Chapitre  7 : Répercussions techniques et réglementaires de la couverture de l’équité en matière d’emploi

Titre officiel : Réaliser et soutenir l’équité en matière d’emploi : un cadre transformatif - Rapport du Groupe de travail sur l’examen de la Loi sur l’équité en matière d’emploi : Chapitre 7

Auteure : Professeure Adelle Blackett, MSRC, Ad E, Présidente du groupe de travail

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Introduction : l'importance d'une couverture exhaustive

Dans le chapitre 1 du présent rapport, nous avons examiné de près qui est visé et qui devrait l'être en vertu du cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi dans un monde du travail en évolution. Nous avons été particulièrement soucieux de veiller à ce que la couverture de l'équité en matière d'emploi nous permette de dresser un portait global des pratiques d'emploi dans les milieux de travail sous réglementation fédérale. Nous ne pouvons pas nous permettre d'abandonner des membres des groupes visés par l'équité en matière d'emploi. L'objectif est de favoriser une inclusion équitable dans le travail décent, pour tous les travailleurs.

Nous rappelons que l'équité en matière d'emploi ne permettra pas à elle seule d'atteindre cet objectif, mais il s'agit d'une pièce importante du casse-tête. Les pratiques d'emploi équitables, y compris la transparence salariale, freinent la ségrégation professionnelle. Par l'entremise de l'équité salariale, ces pratiques nous aident aussi à reconnaître et à valoriser les compétences que les femmes - qui peuvent aussi être membres de tous les autres groupes visés par l'équité en matière d'emploi - mettent à contribution dans leur travail.

Le travail précaire est un obstacle particulier à l'atteinte de l'inclusion équitable. Par exemple, le groupe de travail a présenté des données indiquant que les travailleurs handicapés sont surreprésentés parmi les employés temporaires. Cette tendance s'explique en partie par la pandémie et le besoin urgent de personnel. Le groupe de travail s'est aussi intéressé à l'accès potentiellement réduit des travailleurs handicapés aux prestations de maladie et d'invalidité dans le cadre de modalités de travail non permanentes. Les chercheurs ont constaté que les femmes obtiennent plus souvent des gains liés à l'équité en matière d'emploi dans des postes temporaires à temps partiel que dans des postes permanents à temps pleinNote de bas de page 1. Il s'agit d'une préoccupation particulière : si l'équité en matière d'emploi pour les travailleurs issus des groupes historiquement sous-représentés signifie qu'ils obtiennent des emplois précaires, avons-nous vraiment favorisé une égalité réelle?

Ce chapitre reconnaît que, bien que le principe général de l'inclusion équitable soit clair, les détails sont vraiment importants.

Ce chapitre est donc plutôt technique, avec un but. L'objectif de notre groupe de travail, c'est de ne laisser personne pour compte. Ce chapitre tient également compte d'un point que les membres du groupe de travail ont répété : l'équité en matière d'emploi doit être vue comme une occasion d'attirer des talents qui ont été négligés, et de rendre nos milieux de travail - et notre société pluraliste - plus forts pour nous tous.

Nous reconnaissons également que les conditions du marché du travail sont en partie déterminées par les cadres de réglementation. Il y a un équilibre délicat à atteindre pour s'assurer que la révision du cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi ne contribue pas à une augmentation du travail précaire. Nous devons éviter de créer un cadre qui peut facilement être contourné lorsque la relation d'emploi est évitée. Dans ce rapport, notre groupe de travail a réfléchi à la façon de mettre au point une approche inclusive pour l'équité en matière d'emploi, de couvrir un éventail plus large de milieux de travail et de veiller à ce que les obstacles à l'équité soient éliminés à ces endroits également.

Nous en arrivons donc à trois répercussions et recommandations pour le cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi :

Répercussion 1 : Nous devons savoir ce qui se passe dans les milieux de travail canadiens

Pour rendre justice à l'équité en matière d'emploi, nous devons être en mesure de jeter un regard critique sur ce qui se passe dans les milieux de travail canadiens. Nous devons comprendre les obstacles rencontrés par les travailleurs découragés et nous assurer que nos outils de mesure - notamment la disponibilité sur le marché du travail - n'intègrent pas des désavantages. Nous devons comprendre la surreprésentation des groupes visés par l'équité dans les emplois précaires ainsi que les obstacles à leur inclusion équitable dans le travail décent et dans les emplois stables, durables et favorables. Nous devons être conscients des facteurs économiques - examinés au chapitre 1 - qui mènent à une plus grande précarité du travail, ainsi que de l'approche holistique nécessaire pour préserver le travail décent et la croissance économique.

Rien de tout cela ne signifie que les emplois stables, durables et favorables ne changeront pas au fil du temps. Il y a un juste équilibre. Les normes en milieu de travail et les modèles de travail doivent eux aussi être transformés par la façon dont les groupes visés par l'équité en matière d'emploi comprennent les cycles de vie des milieux de travail, et il faut attirer l'attention sur le caractère fondamental des soins, pour nous-mêmes et pour notre environnementNote de bas de page 2.

Concrètement, cela signifie que le droit du travail et le droit en matière de droits de la personne, y compris le cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, sont censés s'appliquer de façon générale et favoriser l'inclusion équitable, la croissance économique durable, le plein emploi productif ainsi qu'un travail décent pour tous.

La définition de l'emploi dans la Loi canadienne sur les droits de la personne est un exemple de cette large portée : « Y est assimilé le contrat conclu avec un particulier pour la fourniture de services par celui‑ci. » Tous les milieux de travail visés doivent prévenir la discrimination systémique, y remédier et assurer l'égalité réelle.

C'était le raisonnement adopté dans le rapport Bilson sur l'équité salariale :

Le corollaire de ce constat [selon lequel le droit de recevoir un salaire égal pour un travail de valeur égale est un droit de la personne], à notre avis, est que toute législation sur l'équité salariale doit inclure autant de travailleurs que possible dans sa portée, plutôt que d'en exclure tout simplement parce que la nature de leur relation de travail ou la manière dont leur travail est organisé ne s'aligne pas avec les paradigmes traditionnels. Nous croyons que cette conception élargie est d'autant plus importante dans la conjoncture économique actuelle.

L'équité salariale : une nouvelle approche à un droit fondamental, à la page 203.

Nous sommes d'accord. Nous reconnaissons également que le cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi vise à garantir que les groupes visés par l'équité en matière d'emploi sont représentés équitablement dans tout le spectre de l'emploi et, surtout, à éviter qu'ils soient surreprésentés dans les emplois précaires. L'objectif est donc, à juste titre, de veiller à ce que les groupes visés par l'équité aient des possibilités équitables d'accéder à des emplois décents, stables, durables et favorables.

Employés temporaires et à temps partiel en vertu du cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi

Le cadre actuel de la Loi sur l'équité en matière d'emploi donne déjà un aperçu important de ce qui se passe dans les milieux de travail relevant de la compétence fédérale, en demandant une production de rapports équilibrée sur les employés temporaires et à temps partiel :

Définitions de « salarié » dans le Règlement sur l'équité en matière d'emploi

salarié permanent à plein temps Personne embauchée pour une période indéterminée par un employeur du secteur privé et qui travaille régulièrement le nombre d'heures normal fixé par celui-ci pour les salariés de la catégorie professionnelle dont elle fait partie.

salarié permanent à temps partiel Personne embauchée pour une période indéterminée par un employeur du secteur privé et qui travaille régulièrement une partie seulement du nombre d'heures normal fixé par celui-ci pour les salariés de la catégorie professionnelle dont elle fait partie.

salarié temporaire Personne embauchée sur une base temporaire par un employeur du secteur privé et qui travaille un nombre d'heures donné pendant une période déterminée ou des périodes totalisant 12 semaines ou plus au cours d'une année civile, à l'exclusion de la personne qui fréquente à plein temps un établissement d'enseignement secondaire ou postsecondaire et qui travaille durant les vacances scolaires.

