Commentaire – Mouvement étudiant pour la prescription sociale au Canada

Accueil Revue PSPMC
Publié par : L'Agence de la santé publique du Canada
Date de publication : juin 2024
ISSN: 2368-7398
Soumettre un article
À propos du PSPMC
Naviguer
Page précedente | Table des matières | Page suivante
Caitlin Muhl, B. Sc., M.S.P.Note de rattachement des auteurs 1Note de rattachement des auteurs 2; Le‑Tien Bhaskar, M.S.P.Note de rattachement des auteurs 1Note de rattachement des auteurs 3; Michelle Ruhigisha, B. Sc., M.S.P.Note de rattachement des auteurs 1Note de rattachement des auteurs 4; Ellen McGarity‑Shipley, M. Sc. PT, Ph. D.Note de rattachement des auteurs 1
https://doi.org/10.24095/hpcdp.44.6.06f

Attribution suggérée
Commentaire par Muhl C et al. dans la Revue PSPMC mis à disposition selon les termes de la licence internationale Creative Commons Attribution 4.0
Rattachement des auteures
Correspondance
Caitlin Muhl, Université Queen’s, 99, avenue University, Kingston (Ontario) K7L 3N6; courriel : caitlin.muhl@queensu.ca
Citation proposée
Muhl C, Bhaskar L, Ruhigisha M, McGarity-Shipley E. Mouvement étudiant pour la prescription sociale au Canada. Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada. 2024;44(6):319-323. https://doi.org/10.24095/hpcdp.44.6.06f
Mots-clés : mouvement social, prescription sociale, étudiants
Points saillants
- Un réseau mondial de champions étudiants a vu le jour dans sept pays, dont le Canada, dans le but de créer un mouvement étudiant pour la prescription sociale.
- Le Collectif étudiant canadien de prescription sociale a été créé en 2022.
- De grands progrès ont été réalisés dans la création d’un mouvement étudiant pour la prescription sociale au Canada, mais il reste encore beaucoup de travail à faire. Les étudiants, le personnel des organismes de santé et des organismes communautaires, ainsi que le corps professoral et le personnel administratif des établissements d’enseignement postsecondaire doivent agir en ce sens.
- Les efforts collectifs visant à créer un mouvement étudiant pour la prescription sociale au Canada façonneront non seulement le mouvement pour la prescription sociale en général, mais aussi l’avenir de notre système de santé.
Introduction
La prescription sociale est « un moyen par lequel des professionnels de confiance en milieu clinique ou communautaire déterminent qu’une personne a des besoins sociaux liés à la santé qui ne sont pas d’ordre médical, et par lequel ils adressent cette personne à des services et à un soutien non cliniques au sein de la communauté, par l’élaboration conjointe d’une « prescription sociale », c’est-à-dire une prescription non médicale pour améliorer la santé et le bien-être de la personne et renforcer ses liens avec la communauté » [traduction]Note de bas de page 1,p.9. À l’échelle mondiale, la prescription sociale suscite un intérêt croissant en tant qu’approche holistique de la santé et du bien-être, et près de 30 pays sont impliqués dans le mouvement pour la prescription socialeNote de bas de page 2. Au Canada, la recherche, les politiques et les pratiques en matière de prescription sociale progressent à grands pas avec le soutien de l’Institut canadien de prescription socialeNote de bas de page 3.
Parallèlement à la croissance rapide du mouvement pour la prescription sociale dans le monde, un réseau mondial de champions étudiants a vu le jour afin de créer le mouvement étudiant pour la prescription sociale. Au Royaume-Uni, où le mouvement pour la prescription sociale a vu le jour, les étudiants ont été fortement impliqués depuis le début. En 2017, le UK National Social Prescribing Student Champion Scheme a été créé par le Dr Bogdan Chiva Giurca, qui était étudiant en médecine à l’époque, pour permettre aux étudiants de s’impliquer dans l’apprentissage, l’enseignement et la promotion de la prescription socialeNote de bas de page 4. Depuis lors, plus de 350 champions étudiants se sont investis auprès de plus de 20 000 apprenants au Royaume-UniNote de bas de page 5.
Dans les dernières années, le mouvement étudiant pour la prescription sociale s’est étendu à plusieurs autres pays, dont l’Australie, le Japon, le Portugal, Singapour et les États-UnisNote de bas de page 6. En 2021, ces groupes étudiants se sont réunis et ont mis sur pied un cadre pour un mouvement étudiant international de la prescription sociale, soit le Social Prescribing International Student Movement Framework, qui a servi d’appel à l’action et de guide pour les champions étudiants du mondeNote de bas de page 6. Ce cadre a attiré l’attention d’étudiants canadiens qui partageaient une passion pour la prescription sociale et un désir d’introduire ce mouvement au Canada, et c’est ainsi qu’a vu le jour le Collectif étudiant canadien de prescription sociale.
