La bronchite chronique chez les Autochtones – prévalence et facteurs associés - MCBC : Vol 33, No 4 septembre 2013

Volume 33 · numéro 4 · septembre 2013

La bronchite chronique chez les Autochtones – prévalence et facteurs associés

S. Konrad, M. Sc. (1); A. Hossain, M. Sc. (1); A. Senthilselvan, Ph. D. (2); J. A. Dosman, M.D. (3); P. Pahwa, Ph. D. (1, 3)

https://doi.org/10.24095/hpcdp.33.4.03f

Cet article a fait l'objet d'une évaluation par les pairs.

Rattachement des auteurs :

  1. Département de santé communautaire et d'épidémiologie, Université de la Saskatchewan, Saskatoon (Saskatchewan), Canada
  2. Département des sciences de la santé publique, École de santé publique, Université de l'Alberta, Edmonton (Alberta), Canada
  3. Centre canadien de santé et sécurité en milieu agricole, Université de la Saskatchewan, Saskatoon (Saskatchewan), Canada

Correspondance : Punam Pahwa, Centre canadien de santé et sécurité en milieu agricole, Université de la Saskatchewan, 103, Hospital Drive, Saskatoon (Saskatchewan) S7N 0W8; tél. : 306-966-7944; téléc. : 306-966-7920; courriel : pup165@mail.usask.ca

Résumé

Introduction : On sait peu de choses sur la bronchite chronique (BC) chez les Autochtones au Canada. Le but de cette étude était de déterminer la prévalence de la BC et des facteurs qui lui sont associés chez les Autochtones de 15 ans et plus.

Méthodologie : Une analyse de régression logistique a été appliquée à des données tirées de l'Enquête auprès des peuples autochtones de 2006 (enquête transversale) afin de déterminer les facteurs de risque associés à la BC.

Résultats : La prévalence de la BC était de 6,6 % au sein des membres des Premières nations, de 6,2 % chez les Métis et de 2,4 % chez les Inuits. Elle était plus élevée chez les femmes que chez les hommes (7,2 % contre 5,0 %). Les individus atteints de BC étaient en général plus âgés et plus nombreux à avoir un revenu et un niveau d'instruction plus faibles et à habiter en milieu rural. Le tabagisme et l'indice de masse corporelle étaient également associés de façon significative à la BC, mais leur effet différait selon le sexe. L'obésité était associée de manière particulièrement significative à la BC chez les femmes, et le fait d'être fumeur ou de n'avoir jamais fumé était aussi associé de façon significative à la BC chez les femmes.

Conclusion : Ces constatations permettent de déterminer les facteurs associés à la BC chez les Autochtones. Ce sont peut-être à ce titre des facteurs de risque potentiellement évitables qui peuvent éclairer les pratiques en matière de promotion de la santé et de prévention des maladies.

Mots-clés : bronchite chronique, Autochtones, Enquête auprès des peuples autochtones

Introduction

Les Autochtones – membres des Premières nations, Métis et Inuits – sont en nettement plus mauvaise santé que la population canadienne en généralNote du fin du texte 1, une tendance également observée sur le plan respiratoireNote du fin du texte 2. Selon l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) de 2005Note du fin du texte 3 , environ 15 % des Autochtones ont reçu un diagnostic de l'une au moins de quatre maladies respiratoires (asthme, bronchite chronique [BC], emphysème et maladie pulmonaire obstructive chronique [MPOC]), contre 10 % de la population canadienne non autochtone. En 2000, les taux de congés d'hôpital normalisés selon l'âge dans l'Ouest du Canada pour toutes les maladies respiratoires étaient chez les Autochtones de 3 040 pour 100 000 habitants, contre 920 pour 100 000 au sein de la population non autochtoneNote du fin du texte 4.

La BC est une maladie respiratoire définie ainsi : « Toux avec expectorations pendant au moins trois mois de l'année, pendant au moins deux ansNote du fin du texte 5 ». La BC est une cause de morbidité importante et une maladie sous-jacente prédisposant à une MPOCNote du fin du texte 6.

