Synthèse des données probantes – Cartographie des déterminants sociaux de la santé cognitive au Canada : un examen de la portée

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Publié par : L'Agence de la santé publique du Canada
Date de publication : novembre 2025
ISSN: 2368-7398
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Sarah O’ConnorNote de rattachement des auteurs *, Dt. P., M. Sc.; Teodora RigleaNote de rattachement des auteurs *, Inf. Aut., M. Sc.; Mathilde Lavigne‑Robichaud, Ph. D.; Lucie Lapierre, Ph. D.
https://doi.org/10.24095/hpcdp.45.11/12.01f
Cet article a fait l’objet d’une évaluation par les pairs.
Attribution suggérée
Synthèse des données probantes par O’Connor S et al. dans la Revue PSPMC mis à disposition selon les termes de la licence internationale Creative Commons Attribution 4.0
Rattachement des auteurs
Unité des capacités en santé publique et de la gestion du savoir, Direction générale de la réglementation, des opérations et de la gestion des urgences, Agence de la santé publique du Canada, Montréal (Québec), Canada
Correspondance
Sarah O’Connor, Unité des capacités en santé publique et de la gestion du savoir, Direction générale de la réglementation, des opérations et de la gestion des urgences, Agence de la santé publique du Canada, Bureau régional du Québec, 200, boul. René-Lévesque Ouest, Tour Est, Montréal (QC) H2Z 1X4; tél : 418 473-4488; courriel : sarah.oconnor@phac-aspc.gc.ca
Citation proposée
O’Connor S, Riglea T, Lavigne-Robichaud M, Lapierre L. Cartographie des déterminants sociaux de la santé cognitive au Canada : un examen de la portée. Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada. 2025;45(11/12):477-491. https://doi.org/10.24095/hpcdp.45.11/12.01f
Résumé
Introduction. Nous avons cherché à caractériser la littérature évaluant les associations entre les déterminants sociaux de la santé et la santé cognitive des adultes au Canada.
Méthodologie. Nous avons recherché dans les bases de données Embase, CENTRAL, Global Health et MEDLINE par l’intermédiaire d’Ovid, depuis leur création jusqu’au 20 février 2024, des études portant sur les associations entre les déterminants sociaux de la santé et la santé cognitive chez les adultes canadiens, indépendamment de l’état de santé ou de l’état cognitif.
Résultats. Nous avons recensé 159 publications couvrant 93 études, 27 % (n = 25) avec une couverture nationale et 48 % (n = 45) portant sur l’Ontario ou le Québec. Sur les 410 associations entre déterminants sociaux de la santé et cognition, 20 provenaient de 6 études qualitatives et 390 de 87 études quantitatives. La scolarité s’est révélée la catégorie la plus fréquemment évaluée (46 %) parmi les 29 catégories de déterminants sociaux de la santé citées, suivie du soutien social (24 %), du revenu du ménage ou de l’individu (19 %), de l’état matrimonial (17 %), de la profession (16 %), du milieu urbain ou rural de résidence (16 %), de la modalité de résidence ou de la composition du ménage (12 %) et des facteurs environnementaux (13 %). Les deux tiers (67 %) des études ont porté sur diverses dimensions de la santé cognitive, tandis que 41 % ont évalué la démence (tous types confondus). La plupart des déterminants sociaux de la santé étudiés relèvent des contextes avec lesquels les individus interagissent directement. Ceux liés à l’exposition à l’environnement ou à la pollution, aux normes sociétales, aux croyances, aux valeurs et aux pratiques ont été moins souvent évalués.
Conclusion. Cet examen de la portée fournit un état des lieux détaillé de la littérature sur les déterminants sociaux de la santé et la santé cognitive au Canada. Elle met en avant l’importance de prendre en compte une gamme complète de déterminants sociaux de la santé et d’utiliser diverses sources de données et d’approches de collecte de données. Les résultats révèlent également quels déterminants sociaux de la santé demeurent largement inexplorés et devraient donc être priorisés dans les recherches futures.
Mots-clés : démence, déterminants sociaux de la santé, étude exploratoire, maladie d’Alzheimer, cognition, éducation, soutien social
Points saillants
- Les 93 études passées en revue ont identifié 29 catégories de déterminants sociaux de la santé associés à la santé cognitive des adultes au Canada.
- La scolarité et le soutien social ont été les catégories de déterminants sociaux de la santé les plus fréquemment étudiées.
- La plupart des déterminants étudiés relevaient des contextes avec lesquels les individus interagissent directement, alors que les déterminants systémiques et structurels ont été moins souvent étudiés.
- Près de la moitié des études ont été menées en Ontario ou au Québec et on ne dispose d’aucune étude spécifique pour le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest, le Nunavut, la Nouvelle-Écosse et l’Île-du-Prince-Édouard.
- Seules deux études interventionnelles ont évalué l’impact des déterminants sociaux de la santé sur la santé cognitive, ce qui révèle une lacune dans l’intégration des évaluations de l’impact sur la santé dans les initiatives de santé publique.
Introduction
En 2022-2023, environ 487000 (6,2 %) des Canadiens de 65 ans et plus vivaient avec une démence diagnostiquée, 99000 ayant été nouvellement diagnostiqués au cours de cette périodeNote de bas de page 1. Bien que le taux d’incidence de la démence dans ce groupe d’âge ait diminué depuis 10 ans, le nombre total de Canadiens atteints de démence devrait augmenter en raison du vieillissement de la populationNote de bas de page 2. En réponse au besoin urgent de comprendre et de prévenir la démence, le Parlement du Canada a adopté la Loi relative à une stratégie nationale sur la maladie d’Alzheimer et d’autres démencesNote de bas de page 3 en 2017. En 2019, le ministère fédéral de la Santé a publié la première stratégie nationale, Une stratégie canadienne sur la démence. Ensemble, nous y aspironsNote de bas de page 4 et, par la suite, les rapports annuels qui s’y rapportentNote de bas de page 5Note de bas de page 6.
En 2024, la commission Lancet sur la démence a estimé que 45,3 % des cas de démence étaient explicables par 14 facteurs de risque : 1) un niveau de scolarité moins élevé, 2) une perte auditive, 3) un taux élevé de cholestérol à lipoprotéines de faible densité, 4) la dépression, 5) des lésions cérébrales traumatiques, 6) l’inactivité physique, 7) le diabète, 8) le tabagisme, 9) l’hypertension, 10) l’obésité, 11) une consommation excessive d’alcool, 12) l’isolement social, 13) la pollution de l’air et 14) une perte visuelleNote de bas de page 7. Bien que nombre de ces facteurs de risque soient modifiables au niveau individuel, tout le monde n’a pas accès aux ressources nécessaires pour les réduire efficacementNote de bas de page 8Note de bas de page 9. Comme l’a fait remarquer la Société Alzheimer du Canada, « ces facteurs de risque ne sont vraiment modifiables que si les soutiens appropriés sont fournis par nos communautés, les organismes de santé publique et d’autres organisations gouvernementales »Note de bas de page 8, p.50.