Les définitions qui suivent s'appliquent aux fins de la Loi.

salarié

  1. Dans le cas d'un employeur du secteur privé, toute personne qui est employée par celui-ci, à l'exclusion d'une personne employée sur une base temporaire ou occasionnelle pendant moins de 12 semaines par année civile;
  2. dans le cas d'un secteur de l'administration publique fédérale visé aux alinéas 4(1)b) ou c) de la Loi auquel s'applique la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, toute personne nommée ou mutée à un poste dans ce secteur conformément à cette loi, à l'exclusion des personnes suivantes :
    1. celles nommées à titre d'employé occasionnel aux termes du paragraphe 50(1) de cette loi,
    2. celles nommées pour une période inférieure à trois mois;
  3. dans le cas d'un secteur de l'administration publique fédérale visé aux alinéas 4(1)b) ou c) de la Loi auquel ne s'applique pas la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, toute personne nommée à un poste dans ce secteur conformément au texte législatif établissant ce secteur, à l'exclusion d'une personne employée sur une base temporaire ou occasionnelle pendant moins de trois mois.

(En vertu du paragraphe 50(2) de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, un employé occasionnel ne peut être nommé pour une période dépassant 90 jours ouvrables par année civile; l'employé occasionnel n'est pas visé par la LEFP et ne peut être pris en compte dans un processus de nomination interne.)

Le Règlement sur l'équité en matière d'emploi de 1986 contenait une exigence en matière de rapports pour les milieux de travail où le nombre de salariés temporaires représentait 20 % ou plus du nombre total d'employés de l'employeur (formulaire 3). Les employeurs étaient tenus d'indiquer tous les salariés temporaires, en fonction de la date, au cours de l'année civile, où leur nombre était le plus élevé (formulaires 1 à 3).

Ces exigences demeurent sensiblement les mêmes dans le règlement actuel. L'employeur doit remplir le formulaire 2 « à l'égard de tous ses salariés au Canada », y compris les salariés permanents à temps plein, les salariés permanents à temps partiel et, « lorsqu'ils représentent à tout moment de la période de rapport 20 pour cent ou plus de son effectif, les salariés temporaires. »

Ainsi, les salariés temporaires sont raisonnablement pris en compte dans les rapports requis par la Loi sur l'équité en matière d'emploi pour la main-d'œuvre du secteur privé. Au cours de nos vastes consultations, personne n'a déclaré que cela devrait changer. La couverture est bien équilibrée, et nous ne recommandons pas de changements pour le moment.

Répercussion 2 : Les employeurs visés devraient produire des rapports sur l'ensemble de leur main-d'œuvre

La deuxième répercussion est que les employeurs visés devraient produire des rapports sur l'ensemble de leur main-d'œuvre, y compris les entrepreneurs dépendants au sens du paragraphe 3(1) du Code canadien du travail. La raison est simple : nous voulons dresser un portrait significatif des personnes qui accomplissent des tâches dans leur milieu de travail. Nous devons connaître les possibilités d'avancement qui s'offrent à eux sur le lieu de travail, conformément aux principes d'équité en matière d'emploi. Nous devons savoir si les travailleurs issus des groupes désignés se retrouvent de façon disproportionnée à travailler comme entrepreneurs dépendants, sans possibilité d'avancement dans le milieu de travail.

L'inclusion des entrepreneurs dépendants est une pièce importante de l'harmonisation qui simplifie les rapports entre les régimes proactifs. Nous constatons que la Loi sur l'équité salariale inclut les entrepreneurs dépendants, ce qui assure une plus grande harmonisation avec le Code canadien du travail, partie I.

Recommandation 7.1 : Les rapports établis en vertu de la Loi sur l'équité en matière d'emploi devraient inclure les entrepreneurs dépendants, conformément à la Loi sur l'équité salariale et au Code canadien du travail.

Répercussion 3 : Couverture favorable et durable pour le PLEME, les employeurs fédéraux à l'étranger et le PCF

La dernière répercussion est que près de 40 ans plus tard, nous devons nous assurer que la couverture du Programme légiféré d'équité en matière d'emploi (PLEME) pour les employeurs du secteur privé sous réglementation fédérale (SPRF), les employeurs fédéraux à l'étranger et le Programme de contrats fédéraux (PCF) est optimale. Nous suggérons d'apporter des changements mineurs au PLEME, principalement pour l'harmoniser avec les changements que nous proposons pour le PCF. Dans nos propositions, nous avons repris les priorités du chapitre 6 visant à assurer l'harmonisation avec les autres lois proactives - la Loi sur l'équité salariale et la Loi canadienne sur l'accessibilité. Notre objectif est d'élargir la couverture tout en réduisant le fardeau administratif imposé aux employeurs.

Ce qu'il faut retenir, c'est que le changement ne se produira pas d'un seul trait de plume. Ces changements ne seront durables que si l'on s'engage à soutenir les employeurs. Lorsqu'il est question de nos principes d'équité en matière d'emploi, il faut joindre le geste à la parole.

Harmoniser le PLEME

Chez les organisations qui ont du succès, la diversité et l'inclusion ne sont pas facultatives. Le cas de la diversité et de l'inclusion va au-delà du traitement juste et équitable des employés. La diversité et l'inclusion permettent à la fonction publique de tirer parti de la multitude de points de vue de la population de notre pays dont on a besoin pour relever les défis complexes d'aujourd'hui.

Créer une fonction publique diversifiée et inclusive : Rapport final du Groupe de travail conjoint syndical-patronal sur la diversité et l'inclusion, 2017.

Le droit du travail et le droit en matière de droits de la personne sont des cadres exhaustifs : le point de départ est l'inclusion. Les exclusions nécessitent des justifications convaincantes. Il y a beaucoup de petits employeurs relevant de la compétence fédérale, comme l'indiquent les figures 7.1 et 7.2 ci-dessous. Ces employeurs auront probablement besoin de mesures de soutien et d'adaptation particulières. Cela dit, il est difficile de continuer à justifier l'exclusion totale au Canada en 2023. Nous avons été encouragés par les employeurs qui nous ont rencontrés. Ils ont répété ce qui suit : nous avons l'appui qu'il nous faut. Ils veulent savoir que nous prêtons attention aux défis particuliers que les petits employeurs pourraient rencontrer et que nous nous efforçons de leur fournir le soutien dont ils ont besoinNote de bas de page 3.

La législation proactive sur l'équité salariale, l'un des aspects les plus complexes du droit en matière de droits de la personne sur le plan technique, établit un seuil de 10 et plus pour des raisons essentiellement pratiques, compte tenu du petit nombre d'emplois. De grands employeurs nous ont dit que le véritable défi consiste à simplifier ou à harmoniser les cadres législatifsNote de bas de page 4.

À l'heure actuelle, la Loi sur l'équité en matière d'emploi met l'accent sur les grands milieux de travail au-delà de la fonction publique fédérale, c'est-à-dire les employeurs du secteur privé sous réglementation fédérale qui comptent plus de 100 employés. De façon similaire, le Programme de contrats fédéraux connexe vise les organisations comptant au moins 100 employés si la valeur du contrat est supérieure à 1 million de dollars.