On sait peu de choses sur la BC chez les Autochtones au Canada. L'Enquête régionale longitudinale sur la santé des Premières nations de 2002-2003 conclut à une prévalence normalisée selon l'âge de la BC autodéclarée comme diagnostiquée par un médecin de 3,7 % chez les membres des Premières nations vivant dans des réservesNote du fin du texte 7 ; la prévalence chez les Autochtones vivant hors réserve est de 4,9 %. Ces deux taux sont supérieurs à la prévalence au sein de la population canadienne non autochtone, qui est de 2,4 %, selon l'ESCC de 2005Note du fin du texte 3.

La prévalence de la BC chez les Autochtones est peut-être élevée à cause de la forte prévalence de divers facteurs de risque. Le tabagisme, un faible revenu familial, un faible niveau d'instruction et des logements insalubres, souvent associés de façon significative à la prévalence et à l'incidence de la BCNote du fin du texte 8, Note du fin du texte 9, Note du fin du texte 10, sont plus prévalents chez les Autochtones. Selon l'Enquête régionale longitudinale sur la santé des Premières nations de 2002-2003, environ 59 % des membres des Premières nations déclaraient fumer, les taux de tabagisme étant plus élevés chez ceux qui vivaient dans des réserves que chez les autresNote du fin du texte 7. Les taux de tabagisme chez les Inuits atteindraient jusqu'à 70 %Note du fin du texte 11.

En 2005, le revenu total médian des Autochtones de 25 à 54 ans (22 000 $) était nettement inférieur à celui de la population non autochtone d'âge identique (33 000 $)Note du fin du texte 12. Dans le groupe des 25 à 64 ans, 44 % des Autochtones (contre 60 % de l'ensemble de la population) avaient fait des études postsecondairesNote du fin du texte 13. Or un niveau d'instruction inférieur est souvent associé à un statut socioéconomique inférieur, ce qui peut aller de pair avec un revenu inférieur et de pires conditions de logement. En 2006, les Autochtones étaient pratiquement quatre fois plus nombreux à vivre dans des logements surpeuplés et trois fois plus nombreux à vivre dans un logement nécessitant des réparations importantes que les Canadiens non autochtonesNote du fin du texte 14. Or qui dit mauvaises conditions de logement dit souvent humidité et moisissures, ce qui peut entraîner des problèmes respiratoiresNote du fin du texte 2.

Nous avons procédé à une étude descriptive afin d'évaluer la relation entre la BC et les caractéristiques personnelles et contextuelles. Les déterminants de la BC chez les Autochtones du Canada n'étant pas encore bien établis, cette étude visait à confirmer la prévalence (brute et ajustée) de la BC et à en déterminer les facteurs connexes chez les Autochtones canadiens de 15 ans et plus vivant hors réserve.

Méthodologie

Population étudiée et source des données

L'Enquête auprès des peuples autochtones (EAPA) de 2006 est une enquête transversale nationale réalisée entre octobre 2006 et mars 2007 par Statistique Canada en partenariat avec des organisations autochtonesNote du fin du texte 15. C'était la troisième fois que Statistique Canada la réalisait, la première datant de 1991 et la deuxième de 2001. Elle avait pour population cible les membres des Premières nations vivant hors réserve, les Métis et les Inuits vivant en milieu urbain, rural et dans le Nord dans l'ensemble du Canada. Un plan d'échantillonnage à plusieurs degrés a été utilisé pour choisir et recueillir des données de toutes les provinces. On peut trouver ailleurs des détails sur ce plan d'échantillonnageNote du fin du texte 15. En bref, un échantillon cible a été créé à partir des réponses positives à quatre questions de sélection du questionnaire de recensement complet de 2006 indiquant que les répondants soit avaient des ancêtres autochtones, soit s'identifiaient comme Indiens de l'Amérique du Nord, Métis ou Inuits, soit étaient Indiens inscrits ou relevaient des traités, soit étaient membres d'une bande indienne, soit une combinaison de ces réponses. L'échantillon a ensuite été divisé selon les domaines d'estimation et en fonction de l'identité autochtone, des groupes d'âge et des zones géographiques. Un échantillon aléatoire a alors été choisi pour chaque domaine d'estimation. L'EAPA comprenait des renseignements sur l'identité et l'ascendance autochtone, l'instruction, la langue, l'activité professionnelle, le revenu, la santé, les technologies des communications, la mobilité, le logement et le milieu familial. On a sélectionné en tout 48 921 participants, avec un taux de réponse de 80,1 %. Les données ont été recueillies au moyen de questionnaires autoremplis ou d'entrevues personnelles réalisées au téléphone ou en face à face.

