
(1,02-1,53)
0,96
(0,55-1,68)
1,21
(0,95-1,54)
Shrubsole et coll. 2004d 1,02
(0,81-1,29)
1,10
(0,83-1,46)
             
Hanaoka et coll. 2005 1,1
(0,8-1,6)
2,6
(1,3-5,2)
0,6
(0,4-1,0)
           

Vide = Non signalé
S/O = Sans objet

a Les estimations du risque ont été obtenues par suite de communications personnelles de Wells avec des auteurs52c.

b Pré = Préménopause, Post = Postménopause

c Reynolds et coll. 2004, catégories de forte exposition passive au tabac, selon la lettre de Reynolds et coll. (2006)69a.

d Shrubsole et coll. (2004) ont combiné l’exposition due au conjoint ou au milieu de travail seulement et l’exposition due au conjoint et au milieu de travail.

C’est une étude de cohorte réalisée au Japon51b qui a initialement suscité de l’intérêt à l’égard du cancer du sein et de la FTA. Cette étude a révélé que les décès dus au cancer du sein affichaient une hausse de 32 % chez les femmes dont le mari fumait52d. Selon une étude cas-témoins menée en Caroline du Nord53b, il existait une augmentation de 62 % du risque de cancer du sein chez les femmes exposées à la FTA, en particulier chez les femmes non ménopausées52e. Une étude cas-témoins britannique, portant sur le cancer du sein chez les femmes âgées de moins de 37 ans, a noté que le risque associé à la FTA était plus de deux fois supérieur dans le sous-ensemble de cas et de témoins pour lesquels l’exposition au tabagisme passif était connue54b.

À partir de ces observations, Morabia a effectué une étude cas-témoins détaillée en Suisse, pour évaluer directement l’impact de la FTA sur le cancer du sein55b. L’étude a évalué les antécédents annuels détaillés du tabagisme actif et passif dans les milieux domestique, professionnel et social de 244 femmes atteintes de cancer du sein et de 1 032 sujets témoins de la population. Parmi ces femmes, 126 cas et 620 témoins ne subissaient pas d’exposition au tabagisme actif. Le travail de validation était enrichi par la mesure des concentrations urinaires de cotinine chez les sujets. Dans ces quatre études précédentes, les RC associés aux niveaux les plus élevés d’exposition s’approchaient de 2,0 ou étaient supérieurs à ce chiffre. L’étude suisse, qui a évalué le plus exactement le niveau d’exposition à la FTA et a limité cette catégorie d’exposition à au moins une heure par jour pendant au moins un an, a déterminé que les RC étaient respectivement de 3,1 (IC à 95 % : 1,3-7,5) et 3,2 (IC à 95 % : 1,5-6,5) pour une exposition passive de moins de 50 heures et de plus de 50 heures/jour-années. Wells a calculé des risques relatifs résumés pour quatre études de 1,83 (IC à 95 % : 1,40-2,40) pour le tabagisme passif et de 2,17 (IC à 95 % : 1,63-2,88) dans le cas des personnes qui avaient déjà fumé activement52f.

Lash et Aschengrau56b dans une étude cas-témoins réalisée au Massachusetts auprès de 265 cas et 765 témoins, ont également noté un risque deux fois plus élevé associé à l’exposition passive et au tabagisme actif. C’étaient les femmes exposées à la FTA avant l’âge de 12 ans qui présentaient les risques les plus élevés. L’échantillon était composé principalement de femmes ménopausées. Une étude effectuée par Zhao et coll.57b à Chengdu, en Chine, a noté que le risque de cancer du sein était plus de deux fois supérieur dans le cas du tabagisme passif (RC 2,36; IC à 95 % : 1,66-3,66) et du tabagisme actif (RC 3,54; IC à 95 % : 1,36-9,18).