Les déterminants sociaux de la santé – les conditions de l’environnement dans lequel « les gens naissent, grandissent, vivent, travaillent et vieillissent » [traduction]Note de bas de page 10, p.76 – influencent profondément l’exposition des personnes aux facteurs de risque relevés par la Commission Lancet ou leur capacité à les modifierNote de bas de page 7Note de bas de page 8. Les différences dans la répartition de ces déterminants entre divers sous-groupes ou populations découlent de structures sociales, politiques et économiques systémiques établies, qui entraînent des inégalités socio-économiques et sanitaires et, ultimement, des disparités dans les résultats en matière de santé, dont ceux associés aux maladies cognitivesNote de bas de page 11.
Le cadre proposé par Adkins-Jackson et ses collaborateursNote de bas de page 11 intègre le modèle écologique de BronfenbrennerNote de bas de page 12 pour illustrer la manière dont les déterminants sociaux de la santé ont une influence sur le risque de démence classée comme maladie d’Alzheimer. Ce cadre présente un continuum de systèmes intégrés et interdépendants : le microsystème (les contextes avec lesquels les individus interagissent directement), le mésosystème (les interactions entre microsystèmes), l’exosystème (les facteurs qui influencent indirectement la santé, tels que le changement climatique), le macrosystème (les normes sociétales, les croyances, les valeurs et les pratiques établies dans la société dans laquelle les individus vivent et qui influencent les microsystèmes) et le chronosystème (l’exposition aux déterminants sociaux de la santé au cours de la vie)Note de bas de page 11 (voir la figure supplémentaire 1). Les principaux déterminants sociaux de la santé qui influencent la santé cognitive et la démence sont ainsi les 14 facteurs de risque établis par la Commission LancetNote de bas de page 7 auxquels s’ajoutent le fait de vivre dans un quartier défavorisé, les conditions de travail et la profession, l’insécurité financière et alimentaire, la pauvreté, le logement et d’autres facteurs. Ces facteurs sont à leur tour influencés par des déterminants sociaux de la santé systémiques plus larges tels que le racisme structurel, la discrimination ou l’âgismeNote de bas de page 13.
Bien que la stratégie nationale du Canada en matière de démenceNote de bas de page 3 fasse de la prévention un objectif central, elle met l’accent principalement sur les facteurs de risque individuels soulevés par la Commission LancetNote de bas de page 7 : il est moins facile de cibler les déterminants structurels plus larges de ces facteurs de risque. Étant donné que l’interdépendance des systèmes associés aux déterminants sociaux de la santé peut entraîner une cascade d’effets sur la capacité des individus à agir sur les facteurs de risque modifiables et à prendre des mesures pour prévenir les maladiesNote de bas de page 11, il s’avère essentiel d’étudier les déterminants sociaux structurels de la santé qui façonnent les disparités en matière de santé et l’incidence des maladies cognitives au Canada. Or, bien que le rôle des déterminants sociaux de la santé dans la santé cognitive et la démence suscite un intérêt croissantNote de bas de page 8, nous ne disposons pas encore d’une synthèse complète de la littérature scientifique canadienne portant sur les associations entre les déterminants sociaux de la santé et la cognition.
L’objectif de cet examen de la portée était d’offrir un bilan de l’état des connaissances sur les déterminants sociaux de la santé qui ont une incidence sur la santé cognitive chez les adultes au Canada.
Méthodologie
Cet examen de la portée a été réalisé conformément au guide du JBI pour les examens de la portéeNote de bas de page 14 et à l’approche en six étapes d’Arksey et O’MalleyNote de bas de page 15 et de Levac et ses collaborateursNote de bas de page 16. Nous avons suivi les directives PRISMA-ScR [Preferred Reporting Items for Systematic Reviews and Meta-Analyses extension for Scoping Reviews]Note de bas de page 17. Notre protocole est disponible en ligne.
Critères d’admissibilité
Nous avons inclus les études qui évaluaient tous les niveaux de santé cognitive (un état cognitif sain, une déficience cognitive légère ou une démence diagnostiquée [de tous types]) dans des échantillons de participants adultes de 18 ans ou plus ou dans des échantillons de jeunes et d’adultes composés principalement (80 % ou plus) d’adultes. Aucune restriction n’a été imposée sur les conditions de santé préexistantes, en particulier sur les maladies susceptibles d’avoir une incidence sur la santé cognitive. Bien que nous n’ayons pas inclus les études ciblant les proches aidants, nous avons inclus des études dans lesquelles la présence de proches aidants a été considérée comme un déterminant social de la santé pour la santé cognitive.
Seules les études portant sur des populations vivant au Canada ont été retenues. Les études multinationales ont été incluses si on pouvait en extraire des résultats spécifiques au Canada.
Nous avons inclus les études qui évaluaient une association entre des déterminants sociaux de la santé et au moins une dimension de la santé cognitive. Nous avons d’abord limité notre définition des déterminants sociaux de la santé à celle de l’Organisation mondiale de la santéNote de bas de page 10, puis nous avons élargi notre analyse afin d’inclure ceux relevés par Adkins-Jackson et ses collaborateursNote de bas de page 11 ainsi que d’autres déterminants potentiellement liés à la santé cognitiveNote de bas de page 18.
Nous avons exclu les études qui évaluaient les facteurs de risque individuels non modifiables (âge, sexe, génotype) ou qui évaluaient des facteurs de risque modifiables (alimentation, activité physique, tabagisme, mesures cliniques [mesures anthropométriques, tension artérielle, profil lipidique, profil glycémique], etc.) mais sans évaluer de déterminants sociaux de la santé. Les facteurs de risque au niveau du macrosystème (comme le genre) ont été considérés comme relevant des déterminants sociaux de la santé si des évaluations précises ou indirectes des normes, croyances, valeurs, pratiques ou points de vue de la société avaient été réalisées (par exemple, sur le binarisme de genre – la croyance selon laquelle il n’y a que deux genres et que le genre d’une personne doit correspondre au sexe qui lui a été assigné à la naissance).
La santé cognitive est un concept global qui inclut (mais ne se limite pas à) la démence et l’évolution générale vers la démence. Nous avons défini la santé cognitive au sens large comme la capacité de penser clairement, d’apprendre et de se souvenirNote de bas de page 19. (Les définitions des différents éléments de la santé cognitive pris en compte dans cet examen de la portée sont répertoriées dans le tableau supplémentaire 1.) Les outils utilisés pour évaluer les éléments cognitifs pouvaient être des résultats autodéclarés, des tests standardisés ou sur mesure, des questionnaires, des diagnostics médicaux ou des évaluations cognitives (voir le tableau complémentaire 2).