Les populations cibles de cette enquête étaient les jeunes et les enfants autochtones (de 6 à 14 ans) et les adultes autochtones (15 ans et plus). Comme notre étude portait essentiellement sur la population adulte, nous avons exclu les participants à l'EAPA âgés de moins de 15 ans.

Le comité d'éthique de la recherche de l'Université de la Saskatchewan a approuvé ces recherches. Nous avons été autorisés à accéder aux données de Statistique Canada et avons effectué toutes les analyses au Centre de données de recherche de Statistique Canada à l'Université de la Saskatchewan.

Mesures

L'EAPA comprenait une série de questions destinées à connaître les maladies chroniques des participants à l'enquête. Les variables utilisées dans l'analyse sont définies ci-dessous.

Résultat

Dans ce rapportNote du fin du texte 15, la variable de résultat nous intéressant pour les adultes reposait sur la question suivante : « Est-ce qu'un médecin, une infirmière ou un autre professionnel de la santé vous a dit que vous souffriez de bronchite chronique? »

Facteurs

Les variables démographiques et celles du milieu de vie, ainsi que les variables relatives à la santé et au mode de vie, présentaient un intérêt (voir le tableau 1). Les variables démographiques comprenaient l'âge, le sexe, l'origine ethnique et la situation de famille; les variables du milieu de vie comprenaient le lieu de résidence (urbain/rural), le nombre de personnes par ménage et la zone géographique. Le lieu de résidence reposait sur les définitions de Statistique Canada (peuplement et densité de population minimaux par km2) et les zones géographiques étaient les Territoires (Yukon, Territoires du Nord-Ouest et Nunavut), la Colombie-Britannique, les Prairies (Alberta, Saskatchewan et Manitoba), l'Ontario, le Québec et les provinces de l'Atlantique (Nouveau-Brunswick, Île-du-Prince-Édouard, Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador). Les variables relatives à la santé comprenaient l'état de santé général autoévalué, le tabagisme et l'indice de masse corporelle (IMC). L'IMC a été adopté comme variable continue dans le modèle multivarié et a ensuite été divisé en classes pour une représentation schématique (figure 2). Les variables socioéconomiques comprenaient le niveau d'instruction et le revenu.