Johnson et coll. ont présenté les résultats d’une vaste étude cas-témoins canadienne (805 femmes non ménopausées et 1 512 femmes ménopausées présentant un cancer primitif du sein nouvellement diagnostiqué et 2 438 témoins issus de la population)27c. Parmi les femmes non ménopausées qui n’avaient jamais fumé activement, l’exposition régulière à la FTA était associée à un RC ajusté de cancer du sein de 2,3 (IC à 95 % : 1,2-4,6). L’exposition à la FTA montrait une forte tendance dose-réponse (test de tendance p < 0,001) avec un RC de 2,9 ( IC à 95 % : 1,3-6,6) pour une exposition domestique et/ou professionnelle à la FTA de plus de 35 ans. Lorsqu’on a comparé les femmes non ménopausées qui avaient déjà fumé activement aux femmes qui n’avaient jamais eu d’exposition passive ou active régulière à la fumée, le RC ajusté pour le cancer du sein était également de 2,3 (IC à 95 % : 1,2-4,5). Parallèlement, une comparaison directe des femmes qui avaient déjà fumé activement et des femmes qui n’avaient jamais fumé activement, abstraction faite du tabagisme passif, a révélé qu’il n’y avait pas d’augmentation du risque de cancer avant la ménopause, ce qui concorde avec la méta-analyse de Palmer et Rosenberg sur le tabagisme actif49b.

Parmi les femmes ménopausées de l’étude canadienne qui n’avaient jamais fumé activement, une exposition régulière à la FTA était associée à un RC ajusté de cancer du sein de 1,2 (IC à 95 % : 0,8-1,8), et un RC de 1,4 (IC à 95 % : 0,9-2,3) était observé pour le quartile de femmes le plus exposées. Le RC ajusté du risque de cancer du sein après la ménopause chez les femmes qui avaient fumé activement comparativement aux femmes qui n’avaient jamais été exposées régulièrement, que ce soit de façon passive ou active, à la fumée s’établissait à 1,5 (IC à 95 % : 1,0-2,3). Des relations dose-réponse statistiquement significatives ont été observées avec l’augmentation du nombre d’années de tabagisme, l’augmentation du nombre de paquets fumés par année et la diminution du nombre d’années depuis l’abandon du tabac. Les femmes qui avaient fumé pendant 35 ans ou plus avaient un RC ajusté de 1,7 (IC à 95 % : 1,1-2,7). Le tabagisme passif et actif était associé respectivement à une augmentation de 50 % à 95 % du risque chez les femmes ménopausées les plus jeunes (âgées de moins de 62 ans) alors que le risque était presque nul pour les femmes plus âgées (de 63 à 75 ans).

Une étude de cohorte prospective coréenne a obtenu des résultats très semblables à ceux de l’étude canadienne. L’étude de cohorte portant sur 165 000 fonctionnaires coréens et leurs conjointes incluait 138 cas de cancer du sein avant la ménopause et après la ménopause. Jee et coll. ont noté un risque relatif global de 1,2 pour les épouses des ex-fumeurs, 1,3 pour les épouses des fumeurs actuels et 1,7 (IC à 95 % : 1,0-2,8) pour les épouses des fumeurs actuels qui avaient fumé pendant au moins 30 ans58b. Un suivi prolongé de la cohorte a maintenant permis d’étudier 506 nouveaux cas de cancer du sein. Des analyses préliminaires des données semblent indiquer que les femmes qui ont vécu avec des hommes qui fumaient 20 cigarettes et plus par jour avaient un risque relatif de 2,1 (IC à 95 % :  1,5-3,0) de cancer du sein avant l’âge de 50 ans et de 1,6 (IC à 95 % : 1,0-2,6) à l’âge de 50 ans ou plus. (Communication personnelle avec l’auteur, juillet 2000.)

Deux vastes études de cohorte américaines n’ont cependant pas trouvé d’association entre la FTA et le risque de cancer du sein. Une étude de cohorte utilisant la cohorte CPS-II (Cancer Prevention Study 2) de l’American Cancer Society59b a examiné le cancer du sein, dans le cadre d’un suivi de 12 ans de 147 000 épouses qui n’avaient jamais fumé, et n’a relevé aucune augmentation globale du risque de décès par cancer du sein associé au fait de vivre avec un conjoint fumeur (RR 1,0). Une analyse de la cohorte de l’étude sur la santé des infirmières (Nurses Health Study) a relevé un risque relatif de cancer du sein pour l’exposition passive régulière au travail et à la maison (en 1982) de 0,90 (IC à 95 % : 0,67-1,22), tandis que le risque relatif pour le tabagisme actif était de 1,04 (IC à 95 % : 0,94-1,15)60b. Une étude de cohorte japonaise n’a pas non plus observé d’augmentation du risque (RR 0,6)61b.