Les éléments suivants n’ont pas été pris en compte, car ils ne sont liés qu’indirectement à la santé cognitive : les troubles de santé mentale ou psychiatriques (par exemple la dépression, l’anxiété, la psychose, la schizophrénie, le trouble bipolaire ou le trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité), les tests d’intelligence et les troubles moteurs ou les maladies qui leur sont associées (maladie de Parkinson, sclérose en plaques, etc.).
Nous avons inclus des études quantitatives ou qualitatives ayant fait l’objet d’une évaluation par les pairs ainsi que des actes de congrès. Dans les études quantitatives, seules les associations univariées et multivariées où les déterminants sociaux de la santé étaient considérés comme variable d’exposition principale ou facteur prédictif ont été incluses, ceux utilisés comme variables d’ajustement ne l’ont pas été. Les études qualitatives portant sur les changements perçus dans la santé cognitive (ou les symptômes) en présence d’un déterminants social de la santé précis ont été incluses. Nous avons inclus des études aussi bien empiriques que conceptuelles, dans la mesure où elles faisaient état d’une association entre déterminants sociaux de la santé et cognition. Les compte-rendus, les publications de politique gouvernementale et les protocoles ont été exclus.
Aucune restriction n’a été imposée quant à l’année de publication, à l’exception des actes de congrès qui ont été limités aux cinq dernières années (2019-2024).
Recherche et sélection des études
Nous avons consulté les bases de données biomédicales Cochrane Central Register of Controlled Trials (CENTRAL), Embase, Global Health et MEDLINE par l’intermédiaire d’Ovid, depuis leur création jusqu’au 20 février 2024, en utilisant à la fois des mots clés indexés et des mots clés libres associés aux déterminants sociaux de la santé, à la santé cognitive et aux différents contextes canadiens (voir le tableau supplémentaire 3). La stratégie de recherche a été revue et validée par une bibliothécaire scientifique.
Les références ont été importées dans Covidence (Veritas Health Innovation, Melbourne, Australie) et les doublons ont été supprimés. Deux évaluatrices [TR, SO] ont analysé, indépendamment l’une de l’autre, les titres, les résumés et les textes intégraux des études extraites. Les divergences éventuelles ont été résolues par d’autres évaluatrices [MLR, LL]. La stratégie de recherche a été réévaluée de manière itérative. En raison du grand nombre d’études admissibles, nous avons limité la recherche aux seules bases de données biomédicales.
Extraction des données et production graphique
Les données ont été extraites par l’une des évaluatrices [TR ou SO] dans un formulaire de collecte de données pré-piloté. Pour chaque publication incluse, nous avons recueilli les éléments suivants : année de publication, conception de l’étude, nom de l’étude, taille de l’échantillon, déterminants sociaux de la santé pris en compte, éléments de santé cognitive et leurs associations. L’évaluation des effets de l’exposition n’étant pas un objectif de notre revue, nous n’avons pas évalué le risque de biais.
Pour éviter de surestimer la fréquence des associations, nous avons combiné les articles qui utilisaient la même cohorte et les avons traités comme une seule étude.
En utilisant chaque étude comme unité d’analyse, nous avons recueilli de l’information sur l’âge, le sexe, le milieu de résidence (rural ou urbain), l’état de santé, l’état cognitif au départ et la localisation au Canada des participants à l’étude. Les associations identiques dans une même étude ont été combinées. Dans chaque étude, nous avons noté toutes les associations entre les éléments de santé cognitive pris séparément et chaque déterminant social de la santé. Ainsi, si une étude faisait état de plusieurs associations entre un déterminants social de la santé spécifique et différents éléments de santé cognitive, chaque association a été prise en compte indépendamment des autres. Dans le cas d’études longitudinales comportant plusieurs points dans le temps, nous avons sélectionné le point dans le temps le plus récent. Les mesures évaluant des déterminants sociaux de la santé similaires ont été regroupées dans les mêmes catégories et classées selon le cadre d’Adkins-Jackson et ses collaborateursNote de bas de page 11.
Lorsque les déterminants sociaux de la santé ont été évalués à l’aide de mesures indirectes ou de substituts, nous les avons classés en fonction de la mesure la plus proche du déterminant en question. Par exemple, la race ou l’origine ethnique autodéclarées auront été classées dans le macrosystème comme une mesure indirecte du racisme potentiel.
Nous avons synthétisé les données sur les déterminants sociaux de la santé, les éléments de santé cognitive et leurs associations en utilisant des fréquences ou des proportions. Les associations rapportées dans les études qualitatives ont été synthétisées séparément.
Résultats
Résultats de la recherche
Sur les 7 390 documents répertoriés, 159 publications ont été incluses dans cet examen de la portée (figure 1). Parmi celles-ci, 158 étaient en anglais et 18 avaient des résumés en français. Les articles ont été publiés entre 1991 et 2024, plus spécifiquement 101 depuis 2014 et 72 depuis 2019. La taille des échantillons pour les études qualitatives et quantitatives variait entre 3 et 6538000 participants. Parmi les publications incluses, nous avions 85 études transversales, 49 études de cohortes rétrospectives ou prospectives, 8 études cas-témoins ou cas-témoins emboîtés, 6 études qualitatives ou mixtes, 6 études transversales répétées, 1 étude cas-croisement, 1 essai contrôlé randomisé, 1 étude pré-post sans groupe de contrôle et 1 analyse post hoc d’un essai contrôlé non randomisé (voir le tableau supplémentaire 4 pour les détails des publications incluses).
Figure 1 : Texte descriptif
Cette figure illustre le processus d’identification et de selection des études qui ont été incluses dans cet examen de la portée.
Comme première étape, n = 7390 documents ont été repérés :
- MEDLINE (n = 2237)
- CENTRAL (n = 392)
- Global Health (n = 387)
- Embase (n = 4374)
De ceux-ci, n = 2175 doublons ont été supprimés :
- Utilisation de Covidence (n = 2063)
- Manuellement (n = 112)
Après cette étape, il restait n = 5215 documents sélectionnés pour le tri. Le tri a exclu n = 4406 documents. Les 809 documents restants ont été évalués aux fins d’extraction, dont 14 n’ont pu être extraits. Les 795 documents restants ont été évalués pour admissibilité, et 634 documents ont été exclus pour les raisons suivantes :
- Méthodologie inadéquate (n = 66)
- Études ou protocoles en cours (n = 45)
- Aucunes données canadiennes disponibles (n = 30)
- Population non conforme (n = 37)
- Absence de DSS (n = 90)
- Aucun élément de cognition associé aux DSS (n = 366)
En bout de ligne, n = 93 études ont été incluses dans cet examen de la portée.