Le portrait du secteur privé sous réglementation fédérale (SPRF) ne pourrait pas être plus révélateur - la grande majorité des employeurs ne sont pas visés par la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Pourtant, 87 % des employés du secteur privé sous réglementation fédérale travaillent pour les 4 % des employeurs qui comptent plus de 100 employés.

Figure 7.1 : Répartition de l'effectif du SPRF selon la taille de l'entreprise, 2021
Figure de la : la description suit
  • Sources : Enquête sur les milieux de travail de compétence fédérale, 2015; Enquête sur l'emploi, la rémunération et les heures de travail, novembre 2015 et novembre 2021; Rapport annuel de l'employeur concernant les situations comportant des risques (base de données, 2019); Système d'information sur les relations industrielles, 2022; Programme du travail (calculs).
Description textuelle de la figure 7.1
Taille de l'entreprise Répartition de l'effectif (pourcentage)
1 à 5 employés 2 %
6 à 19 employés 3 %
20 à 99 employés 8 %
Plus de 100 employés 87 %
Figure 7.2 : Répartition des employeurs du SPRF selon la taille de l'entreprise, 2021
Figure de la : la description suit
  • Sources : Enquête sur les milieux de travail de compétence fédérale, 2015; Nombre d'entreprises canadiennes, décembre 2021; Rapport annuel de l'employeur concernant les situations comportant des risques (base de données, 2019); Programme du travail (calculs)
Description textuelle de la figure 7.2
Taille de l'entreprise Répartition des employeurs (pourcentage)
1 à 5 employés 2 %
6 à 19 employés 3 %
20 à 99 employés 8 %
Plus de 100 employés 87 %

La plupart des petites entreprises comptant de 1 à 5 employés œuvrent dans le secteur du transport routier. La plupart des entreprises comptant 100 employés ou plus sont aussi dans le secteur du transport routier (289 entreprises avec 63 790 employés), bien que le nombre d'employés le plus élevé œuvrant dans des entreprises de plus de 100 employés se trouve dans le secteur bancaire (53 entreprises pour 252 086 employés).

Le groupe de travail a reçu une série de recommandations de la part des groupes consultés et d'experts universitaires, qui proposaient de réduire le nombre d'employés requis pour être inclus dans le cadre du PLEME.

Nous notons ce qui suit :

D'une part, procéder ainsi signifierait qu'un nombre important d'employeurs serait ajouté, même si certains d'entre eux sont susceptibles d'être visés si, comme nous le recommandons, les grands employeurs tiennent compte des entrepreneurs dépendants dans leurs rapports, et cela inclurait probablement certains des employeurs dont le nombre d'employés se situe entre 1 et 10.

L'inclusion en vertu du cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi n'a de sens que si elle fournit un tableau composite de l'entreprise, y compris du point de vue de ses réseaux d'intégration, et des perspectives de mobilité des employés au sein de celle-ci. Le soutien des grands employeurs pour qu'ils produisent des rapports sur leurs entrepreneurs dépendants favorise la transparence et offre la capacité de comprendre ce qui se produit réellement pour les groupes visés par l'équité sur le lieu de travail.

Le fait qu'un large éventail de milieux de travail comprennent qu'ils contribuent à l'atteinte de l'égalité réelle au travail porte une valeur symbolique importante. Et d'un point de vue pragmatique, ce sont les moyennes entreprises qu'il faudrait encourager et aider à établir des rapports.

D'autre part, et fondamentalement, pour qu'une inclusion de cette nature soit un tant soit peu viable, il faut s'engager à apporter un soutien solide aux employeurs. Ils ont besoin de soutien pour que la production de rapports soit durable. Notre groupe de travail a mené de vastes consultations auprès d'experts de renom dans le domaine. On nous a assuré qu'une clé pour étendre l'équité en matière d'emploi aux petites et moyennes entreprises est d'assurer l'accès au soutien et à la formation.

L'inclusion équitable ne se fera pas d'un trait de plume législative; il doit y avoir un engagement à l'égard de mesures de soutien durables afin que l'inclusion législative puisse se traduire de manière significative par une inclusion équitable.

Ce qui est peut-être plus important encore, c'est que nous avons pu consulter certains petits employeurs directement. Ce que nous avons entendu, c'est un engagement envers l'équité et une demande de latitude, d'harmonisation des exigences entre les cadres d'équité, comme l'équité salariale et l'accessibilité, et de soutien à la mise en œuvre :

[Traduction] Vu la petite taille de notre entreprise, nous ne sommes pas encore soumis à la LEME, mais nous sommes en croissance. Nous nous soucions de la diversité et de l'inclusion (DI) et nous voulons que les employés se sentent plus inclus. Si le seuil change, pourrait-il y avoir une période de transition durant laquelle l'établissement de rapports serait optionnel, ce qui nous permettrait de nous adapter aux changements? Le gouvernement pourrait peut‑être rendre des ressources disponibles. Ce serait très utile pour une entreprise de notre taille.

Un employeur de petite taille sous réglementation fédérale, consultations du GTELEME, 7 avril 2022.

La Loi sur l'équité salariale fédérale s'applique aux employeurs qui ont 10 employés ou plus. Les responsabilités varient selon la taille de l'employeur. Notamment, chaque employeur visé est tenu d'établir un plan d'équité salariale (article 13). La constitution d'un comité d'équité salariale est, dans la majorité des cas, facultative pour les employeurs comptant de 10 à 99 employés (article 16), tandis que les employeurs comptant au moins 100 employés sont tenus de constituer un comité d'équité salariale, tout comme les groupes d'employeurs comptant de 10 à 99 employés lorsqu'au moins un des employeurs a des employés syndiqués à la date à laquelle celui-ci est devenu assujetti à la Loi sur l'équité salariale (article 17).

Au Québec, la Loi sur l'équité salariale s'applique à tous les employeurs. Tout employeur doit produire une déclaration relative à l'application de la Loi dans son entreprise (article 4). Les employeurs comptant entre 10 et 49 employés ont la responsabilité de déterminer et d'apporter les ajustements salariaux nécessaires « afin d'accorder, pour un travail équivalent, la même rémunération aux salariés » (article 34). Tous les employeurs comptant entre 50 et 99 employés ont la responsabilité d'établir un programme d'équité salariale. Les grands employeurs, qui comptent 100 employés ou plus, doivent instituer un comité d'équité salariale au sein duquel les employés sont représentés (article 16).

En comparaison, les exigences en matière de rapports s'appliquent aux employeurs comptant 20 employés ou plus en France en vertu de la Loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées; aux employeurs comptant 100 employés ou plus en Australie en vertu de la Equal Employment Opportunity (Commonwealth Authorities) Act 1987; et aux entreprises comptant 50 employés ou plus en Afrique du Sud en vertu de la Employment Equity Act et de la Broad-Based Black Economic Empowerment Act. En Irlande du Nord, tous les employeurs comptant au moins 11 employés ont des responsabilités liées à la surveillance de l'équité en matière d'emploi en vertu de la Fair Employment Act.

À la lumière de cette expérience comparative et pour encourager l'harmonisation entre les régimes d'équité à l'échelle fédérale, notre groupe de travail recommande ce qui suit :

Recommandation 7.2 : La Loi sur l'équité en matière d'emploi devrait s'appliquer aux employeurs distincts du secteur public fédéral qui ont 10 employés ou plus, énumérés à l'annexe V de la Loi sur la gestion des finances publiques (organismes distincts); et aux autres employeurs du secteur public qui ont 10 employés ou plus, y compris les Forces armées canadiennes (officiers et militaires du rang des Forces régulières et de la Force de réserve) et la Gendarmerie royale du Canada (membres réguliers et civils, à l'exception des fonctionnaires fédéraux).