Deux études cas-témoins réalisées en Caroline du Nord et dont font état Marcus et coll.62b et Millikan et coll.63b n’ont pas observé de risque accru associé à la FTA chez les adolescents ou chez les adultes. Toutefois, même si l’exposition passive au tabac pendant l’enfance a été quantifiée, ces études comportaient chacune une  seule question sur l’exposition à la FTA à l’âge adulte, soit : est-ce que le sujet avait vécu avec un fumeur lorsqu’il avait 18 ans et plus?

À partir d’un nouveau groupe de cas et de témoins, Lash et Aschengrau64b ont été incapables de reproduire les résultats antérieurs relativement à un risque accru de cancer du sein associé à l’exposition à la FTA, et ils n’ont observé aucun effet associé au tabagisme actif (RC 0,72, IC à 95 % : 0,55-0,95), ou au tabagisme passif (RC 0,85, IC à 95 % : 0,63-1,1). Une récente étude cas-témoins allemande65d a cependant signalé un risque accru associé à la FTA (RC 1,59, IC à 95 % : 1,06-2,39) et au tabagisme actif (RC 1,45, IC à 95 % : 0,96-2,19).

Delfino et ses collègues66b ont examiné la question du génotype de la N-acétyltransférase 2 (NAT2) en regard du tabagisme et du risque de cancer du sein. Ils n’ont trouvé aucune indication que la NAT2 était soit un facteur de risque de cancer du sein, soit qu’elle altérait la susceptibilité à la fumée du tabac, mais ils ont observé des augmentations modestes du risque chez les femmes exposées à la FTA. L’étude de Gammon et ses collègues67b n’a pas relevé d’association entre la FTA et le cancer du sein en général (RC 1,04, IC à 95 % : 0,81-1,35), mais elle a fait ressortir un risque significativement plus élevé chez les femmes qui vivaient avec un conjoint fumeur depuis plus de 27 ans (RC 2,10, IC à 95 % : 1,47-3,02).

Reynolds et coll. (2004) ont effectué une étude portant sur le tabagisme passif et actif auprès de la cohorte de la California Teachers Study68b. Ils ont fait état d’un risque élevé chez les fumeuses actuelles. Par rapport aux femmes n’ayant jamais fumé qui n’étaient pas exposées à la FTA à la maison, le rapport de risques était de 1,25 (IC à 95 % : 1,02-1,53). L’exposition à la FTA était définie comme étant le fait d’avoir déjà vécu avec un fumeur pendant l’enfance ou à l’âge adulte. Aucune association n’a été signalée entre l’exposition à la FTA et le cancer du sein chez les femmes n’ayant jamais fumé, bien qu’une analyse révisée portant sur les femmes âgées de moins de 50 ans au moment du diagnostic ait fait ressortir un risque de 1,27 (IC à 95 % : 0,84-1,92) chez les femmes exposées à la maison aussi bien pendant l’enfance qu’à l’âge adulte69b.

Shrubsole et coll. (2004) ont utilisé les données cas-témoins de la Shanghai Breast Cancer Study menée en population et n’ont pas signalé d’association avec le tabagisme du conjoint70c. Certaines données évoquaient un risque élevé associé à l’exposition à la FTA en milieu de travail pendant cinq heures ou plus par jour (RC 1,6, IC à 95 % : 1,0-2,4) et d’un profil dose-réponse significatif (p = 0,02). Hanaoka et coll. ont réalisé une étude sur le tabagisme actif et le tabagisme passif dans une cohorte de femmes japonaises âgées de 40 à 59 ans, qui ont été suivies pendant  dix ans71c. On a signalé un risque élevé associé au tabagisme actif et au tabagisme passif chez les femmes non ménopausées, mais non chez les femmes ménopausées. Parmi les femmes qui n’étaient pas ménopausées au début de l’étude, en utilisant comme témoins des femmes qui n’avaient jamais fumé activement ni été exposées à la FTA, le RR pour les femmes ayant déjà fumé était de 3,9 (IC à 95 % : 1,5-9,9). Parmi les femmes non ménopausées au début de l’étude, le RR pour l’exposition domestique ou professionnelle/publique à la FTA chez les femmes n’ayant jamais fumé activement était de 2,6 (IC à 95 % : 1,3-5,2).