Caractéristiques des études
Les 159 publications incluses portaient sur 93 études. Parmi ces dernières, 25 avaient une couverture nationale ou couvraient plusieurs provinces, et près de la moitié (n = 45) ont été menées en Ontario ou au Québec (voir le tableau 1 pour la synthèse des caractéristiques des participants aux études et les contextes des études incluses; pour plus de détails, voir les tableaux supplémentaires 5 et 6).
| Caractéristiques | n (%)Note de bas de page a |
|---|---|
| Localisation | |
| Couverture de plusieurs provinces ou de l’ensemble du pays | 25 (27) |
| Colombie-Britannique | 4 (4) |
| Alberta | 7 (8) |
| Saskatchewan | 4 (4) |
| Manitoba | 2 (2) |
| Ontario | 25 (27) |
| Québec | 20 (22) |
| Nouveau-Brunswick | 1 (1) |
| Nouvelle-Écosse | 0 |
| Île-du-Prince-Édouard | 0 |
| Terre-Neuve-et-Labrador | 2 (2) |
| Yukon, Territoires du Nord-Ouest et Nunavut | 0 |
| Non mentionné | 3 (3) |
| Sexe des participants | |
| Les deux sexes | 72 (77) |
| Hommes | 6 (7) |
| Femmes | 4 (4) |
| Non mentionné | 11 (12) |
| Groupe d’âge | |
| Jeunes adultes | 1 (1) |
| Aînés | 36 (39) |
| Adultes (sans spécification) | 56 (60) |
| Principal type de données utilisées | |
| Base de données administratives | 21 (23) |
| Données cliniques | 8 (9) |
| Dossiers médicaux | 4 (4) |
| Données d’enquête | 29 (31) |
| Données qualitatives | 6 (6) |
| Mixte | 25 (27) |
| Population de l’étude | |
| Cliniques ambulatoires | 17 (18) |
| Logements communautaires | 59 (63) |
| Collectivités des Premières Nations, Inuits ou Métis | 3 (3) |
| Services des urgences | 1 (1) |
| Soins à domicile | 2 (2) |
| Milieu hospitalier | 4 (4) |
| Établissements de soins de longue durée | 6 (6) |
| Établissement correctionnel | 1 (1) |
| État cognitif au départ | |
| Santé cognitive | 17 (18) |
| Troubles cognitifs ou démence | 6 (6) |
| Mixte | 30 (32) |
| Non mentionné | 40 (43) |
Nous avons classé les déterminants sociaux de la santé relevés en 29 catégories (voir tableau 2). Au total, 80 études (86 %) ont évalué ces déterminants au niveau du microsystème, par exemple la scolarité (46 %), le soutien social (24 %), le revenu du ménage ou de l’individu (19 %), la profession (16 %), le milieu de résidence urbain ou rural (16 %), l’état matrimonial (17 %) ou les modalités de résidence et la composition du ménage (12 %). Douze études (13 %) ont évalué l’exposition aux polluants environnementaux, qui est un déterminant exosystémique, et 31 (33 %) ont évalué un déterminant macrosystémique, soit l’accès aux soins de santé (11 %), l’origine ethnique (11 %), la langue maternelle ou les barrières linguistiques (11 %) et le fait d’être membre des Premières Nations, Inuit ou Métis (4 %). Certains déterminants ont été évalués rétrospectivement tout au long de la vie (le chronosystème), les plus courants étant le niveau de scolarité le plus élevé et une exposition professionnelle passée à des polluants. Une étude a évalué les antécédents de maltraitance dans l’enfance et une autre a évalué l’exposition périnatale et infantile au mercure. Aucune des études sélectionnées n’a évalué les interactions entre différents microsystèmes (le mésosystème).
| Déterminant social de la santéNote de bas de page a | n (%) | ||
|---|---|---|---|
| Toutes les études (n = 93) |
Études quantitatives (n = 87) |
Études qualitatives (n = 6) |
|
| MicrosystèmeNote de bas de page b | |||
| Scolarité | 43 (46) | 42 (48) | 1 (17) |
| Soutien social | 22 (24) | 18 (21) | 4 (66) |
| Revenu | 18 (19) | 18 (21) | 0 |
| État matrimonial | 16 (17) | 16 (18) | 0 |
| Profession ou emploi | 15 (16) | 15 (17) | 0 |
| Milieu de résidence (rural/urbain) | 15 (16) | 13 (15) | 2 (33) |
| Statut vis-à-vis de l’immigration | 11 (12) | 10 (11) | 1 (17) |
| Modalités de résidence ou composition du ménage | 11 (12) | 11 (13) | 0 |
| Environnement bâti | 10 (11) | 10 (11) | 1 (17) |
| Logement | 10 (11) | 9 (10) | 0 |
| Défavorisation du quartier ou statut socio-économique | 8 (9) | 8 (9) | 0 |
| Maltraitance dans l'enfance | 6 (6) | 5 (6) | 1 (17) |
| Exposition professionnelle | 4 (4) | 4 (5) | 0 |
| Solitude | 4 (4) | 4 (5) | 0 |
| Sécurité alimentaire | 1 (1) | 1 (1) | 0 |
| ExosystèmeNote de bas de page c | |||
| Polluants environnementaux | 12 (13) | 12 (14) | 0 |
| MacrosystèmeNote de bas de page d | |||
| Accès aux soins de santé | 10 (11) | 8 (9) | 2 (33) |
| Origine ethnique | 10 (11) | 10 (11) | 0 |
| Langue maternelle ou barrières linguistiques | 10 (11) | 9 (10) | 1 (17) |
| Membres des Premières Nations, Inuits ou Métis | 4 (4) | 3 (3) | 1 (17) |
| Connaissance de la santé cognitive | 2 (2) | 1 (1) | 1 (17) |
| Mise en œuvre de politique | 2 (2) | 2 (2) | 0 |
| Religion | 2 (2) | 1 (1) | 1 (17) |
| Orientation sexuelle | 2 (2) | 2 (2) | 0 |
| Stigmatisation | 2 (2) | 1 (1) | 1 (17) |
| Culture | 1 (1) | 0 | 1 (17) |
| Identité de genre ou binarisme de genre | 1 (1) | 1 (1) | 0 |
| Marginalisation | 1 (1) | 1 (1) | 0 |
| Qualité des soins | 1 (1) | 0 | 1 (17) |
Au total, 62 études ont évalué soit la cognition globale en utilisant, par exemple, le Mini Mental State Examination, le Montreal Cognitive Assessment (MoCA), l’Échelle de performance cognitive (Cognitive Performance Scale), ou des mesures composites de la cognition globale, soit un élément de santé cognitive précis en utilisant, par exemple, des tests des fonctions exécutives, de la vitesse de traitement ou de la mémoire. Un diagnostic de démence (tous types confondus) a constitué un résultat associé à des déterminants sociaux de la santé dans 38 études (voir tableau 3; pour plus d’information sur les déterminants sociaux de la santé et les éléments cognitifs évalués dans les études, voir le tableau supplémentaire 5).