Dans ce commentaire, nous soulignons l’importance de créer un mouvement étudiant pour la prescription sociale au Canada, nous donnons un aperçu du Collectif étudiant canadien de prescription sociale, nous fournissons des exemples de la façon dont les étudiants contribuent aux efforts en matière de prescription sociale dans le pays et nous lançons un appel à l’action pour l’avancement du mouvement étudiant pour la prescription sociale au Canada.
L’importance d’un mouvement étudiant pour la prescription sociale au Canada
Tout au long de l’histoire, les étudiants ont été un élément moteur des mouvements sociauxNote de bas de page 7. Un exemple récent est le rôle essentiel que des activistes étudiants ont joué dans la formation du mouvement Black Lives MatterNote de bas de page 8. Il s’ensuit que le mouvement pour la prescription sociale bénéficierait de la capacité des étudiants à favoriser le changement social. Dans le contexte canadien, des données empiriques laissent entendre que les étudiants sont désireux de soutenir le mouvement et les membres de la communauté de la prescription sociale s’entendent pour dire que l’implication des étudiants est fondamentale pour le succès du mouvement.
Cela dit, il n’est pas seulement question de l’impact des étudiants sur le mouvement, mais aussi de l’impact du mouvement sur les étudiants : il s’agit d’autonomiser les apprenants d’aujourd’hui, qui deviendront les dirigeants de demain. Puisque les données révèlent que jusqu’à 50 % des consultations en soins primaires sont liées à des problèmes non médicauxNote de bas de page 9, il faut aller au-delà du modèle biomédical et déplacer les soins en amont, de façon à traiter les facteurs non médicaux qui sont responsables de 80 % à 90 % de la santé et du bien-êtreNote de bas de page 10Note de bas de page 11Note de bas de page 12. Les arguments en faveur de ce changement n’ont jamais été aussi clairs étant donné la tempête parfaite de la pandémieNote de bas de page 13, d’une population mondiale vieillissanteNote de bas de page 14 et d’une pénurie mondiale de travailleurs de la santé, estimée à 18 millions de travailleurs (20 % de la main-d’œuvre mondiale) d’ici 2030Note de bas de page 15. Selon les sages paroles de Hamaad Khan, étudiant en médecine et champion de la prescription sociale au Royaume-Uni, il faut se demander où est la « santé » dans notre système de santé et où sont les « soins » dans les soins de santé que nous prodiguonsNote de bas de page 16. Nous sommes à un point critique, mais il y a de l’espoir pour l’avenir : en inculquant les valeurs de la prescription sociale à nos étudiants, nous leur donnerons les moyens de « créer de la santé dans notre système de santé » et de prodiguer de meilleurs soins aux patients. Voilà ce que nous espérons réaliser avec le mouvement étudiant pour la prescription sociale au Canada.
Le Collectif étudiant canadien de prescription sociale
Le Collectif étudiant canadien de prescription sociale a été mis sur pied en 2022. Notre mission est de créer un mouvement étudiant pour la prescription sociale au Canada. Nous sommes guidés par quatre valeurs : 1) la collaboration, 2) l’éducation, 3) la défense des intérêts et 4) l’innovation. Nous comptons plus de 350 membres représentant plus de 35 établissements d’enseignement postsecondaire en Colombie-Britannique, en Alberta, en Saskatchewan, en Ontario, au Québec, au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse, à l'Île-du-Prince-Édouard et à Terre-Neuve-et-Labrador. Nous comptons parmi nos membres des étudiants de premier cycle, des étudiants des cycles supérieurs et des étudiants de niveau collégial inscrits à différents programmes (sciences de la santé, kinésiologie, médecine, soins infirmiers, pharmacie, psychologie, santé publique, travail social, etc.).
Outre nos membres, nous avons établi des partenariats avec plus de 20 établissements d’enseignement et organismes communautaires. En tant que communauté en ligne, nous communiquons avec nos membres et nos partenaires par courriel, au moyen d’un bulletin d’information, avec Slack et en tenant des réunions sur Zoom et nous sommes en lien avec la communauté de la prescription sociale en général grâce à notre page web, à nos comptes de médias sociaux, à des webinaires, à des présentations et à des conférences. Nous sommes affiliés à l’Institut canadien de prescription sociale, qui veille à ce que les travaux du mouvement étudiant pour la prescription sociale demeurent alignés sur ceux du mouvement plus large pour la prescription sociale au Canada.