TABLEAU 1
Caractéristiques des Autochtones (de 15 ans et plus) stratifiées selon l'autodéclaration de bronchite chronique, 2006, Canada (N = 48 921)
  Bronchite chronique (%) RC (IC à 95 %)
Oui Non
Caractéristiques démographiques
Origine ethnique autochtoneTableau 1 - Note a
Indien de l'Amérique du Nord 6,57 93,43 1,00
Métis 6,19 93,81 0,93 (0,79 à 1,11)
Inuit 2,38 97,62 0,35 (0,25 à 0,47)
Sexe
Homme 5,00 95,00 1,00
Femme 7,20 92,80 1,47 (1,23 à 1,76)
Âge (en années)
15-19 2,67 97,33 1,00
20-24 3,12 96,88 1,17 (0,73 à 1,86)
25-34 3,70 96,30 1,40 (0,95 à 2,06)
35-44 6,12 93,88 2,38 (1,67 à 3,38)
45-54 9,09 90,91 3,64 (2,57 à 5,17)
55 et plus 10,06 89,94 4,07 (2,83 à 5,86)
Situation de famille
Marié 6,85 93,15 1,00
Jamais marié 4,28 95,72 0,61 (0,50 à 0,74)
Veuf ou divorcé 10,59 89,41 1,61 (1,30 à 2,00)
Caractéristiques du milieu de vie
Nombre de personnes par ménage
≥ 5 4,08 95,92 1,00
3-4 5,32 94,68 1,34 (1,01 à 1,71)
≤ 2 8,22 91,78 2,11 (1,63 à 2,72)
Lieu de résidenceTableau 1 - Note b
Urbain 6,61 93,39 1,00
Rural 5,19 94,81 0,77 (0,66 à 0,91)
Zone géographique
TerritoiresTableau 1 - Note c 1,85 98,15 1,00
Colombie-Britannique 4,95 95,05 2,78 (1,94 à 3,98)
PrairiesTableau 1 - Note d 4,96 95,04 2,78 (2,05 à 3,78)
Ontario 9,05 90,95 5,31 (3,82 à 7,37)
Québec 6,89 93,11 3,95 (2,75 à 5,66)
Provinces de l'AtlantiqueTableau 1 - Note e 7,44 92,56 4,29 (3,08 à 5,97)
Statut socioéconomique
Niveau d'instruction
Diplôme universitaire 3,93 96,07 1,00
Études universitaires 6,82 93,18 1,78 (1,31 à 2,43)
Secondaire terminé 5,29 94,71 1,36 (0,94 à 1,98)
Moins que le secondaire 6,95 93,05 1,82 (1,33 à 2,49)
Revenu annuel ($)
100 000 et plus 2,69 97,31 1,00
80 000-99 999 3,88 96,12 1,46 (1,01 à 2,09)
60 000-79 999 5,71 94,29 2,19 (1,58 à 3,02)
40 000-59 999 6,46 93,54 2,49 (1,83 à 3,40)
20 000-39 999 7,08 92,92 2,75 (2,05 à 3,69)
Moins de 20 000 11,45 88,55 4,66 (3,44 à 6,33)
Caractéristiques du mode de vie
Tabagisme
N'a jamais fumé 3,25 96,75 1,00
Ex-fumeur 6,27 93,73 1,99 (1,54 à 2,56)
Fumeur 8,32 91,68 2,70 (2,14 à 3,40)
Caractéristiques liées à la santé
État de santé général
Excellent 2,21 97,79 1,00
Très bon 3,43 96,57 1,57 (1,13 à 2,16)
Bon 6,20 93,80 2,92 (2,16 à 3,94)
Assez bon 14,36 85,64 7,41 (5,39 à 10,17)
Mauvais 21,94 78,06 12,41 (8,88 à 17,35)
Diabète
Non 8,10 91,90 1,00
Oui 13,16 86,84 1,72 (1,01 à 2,96)
IMC (kg/m2)
< 24,9 6,00 94,00 1,00
25,0-29,9 5,51 94,49 0,91 (0,73 à 1,13)
> 29,9 7,34 92,66 1,26 (1,02 à 1,55)

Abréviations : IC, intervalle de confiance; IMC, indice de masse corporelle; RC, rapport de cotes.

Note a

D'après les participants à l'EAPA s'identifiant soit comme Indien de l'Amérique du Nord, Métis ou Inuit, soit comme Indien inscrit ou relevant des traités, soit comme membre d'une bande indienne, soit comme ayant une ascendance autochtone, soit une combinaison de ces réponses.

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Note b

Selon les définitions de Statistique Canada15.

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Note c

Yukon, Territoires du Nord-Ouest, Nunavut.

Retour à la référence de la note de bas de page c

Note d

Alberta, Saskatchewan, Manitoba.

Retour à la référence de la note de bas de page d

Note e

Île-du-Prince-Édouard, Nouveau-Brunswick, Nouvelle-Écosse, Terre-Neuve.