| Éléments de la santé cognitive | n (%) | ||
|---|---|---|---|
| Toutes les études (n = 93) |
Études quantitatives (n = 87) |
Études qualitatives (n = 6) |
|
| Éléments de la cognition globale et de la santé cognitive | |||
| Cognition globaleNote de bas de page a | 47 (51) | 46 (53) | 1 (17) |
| Fonctions exécutives | 12 (13) | 12 (14) | 0 |
| Vitesse de traitement | 9 (10) | 9 (10) | 0 |
| Traitement visuospatial | 4 (4) | 4 (5) | 0 |
| Fluidité verbale | 7 (8) | 7 (8) | 0 |
| Mémoire (au sens large) | 17 (18) | 16 (18) | 1 (17) |
| Apprentissage verbal et mémoire verbale | 9 (10) | 9 (10) | 0 |
| Mémoire de travail | 5 (5) | 5 (6) | 0 |
| Mémoire prospective | 1 (1) | 1 (1) | 0 |
| Compréhension verbale | 1 (1) | 1 (1) | 0 |
| Cognition, mémoire ou déclin cognitif autodéclarés | 11 (12) | 9 (10) | 2 (33) |
| Troubles cognitifs légers et démenceNote de bas de page b | |||
| Diagnostic de démence (tous types) | 38 (41) | 35 (40) | 3 (50) |
| Maladie d’Alzheimer | 13 (14) | 13 (15) | 0 |
| Démence vasculaire | 2 (2) | 2 (2) | 0 |
| Démence autodéclarée | 5 (5) | 5 (6) | 0 |
| Décès associé à la démence | 2 (2) | 2 (2) | 0 |
| Diagnostic de troubles cognitifs légers | 10 (11) | 10 (11) | 0 |
| Vieillissement sain autodéclaré | 1 (1) | 0 | 1 (17) |
Associations entre déterminants sociaux de la santé et cognition
Dans les 93 études incluses dans notre examen de la portée, nous avons relevé 410 associations principales entre des déterminants sociaux de la santé et des éléments de la santé cognitive (voir le tableau supplémentaire 6). Sur ces 410 associations, 87 analyses quantitatives ont fait état de 390 associations entre des catégories de déterminants sociaux de la santé et des éléments de la santé cognitive (voir le tableau supplémentaire 4) et 6 études qualitatives ont fait état de 20 données thématiques descriptives liant déterminants sociaux de la santé et résultats cognitifs (voir le tableau supplémentaire 5)Note de bas de page 20Note de bas de page 21Note de bas de page 22Note de bas de page 23Note de bas de page 24Note de bas de page 25. Nous avons également inclus deux essais qui ont mentionné des interventions portant sur les déterminants sociaux de la santé (accès aux soins de santé, milieu de résidence rural ou urbain) et ont évalué leur impact sur la santé cognitiveNote de bas de page 26Note de bas de page 27.
Études quantitatives
Sur les 390 associations entre les déterminants sociaux de la santé et la cognition et la démence dans les études quantitatives, la scolarité a été la plus fréquemment étudiée, suivie par le soutien social et le revenu du ménage ou celui de l’individu (voir tableau 4).
| Déterminant social de la santé | Éléments de la santé cognitive (n) | Diagnostic de démence (n) | Diagnostic de troubles cognitifs (n) | Décès associé à la démence (n) | ||||||||||
|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
| Cognition globaleNote de bas de page a | Mémoire (toutes les composantes) | Fonctions exécutives | Fluidité verbale | Vitesse de traitement | Traitement visuospatial | Compréhension verbale | Attention | Démence (tous types)Note de bas de page b | Maladie d’Alzheimer | Démence autodéclarée | Démence vasculaire | |||
| Scolarité | 23 | 8 | 5 | 4 | 4 | 3 | 1 | 1 | 11 | 4 | 3 | 1 | 4 | 1 |
| Soutien social | 13 | 6 | 5 | 5 | 1 | 1 | 1 | 0 | 6 | 2 | 1 | 0 | 1 | 0 |
| Revenu | 11 | 3 | 3 | 2 | 0 | 1 | 0 | 0 | 8 | 0 | 0 | 0 | 1 | 1 |
| Profession ou emploi | 11 | 3 | 2 | 1 | 2 | 0 | 0 | 0 | 3 | 1 | 1 | 1 | 0 | 2 |
| État matrimonial | 11 | 1 | 1 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 5 | 0 | 2 | 0 | 4 | 1 |
| Polluants environnementaux | 1 | 1 | 1 | 0 | 1 | 1 | 0 | 0 | 9 | 5 | 0 | 0 | 0 | 1 |
| Milieu de résidence (rural/urbain) | 5 | 2 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 8 | 1 | 1 | 1 | 0 | 1 |
| Modalités de résidence ou composition du ménage | 8 | 2 | 1 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 4 | 0 | 1 | 0 | 1 | 0 |
| Origine ethnique | 7 | 3 | 1 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 2 | 1 | 0 | 0 | 2 | 0 |
| Statut vis-à-vis de l’immigration | 6 | 1 | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 3 | 1 | 0 | 0 | 1 | 1 |
| Environnement bâti | 2 | 1 | 1 | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 | 5 | 2 | 0 | 0 | 0 | 1 |
| Défavorisation du quartier ou statut socio-économique | 3 | 1 | 1 | 0 | 1 | 1 | 0 | 0 | 5 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 |
| Accès aux soins de santé | 4 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 5 | 0 | 1 | 0 | 2 | 0 |
| Logement | 6 | 1 | 1 | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 | 3 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 |
| Langue maternelle ou barrières linguistiques | 5 | 1 | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 3 | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 |
| Solitude | 3 | 2 | 2 | 2 | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 |
| Exposition professionnelle | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 4 | 3 | 0 | 2 | 0 | 0 |
| Maltraitance dans l'enfance | 3 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 |
| Orientation sexuelle | 1 | 1 | 1 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 |
| Membres des Premières Nations, Inuits ou Métis | 2 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 |
| Mise en œuvre de politique | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 | 1 | 0 |
| Identité de genre ou binarisme de genre | 0 | 1 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 |
| Sécurité alimentaire | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 |
| Connaissance de la santé cognitive | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 |
| Marginalisation | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 |
| Religion | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 |
| Stigmatisation | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 |
Études qualitatives
Les six études qualitatives ont été menées en Alberta, en Saskatchewan, en Ontario et à Terre-Neuve-et-Labrador auprès de populations variées, par exemple des personnes atteintes de démence, des proches aidants et des travailleurs de la santé, des travailleuses du sexe et des grands-mères autochtonesNote de bas de page 20Note de bas de page 21Note de bas de page 22Note de bas de page 23Note de bas de page 24Note de bas de page 25. L’accès aux soins de santé a été le déterminant social de la santé le plus étudié, suivi du soutien social et du milieu de résidence (rural ou urbain). Des déterminants sociaux de la santé macrosystémiques tels que la stigmatisation, la religion, l’appartenance ethnique, le contexte culturel et la maltraitance ont également été étudiés (voir tableau 5).