Recommandation 7.3 : La Loi sur l'équité en matière d'emploi devrait s'appliquer aux employeurs ayant 10 employés ou plus dans le secteur privé sous réglementation fédérale.

Recommandation 7.4 : Les employeurs qui comptent entre 10 et 49 employés devraient être tenus de réaliser des progrès raisonnables en vue d'atteindre une représentation des groupes visés par l'équité en matière d'emploi qui correspond à la disponibilité sur le marché du travail. Ils devraient avoir un accès réel à la formation et au soutien.

Recommandation 7.5 : Les employeurs ayant 50 employés ou plus et tous les employeurs visés de la fonction publique fédérale devraient être tenus de réaliser des progrès raisonnables en vue d'atteindre une représentation des groupes visés par l'équité en matière d'emploi qui correspond à la disponibilité sur le marché du travail. Ils devraient aussi être tenus d'assumer les obligations existantes des employeurs en vertu de la Loi sur l'équité en matière d'emploi actuelle, avec une période de transition appropriée pour l'établissement de rapports. Ils devraient avoir un accès réel à la formation et au soutien.

Recommandation 7.6 : Le Règlement sur l'équité en matière d'emploi devrait définir avec précision les périodes de transition lorsqu'on considère qu'un employeur devient assujetti à la Loi sur l'équité en matière d'emploi d'une manière qui l'harmonise avec la Loi sur l'équité salariale et qui facilite la formation et la production de rapports par les employeurs.

Activités à l'étranger des employeurs sous réglementation fédérale

La Loi sur l'équité en matière d'emploi a tendance à mettre l'accent sur les employés des employeurs du secteur privé situés « au Canada. » Toutefois, beaucoup de choses ont changé lorsqu'il est question des technologies disponibles aux fins de production de rapports et de la place du Canada dans le monde.

Les initiatives sur les entreprises et les droits de la personne sont axées sur la façon dont les employeurs canadiens à l'étranger traitent les travailleurs dans les chaînes de valeur ou les chaînes d'approvisionnement mondiales. Nous voyons émerger des initiatives canadiennes visant à mettre en œuvre les Principes directeurs de l'ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme. En plus du nouveau poste d'ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises, on demande au Canada d'introduire des dispositions législatives solides en matière de diligence raisonnable et d'aller de l'avant avec les projets de loi proposés sur l'esclavage moderne. Bon nombre de ces initiatives, comme le cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, sont axées sur les exigences en matière de rapports. Dans le jugement Nevsun Resources Ltd. c. ArayaNote de bas de page 5, la Cour suprême du Canada a ouvert la voie à des poursuites pour violations du droit international coutumier au Canada par des sociétés canadiennes exerçant des activités à l'étranger. Plus récemment, après sa visite au Canada du 1er au 10 mars 2023, le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones, José Francisco Calí-Tzay, a « exprimé de vives préoccupations concernant les conséquences négatives, parfois dévastatrices, des industries extractives canadiennes sur les Peuples Autochtones en dehors du Canada, principalement des opérations minières » et a demandé au Canada de veiller à ce que les sociétés transnationales canadiennes soient tenues responsables des violations des droits de la personne commises à l'étrangerNote de bas de page 6.

Notre groupe de travail a tenu des consultations avec le Centre de recherches pour le développement international (CRDI), un organisme fédéral qui a des bureaux régionaux dans cinq pays : l'Inde, la Jordanie, le Kenya, le Sénégal et l'Uruguay. Une partie de la main-d'œuvre est composée d'« expatriés » originaires du Canada, mais dans la plupart des cas, les directeurs locaux sont des citoyens du pays où le bureau du CRDI est installé. On nous a dit que les employés recrutés au Canada et affectés à l'étranger, qui travaillent en alternance au Canada et à l'étranger après des affectations de 5 à 10 ans à l'étranger, ne sont généralement pas inclus dans les calculs sur l'équité en matière d'emploiNote de bas de page 7.

Nous avons également tenu compte des Forces armées canadiennes, et nous nous sommes inspirés du fait que, pour ce qui est de l'inclusion dans le cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, un règlement particulier sur l'équité en matière d'emploi a été pris en 2002 à la suite des consultations appropriées, afin d'adapter les exigences au contexte particulier des Forces canadiennes et de préserver leur efficacité opérationnelleNote de bas de page 8.

Affaires mondiales Canada comptait 13 106 employés, dont 7 723 employés canadiens (EC) et 5 383 employés recrutés sur place (ERP) en date du mois de mars 2022. De ce nombre total, 6 443 employés étaient en poste au Canada, tandis que 6 669, ou 51 %, étaient affectés à 178 missions à l'étranger.

Ses rapports sur l'équité en matière d'emploi couvrent les EC, qu'ils se trouvent au Canada ou en mission à l'étranger (personnel permutant et non permutant). Selon les données de 2021, des écarts liés au taux d'atteinte persistent pour les travailleurs handicapés à tous les égards, et pour les femmes et les employés noirs au niveau diplomatique. Parmi les chefs de mission, 47 % étaient des femmes et 12 % étaient issus des minorités visiblesNote de bas de page 9.

En plus de son engagement envers la sécurité des travailleurs à l'étranger et durant la pandémie, Affaires mondiales Canada a écrit ce qui suit au sujet des questions d'emploi pour ses ERP dans son plan ministériel de 2021-2022 :

Affaires mondiales Canada s'engage à améliorer et à offrir des services plus novateurs pour les employés du gouvernement du Canada dans les missions grâce à un engagement continu auprès des employés recrutés sur place (ERP) et des employés canadiens (EC). L'effectif de plus de 5 400 ERP fournit des services essentiels en matière de prestation de programmes et d'administration, de technologie de l'information, de services consulaires et autres dans les missions, à l'appui d'Affaires mondiales Canada et d'autres programmes du gouvernement canadien. Les consultations avec les ERP et les principaux partenaires ont permis de franchir de nouvelles étapes dans la réforme de la gestion de cet important effectif. En 2021-2022, il s'agira notamment d'améliorer les politiques de soutien à la rémunération, à l'emploi et à la dotation en personnel, aux relations de travail et aux prestations de retraite et d'assurance pour les ERP. Le Ministère reconnaît qu'il reste encore beaucoup de travail à faire pour assurer la viabilité du programme de prestations pour les ERP et pour améliorer la façon dont cet effectif est traité par rapport aux autres effectifs du gouvernement du Canada.

Affaires mondiales Canada, Plan ministériel 2021-2022

L'exemple de l'inclusion d'Affaires mondiales Canada, qui compte 178 missions dans le monde entier, dans la Loi sur l'équité en matière d'emploi est important. D'autres milieux de travail couverts dont le personnel est recruté au Canada devraient être visés par le cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi.

L'établissement de rapports sur les pratiques d'embauche à l'étranger du secteur privé et de la fonction publique du Canada pour les employeurs visés par le cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi favoriserait la mise en œuvre efficace de l'équité en matière d'emploi. Ces rapports dresseraient un portrait exhaustif des possibilités de recrutement et de promotion pour les citoyens canadiens et les résidents permanents à l'étranger, y compris des obstacles qu'ils pourraient rencontrer pour revenir au Canada dans un emploi qui correspond à leurs compétences. Nous notons que ces pratiques de promotion sont particulièrement importantes pour ces travailleurs - les Canadiens et les résidents permanents du Canada - qui reviennent au Canada avec le même employeur ou avec un autre employeur canadien.