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Analyse statistique

Nous avons calculé le pourcentage de participants déclarant souffrir de BC et mesuré les facteurs associés. Les variables de poids calculées par les spécialistes en méthodologie de Statistique Canada utilisées dans toutes les analyses ont garanti que les estimations finales seraient représentatives de la population étudiée. Nous avons utilisé une modélisation par régression logistique multiple pondérée et fondée sur une probabilité maximale afin de tester l'association des facteurs de risque de la BC. Une technique de rééchantillonnage avec répliques équilibrées répétées a été employée pour le calcul des erreurs types des coefficients de régression afin de tenir compte des regroupements hérités du plan d'étude de l'enquête transversale complexe. Les interactions réciproques statistiquement significatives ont été analysées. Les résultats des modèles sont présentés sous forme de rapports de cotes (RC) assortis d'intervalles de confiance (IC) à 95 %. Les progiciels statistiques SAS version 9.2 (SAS Institute Inc., Cary, Caroline du Nord, É.-U.) et STATA version 11.0 ont été utilisés pour toutes les analyses.

Résultats

Parmi les répondants adultes à l'EAPA, 50,0 % étaient membres des Premières nations, 45,2 % Métis et les autres, soit 4,8 %, Inuits. En raison de leur faible effectif au sein de l'ensemble de données, les Inuits ont été exclus de toutes les analyses multivariées.

Prévalence brute de la bronchite chronique

Le tableau 1 résume la prévalence et le rapport de cotes pour la BC. La prévalence brute de la BC était de 6,6 % chez les membres des Premières nations, 6,2 % chez les Métis et 2,4 % chez les Inuits, respectivement (tableau 1). La prévalence globale était de 6,0 % chez les Autochtones vivant hors réserve. Elle était de 8,3 % chez les fumeurs et de 3,3 % chez les non-fumeurs n'ayant jamais fumé. La BC était plus fréquente chez les femmes que chez les hommes (5,0 % contre 7,2 %) et elle augmentait avec l'âge, passant de 2,7 % chez les 15 à 19 ans à 10,1 % chez les 55 ans et plus. C'est en Ontario (9,1 %) et dans les provinces de l'Atlantique (7,4 %) que la prévalence était la plus élevée. Elle était également plus forte chez ceux vivant avec un plus faible revenu et dont le niveau d'instruction était inférieur.

La prévalence était de 13,2 % chez les diabétiques et de 8,1 % chez les non-diabétiques.

Prévalence ajustée de la bronchite chronique

Le tableau 2 synthétise les variables qui se sont révélées être prédictrices importantes de la BC dans le modèle multivarié.