Plausibilité sur le plan biologique

Du point de vue biologique, il est plausible que les sièges de cancer qui ne sont pas directement en contact avec la fumée de tabac puissent être affectés par celle-ci. Par exemple, l’incidence des cancers du pancréas, du col utérin et de la vessie est plus élevée chez les fumeurs72. Petrakis et coll.73a,74a ont découvert la présence de mutagènes, originant de la fumée de cigarette, dans le liquide de sécrétion mammaire des femmes non allaitantes, et l’on a détecté dans le liquide de sécrétion mammaire des fumeuses des concentrations de nicotine plus élevées que dans le plasma75.

Étant donné que les mutagènes présents dans la fumée de cigarette s’accumulent dans  les tissus mammaires des femmes non allaitantes73b,74b, il est biologiquement plausible que l’exposition à la fumée de tabac soit liée au cancer du sein. Des composés semblables à ceux qu’on trouve dans la fumée de tabac (p. ex. 7,12-diméthylbenz(a)anthracène [DMBA]) sont de puissants agents cancérogènes mammaires chez  les animaux76.

Un certain nombre d’études ont révélé que le tabagisme passif et le tabagisme actif étaient tous les deux de plus puissants facteurs de risque de cancer du sein chez les femmes non ménopausées que chez les femmes ménopausées, ce qui laisse croire qu’il pourrait exister un sous-groupe de femmes présentant une susceptibilité accrue au cancer du sein lorsqu’elles sont exposées (de façon passive ou active) et dont le risque s’exprime après une exposition relativement faible (et donc principalement à un jeune âge). Des études récentes ont évoqué la possibilité que le phénotype de la N-acétylation puisse influer sur le risque de cancer du sein. L’enzyme responsable de l’acétylation agit sur des agents cancérogènes communs comme ceux qu’on retrouve dans la fumée de cigarette. Il pourrait aussi accroître les risques observés chez les femmes exposées à la fumée secondaire. Environ la moitié des femmes de race blanche ont des enzymes d’acétylation défectueuses, et les individus appartenant à ce groupe sont appelés « acétylateurs lents »77. Les données recueillies jusqu’ici sont ambivalentes en ce qui concerne l’influence, s’il en existe une, du phénotype d’acétylation sur le risque de cancer du sein et le lien éventuel avec le tabagisme passif.

Comme dans toutes les études épidémiologiques d’observation, il pourrait y avoir des facteurs de risque qui sont corrélés à l’exposition à la fumée de tabac et au cancer du sein qui sont inconnus ou pour lesquels les données ne sont pas recueillies de façon adéquate et qui pourraient fournir une autre explication aux résultats obtenus78. L’incapacité des études positives à observer une différence sur le plan de l’ampleur du risque entre le tabagisme actif et le tabagisme passif, résultat qui semble contre-intuitif, tend à réfuter l’existence d’une relation de causalité. Un certain nombre d’études positives n’ont pas fait ressortir de relation exposition-réponse.

Méta-analyses relatives au cancer du sein

Afin d’analyser l’hétérogénéité du risque parmi les 20 études publiées indiquées ci-dessus, les auteurs d’une méta-analyse récente se sont penchés sur l’impact des facteurs suivants sur le risque observé de cancer du sein : le plan expérimental (étude cas-témoins ou étude de cohorte); le statut par rapport à la ménopause (femmes  non ménopausées ou ménopausées);  la date de la publication (avant ou après le 1er janvier 2000); le lieu de l’étude (Europe, Amérique de Nord ou Asie); le degré de contrôle des variables confusionnelles;  et la qualité (exhaustivité) de l’évaluation  de l’exposition à la FTA (à vie)79a. À la lumière des estimations du risque provenant de  19 études satisfaisant aux critères de qualité de base, les auteurs de la méta-analyse ont observé une estimation groupée du risque résumé de 1,27 (IC à 95 % : 1,11-1,45) associée à une exposition régulière prolongée à la FTA chez les femmes qui n’avaient jamais fumé de leur vie. C’était la qualité de l’évaluation de l’exposition qui permettait le mieux de distinguer le niveau de risque observé. Les cinq études qui comprenaient l’évaluation la plus complète de l’exposition (données quantitatives à long terme sur les trois principales sources  d’exposition à la FTA, soit l’exposition pendant l’enfance, l’exposition à l’âge adulte à la maison et au travail) ont obtenu une estimation groupée du risque supérieure pour les non-fumeuses exposées à la FTA de 1,90 (IC à 95 % : 1,53-2,37). Les études faisant appel à des mesures moins complètes de l’exposition ont fait ressortir une faible augmentation du risque (1,08). En ce qui concerne le cancer du sein avant la ménopause, le risque global associé  à l’exposition à la FTA était de 1,68 (IC à 95 % : 1,33-2,12). Les études comportant de meilleures mesures de l’exposition ont obtenu une estimation du risque avant la ménopause de 2,19 (IC à 95 % : 1,68-2,84). La figure 1 résume les estimations du risque avant la ménopause de chaque étude pour toutes les femmes exposées. Chez les femmes qui avaient fumé, l’estimation du risque de cancer du sein était de 1,53 (IC  à 95 % : 1,22-1,91) lorsqu’on comparait les fumeuses aux femmes qui n’avaient jamais fumé activement ni subi une exposition passive régulière; l’estimation était de 2,08 (IC à 95 % : 1,44-3,01) lorsque l’évaluation de l’exposition était plus complète et de 1,15 (IC à 95 % : 0,98-1,35) lorsqu’elle l’était moins.