Nos efforts visant à créer le mouvement étudiant pour la prescription sociale se diffusent à l’échelle locale, nationale et internationale. À l’échelle locale, nous avons des sections dans les établissements d’enseignement postsecondaire. À l’échelle nationale, nous nous réunissons dans le cadre d’assemblées générales et de cinq groupes de travail chargés de divers domaines d’intérêt : 1) la recherche, 2) les politiques, 3) les pratiques, 4) l’application des connaissances et 5) la médecine. Enfin, à l’échelle internationale, nous représentons le Canada au sein du Conseil étudiant mondial pour la prescription sociale (Global Social Prescribing Student Council), qui réunit les responsables de groupes étudiants du monde entier s’intéressant à la prescription sociale afin de faire progresser le mouvement étudiant mondial pour la prescription sociale.
Nous avons récemment mené une enquête sur l’expérience des membres, et il en est ressorti que les étudiants jugent tirer profit de leur participation à notre groupe. En effet, lorsque nous les avons interrogés au sujet de leur participation, 82,3 % de nos membres ont reconnu que ce groupe avait amélioré leurs connaissances sur la prescription sociale et 88,2 % que ce groupe les avait aidés à entrer en contact avec d’autres étudiants qui s’intéressent à la prescription sociale. En ce qui concerne l’avenir, nous espérons déployer nos efforts, augmenter le nombre de nos membres, mieux comprendre l’efficacité de nos efforts et fournir des données probantes sur la prescription sociale en étudiant des domaines pertinents qui n’ont pas encore été explorés, comme ce qui motive les étudiants à s’impliquer dans le mouvement étudiant pour la prescription sociale.
Contribution des étudiants aux efforts en matière de prescription sociale au Canada
Les étudiants ont commencé à participer aux efforts en matière de prescription sociale au Canada plusieurs années avant la création du Collectif étudiant canadien de prescription sociale. Par exemple, des étudiants en stage ont participé au premier projet pilote de prescription sociale au Canada (2018-2020)Note de bas de page 17. Il est à noter que les programmes de prescription sociale tirent parti du fait que les étudiants peuvent agir à titre de facilitateurs depuis plus d’une décennieNote de bas de page 18Note de bas de page 19. En Colombie-Britannique, on a créé la Basics for Health Society en 2012 pour permettre aux organismes communautaires et de soins de santé de répondre aux besoins sociaux des patients, en faisant appel à des étudiants bénévoles ayant reçu une formation pour orientent les patients vers les ressources communautaires dont ces derniers avaient besoinNote de bas de page 18. En Ontario, la clinique NORD (Naviguer Ottawa pour des Ressources Disponibles en santé), dirigée par des étudiants en médecine et en droit de l’Université d’Ottawa, a été fondée en 2018Note de bas de page 19. Les établissements de soins adressent les patients ayant des besoins sociaux à la clinique NORD, où des étudiants bénévoles ayant reçu une formation les orientent vers les ressources communautaires dont ils ont besoin. Ces programmes permettent non seulement de répondre aux besoins sociaux des patients et d’améliorer l’équité en matière de santé des communautés mal desservies, mais aussi d’enrichir l’expérience éducative des étudiants grâce à des possibilités d’apprentissage par l’expérience.
Depuis le lancement du Collectif étudiant canadien de prescription sociale, plusieurs initiatives dirigées par des étudiants ont vu le jour, une conséquence directe de la communauté étudiante qui a été cultivée. À l’échelle locale, la section de l’Université Brock collabore avec les services de santé aux étudiants dans le but de mettre sur pied un programme de prescription sociale sur le campus. Ailleurs en Ontario, la section de l’Université de Toronto a accueilli le premier congrès étudiant du pays sur la prescription sociale. À l’échelle nationale, notre groupe de travail sur la recherche mène actuellement une étude exploratoire sur la prescription sociale et les étudiantsNote de bas de page 20, et notre groupe de travail sur les politiques a récemment élaboré un exposé de politique faisant valoir l’importance de la prescription sociale pour le soutien de la santé mentale des étudiants sur le campus.
Outre le travail qu’ils font par l’intermédiaire du Collectif étudiant canadien de prescription sociale, les étudiants contribuent à la recherche, aux politiques et aux pratiques en matière de prescription sociale en faisant des travaux de thèse, des stages, des internats, des assistanats de recherche et des stages coopératifs.
