Contexte stratégique : Prise en compte des connaissances des collectivités en vertu de la Loi sur l’évaluation d’impact

Le présent document est présenté à titre informatif seulement. Il ne remplace pas la Loi sur l’évaluation d’impact (LEI) ou ses règlements. En cas d’incompatibilité entre le texte du présent document et la LEI ou ses règlements, la LEI et ses règlements ont prévalence. Pour les versions les plus à jour de la LEI et de ses règlements, veuillez consulter le site Web du ministère de la Justice.

1. Introduction

Le paragraphe 22(1) de la Loi sur l’évaluation d’impact (LEI) décrit les éléments à examiner dans les évaluations d’impact réalisées par l’Agence d’évaluation d’impact du Canada (l’Agence) ou par une commission. Plus précisément, l’alinéa m) précise que les connaissances des collectivités fournies à l’égard du projet désigné doivent être prises en compte.

Par conséquent, le présent document vise à appuyer la prise en compte des connaissances des collectivités dans l’évaluation d’impact d’un projet, tant pour les évaluations menées par l’Agence que pour celles menées par les commissions. Il fournit un guide sur ce que signifient les connaissances des collectivités en vertu de la LEI, des avantages qu’elles peuvent apporter à une évaluation et de la manière dont elles peuvent être utilisées dans le cadre d’une évaluation d’impact.

Étant donné que les évaluations d’impact des projets désignés doivent tenir compte des connaissances des collectivités fournies par rapport aux projets, lors de la planification de l’évaluation d’impact, les promoteurs, les praticiens et les autres personnes participant au processus doivent prendre en compte ce qui suit :

  1. Quelles sont les sources de connaissances des collectivités disponibles et pertinentes pour un projet proposé?
  2. Quelles méthodes permettraient de recueillir de la façon la plus efficace et inclusive les connaissances des collectivités pertinentes?
  3. Comment les connaissances des collectivités peuvent-elles éclairer l’évaluation et les activités postérieures à la décision?

2. Que sont les connaissances des collectivités?

Les connaissances des collectivités peuvent se définir comme les connaissances détenues par des personnes ou partagées par une collectivité, qui sont acquises au fil du temps par l’utilisation directe d’une ressource ou d’un environnement (naturel ou social) ou par l’interaction avec celle-ci ou celui-ci. Cela rend le contexte des connaissances des collectivités particulier et unique.

Les sources de connaissances des collectivités peuvent notamment comprendre de l’information recueillie auprès de personnes et d’organisations telles que :

Les types de connaissances des collectivités pourraient comprendre toute connaissance liée à l’évaluation des effets potentiels d’un projet proposé sur l’environnement, la santé, la société ou l’économie. Celles-ci peuvent être de nature quantitative ou qualitative. Il peut s’agir, par exemple, d’études sur l’utilisation des terres, de registres d’associations de protection de la faune, de rapports annuels d’un fournisseur de services sociaux local ou de photos de groupes historiques locaux.

Étude de cas

Durant la période de consultation publique sur le projet lié à la capacité de la subdivision Cascade de Canadien Pacifique, l’Administration portuaire Vancouver-Fraser a recueilli les connaissances de la collectivité, qui ont été utilisées pour éclairer l’évaluation du projet. Des études réalisées en plongée (2010 et 2019) fournies par des plongeurs locaux ont permis d’identifier des espèces autrement non identifiées dans la zone du projet proposé, notamment des syngnathes à lignes grises, des limandes tachetées, des chabots-bisons, de jeunes crabes dormeurs et des chabots grogneurs. Sans ces études réalisées en plongée, l’Administration portuaire n’aurait pas eu connaissance de tous les effets potentiels sur la zone marine localeNote de bas de page 1.

Les connaissances des collectivités peuvent être utiles à l’évaluation d’impact d’un projet en aidant à compléter l’information et les études par des connaissances et des données locales ou régionales qui ne seraient pas autrement recueillies dans le cadre de l’évaluation (p. ex., en définissant les conditions de référence ou en déterminant et en caractérisant les effets potentiels). C’est pourquoi les promoteurs devraient chercher activement des personnes et des groupes susceptibles de détenir des connaissances des collectivités, comme les sources énumérées ci-dessus ou encourager leur participation à des événements publics. Les renseignements relatifs au moment où, pendant le processus d’évaluation d’impact, les détenteurs de connaissances des collectivités devraient être identifiés et mis à contribution, sont présentés ci-dessous.

Étude de cas

À New York, des défenseurs de la communauté latino-américaine ont fait part à l’Environmental Protection Agency (l’agence américaine responsable des évaluations environnementales) de leurs connaissances sur les pêcheurs locaux qui pratiquent la pêche de subsistance et qui dépendent des poissons pris dans l’East River. C’est pourquoi les promoteurs devraient chercher activement des personnes et des groupes susceptibles de détenir des connaissances des collectivités, comme ceux énumérés ci-dessus (c’est-à-dire des sources de connaissances des collectivités), ou encourager leur participation à des événements publics. Sans cette information, les connaissances de l’Environmental Protection Agency sur la pollution de la rivière et les répercussions sur la santé des résidents locaux auraient été incomplètesNote de bas de page 2.