| Étude / cadre | Population | Déterminants sociaux de la santé | Citations choisies |
|---|---|---|---|
| Di Gregorio et al. (2015)Note de bas de page 21 Quatre communautés dans le nord de l’Ontario |
2 personnes atteintes de démence, 15 partenaires de soins, 37 prestataires de soins de santé et de services sociaux, 17 autres membres de la communauté | Connaissance et sensibilisation des prestataires de soins de santé; accès aux soins de santé; prise de conscience et compréhension de la démence; environnement rural; réseaux de soutien communautaire; services de santé et de soins communautaires | « La prise de conscience est la première étape par laquelle on commence à connaître le phénomène : dans ce cas, les signes et les symptômes de la démence, les ressources disponibles ou les personnes atteintes de démence. » « Malgré une méconnaissance des signes et symptômes de la démence, les personnes diagnostiquées sont souvent plus visibles en milieu rural. » |
| Pace (2020)Note de bas de page 20 Communauté NunatuKavut (Terre-Neuve-et-Labrador) |
14 adultes de 50 ans et plus, aidants familiaux et travailleurs à domicile | Soutien social | « La solitude et l’isolement ont été décrits comme des facteurs de risque de démence, tandis que les contacts sociaux ont été considérés comme une protection contre le déclin cognitif. [...] Les participants ont indiqué que le fait de voir régulièrement d’autres personnes était bon pour le cerveau et pour le bien-être mental. Les visites et les rencontres sociales sont perçues comme des occasions de rire, de raconter des histoires et de se souvenir, ce qui est décrit comme un soutien à la mémoire ainsi qu’au renforcement de l’identité collective et des expériences partagées. » |
| Baumann et al. (2019)Note de bas de page 22 Cadre urbain à Toronto (Ontario) |
10 travailleuses du sexe, femmes (n = 5) et femmes transgenres (n = 5), de 18 ans ou plus, dans le cadre du programme Worksafe | Violence sexuelle | « Certaines participantes [...] ont déclaré avoir subi des conséquences à long terme telles que des pertes de mémoire persistantes, une sensibilité au bruit et des cicatrices. Tiffany, qui a été étranglée par une connaissance, souffre d’anxiété persistante et de pertes de mémoire. Elle a déclaré avoir des problèmes de mémoire à court terme et des maux de tête constants [...]. » |
| Bacsu et al. (2020)Note de bas de page 23 Deux communautés rurales en Saskatchewan |
42 adultes âgés de 60 ans ou plus | Soutien social | « Les aînés vivant en milieu rural considèrent que l’engagement social est essentiel au maintien de la santé cognitive. Par exemple, un aîné a déclaré : "Je pense qu’une grande partie de la santé du cerveau est due à la fréquentation d’autres personnes..." En particulier, les aînés ruraux ont décrit des activités liées à deux sous-thèmes : la technologie et les médias sociaux, et les activités communautaires ». |
| Koehn et al. (2016)Note de bas de page 24 Canadiens d’origine chinoise dans le Grand Vancouver (Colombie-Britannique); anglophones à Calgary, (Alberta); Canadiens d’origine indienne à Toronto (Ontario); francophones à Ottawa, (Ontario) |
29 cas de démence et dyades de soignants | Accès aux soins de santé; contexte culturel; scolarité; statut d’immigrant; barrières linguistiques; qualité des soins; religion; soutien social; stigmatisation | « Il est également important que les sources crédibles connaissent la maladie, et c’est là que le personnel des organismes d’aide aux immigrants est généralement défaillant, car la plupart d’entre eux n’ont pas la formation nécessaire pour comprendre la symptomatologie et la trajectoire de la démence, et ne peuvent donc pas orienter la personne atteinte de démence vers les services appropriés. » |
| Lanting et al. (2011)Note de bas de page 25 Communautés du nord de la Saskatchewan |
Trois grands-mères autochtones | Accès routier aux communautés nordiques (environnement bâti); changements culturels perçus; soins de santé fondés sur la culture | « Ces données suggèrent des perceptions culturelles fondamentales communes du vieillissement et de la démence soulevées par un groupe de grands-mères [autochtones]. En outre, on pense que les changements culturels perçus sont à l’origine de l’augmentation des maladies chez les aînés [autochtones] et qu’ils ont un impact négatif sur le processus de vieillissement. » |
Analyse
Impact des déterminants sociaux de la santé sur les résultats cognitifs au Canada
En utilisant un modèle écologiqueNote de bas de page 10, nous avons sélectionné 159 publications couvrant 93 études qui englobent de nombreuses dimensions des déterminants sociaux de la santé et de la santé cognitive, qu’il s’agisse d’associations bien connues (scolarité, soutien social) ou d’associations en émergence ou moins étudiées (conditions de travail, déterminants du macrosystème).
Notre synthèse met en lumière les efforts soutenus des chercheurs pour comprendre l’impact des déterminants sociaux de la santé sur la santé cognitive au Canada. Cet examen de la portée, qui s’ajoute aux études internationales dont on disposeNote de bas de page 28Note de bas de page 29Note de bas de page 30, est le premier à prendre en compte une gamme étendue de déterminants sociaux de la santé en relation avec la santé cognitive au Canada. Cette synthèse fournit des informations aux décideurs politiques et aux autorités de santé publique sur la manière dont les conditions de vie, de travail et de vieillissement des Canadiens peuvent avoir une influence sur les résultats cognitifs de ces derniers.
Portée géographique et caractérisation de la recherche sur les déterminants sociaux de la santé
Environ un quart (27 %) des études incluses couvraient l’ensemble du pays, tandis que près de la moitié ont été menées en Ontario (27 %) ou au Québec (22 %), les deux provinces canadiennes les plus peuplées. Les études nationales, en particulier celles qui reposent sur des échantillons représentatifs au niveau national, sont utiles pour leur généralisation et pour identifier les différences régionales dans la distribution des déterminants sociaux de la santé et des résultats de santé. Cependant, nous n’avons pas relevé d’études menées au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest ou au Nunavut, et aucun résultat particulier pour la Nouvelle-Écosse ou l’Île-du-Prince-Édouard n’était disponible en dehors d’études multiprovinciales ou nationales. Ces lacunes dans la recherche soulignent la nécessité de mener d’autres travaux sur des populations peu étudiées au Canada.