Figure 1
Méta-analyse sur le tabagisme passif et le risque de cancer du sein avant la ménopause chez les femmes n’ayant jamais fumé79b.
Estimations du risque individuel et du risque résumé chez les femmes qui ont déjà subi une exposition passive régulière à la fumée du tabac, stratifiées en fonction de l’exhaustivité de l’évaluation de l’exposition passive à la fumée du tabac et du plan expérimental. Dans le cas de Reynolds et coll., 2004, une nouvelle estimation du risque tirée de la lettre de Reynolds et coll. (2006)69c a été présentée relativement aux femmes exposées pendant l’enfance et à l’âge adulte (le risque pour toute les femmes exposées n’est pas indiqué).

Le cancer du sein et la FTA :  Résumé et conclusions

Parmi les études sur le cancer du sein et la FTA, les estimations du risque présentent un grand degré d’hétérogénéité. En général, les études de cohorte ont relevé des risques plus faibles que les études cas-témoins. Dans les études qui ont présenté les données en fonction du statut par rapport à la ménopause, les risques relatifs étaient en général plus élevés chez les femmes non ménopausées que chez les femmes ménopausées. Il existait également des différences entre les études quant à la mesure dans laquelle les variables confusionnelles étaient prises en compte et quant au degré d’exhaustivité de l’exposition passive à la fumée du tabac.

Les études de cohorte prospectives sont généralement considérées comme supérieures sur le plan méthodologique aux études cas-témoins, parce qu’elles ne présentent habituellement pas les faiblesses suivantes qui, dans les études cas-témoins, sont à tout le moins des problèmes hypothétiques : biais lié aux non-réponses, données indirectes et faibles taux de réponse. Si les cas sont plus nombreux que les témoins à se rappeler les périodes où ils ont vécu ou travaillé avec des fumeurs, cela peut entraîner une augmentation artificielle du risque. Tous les facteurs suivants tendent à réfuter l’hypothèse voulant que les biais potentiels propres aux études cas-témoins soient responsables des augmentations observées du risque : le fait que trois études de cohorte asiatiques (donc non affectées par les problèmes propres aux études cas-témoins) aient mis en évidence un risque accru et des relations dose-réponse; le fait que les études de cohorte et les études cas-témoins dont les mesures de l’exposition laissent à désirer observent des estimations semblables plus faibles du risque résumé; le fait que ce type de biais ne semble pas avoir influé de façon importante sur les études cas-témoins portant sur la FTA et le cancer du poumon ou la cardiopathie; le fait que le risque est de façon assez constante plus élevé avant la ménopause qu’après la ménopause dans ces études cas-témoins.