Parmi les autres avantages que les connaissances des collectivités peuvent apporter aux évaluations d’impact, citons les suivants :

Exemple

Une association communautaire locale pourrait faire valoir que son établissement (près du projet proposé) organise fréquemment des cours et des activités de plein air pour ses membres, qui consistent en des populations particulièrement vulnérables. En tenant compte de l’information sur la fréquence d’utilisation de l’espace extérieur par le centre, et en indiquant qui l’utilise, le promoteur sera en mesure de mieux planifier le projet, en ajustant le calendrier de certaines activités de construction pour atténuer les répercussions sanitaires et sociales sur les populations vulnérables qui utilisent l’établissement.

Les connaissances des collectivités peuvent être différentes de l’information recueillie durant les périodes de participation du public. Le public aura la possibilité de participer de façon significative à un processus d’évaluation d’impact. Grâce à ces occasions de participation du public, des personnes et des groupes peuvent faire part de leurs commentaires, de leurs préoccupations ou de leurs intérêts à l’égard du projet, et ceux-ci seront pris en compte dans le cadre de l’évaluation d’impact. En effet, la LEI prévoit explicitement que les commentaires formulés par le public se distinguent des connaissances des collectivités, et doivent être pris en compte (alinéa 22(1)n)).

Les différentes étapes du processus d’évaluation d’impact et le rôle des connaissances des collectivités lors de chacune d’entre elles sont abordés ci-dessous. Les connaissances des collectivités se développent par l’interaction à long terme avec une ressource ou un environnement et peuvent donc être plus approfondies et spécifiques que les commentaires généraux, les préoccupations ou les intérêts exprimés à l’égard du projet dans des forums de participation ouverts. Les promoteurs peuvent devoir mener des études particulières pour recueillir les connaissances des collectivités et ne doivent pas se fier uniquement aux possibilités de participation du public pour recueillir ces renseignements.

Les personnes et les groupes communautaires peuvent également faire valoir des connaissances de leur collectivité à tout moment, soit par le truchement des possibilités de participation du public à une évaluation d’impact, soit en les communiquant directement aux promoteurs du projet, aux commissions ou à l’Agence.

Les connaissances des collectivités diffèrent des connaissances autochtones. Comme pour les connaissances des collectivités, la LEI exige que toutes les connaissances autochtonesNote de bas de page 3 fournies dans le cadre d’un projet soient prises en compte (alinéas 6(1)j) et 22(1)g)) et précise les exigences quant à leur utilisation et leur protection.

Pour savoir plus précisément comment acquérir et protéger les connaissances autochtones dans le cadre d’une évaluation d’impact, veuillez consulter les documents d’orientation de l’Agence traitant de cette question :

3. Prise en compte des connaissances des collectivités en vertu de la Loi sur l’évaluation d’impact

Tout au long du processus d’évaluation d’impact, les personnes, les collectivités, les promoteurs, les commissions et l’Agence jouent tous un rôle essentiel pour veiller à ce que les connaissances des collectivités soient recueillies, transmises et prises en compte de manière adéquate :

4. Méthodes de collecte et de prise en compte des connaissances des collectivités

Le promoteur et les praticiens de l’évaluation d’impact (praticiens de l’EI) peuvent devoir utiliser diverses méthodes pour recueillir et prendre en compte les connaissances des collectivités dans le cadre de la LEI, notamment des méthodes qualitatives telles que des entretiens, des groupes de discussion ou des présentations écrites officielles. Des méthodes appropriées peuvent être indiquées dans les LDIEI. Le plan de participation du public peut également décrire des moyens de recueillir les connaissances des collectivités. Bien que les méthodologies novatrices soient encouragées, le respect de lignes directrices éthiques en matière de mobilisation et collecte de renseignements auprès de personnes ou d’organisations est exigé.

Tout au long du processus d’évaluation d’impact, les promoteurs et les praticiens de l’EI devraient prendre en compte les questions suivantes :

5. Principes de prise en compte des connaissances des collectivités

La collecte et la prise en compte des connaissances des collectivités doivent s’appuyer sur les principes suivants :