Déterminants de microniveau et de macroniveau et difficultés de mesure
Nous avons constaté que 86 % des associations étaient liées à des déterminants sociaux de la santé classés dans le microsystème, soit le contexte immédiat de l’individu, ce qui correspond aux conclusions d’une étude exploratoire similaireNote de bas de page 28. Seul un tiers (33 %) des associations étaient liées à des déterminants sociaux de la santé macrosystémiques, ce qui met en évidence un enjeu potentiel dans l’évaluation de ces déterminants sociaux de la santé structurels en amont.
Le macrosystème, la couche la plus externe des systèmes intégrés entourant l’individu, a été décrit comme le domaine des systèmes de pouvoir à l’origine des déterminants sociaux de la santé et des disparités en matière de santé et a été décrit également comme imprégnant tous les autres systèmesNote de bas de page 11. Bien que les déterminants macrosystémiques aient été moins étudiés que ceux du microsystème, nous avons relevé 31 études évaluant divers déterminants sociaux de la santé macrosystémiques, qu’il s’agisse de la connaissance de la santé cognitive, de la mise en œuvre de politiques, de la religion, de la stigmatisation, de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre.
L’inclusion d’études qualitatives nous a permis d’intégrer des expériences subjectives associées aux déterminants sociaux de la santé, en particulier la stigmatisation, la discrimination et d’autres associations avec le contexte culturel, l’âgisme et le sexisme, qui peuvent être plus difficiles à évaluer autrement. Les études futures devraient mettre l’accent sur de meilleurs moyens d’évaluer les déterminants sociaux de la santé macrosystémiques.
Déterminants bien connus et déterminants en émergence
Nous avons constaté que la scolarité et le soutien social étaient les déterminants sociaux de la santé les plus fréquemment étudiés, ce qui correspond aux conclusions d’autres étudesNote de bas de page 28Note de bas de page 29Note de bas de page 30. Le soutien social (en particulier l’engagement social, les activités sociales et la qualité des relations avec les aidants) a fait l’objet d’études régulières quant à sa relation avec la santé cognitive des personnes atteintes ou à risque d’être atteintes de la maladie d’Alzheimer et de démences apparentéesNote de bas de page 30. L’état matrimonial ou la solitude peuvent également jouer un rôle dans le déclin cognitif, bien que les preuves à l’appui restent plus faibles que celles concernant l’engagement socialNote de bas de page 30.
Des études longitudinales ont également montré que la scolarité était un facteur de protection contre les pathologies liées à la démence, peut-être en raison d’une plus grande réserve cognitiveNote de bas de page 6Note de bas de page 31Note de bas de page 32Note de bas de page 33. Le rôle de la formation dans la santé cognitive est complexe, car les personnes ayant un niveau de scolarité élevé obtiennent généralement de meilleurs résultats aux tests neurocognitifs que celles qui ont un niveau d’éducation moins élevéNote de bas de page 34. La scolarité peut donc être considérée soit comme un facteur prédictif clé, soit comme un facteur de confusion. Cependant, la scolarité en tant que variable relevait généralement d’une scolarité formelle autodéclarée (soit le niveau de scolarité ou le nombre d’années de scolarité) alors que la stimulation cognitive par un apprentissage continu tout au long de la vie demeure un aspect largement sous-étudié dans les études longitudinalesNote de bas de page 35.
Le rôle des facteurs professionnels dans la santé cognitive est de plus en plus reconnuNote de bas de page 36. La plupart des études de cet examen ont mis l’accent uniquement sur la profession ou le type d’emploi, mais quelques-unes ont évalué l’exposition aux produits chimiques ou les difficultés psychosociales au travailNote de bas de page 36Note de bas de page 37Note de bas de page 38Note de bas de page 39Note de bas de page 40Note de bas de page 41Note de bas de page 42Note de bas de page 43Note de bas de page 44Note de bas de page 45Note de bas de page 46Note de bas de page 47. Bien que de nombreuses études aient porté sur l’exposition aux risques liés au travail (entre autres, l’exposition aux produits chimiques, le travail dans l’industrie minière)Note de bas de page 36Note de bas de page 37Note de bas de page 38Note de bas de page 39Note de bas de page 40Note de bas de page 41Note de bas de page 42Note de bas de page 43Note de bas de page 44Note de bas de page 45Note de bas de page 46Note de bas de page 47, les aspects psychosociaux des conditions de travail (stress au travail, perception d’une forte demande psychologique ou d’un faible contrôle du travail, complexité du travail, etc.) n’ont été prises en compte que récemment dans quelques études, avec des résultats mitigésNote de bas de page 36Note de bas de page 42Note de bas de page 43Note de bas de page 44Note de bas de page 45.
La législation progressiste du Québec en matière de santé et de sécurité au travail fournit un cadre pour protéger les travailleurs contre les risques physiques et psychosociaux sur leur lieu de travail, en reconnaissant les impacts plus larges sur la santé susceptibles de se prolonger jusqu’à la retraiteNote de bas de page 36Note de bas de page 48. En exigeant l’évaluation des facteurs de stress au travail tels que le stress professionnel, une exigence psychologique élevée, le manque de contrôle sur le travail et la complexité du travail, et en imposant des mesures pour les atténuer, cette législation a le potentiel d’améliorer la santé cognitive ainsi que les résultats en matière de santé cardiovasculaire et mentaleNote de bas de page 49Note de bas de page 50. Selon l’approche du Québec, les facteurs de stress psychosociaux au travail sont des déterminants sociaux de la santé modifiables qui peuvent faire l’objet d’interventions ciblées et d’approche législativeNote de bas de page 48Note de bas de page 51.
L’environnement bâti et naturel joue également un rôle important dans la santé cognitive : les facteurs de protection et de risque dépendent de la disponibilité en matière d’espaces verts, de zones piétonnières, d’activités sociales et physiques et d’autres ressources. Les recherches menées au Canada laissent penser que l’accès à des espaces verts est associé à des taux plus faibles de démenceNote de bas de page 52Note de bas de page 53. Des indices plus élevés de potentiel piétonnier sont associés à un meilleur fonctionnement cognitif chez les populations vieillissantes, soulignant les avantages de milieux de vie accessibles et actifsNote de bas de page 54. En cohérence avec ces résultats, la stratégie nationale du Canada en matière de démence encourage les activités physiques et sociales communautaires, en particulier dans les régions rurales et isolées, avec des environnements bâtis conçus pour soutenir la préventionNote de bas de page 4Note de bas de page 5Note de bas de page 6. En développant des milieux accessibles qui encouragent les gens à faire de l’exercice, à créer des œuvres d’art, à jouer de la musique et à d’autres activités similaires, les environnements bâtis peuvent être mis à profit pour favoriser la résilience cognitiveNote de bas de page 55Note de bas de page 56. De tels programmes menés par les collectivités non seulement renforcent la prévention de la démence, mais soulignent également le potentiel de l’aménagement des quartiers en tant que déterminant social de la santé modifiable ayant des conséquences importantes pour la santé physique, sociale et cognitiveNote de bas de page 55Note de bas de page 56.