TABLEAU 2
Résultats de la régression logistique de la prévalence de la bronchite chronique chez les Autochtones (15 ans et plus), 2006, Canada (N = 48 921)
  Estimations par régression (Special Beta Symbol)
Special Beta Symbol (ET(Special Beta Symbol))
RCaj. (IC à 95 %)
Caractéristiques démographiques
Origine ethnique
Première Nation (réf.) 1,00
Métis 0,05 (0,02) 1,05 (1,00 à 1,10)
Sexe
Homme (réf.) 1,00
Femme 0,53 (0,13) 1,71 (1,32 à 2,21)
Âge (années)
15-19 (réf.) 1,00
20-24 0,08 (0,06) 1,08 (0,95 à 1,23)
25-34 0,08 (0,06) 1,08 (0,96 à 1,21)
35-44 0,65 (0,06) 1,92 (1,72 à 2,14)
45-54 1,08 (0,06) 2,94 (2,63 à 3,29)
55 et plus 1,12 (0,06) 3,06 (2,73 à 3,43)
Situation de famille
Marié (réf.) 1,00
Jamais marié -0,32 (0,03) 0,72 (0,68 à 0,78)
Veuf/divorcé -0,11 (0,04) 0,90 (0,84 à 0,96)
Lieu de résidence
Rural (réf.) 1,00
Urbain 0,25 (0,02) 1,31 (1,25 à 1,38)
Niveau d'instruction
Diplôme universitaire 1,00
Études universitaires 0,29 (0,04) 1,33 (1,22 à 1,45)
Secondaire terminé 0,09 (0,05) 1,09 (0,99 à 1,21)
Moins que le secondaire 0,36 (0,05) 1,43 (1,30 à 1,57)
Revenu ($)
80 000 et plus (réf) 1,00
60 000-79 999 0,66 (0,04) 1,94 (1,79 à 2,10)
40 000-59 999 0,66 (0,04) 1,93 (1,78 à 2,08)
20 000-39 999 0,76 (0,04) 2,14 (1,98 à 2,31)
Moins de 20 000 1,21 (0,04) 3,36 (3,11 à 3,63)
IMC (kg/m2) -0,07 (0,01) 0,93 (0,91 à 0,95)
IMC2 0,00 (0,00) 1,00 (1,00 à 1,00)
Tabagisme
N'a jamais fumé (réf) 1,00
Ex-fumeur 0,78 (0,07) 2,19 (1,91 à 2,50)
Fumeur 1,18 (0,06) 3,24 (2,86 à 3,67)
Interactions
(Sexe plus tabagisme)
Femme plus ex-fumeuse -1,01 (0,08) 0,36 (0,31 à 0,43)
Femme plus fumeuse -0,60 (0,07) 0,55 (0,48 à 0,63)
(Sexe plus IMC)
Femme plus IMC 0,01 (0,00) 1,01 (1,00 à 1,02)

Abréviations : ET, écart-type; IC, intervalle de confiance; IMC, indice de masse corporelle; RCaj., rapport de cotes ajusté.

Note

D'après les participants à l'EAPA s'identifiant soit comme Indien de l'Amérique du Nord, Métis ou Inuit, soit comme Indien inscrit ou relevant des traités, soit comme membre d'une bande indienne, soit comme ayant une ascendance autochtone, soit une combinaison de ces réponses.

Retour à la référence de la note de bas de page a

Dans le modèle multivarié, la prévalence de la BC chez les Métis ne différait pas de manière significative de la prévalence chez les Premières nations (RC = 1,05; IC à 95 % : 1,00 à 1,10). Comme prévu, les répondants plus âgés étaient plus nombreux à faire état de BC que ceux du groupe d'âge le plus jeune ( ≥ 55 ans : RC = 3,06; IC à 95 % : 2,73 à 3,43). Ceux qui n'avaient jamais été mariés ou qui étaient veufs ou divorcés étaient moins nombreux à faire état de BC (jamais mariés : RC = 0,72; IC à 95 % : 0,68 à 0,78; veufs/divorcés : RC = 0,90; IC à 95 % : 0,84 à 0,96). Le revenu et le niveau d'instruction étaient inversement associés à la BC. En effet, la probabilité de BC était 1,4 fois plus élevée (IC à 95 % : 1,30 à 1,57) chez les participants n'ayant pas terminé le secondaire que chez les titulaires d'un diplôme universitaire, et 3,4 fois plus élevée (IC à 95 % : 3,1 à 3,6) chez ceux dont le revenu était inférieur à 20 000 $ que chez ceux ayant un revenu de 80 000 $ et plus. On a par ailleurs observé une association positive entre le fait de vivre en milieu urbain et la BC (RC = 1,31; IC à 95 % : 1,25 à 1,38). L'IMC s'est révélé un prédicteur important comme terme quadratique, représentant une relation en U (IMC = 25,0 à 29,9 kg/m2 : RC=0,91,IC:0,73à1,13;TMC>29,9 kg/m2 : RC = 1,26, IC : 1,02 à1,55).

On a également noté deux interactions significatives entre le sexe et le tabagisme et entre le sexe et l'IMC. Chez les non-fumeurs n'ayant jamais fumé et chez les fumeurs, la probabilité de BC était plus élevée chez les femmes, tandis que chez les ex-fumeurs elle était légèrement inférieure chez les femmes (figure 1). Dans les trois catégories d'IMC (poids normal et insuffisance pondérale, surpoids et obésité), la probabilité de BC était significativement plus élevée chez les femmes, avec une différence particulièrement marquée chez les personnes obèses.