  1. Rechercher les connaissances des collectivités dès le début du processus :
    • Regrouper les connaissances des collectivités dès le début du processus d’évaluation d’impact aidera à déterminer les problèmes ou les possibilités déjà présents dans les collectivités qui éclaireront les principaux documents du processus d’évaluation d’impact (p. ex. le sommaire des questions et les lignes directrices individualisées relatives à l’étude d’impact).
      • Exemples de problèmes déjà présents dans une collectivité : changements environnementaux, migration des troupeaux, pressions climatiques existantes, pressions sociales, etc.
      • Exemples de possibilités déjà présentes dans une collectivité : possibilités d’approvisionnement local, services de soutien communautaires existants, etc.
  2. Appliquer l’analyse comparative entre les sexes plus (ACS+) à la collecte et à la prise en compte des connaissances des collectivités :
    • Lorsqu’on collecte des connaissances des collectivités, l’information recueillie devrait refléter la diversité au sein de la collectivité dans son ensemble. L’ACS+ doit être appliquée aux méthodes et aux outils utilisés pour recueillir les connaissances des collectivités. Par exemple, différents groupes peuvent avoir différents niveaux d’accès à Internet ou de littératie numérique, ce qui nécessitera des adaptations afin de soutenir la transmission de leurs connaissances si des outils numériques ou en ligne sont utilisés.
  3. Maintenir la transparence tout en recueillant et en prenant en compte les connaissances des collectivités :
    • Les sources et les utilisations des connaissances des collectivités doivent être rendues publiques, afin que tous les membres des collectivités et les autres participants à l’évaluation puissent comprendre comment l’information locale a été utilisée dans le processus d’évaluation d’impact. Toute connaissance des collectivités fournie sous la forme d’un commentaire public sera publiée sur le Registre canadien d’évaluation d’impact (Registre), conformément aux exigences de la LEI.
    • En ce qui concerne les connaissances des collectivités recueillies par le promoteur en vue de leur inclusion dans l’étude d’impact, les promoteurs doivent tenir compte des questions de confidentialité. Lorsqu’il y a des préoccupations au sujet de la confidentialité ou d’autres sujets pertinents à caractère délicat, le promoteur et l’Agence prendront des mesures pour veiller à ce que les connaissances des collectivités en question, si elles sont pertinentes pour l’évaluation, soient recueillies et enregistrées et que des mesures appropriées soient prises pour protéger tous les renseignements confidentiels. Afin de s’assurer que des mesures appropriées sont prises, toute préoccupation concernant la confidentialité doit être soulevée avant que des connaissances ou des renseignements soient fournis.
  4. Fournir des mécanismes d’apprentissage mutuel :
    • Le partage des connaissances présente des avantages pour les collectivités et les promoteurs, car il permet notamment de mieux comprendre le projet et ses composantes, ainsi que le contexte et les possibilités de la collectivité. La communication sur la façon dont les connaissances des collectivités ont été prises en compte dans une évaluation d’impact (p. ex. dans la conception du projet) est une occasion importante d’apprentissage mutuel et de dialogue. La participation des membres des collectivités à la collecte des connaissances des collectivités offre également des possibilités d’apprentissage mutuel. Par exemple, le promoteur peut fournir des résumés en langage clair et simple des études réalisées afin que les détenteurs de connaissances puissent comprendre et intégrer ces constatations à leur propre compréhension de leur collectivité et de leur région.
  5. Faire preuve de souplesse et de réactivité :
    • Lors de la collecte des connaissances des collectivités, les promoteurs doivent faire preuve de souplesse et demeurer à l’écoute des détenteurs de connaissances. Cela signifie que les méthodes de collecte des connaissances des collectivités doivent demeurer souples afin de s’adapter aux nouveaux renseignements (p. ex., nouveaux groupes ou lieux d’étude) et aux nouvelles circonstances (p. ex., considérations saisonnières) qui apparaissent au cours de l’évaluation d’impact, ainsi qu’aux nouvelles façons de recueillir des renseignements ou de démontrer la validité de ces renseignements. Par exemple, la pandémie de COVID-19 a démontré la nécessité d’être ouvert à la collecte de renseignements virtuelle et à distance.

Il peut également être nécessaire de faire preuve de souplesse en ce qui a trait à la forme ou à l’étendue des connaissances des collectivités fournies. Par exemple, les conditions sociales, économiques, sanitaires et environnementales existantes (comme les changements climatiques) peuvent modifier les conditions locales au sein d’une collectivité d’une manière qui n’est pas immédiatement reflétée dans les ensembles de données régionales, nationales ou mondiales. Les ensembles de données nationaux peuvent comprendre des années de données et des observations répétées, tandis que les connaissances des collectivités, comme celles relatives à une espèce envahissante ou à un environnement en évolution, peuvent être uniques et limitées dans le temps, mais aussi importantes et valables.

6. Conclusion

L’obligation de prendre en compte les connaissances des collectivités dans les évaluations d’impact en vertu de la LEI offre l’occasion d’élargir les types de données et d’éléments probants recueillis au cours d’une évaluation. Les détenteurs de connaissances des collectivités devraient participer dès le début et tout au long du processus d’évaluation d’impact afin d’éclairer l’ensemble de l’évaluation, aux côtés des détenteurs de connaissances autochtones et des autres experts en évaluation des impacts environnementaux, sanitaires, sociaux et économiques. L’inclusion significative des connaissances des collectivités dans les évaluations d’impact renforcera la base de données probantes et éclairera la prise de décision.

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