Recommandation 7.7 : Tous les employeurs visés de la fonction publique et les employeurs du secteur privé sous réglementation fédérale devraient être tenus d'inclure les Canadiens ou les résidents permanents du Canada travaillant à l'étranger dans leurs responsabilités de mise en œuvre en milieu de travail et de production de rapports en vertu du cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi.

Recommandation 7.8 : Un règlement particulier sur l'équité en matière d'emploi devrait être adopté, au besoin, pour assurer l'inclusion efficace des Canadiens ou des résidents permanents du Canada travaillant à l'étranger, en tenant compte de l'efficacité opérationnelle.

Recommandation 7.9 : Le commissaire à l'équité en matière d'emploi devrait mettre au point de la formation et des orientations particulières afin d'appuyer la mise en œuvre efficace des recommandations pour les travailleurs visés à l'étranger.

Relancer le Programme de contrats fédéraux

Le gouvernement du Canada est le plus gros acheteur de biens et de services au Canada. Il dépense environ 22 milliards de dollars par année pour l'approvisionnement en biens et services, y compris des services de constructionNote de bas de page 10. Bien qu'une analyse approfondie des pratiques d'approvisionnement dépasse la portée du présent rapport, quelques recommandations méritent qu'on s'y attarde.

Le Programme de contrats fédéraux est un moyen concret pour le gouvernement du Canada de joindre le geste à la parole en finançant ses engagements en matière de droits de la personne, en exigeant que ceux qui lui fournissent des biens et des services atteignent l'égalité réelle dans leur milieu de travail. Toutefois, comme une grande partie du cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, le programme s'est bureaucratisé et a perdu sa raison d'être. Le principe de départ, qui fait partie du droit applicable, est que les employeurs qui concluent des contrats avec le gouvernement fédéral doivent respecter l'égalité réelle en milieu de travail.

Le Programme de contrats fédéraux n'est toutefois plus ce qu'il était. Lors de son adoption en 1986, il était considéré comme un programme unique appuyant les objectifs de justice sociale en élargissant la portée du cadre d'équité en matière d'emploi fédéral et en assurant le rôle de chef de file du gouvernement fédéralNote de bas de page 11. Maintenant, il n'est plus qu'un simple reflet de son institutionnalisation antérieure et de ses objectifs de longue date. Il vise actuellement les organisations employant 100 employés ou plus qui soumissionnent à des contrats dont la valeur est supérieure au seuil de 1 million de dollars. Lorsque la couverture était à son maximum, avant le changement de 2013, le programme s'appliquait aux organisations comptant 100 employés ou plus qui soumissionnaient à des contrats d'une valeur de 200 000 $. La diminution de l'incidence est flagrante :

Tableau 7.1 : Couverture du Programme de contrats fédéraux
Année Nombre d'employeurs Nombre d'universités et collèges Nombre d'employés
2013 1 045 59 1 233 766
2022 410 26 609 658

Le programme initial

Le Programme de contrats fédéraux était, sur le plan fonctionnel, « équivalent » à la Loi sur l'équité en matière d'emploi, mais par l'entremise du lien avec les contrats ou les approvisionnements du gouvernement :

Le ministre est également chargé de l'administration du programme de contrats fédéraux pour l'équité en matière d'emploi et, à ce titre, tenu de veiller à ce que les exigences applicables aux entrepreneurs en vertu de ce programme pour ce qui est de la réalisation de l'équité en matière d'emploi soient équivalentes à celles que la présente loi impose aux employeurs dans ce domaine.

Ancien paragraphe 42(2) de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, 1995 ch. 44, 42-43-44 Elizabeth II, 15 décembre 1995

Le PCF initial comportait onze critères :

  1. Communication de la politique d'équité en matière d'emploi aux employés.
  2. Affectation d'un cadre supérieur responsable de l'équité en matière d'emploi.
  3. Collecte/mise à jour de l'information sur la population active concernant les groupes désignés et non désignés selon le poste et l'échelle salariale (c.-à-d. enquête sur la population active).
  4. Analyse des données sur l'effectif des entreprises pour comparer la représentation des groupes désignés au sein d'un organisme avec le bassin de travailleurs qualifiés disponibles dans lequel, selon des attentes raisonnables, un employeur devrait puiser pour recruter des employés.
  5. Élimination de la discrimination systémique en étudiant, dans les cas de sous-représentation, les systèmes d'emploi officiels et officieux.
  6. Définition d'objectifs et de calendriers d'embauche, de formation et d'avancement pour les membres des groupes désignés dans les cas de sous‑représentation.
  7. Établissement d'un plan de travail sur l'équité en matière d'emploi afin de réaliser les objectifs et de respecter les calendriers.
  8. Adoption de mesures spéciales et d'aménagements pour faire en sorte que les objectifs soient atteints, y compris la mise en place d'aménagements raisonnables.
  9. Création d'un climat favorable à l'intégration harmonieuse des membres de groupes désignés au sein d'une organisation.
  10. Adoption de procédures de contrôle à l'intention des employeurs pour évaluer les progrès et l'atteinte des résultats à la suite de la mise en œuvre de l'équité en matière d'emploi.
  11. Autorisation accordée aux représentants de Développement des ressources humaines Canada de pénétrer dans les locaux de l'employeur pour avoir accès aux dossiers mentionnés au point 3 ci-dessus.

Les rapports sur les changements apportés au programme au fil du temps révèlent de la frustration. Le PCF avait le potentiel de changer les choses, mais sa capacité à le faire s'est manifestement perdue :

[Traduction] Il n'est pas difficile de ressentir de la frustration, d'avoir l'impression qu'une occasion n'a pas été saisie, surtout lorsqu'on considère la conclusion principale de l'évaluation, selon laquelle le PCF avait la capacité d'influencer considérablement les employeurs.

Professeur Christopher McCrudden, Buying Social Justice: Equality, Government Procurement, & Legal Change (Oxford University Press, 2007), à la page 605.

Après tout, un rapport exhaustif a révélé que seuls 10 % des employeurs du PCF avaient pleinement mis en œuvre les exigences du PCF. Pourtant, 90 % des employeurs du PCF ont mentionné qu'ils tiennent compte de l'une ou l'autre des mesures relatives à l'équité en matière d'emploi seulement en raison de l'existence du PCF. Il s'agit d'une amélioration considérable par rapport aux résultats de l'évaluation de 1992.

Le rapport final sur l'évaluation du PCF, publié en 2002, a souligné l'importante réduction du financement du programme ainsi que sa décentralisation, qui sont citées comme des raisons ayant entraîné des « défis » pour l'administration du programme. Le rapport a conclu que malgré la valeur et la nécessité du programme, il ne pouvait pas être mis en œuvre dans les conditions existantesNote de bas de page 12. La direction a accepté les constatations de l'évaluationNote de bas de page 13. À l'époque, le programme visait 845 employeurs d'envergure, pour un total cumulatif de plus de 800 000 employés. Toutefois, la couverture à l'extérieur du Québec et de l'Ontario était faible, en particulier dans la région de l'AtlantiqueNote de bas de page 14.

À l'époque, les représentants des groupes désignés, notamment les représentants autochtones, voulaient que la valeur minimale des contrats soit abaissée à 50 000 $ ou 100 000 $, et que le seuil pour le nombre d'employés soit réduit afin d'inclure les employeurs comptant de 50 à 99 travailleursNote de bas de page 15. Ils avaient noté que la taille de la main-d'œuvre canadienne était limitée et qu'elle diminuait.