Par exemple, en Ontario, des étudiants en stage à l’Université de Guelph travaillent avec le programme de prescription sociale au Centre de santé communautaire de Guelph tandis qu’au Québec, des stagiaires à l’Université McGill soutiennent les efforts visant à implanter la prescription sociale dans les cliniques de soins primaires et, ailleurs au Canada, des étudiants soutiennent le travail effectué à l’Institut canadien de prescription sociale dans le cadre de stages et d’assistanats de recherche.
En outre, les étudiants soutiennent le mouvement pour la prescription sociale en s’acquittant de tâches rémunérées comme non rémunérées, distinctes de leurs activités universitaires tout en étant complémentaires. Par exemple, des étudiants coordonnent les programmes de prescription sociale de divers organismes, comme Fraser Health en Colombie-Britannique et le Vanier Social Pediatric Hub en Ontario, et des étudiants d’un peu partout au pays se portent volontaires pour participer à divers programmes, comme le Programme d’appels amicaux de la Croix-Rouge canadienne et le Partenariat étudiant-aîné pour prévenir l’isolement, qui visent à aider les personnes qui se sentent seules et isolées socialement.
Toutes ces expériences permettent aux étudiants d’appliquer ce qu’ils ont appris en classe sur la promotion de la santé, la réflexion en amont et le pouvoir de la communauté.
Appel à l’action
S’il est important de se réjouir des progrès accomplis jusqu’à présent dans la création du mouvement étudiant pour la prescription sociale, il reste encore beaucoup de travail à faire. Nous lançons donc un appel à l’action aux étudiants, au personnel des organismes de soins de santé et des organismes communautaires ainsi qu’au corps professoral et au personnel administratif des établissements d’enseignement postsecondaire afin qu’ils soutiennent l’avancement du mouvement étudiant pour la prescription sociale au Canada.
- Nous lançons un appel aux étudiants afin
qu’ils rejoignent le Collectif étudiant canadien de prescription sociale et
soutiennent la recherche, les politiques et les pratiques en matière de
prescription sociale dans le cadre d’activités universitaires (travaux de
thèse, stages, internats, assistanats de recherche, stages coopératifs, etc.)
et non universitaires (tâches rémunérées et non rémunérées).
Vous pouvez vous inscrire ici. - Nous lançons un appel au personnel des
organismes de soins de santé et des organismes communautaires ainsi qu’au corps
professoral et au personnel administratif des établissements d’enseignement
postsecondaire afin qu’ils nous rejoignent et augmentent le degré et le type
d’implication des étudiants dans les efforts en matière de prescription sociale
(facilitation, élaboration de programmes, évaluation de programmes, recherche,
etc.) dans le cadre d’activités universitaires et non universitaires.
Que vous souhaitiez simplement recevoir notre bulletin d’information ou explorer les possibilités qui s’offrent aux étudiants, vous pouvez vous inscrire ici. - Nous lançons un appel au corps
professoral et au personnel administratif des établissements d’enseignement
postsecondaire afin qu’ils renforcent nos efforts visant à former les étudiants
à la prescription sociale en intégrant ce concept dans les programmes d’études
en santé (médecine, soins infirmiers, ergothérapie, pharmacie, physiothérapie,
travail social, etc.), en alliant l’enseignement didactique aux possibilités
d’apprentissage par l’expérience.
Selon ce que nous avons observé dans d’autres pays, les efforts déployés par les étudiants pour sensibiliser leurs pairs à la prescription sociale doivent être renforcés par une éducation formelle qui allie l’enseignement didactique aux possibilités d’apprentissage par l’expérienceNote de bas de page 4Note de bas de page 21Note de bas de page 22Note de bas de page 23Note de bas de page 24Note de bas de page 25.
Ensemble, ces mesures vont aider à créer un mouvement étudiant pour la prescription sociale qui façonnera non seulement le mouvement pour la prescription sociale en général mais aussi l’avenir de notre système de santé.
Remerciements
Nous tenons à remercier Sonia Hsiung pour son mentorat et pour ses précieux commentaires sur cet article. Nous tenons également à remercier Niloufar Aran pour sa contribution au Collectif étudiant canadien de prescription sociale en tant que cofondatrice et codirectrice avant son départ pour étudier à l’étranger.
Conflits d’intérêts
Les auteures n’ont aucun conflit d’intérêts à déclarer.
Contribution des auteures et avis
- Conception : CM
- Rédaction de la première version du manuscrit : CM
- Relectures et révisions : CM, LB, MR, EMS
Le contenu de l’article et les points de vue qui y sont exprimés n’engagent que les auteures; ils ne correspondent pas nécessairement à ceux du gouvernement du Canada.