Une autre explication possible pourrait être l’incapacité de nombreuses études de  cohorte (et des études cas-témoins dont l’évaluation de l’exposition laissait à désirer) d’identifier de manière adéquate le groupe témoin non exposé. Ainsi, dans l’analyse principale de l’étude de cohorte américaine CPS-II, les renseignements concernant l’exposition à la FTA se limitaient aux antécédents de tabagisme du conjoint et à l’exposition en milieu de travail et à la maison en 1982 seulement. On n’a pas recueilli, dans le cadre de l’étude, de l’information sur les antécédents d’exposition des femmes à la FTA en milieu de travail, pendant l’enfance ou à la maison, mais en raison d’une personne autre que le conjoint. Dans une étude nord-américaine, le fait de ne pas tenir compte de ces types d’exposition à la FTA risque d’entraîner d’importantes erreurs de classification du statut du sujet sur le plan de l’exposition80. Dans l’analyse de la relation dose-réponse, seulement 50 % des femmes ont été considérées comme exposées à la FTA en raison de leur conjoint59c. D’autres études qui ont examiné les principales sources d’exposition à la FTA, notamment à la maison et au travail et, parfois, dans un contexte social, ont découvert qu’entre 80 et 95 % des femmes étaient exposées à la FTA27d,43c,56c. L’étude de cohorte sur les infirmières, la deuxième plus vaste étude de cohorte américaine, a également recueilli de l’information sur l’exposition actuelle en milieu de travail en 198260c, et la troisième étude sur les enseignantes de la Californie n’a fait état que de l’exposition domestique68c. Cette classification erronée peut sérieusement « diluer » les estimations du risque44c. Les résultats sont particulièrement divergents pour les femmes fortement exposées à  la FTA29c.

Le CIRC a conclu en 2002 que les données globales sur la FTA et le cancer du sein ne corroboraient pas l’existence d’une relation de causalité5f. Bien que quatre des dix études cas-témoins examinées aient fait ressortir des augmentations significatives du risque, les études prospectives, dans l’ensemble, n’ont pas fait état d’un risque accru. L’absence de relation dose-réponse positive tend aussi à réfuter l’existence d’une association. L’évaluation effectuée par le CIRC portait uniquement sur les  15 études relatives à la FTA et au cancer du sein qui étaient disponibles au milieu de 2002 et, par conséquent, elle n’incluait pas plusieurs études de cohorte publiées depuis 2002, lesquelles ont évoqué des risques liés au tabagisme actif. De plus, le document du CIRC ne présentait que des données descriptives sur les diverses études ainsi qu’une évaluation non systématique de la qualité de chacune. On n’a effectué aucune méta-analyse dans le but de tenter de synthétiser les 15 études ou d’examiner l’impact des caractéristiques ou de la qualité de l’étude, des sous-populations ou du statut par rapport à la ménopause sur le risque observé.

Par opposition, l’EPA de la Californie est devenue le premier organisme soucieux de l’hygiène du milieu à juger concluante3i l’association entre le cancer du sein avant la ménopause et la FTA3j, en se fondant, en partie, sur la méta-analyse publiée en 2005 qui faisait état d’un risque global de cancer du sein avant la ménopause associé à la FTA de 1,68 (IC à 95 % : 1,33-2,12) chez les non-fumeuses à vie79c. Un facteur a joué un rôle : le fait que des études additionnelles étaient disponibles, dont cinq sur la FTA et le cancer du sein. Un second facteur explique la conclusion de l’EPA de la Californie :  en utilisant une population témoin de  femmes n’ayant jamais fumé non exposées à la FTA, même s’il continuait d’y avoir une certaine hétérogénéité dans les résultats des études, les études examinées ont fourni des preuves du rôle du tabagisme actif en tant que facteur de causalité du cancer du sein, y compris des preuves d’une relation dose-réponse. Un sommaire et un élargissement de la recension effectuée en 2005 par la Cal/EPA ont également permis d’arriver à la conclusion qu’il existait un lien causal entre la FTA et le cancer du sein chez les femmes non ménopausées81a. D’autres  études ont conclu que la controverse n’avait pas encore été résolue en ce qui concerne la FTA et le cancer du sein82a.

L’existence d’une relation entre la FTA et le cancer du sein a de lourdes conséquences sur la santé publique. Dans la vaste étude canadienne en population, plus de 90 % des sujets ont déclaré avoir subi une exposition régulière à la fumée du tabac à un moment ou un autre. Plus de 50 % des femmes avaient fumé régulièrement à un moment quelconque de leur vie et 40 % des femmes (qui toutes n’avaient jamais fumé de leur vie) avaient été exposées régulièrement à la FTA à une certaine période de leur vie. Contrairement à la majorité des autres facteurs établis de cancer du sein, l’exposition à la FTA est un facteur qu’il est possible de modifier au moyen de politiques publiques. Il faudra mener d’autres études afin de préciser les caractéristiques de l’exposition dans la relation entre la FTA et le cancer du sein.