Nous n’avons répertorié que deux études interventionnelles ciblant les déterminants sociaux de la santé et mesurant leur impact sur la santé cognitiveNote de bas de page 26Note de bas de page 27. Cela souligne la nécessité d’une meilleure intégration des mesures d’impact dans les évaluations des initiatives de santé publique sur la santé cognitive au Canada. De futures études interventionnelles pourraient également porter sur la mise en place d’initiatives incluant la démence dans les initiatives qui s’attaquent aux inégalités et aux injustices en matière de santé et de bien-être, telles que les villes et communautés amies des aînés proposées par l’Organisation mondiale de la santéNote de bas de page 57.
Considérations méthodologiques : données autodéclarées ou spatiales
La plupart des déterminants sociaux de la santé ont été évalués à l’aide de mesures autodéclarées. Obtenus par le biais de questionnaires ou d’enquêtes, ce sont des moyens rentables et faciles d’évaluer une grande variété de déterminants sociaux de la santé du point de vue des participantsNote de bas de page 58. Cependant, les autoévaluations sont sujettes à des biais de mémorisation et de désirabilité sociale, notamment en contexte de perte de mémoire et de déclin cognitifNote de bas de page 58. En outre, certains déterminants sociaux de la santé microsystémiques, tels que le soutien social et le niveau de scolarité, sont sans doute davantage susceptibles d’être étudiés parce qu’ils sont facilement évalués par ces méthodes.
Les déterminants sociaux de la santé exosystémiques, tels que les expositions environnementales et professionnelles, n’ont pas été aussi souvent évalués. Ces déterminants sociaux de la santé ont été plus souvent mesurés à l’aide de données spatialisées telles que les aires de diffusion ou les codes postaux. Plusieurs obstacles entravent l’utilisation des données spatialisées, à savoir l’accès à ces données, leur jumelage et les processus réglementairesNote de bas de page 59. Les études futures devraient explorer davantage le potentiel de l’utilisation des données spatialisées pour analyser les associations entre les facteurs de risque potentiels et les résultats en matière de santé cognitive.
Points forts et limites
Cet examen de la portée présente de nombreux points forts, notamment une stratégie de recherche exhaustive et l’inclusion de déterminants sociaux de la santé variés associés à l’éventail complet de la santé cognitive. L’accent mis sur les populations du Canada est un atout, car les résultats peuvent être une source d’information pour les décideurs politiques et les professionnels de la santé en fournissant des données probantes directement pertinentes. Nous avons également mis en évidence les possibilités de recherche future.
Cette étude présente également des limites. L’accent mis sur la littérature canadienne publiée a limité notre capacité à explorer certains déterminants sociaux de la santé en raison de l’absence de groupes de contrôle externes. Par exemple, nous n’avons pas pu comparer les systèmes nationaux de soins de santé, les programmes publics ou les approches.
Nous avons limité la recherche aux bases de données biomédicales en raison du grand nombre d’études admissibles répertoriées, alors qu’une recherche dans la littérature grise aurait pu permettre de trouver d’autres publications ou interventions pertinentes et des données sur d’autres populations ou des populations sous-représentées. En outre, l’extraction des données a été effectuée par une seule évaluatrice.
Nous n’avons pas pu combiner les données sur les modèles d’étude en utilisant l’étude comme unité d’analyse, car les diverses publications décrivant une même étude pouvaient avoir utilisé des modèles d’étude différents. Enfin, la diversité des études et des approches analytiques n’a pas permis de réaliser des méta-analyses des associations. Nos résultats peuvent toutefois servir de guide à l’élaboration de futures revues systématiques visant à explorer ces associations.
Conclusion
Cette analyse a permis de répertorier 159 publications couvrant 93 études décrivant les associations entre les déterminants sociaux de la santé répartis en 29 catégories et les résultats en matière de santé cognitive sur un continuum allant de la cognition saine à la démence. Outre la diversité des associations, nous avons également mis en évidence la complexité de l’évaluation des déterminants sociaux et la valeur de l’utilisation d’une large gamme de sources de données et d’approches de collecte de données dans les études pour une meilleure couverture des déterminants sociaux de la santé. Nos résultats montrent qu’il est important de tenir compte d’un large éventail de déterminants sociaux de la santé, de mieux intégrer les chaînes d’influence entre eux et de concevoir des interventions ciblées et globales capables d’agir efficacement sur la santé cognitive. Les recherches futures devraient également mettre l’accent sur l’intégration d’autres mesures des fonctions cognitives positives et du vieillissement en bonne santé afin de couvrir ce continuum de la santé cognitive.
Financement
Nous remercions le Centre de surveillance et de recherche appliquée et le Centre de promotion de la santé de la Direction générale de la promotion de la santé et de la prévention des maladies chroniques de l’Agence de la santé publique du Canada pour leur soutien financier.
Remerciements
Nous remercions le Centre de surveillance et de recherche appliquée et le Centre de promotion de la santé de la Direction générale de la promotion de la santé et de la prévention des maladies chroniques de l’Agence de la santé publique du Canada pour leur expertise et leurs commentaires précieux; la Bibliothèque de l’Agence de la santé publique du Canada pour son aide dans la validation de la stratégie de recherche et Dominique Parisien de l’Unité des capacités en santé publique et de la gestion du savoir de la Direction générale de la réglementation, des opérations et de la gestion des urgences de l’Agence de la santé publique du Canada, pour son aide dans la réalisation de ce projet et le transfert des connaissances pertinentes.
Conflits d’intérêts
Les auteures déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts.
Contributions des auteures et avis
- SO : conception, curation de données, analyse formelle, enquête, méthodologie, rédaction de la première version du manuscrit, relectures et révisions.
- TR : conception, curation de données, analyse formelle, enquête, rédaction de la première version du manuscrit, relectures et révisions.
- MLR : conception, administration du projet, supervision, validation, relectures et révisions.
- LL: conception, administration du projet, supervision, validation, relectures et révisions.
Le contenu de cet article et les points de vue qui y sont exprimés n’engagent que les auteures; les points de vue ne correspondent pas nécessairement à ceux du gouvernement du Canada.
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