Actuellement, l'équivalent du Programme de contrats fédéraux au Québec s'applique aux employeurs ayant 100 employés ou plus qui demandent des contrats de 100 000 $ ou plusNote de bas de page 16.

Notre groupe de travail prend au sérieux le fait qu'en 2017, le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale des Nations Unies a demandé au Canada « [d]'améliorer le mécanisme destiné à s'assurer que les employeurs respectent les conditions en matière de droits du travail énoncées dans le règlement fédéral sur l'équité en matière d'emploiNote de bas de page 17. »

Notre groupe de travail a été informé qu'une nouvelle version du Programme de contrats fédéraux devrait être lancée en 2024-2025 et qu'elle inclura des exigences fondées sur la Loi canadienne sur l'accessibilité et la Loi sur l'équité salariale.

À la lumière des considérations et des exemples examinés, ainsi que des résultats des consultations, nous recommandons l'équivalence avec les exigences de mise en œuvre que la Loi sur l'équité en matière d'emploi impose aux employeurs ainsi que la modification du seuil. Nous recommandons également une approche différente afin d'inclure les collèges et les universités qui présentent des demandes de subventions fédérales de recherche. Enfin, nous recommandons que certaines exclusions actuelles des contrats de services juridiques, des subventions et contributions, de la coopération internationale et des contrats de construction soit réévaluée.

Équivalence avec les exigences de mise en œuvre que la Loi sur l'équité en matière d'emploi impose aux employeurs

La référence à l'équivalence ne fait plus partie du paragraphe 42(2) de la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Désormais, il indique seulement que « [l]e ministre est également chargé de l'administration du programme de contrats fédéraux pour l'équité en matière d'emploi. » Il s'avère que la notion d'équivalence dans l'exigence législative n'a pas empêché l'opérationnalisation de certaines différences assez importantes. Bien que le Programme légiféré d'équité en matière d'emploi (PLEME) - qui fait toujours partie intégrante de la Loi sur l'équité en matière d'emploi - a été interprété de façon à inclure les employés occasionnels, il était entendu que le PCF les excluait. Les consultations avec les syndicats n'étaient qu'une recommandation dans le cadre du PCF, alors qu'elles sont obligatoires dans la loi qui s'applique à la fois à la fonction publique fédérale et aux employeurs sous réglementation fédérale dans le cadre du PLEME. De la même façon, il a été interprété que les employeurs du PCF n'avaient pas d'exigences en matière de rapports à respecter, contrairement aux exigences claires en matière de rapports énoncées dans la loi qui s'applique aux employeurs du secteur privé, et malgré le fort soutien à la production de rapports par les employeurs comme moyen d'évaluer les progrès réalisés dans l'atteinte de l'équité en matière d'emploi. Enfin, les responsabilités de vérification de la CCDP n'incluaient pas le PCFNote de bas de page 18.

Plusieurs groupes qui ont rencontré notre groupe de travail ou qui ont présenté des mémoires écrits ont recommandé que nous revenions à la norme d'équivalence réelle. L'Association canadienne des professeures et professeurs d'université a fourni une évaluation détaillée du type d'engagements qui, selon elle, devraient s'appliquer aux entrepreneurs fédéraux :

[Traduction]

  • Que l'« engagement » de l'entrepreneur fédéral comprenne l'obligation de fournir des rapports annuels, y compris des sondages exhaustifs sur le milieu de travail :
    • Que les sondages et les rapports sur le milieu de travail des entrepreneurs soient accessibles au public, sous réserve d'une protection raisonnable des renseignements personnels;
    • Que les sondages sur le milieu de travail fournissent des données sur le nombre d'employés issus des groupes désignés dans chaque profession et/ou sous‑profession, dans la mesure du possible;
    • Que les sondages sur le milieu de travail recueillent et affichent davantage de données selon la situation professionnelle (temps plein, temps partiel, continu, contrat et autres situations pertinentes). Pour le personnel enseignant, les classifications supplémentaires incluraient ce qui suit : professeur adjoint, agrégé et titulaire; poste menant à la permanence, poste ne menant pas à la permanence et poste permanent;
    • Que les sondages sur le milieu de travail recueillent et affichent des données qui révèlent toute iniquité potentielle en matière d'emploi pour l'atteinte de l'échelle salariale par les groupes désignés (c.-à-d. où se situent les membres du groupe désigné dans la grille salariale du groupe professionnel de l'établissement).

Association canadienne des professeures et professeurs d'université, mémoire présenté au GTELEME, avril 2022

Recommandation 7.10 : Les exigences de mise en œuvre de l'équité en matière d'emploi applicables aux entrepreneurs visés par le Programme de contrats fédéraux devraient être équivalentes à celles imposées aux employeurs visés par la Loi sur l'équité en matière d'emploi.

Seuil

Nous avons tenu compte de la couverture limitée actuelle du PCF et des nombreuses recommandations visant à revenir aux niveaux d'avant 2013 ou à un niveau inférieur, et nous avons été guidés par les niveaux établis dans d'autres administrations, y compris d'autres administrations au Canada. En particulier, nous avons considéré qu'en vue de favoriser l'inclusion équitable et d'envoyer un message important sur la valeur de l'harmonisation des textes législatifs à l'échelle du Canada, il serait approprié d'établir le seuil à 100 000 $ pour qu'il corresponde au programme de contrats du Québec (le Programme d'obligation contractuelle [OBC/POC]).

Ce qu'il faut retenir, c'est que, compte tenu de la nature du programme, les niveaux actuels sont trop élevés pour veiller à ce que les entrepreneurs avec lesquels le gouvernement fédéral entretient des relations favorisent véritablement l'égalité réelle dans l'embauche.

Nous tenions également à éviter une situation dans laquelle les entreprises pourraient cumuler plusieurs contrats de 90 000 $ avec le gouvernement fédéral sans atteindre le seuil. Nous formulons une autre recommandation sur le montant cumulatif pour l'admissibilité au Programme de contrats fédéraux.

Recommandation 7.11 : Le seuil monétaire pour l'inclusion des entrepreneurs dans le cadre du Programme de contrats fédéraux devrait se rapprocher des niveaux d'avant 2013, et en vue d'accroître l'harmonisation avec les programmes de contrats déjà en vigueur à l'échelle du Canada, il devrait être établi à 100 000 $.

Recommandation 7.12 : Le seuil monétaire devrait être évalué en fonction de la valeur cumulative des contrats. Aucun entrepreneur ne devrait être en mesure de cumuler des contrats totalisant plus de 200 000 $ sans être assujetti au Programme de contrats fédéraux.

Recommandation 7.13 : Le seuil pour le nombre de travailleurs devrait être équivalent au seuil établi pour les employeurs visés par la Loi sur l'équité en matière d'emploi.

Le Programme de contrats fédéraux et le secteur de l'enseignement supérieur

L'éducation est à l'origine du problème et elle doit en être la solution.

L'honorable sénateur Murray Sinclair, chancelier, Université Queen's

L'équité a beaucoup évolué dans le secteur de l'enseignement supérieur. Ce secteur, qui relève de la compétence provinciale, est essentiel pour faire tomber les principaux obstacles à l'inclusion équitable en milieu de travail. Nous abordons ces obstacles au chapitre 4. Des obstacles persistent également pour ceux qui travaillent en enseignement supérieur. Celles-ci comprennent notamment la disparité salariale, les préjugés inconscients ou implicites dans l'évaluation des curriculum vitae, les préjugés liés à l'accent, les préjugés dans la façon dont les lettres de recommandation sont rédigées et les termes utilisés pour décrire les membres des groupes visés par l'équité, comme les femmes ou les minorités racisées, les préjugés sexistes dans les pratiques de citation et l'examen par les pairs, les préjugés dans l'évaluation de l'enseignement, et la « taxe de l'équité », qui mène à une charge de travail disproportionnellement élevée et non reconnue pour les membres des groupes sous-représentés visés par l'équitéNote de bas de page 19.