FTA et cancer du cerveau

Les données sur le tabagisme passif et le risque de cancer du cerveau chez l’adulte sont fondées sur quatre études. L’étude de la mortalité dans une cohorte réalisée au Japon par Hirayama36b et fondée sur 34 décès seulement a relevé l’association la plus étroite, avec une augmentation supérieure à trois ordres de grandeur de la mortalité due au cancer du cerveau parmi les épouses non fumeuses de fumeurs. Le risque relatif variait selon le nombre de cigarettes fumées par le mari par jour : il était de 3,0 (IC à 95 % : 1,1-8,6) pour 1 à 14 cigarettes par jour, 6,3 (IC à 95 % : 2,0-19,4) pour 15 à 19 cigarettes et 4,3 (IC à 95 % : 1,5-12,2) pour 20 cigarettes ou plus. Une étude cas-témoins réalisée aux États-Unis et comprenant seulement 11 cas chez des non-fumeurs53c a noté des risques accrus de certains types de cancer, y compris une augmentation non significative du risque de cancer du cerveau lié au tabagisme du mari mais non de l’épouse. Dans une étude cas-témoins réalisée aux États-Unis portant sur le méningiome intracrânien et le tabagisme, les résultats n’étaient pas constants dans le cas du tabagisme actif, mais parmi les personnes qui n’avaient jamais fumé activement, le tabagisme passif d’un conjoint était associé à un risque accru chez les sujets des deux sexes (n = 95 cas, 202 témoins; RC 2,0, IC à 95 % :1,1-3,5)83a.

L’Adelaide Adult Brain Cancer Study84a était une des dix études cas-témoins suivant un même protocole qui ont été coordonnées par le CIRC et qui recueillaient des données sur l’exposition passive au tabac due aux parents, à un conjoint ou aux collègues de travail. Les chercheurs ont noté des risques estimatifs accrus de méningiome (RC 2,5, IC à 95 % : 1,0-6,0) et de gliome (RC 1,35, IC à 95 % : 0,6-2,7) associés à une exposition passive au cours de la vie. Malheureusement, l’étude ne distinguait pas les fumeurs des non-fumeurs, de sorte qu’il était difficile de distinguer les effets de la FTA chez les fumeurs et chez les non-fumeurs.

FTA et cancers infantiles

Plus de 30 études publiées ont examiné l’exposition par la mère et/ou le père à la fumée du tabac et les cancers infantiles. Pour une revue de ces études, le lecteur est prié de consulter le chapitre 7 des rapports de l’EPA de la Californie3k. Pour tous les cancers combinés, les indications ont été jugées non concluantes en ce qui a trait à l’association avec le tabagisme de la mère, et évocatrices en ce qui a trait au tabagisme du père, sur la base de risques relativement faibles. Les résultats ont été jugés non concluants relativement à la leucémie infantile, et évocateurs relativement aux lymphomes et au cancer du cerveau chez l’enfant, bien que l’association évoquée puisse être attribuable au tabagisme avant la conception plutôt qu’à la FTA. Une méta-analyse antérieure effectuée par Boffetta et coll.85a a noté une légère augmentation du risque global de cancer infantile associée au tabagisme de la mère dans une synthèse de 12 études (RR 1,10, IC à 95 % : 1,03-1,19), mais cette observation ne s’appliquait pas à certaines tumeurs. Le RR résumé dans le cas du tabagisme chez le père et du cancer du cerveau chez l’enfant, établi à partir de dix études, était de 1,22 (IC à 95 % : 1,02-1,40) et, pour le lymphome, le RR résumé établi à partir de quatre études était de 2,08 (IC à 95 % : 1,08-3,98). Il n’existe pas toutefois d’indications claires de l’existence d’une relation dose-réponse. De plus, les études sur les cancers infantiles sont invariablement des études cas-témoins; ces études sont sujettes à un biais de mémoire.

Efforts déployés par les services de santé publique pour réduire l’exposition la FTA

De grands progrès ont été réalisés dans la réduction de la FTA au Canada, aux États-Unis et en Australie, et, de plus en plus, en Europe également (en Irlande, notamment, il est interdit de fumer dans presque tous les lieux publics depuis mars 2004). De nombreuses organisations non gouvernementales ont milité en faveur de l’imposition de restrictions à l’usage du tabac, et divers ordres de gouvernement ont lancé des campagnes médiatiques pour sensibiliser la population aux dangers de la FTA et ont promulgué des lois visant à restreindre l’usage du tabac dans les endroits publics. Des restrictions de l’usage du tabac existent au Canada depuis la fin des années 80 dans les édifices fédéraux et les grandes entreprises. En 2004, 91 % des Canadiens ont indiqué qu’ils travaillaient dans un environnement où étaient imposées au moins certaines restrictions à l’usage du tabac.