FIGURE 1
Graphique avec barres d'erreur indiquant la probabilité de bronchite chronique chez les Autochtones (15 ans et plus), par sexe et par catégorie de tabagisme, 2006, Canada

FIGURE 1 Graphique avec barres d'erreur indiquant la probabilité de bronchite chronique chez les Autochtones (15 ans et plus), par sexe et par catégorie de tabagisme, 2006, Canada
[FIGURE 1, texte équivalent]

On a noté une interaction significative entre le sexe et le tabagisme. Chez les non-fumeurs n’ayant jamais fumé et chez les fumeurs, la probabilité de BC était plus élevée chez les femmes, tandis que chez les ex-fumeurs elle était légèrement inférieure chez les femmes.

FIGURE 2
Graphique avec barres d'erreur indiquant la probabilité de bronchite chronique chez les Autochtones (15 ans et plus), par sexe et indice de masse corporelle, 2006, Canada

FIGURE 1 Blessures associées aux jeux gonflables chez les 0 à 18 ans, données annuelles normalisées, SCHIRPT, 1990-2009
[FIGURE 2, texte équivalent]

L’IMC a été adopté comme variable continue dans le modèle multivarié et a ensuite été divisé en classes pour une représentation schématique. On a noté une interaction significative entre le sexe et l’IMC. Dans les trois catégories d’IMC (poids normal et insuffisance pondérale, surpoids et obésité), la probabilité de BC était significativement plus élevée chez les femmes, avec une différence particulièrement marquée chez les personnes obèses.

Analyse

À l'aide d'une cohorte transversale, cette étude a permis de déterminer la prévalence de la BC et d'examiner les facteurs qui y sont associés chez les Autochtones adultes. Nous avons conclu à une prévalence de la BC de 6,0 % globalement, de 6,6 % chez les membres des Premières nations, de 6,2 % chez les Métis et de 2,4 % chez les Inuits. L'analyse multivariée a montré que le vieillissement, le tabagisme, l'obésité, un faible niveau d'instruction, un faible revenu et la vie en milieu urbain sont associés de façon significative à la BC autodéclarée comme diagnostiquée par un médecin. Des interactions réciproques entre le sexe et le tabagisme et entre le sexe et l'IMC ont également été relevées.

Nous avons constaté que la prévalence de la BC dans notre analyse était légèrement supérieure aux valeurs de 4,9 % pour les Autochtones vivant hors réserve et de 2,4 % pour la population non autochtone qui figuraient dans l'ESCC de 2005. L'ESCC mesure la BC autodéclarée comme diagnostiquée par un fournisseur de soins de santé d'une manière similaire à l'EAPA.

La prévalence de la BC s'est révélée particulièrement faible chez les Inuits par rapport aux membres des Premières nations et aux Métis. Comme c'est dans ce groupe que les taux de tabagisme étaient les plus élevésNote du fin du texte 16 , il faut peut-être attribuer la faible prévalence de la BC à des obstacles géographiques à l'accès aux soins et, donc, à des possibilités plus limitées d'obtenir un diagnostic. Cette explication pourrait aussi valoir, en partie du moins, pour la différence observée entre les lieux de résidence, les personnes vivant en milieu urbain étant plus susceptibles d'autodéclarer une BC diagnostiquée par un médecin que celles vivant en milieu rural.

Nos conclusions sur les différences entre les sexes en ce qui concerne la prévalence de la BC sont corroborées par une étude réalisée dans une petite ville de la Saskatchewan et portant sur une population de producteurs de céréales : elle conclut à une prévalence de 9,6 % chez les femmes et de 4,2 % chez les hommesNote du fin du texte 17.