Les trois organismes de financement fédéraux reçoivent un soutien important à la recherche de la part du gouvernement fédéral. Le Comité consultatif sur le système fédéral de soutien à la recherche a recommandé d'augmenter de 10 % par an pendant cinq ans le budget de base des conseils subventionnaires, en plus des autres investissementsNote de bas de page 20. L'Alliance canadienne des associations étudiantes a reconnu que les universités et les collèges reçoivent un financement fédéral et considère qu'il est important d'être en mesure d'examiner les résultats liés à l'équité et d'évaluer les modèles qui appuient l'équitéNote de bas de page 21. L'Association canadienne des professeures et professeurs d'université a jugé qu'il y avait des améliorations dans les universités visées par le PCF et a recommandé ce qui suit :

[Traduction] L'ACPPU recommande un retour au seuil initial de 200 000 $ pour les entrepreneurs fédéraux et une expansion éventuelle du programme visant à inclure :

  1. les entrepreneurs comptant moins de 100 employés, mais plus de 50, y compris les employés contractuels;
  2. les employés occasionnels ou contractuels de l'entrepreneur fédéral;
  3. les contrats de plus de 100 000 $, par opposition aux contrats de plus de 200 000 $.

Nous recommandons que la définition des contrats fédéraux dans le cadre du PCF soit élargie afin d'inclure les subventions fédérales de recherche.

Association canadienne des professeures et professeurs d'université, mémoire présenté au GTELEME, avril 2022.

L'Université Queen's, elle-même un entrepreneur fédéral, a elle aussi demandé que le seuil pour les employeurs soit élargi :

[Traduction] Le gouvernement du Canada devrait élargir le seuil pour les employeurs qui présentent une demande de financement fédéral chaque année. En tant qu'entrepreneur fédéral, l'Université Queen's doit avoir un programme d'équité en matière d'emploi. Pour respecter cette obligation, l'Université Queen's recueille des renseignements sur l'effectif, effectue une analyse de l'effectif, établit des objectifs quantitatifs à court et à long terme, et fait des efforts et des progrès raisonnables pour atteindre ces objectifs. Par conséquent, nous croyons que rendre obligatoires les programmes d'équité en matière d'emploi pour la présentation d'une demande de financement fédéral est un énorme incitatif à l'équité en matière d'emploi, qui devrait être élargi à un plus grand nombre de participants par l'entremise de divers programmes et initiatives.

Université Queen's, Human Rights and Equity Office, 19 avril 2022

Nous accueillons favorablement ces recommandations. À l'origine, nous envisagions d'inclure les subventions de recherche dans la détermination du seuil de couverture pour le Programme de contrats fédéraux. Toutefois, compte tenu des seuils réduits recommandés, et de l'ampleur des subventions, nous considérons qu'il est préférable de faire de la volonté de se conformer au Programme de contrats fédéraux une condition préalable pour que les collèges et les universités du secteur de l'enseignement supérieur, y compris leurs chercheurs, présentent des demandes de subventions fédérales de recherche et participent au travail des conseils fédéraux de subventions à la recherche, y compris la Fondation canadienne pour le savoir et la science proposée par le Comité consultatif sur le système fédéral de soutien à la recherche, qui est présidé par monsieur Frédéric BouchardNote de bas de page 22. Le moment est bien choisi, compte tenu de l'accent que met le rapport Bouchard sur l'importance de l'inclusion équitableNote de bas de page 23. Notre recommandation vise à favoriser la clarté, la cohérence et la transparence, car les chercheurs eux-mêmes sauront que leur employeur fait partie du Programme de contrats fédéraux et qu'il a pris un engagement envers l'inclusion équitable par l'entremise du cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi :

Recommandation 7.14 : Les collèges et les universités devraient être tenus d'accepter de participer au Programme de contrats fédéraux pour pouvoir demander des subventions fédérales de recherche et d'autres types de financement fédéral pour la recherche, et pour participer aux conseils fédéraux de subventions à la recherche, y compris la Fondation canadienne pour le savoir et la science proposée.

Fournisseurs de services juridiques

Les contrats fédéraux conclus avec les fournisseurs de services juridiques varient : il peut s'agir de faire appel à des cabinets d'avocats externes qui fourniront des services au gouvernement, ou de conclure des contrats avec des fournisseurs ou des éditeurs de bases de données juridiques en ligne. Il semble y avoir peu de raisons de ne pas couvrir un grand éditeur de bases de données juridiques, dont les contrats sont évalués à plus d'un million de dollars, alors qu'un éventail de petites entreprises sont visées par le PCF.

De plus, les Services professionnels, scientifiques et techniques constituent l'un des principaux secteurs d'emploi au Canada selon les données du Recensement de 2021; les services juridiques sont une partie importante de ce secteur d'emploi.

Bon nombre de grands cabinets d'avocats ont adopté des initiatives d'EDI et ont des relations productives avec les facultés de droit qui ont cherché à accroître la représentation des membres des groupes visés par l'équité. La participation de ces employeurs au PCF devrait être considérée comme quelque chose de positif, soit leur intégration dans une communauté d'apprentissage qui devrait profiter à la profession juridique, et même à d'autres secteurs.

Il convient de noter que les marchés de prestation de services juridiques ne peuvent être conclus que sous l'autorité du ministre de la Justice. Il existe toutefois une liste d'autorités contractantes qui sont exemptées de cette règle. Il s'agit de divers commissaires, dont le vérificateur général et le commissaire à la vie privéeNote de bas de page 24.

Notre groupe de travail a été informé que les fournisseurs de services juridiques sont exclus du Programme de contrats fédéraux pour des raisons liées au secret professionnel de l'avocat.

Selon l'état du droit au Canada, le secret professionnel de l'avocat peut être réfuté afin d'autoriser la divulgation du montant total des honoraires d'avocat, s'il n'y a aucune possibilité raisonnable que cette divulgation ne révèle des communications entre l'avocat et son clientNote de bas de page 25. Il convient de noter que pour certains services juridiques, notamment pour les fournisseurs de bases de données juridiques, la valeur des contrats est déjà rendue publique par le gouvernement du Canada en vertu des pratiques de gouvernement ouvert.

Les raisons invoquées pour continuer d'exempter les fournisseurs de services juridiques de la couverture du Programme de contrats fédéraux ne semblent plus s'appliquer. En particulier, si les fournisseurs de services juridiques sont inclus dans le répertoire en ligne du gouvernement ouvert, ils devraient pouvoir être visés par le PCF si les autres conditions sont remplies.

Recommandation 7.15 : Les fournisseurs de services juridiques pouvant être inclus dans le répertoire en ligne du gouvernement ouvert et ayant des contrats individuels de 100 000 $ ou des contrats cumulatifs totalisant plus de 200 000 $ au cours d'un exercice donné devraient être inclus dans le Programme de contrats fédéraux.

Subventions et contributions

Les programmes de subventions et contributions (S et C) du gouvernement fédéral financent des activités dans tous les secteurs de la société canadienne. Les programmes fédéraux de S et C ont été examinés par le vérificateur général du CanadaNote de bas de page 26. Le Conseil du Trésor a entrepris des réformes visant à simplifier les processus, réduire le fardeau administratif et de production de rapports imposé aux bénéficiaires et mieux mobiliser les intervenants dans la conception des programmes.