En 2000, 27 % des enfants âgés de moins de 18 ans étaient régulièrement exposés à la FTA. En 2003, seulement 16 % des enfants étaient dans la même situation (http://www.hc-sc.gc.ca/ hl-vs/tobac-tabac/research-recherche/ stat/ctums-esutc/index_f.html).

L’État de la Californie a interdit l’usage du tabac dans tous les restaurants en 1998 et dans les bars en 1999. L’État du Massachusetts et la ville de New York ont interdit l’usage du tabac dans les restaurants. (Pour avoir un aperçu des lois et de leurs répercussions sur les revenus des restaurants, le lecteur est prié de consulter [en anglais seulement] http://www.repace.com/fact_rest.html). Certaines municipalités canadiennes ont imposé des restrictions très diverses. À l’été 2002, Ottawa, la capitale nationale, a décrété l’interdiction de fumer à l’intérieur de tous les immeubles publics. (Pour prendre connaissance des règlements municipaux sur le tabac au Canada, veuillez consulter http://www.hc-sc.gc.ca/hl-vs/pubs/ tobac-tabac/tcbc-rmtc/index_f.html; pour connaître les lois canadiennes relatives au tabac, consultez http://www.cctc.ca/ cctc/FR/loiscanadiennes).

À l’échelle provinciale, la Colombie-Britannique a interdit l’usage du tabac dans les bars et les restaurants le 1er janvier 2000, grâce à une initiative du B.C. Workers Compensation Board destinée à protéger les travailleurs. En 2001, ces règlements ont été modifiés afin de permettre la construction de fumoirs, qui ne doivent pas forcément être isolés, et où le personnel qui y consent peut servir les clients. La lutte pour un environnement sans fumée au Canada a remporté une grande victoire le 1er juin 2006, date à laquelle l’Ontario et le Québec ont interdit de fumer à l’intérieur de tous les lieux publics, y compris les bars et les restaurants, dans l’ensemble de la province. Le tabagisme est donc interdit dans ces deux provinces dans presque tous les établissements, et la législation ne prévoit pas l’installation de fumoirs désignés accessibles au public. Aujourd’hui, plus de 95 % des Canadiens vivent dans des communautés où ils jouissent d’une protection complète contre la FTA dans les lieux publics.92a

Conclusions

Au cours des 25 dernières années, la FTA a été mise en cause dans le retard de développement des enfants, les problèmes respiratoires infantiles, certains problèmes liés à la reproduction, les maladies cardiovasculaires et le cancer. Il est établi que la FTA est un agent causal du cancer du poumon. L’EPA de la Californie est devenue le premier organisme soucieux de l’hygiène du milieu à arriver à la conclusion qu’il existe une relation causale entre l’exposition régulière à long terme à la FTA et le cancer du sein chez les femmes jeunes, principalement non ménopausées3l. Notre compréhension de la susceptibilité individuelle pourrait être améliorée grâce à des études épidémiologiques génétiques, et il pourrait falloir revoir le paradigme dose-réponse de la cancérogénicité dans le cas de la fumée du tabac et du cancer du sein, de manière à y englober des seuils et des sous-groupes vulnérables.

Depuis au moins un demi-siècle, l’exposition à la fumée du tabac a été un problème « épidémique » dans de nombreux pays développés. Heureusement, la situation s’améliore rapidement en ce qui a trait au tabagisme dans les lieux publics, en particulier en Amérique du Nord. L’attitude du public à l’égard de l’acceptabilité sociale du tabagisme dans les lieux publics a changé de manière radicale. Parmi les mesures efficaces pour limiter l’exposition figure les interdictions légales dans les lieux de travail et les lieux publics, les politiques visant à restreindre l’usage du tabac dans les lieux où il n’est pas encore interdit de fumer (maisons et voitures). Toutefois, un grand nombre d’enfants, de conjoints et de travailleurs sont toujours exposés quotidiennement à la fumée du tabac. Vu les risques de cancer du poumon, du sein, du nez et de cardiopathie et d’asthme, il est clairement temps de redoubler d’effort afin de réduire l’exposition des non-fumeurs à la FTA dans tous les milieux.

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