De nombreuses autres études concluent également que le tabagisme, le revenu et un faible niveau d'instruction sont associés de manière indépendante à la BCNote du fin du texte 5, Note du fin du texte 18, Note du fin du texte 19. Le tabagisme est un facteur de risque majeur et connu de la BCNote du fin du texte 19. Le revenu et l'instruction, indicateurs du statut socioéconomique, donnent à penser que d'autres variables interviennent peut-être dans cette associationNote du fin du texte 18. Un faible revenu, par exemple, limite les options individuelles en ce qui a trait à l'environnement, à des habitudes de vie et à une alimentation saines, ce qui peut contribuer à l'obésitéNote du fin du texte 20.

Le lien entre obésité et maladies respiratoires chroniques est de plus en plus reconnu. Dans une cohorte longitudinale, Guerra et collab.Note du fin du texte 21 ont constaté que les patients souffrant de BC sont plus nombreux à être obèses. Dans notre étude, nous avons observé une tendance de risque en U possible (figure 1), ce qui veut dire qu'il existe une corrélation avec la maladie, que l'IMC soit faible ou élevé. Guerra et collab.Note du fin du texte 21 relèvent une tendance similaire, quoique non significative. De plus, ils observent une relation temporelle. Autrement dit, un IMC de 28 kg/m2 ou plus fait augmenter le risque de diagnostic de BC confirmé par un médecin (RC = 1,80; IC à 95 % : 1,32 à 2,46) deux ans plus tardNote du fin du texte 21. Leur étude laisse supposer un lien de causalité, mais d'autres recherches sont nécessaires pour élucider ce lien. Quoi qu'il en soit, l'obésité augmente le risque de dysfonction respiratoire, comme l'indique une étude sur l'obésitéNote du fin du texte 22.

Limites

Notre étude comportait plusieurs limites. Dans des enquêtes telles que l'EAPA, l'évaluation de la BC manque de précision clinique, ce qui pourrait entraîner des erreurs de classificationNote du fin du texte 23. L'EAPA pose une seule question au sujet de la BC, à savoir si un professionnel de la santé a dit aux répondants qu'ils souffraient de BC. Le diagnostic de maladie chronique peut également dépendre de l'existence et de l'utilisation des services de santé, d'où un biais systémique possible. De plus, toutes les réponses à cette enquête étaient auto-déclarées, et les autodéclarations peuvent sous-évaluer la prévalence de certains facteurs de risque, comme le poids, le tabagisme et le revenu. Enfin, cette enquête n'a recueilli des données que sur les membres des Premières nations vivant hors réserve. Or, d'après le recensement de 2006, environ 40 % des membres des Premières nations vivent dans des réservesNote du fin du texte 14 et diverses statistiques révèlent des différences significatives entre les membres des Premières nations vivant dans les réserves et ceux vivant hors réserve, ce qui fait que ces résultats ne sont pas forcément généralisables à toutes les Premières nations. En outre, les Inuits ont été exclus de l'analyse multivariée, ce qui rend ces conclusions encore moins généralisables à cette population.

Conclusion

À notre connaissance, il s'agit du premier rapport examinant spécifiquement les facteurs associés à la BC chez les Autochtones. Notre recherche fournit un instantané de la BC et de ses déterminants, mais d'autres analyses sont nécessaires pour étudier de plus près ces associations, en particulier l'incidence d'un statut socioéconomique faible et de l'obésité sur la BC. Notre étude souligne l'importance du renoncement au tabagisme et de la réduction de l'IMC dans cette population, en particulier chez les femmes.

En conclusion, cette étude montre que des facteurs de risque évitables (statut socio-économique faible, obésité et tabagisme) sont associés de façon significative à la BC après ajustement pour les variables confusionnelles éventuelles. Ces données peuvent être utiles dans la conception et la promotion de campagnes de prévention axées sur la population autochtone.

Remerciements

Cette étude a reçu l'appui du programme de projets pilotes des Instituts de recherche en santé du Canada et du Centre canadien de santé et sécurité en milieu agricole.

Aucun conflit d'intérêts n'est à déclarer.

Références

Note 1

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