Le contrôleur général du Canada a indiqué qu'il existe des preuves manifestes que l'information sur les possibilités de financement des S et C est plus accessible. Les processus de demande simplifiés et normalisés, les réductions concrètes des exigences redditionnelles, les pratiques de financement plus cohérentes dans les ministères et entre les ministères ainsi que le passage de l'aversion pour le risque à la gestion des risques ont tous contribué à améliorer le fonctionnement des programmes de S et CNote de bas de page 27.

À première vue, envisager d'inclure les bénéficiaires du programme de S et C dans le cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi par l'entremise du PCF pourrait sembler contraire à l'objectif de simplification du programme. Pourtant, les préoccupations motivant la simplification étaient axées sur les exigences jugées excessives et même redondantes avant les récentes réformes. Le Conseil du Trésor note que depuis 2013, et de nouveau depuis 2017, ces exigences ont diminué de près de 50 % grâce à l'approche « Une fois suffit! », qui a réduit les demandes en double pour les bénéficiaires. Le processus de demande en ligne simplifie les choses et est apparemment préféré par les bénéficiaires. La simplification entraîne également un recours accru aux ententes uniques, aux rapports consolidés et aux paiements uniques, ce qui signifie que les obstacles à l'inclusion qui pouvaient exister dans le passé semblent moins évidents maintenant. Le Conseil du Trésor souligne l'existence d'un site Web centralisé qui offre un « accès à guichet unique » pour soumettre des demandes de financementNote de bas de page 28. Les bénéficiaires peuvent produire des rapports de façon numérique.

Des processus de vérification sont déjà en place dans le cadre du programme de S et C, et le nombre de vérifications sur place a été réduit de 87 % depuis 2008; le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada indique que l'accent est mis sur la gestion des risques plutôt que sur l'aversion pour le risque, et que la vérification est axée sur le niveau de risque relatif.

L'équité en matière d'emploi ne serait donc pas un ajout redondant. Au contraire, la simplification pourrait permettre au programme de S et C d'appuyer les principaux objectifs du gouvernement, comme l'équité en matière d'emploi. La simplification devrait accroître la capacité des programmes d'incitatifs couvrant un large éventail de domaines prioritaires du gouvernement à refléter la société canadienne.

Il est toutefois clair que les programmes de S et C sont si vastes qu'un grand nombre d'employeurs inclus dans ceux-ci ne devraient pas être visés par le PCF. Il faut notamment citer les gouvernements provinciaux et les municipalités, qui, à juste titre, invoqueraient l'exercice d'une compétence trop étendue.

Pourtant, les programmes de S et C couvrent aussi une gamme de mécanismes incitatifs, par exemple les remboursements que le gouvernement fédéral fournit aux constructeurs et aux concessionnaires automobiles pour inciter les consommateurs à acheter des véhicules électriques. Ces subventions et contributions pourraient totaliser plus de 100 millions de dollars.

Les récentes améliorations et simplifications ouvrent la voie à la rationalisation d'un programme gouvernemental qui favorise l'inclusion partout au Canada. On s'attend à ce que l'inclusion de certains de ces employeurs permette au cadre d'équité en matière d'emploi de mettre en lumière les sources d'ingéniosité et d'inclusion réelles, par exemple dans le secteur des organisations non gouvernementales (ONG).

Recommandation 7.16 : Il faudrait analyser les aspects du programme de subventions et contributions qu'il serait adéquat d'assujettir au cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, en établissant un seuil comparable aux seuils proposés pour les employeurs du Programme de contrats fédéraux.

Le secteur de la coopération internationale et le Canada dans le monde

Les subventions et les contributions sont, en particulier, un moyen clé de financer certaines ONG. Le secteur en soi est vaste, mais l'une des dimensions méritent une attention particulière aux fins de la couverture de l'équité en matière d'emploi : les ONG qui représentent le Canada dans le monde. Leur autonomie est essentielle, tout comme l'image du Canada qu'elles véhiculent dans le reste du monde.

Récemment, l'une des principales organisations de développement international au monde, Médecins Sans Frontières/Doctors Without Borders, s'est engagée à changer la vision que les organisations de développement international en son genre ont malheureusement perpétuée, citant la façon dont elle a involontairement entretenu les stéréotypes racistes des « sauveurs blancs. » Les organisations d'aide internationale sont particulièrement bien placées pour contribuer à refaçonner l'image du Canada dans le monde afin qu'elle reflète une compréhension inclusive des travailleurs de notre pays et de leur potentiel à diriger dans un large éventail d'emplois dans le monde.

Dans une lettre adressée récemment à la ministre des Finances, Chrystia Freeland, 77 organisations de développement international ont demandé d'augmenter le financement en faisant passer les 8,15 milliards de dollars promis dans le dernier budget à 10 milliards de dollars en 2025. Les organisations d'aide l'ont très bien dit : « L'aide étrangère n'est pas de la charité. C'est un investissement dans le type de monde que nous voulons tous voirNote de bas de page 29. » Nous considérons que cela inclut la perspective de l'équité. Nombreux sont ceux qui ont commencé à réfléchir à ces questions - dépeignent-ils, pour le Canada, une vision d'exclusion, ou bien montrent-ils la mesure dans laquelle le Canada représente le monde par l'entremise de sa démographieNote de bas de page 30? Il s'agit là d'une occasion formidable, que les organismes canadiens de développement et de défense des droits de la personne devraient être encouragés à prendre au sérieux en adhérant aux principes d'équité en matière d'emploi. Le groupe de travail a été marqué par la réflexion d'un participant, suggérant que des Canadiens de la même origine que le pays d'accueil soient affectés à ces endroits. Nous suggérons que le Canada mène la charge pour mettre en valeur l'inclusion équitable dans toute sa diversité dans l'ensemble de ses activités à l'étranger. Les ONG devraient recevoir l'appui du titulaire du poste de commissaire à l'équité en matière d'emploi proposé pour être en mesure de favoriser une inclusion équitable dans les organisations de coopération internationale.

Recommandation 7.17 : Le secteur de la coopération internationale du Canada devrait être expressément inclus dans la portée du Programme de contrats fédéraux.

Recommandation 7.18 : Les travailleurs des organisations de coopération internationale recrutés au Canada, qu'ils soient au Canada ou affectés à l'étranger, devraient être inclus dans le calcul du seuil numérique applicable en vertu du cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, en plus du montant total des ententes de contribution conclues avec le gouvernement du Canada.

L'industrie de la construction

À l'heure actuelle, le Programme de contrats fédéraux exclut la construction. La construction ne comprend pas les contrats d'architecture et d'ingénierie, qui sont assujettis au PCFNote de bas de page 31. Au Canada, la construction est une industrie dans laquelle les taux de syndicalisation sont demeurés relativement élevés, mais où la représentation des membres des groupes visés par l'équité en matière d'emploi serait faible. Il s'agit d'un secteur auquel le PCF pourrait s'appliquer, mais ce n'est pas le cas. La principale raison présentée au groupe de travail est que ce secteur est caractérisé par la sous-traitance.

Au Québec, le Groupe de travail de 2006 sur la pleine participation à la société québécoise des communautés noires a demandé « [q]ue le ministre du Travail demande à la Commission de la construction du Québec de créer un poste au sein de son organisation dont le titulaire aura pour fonction de veiller aux intérêts et à la juste représentation des Québécois issus des minorités visibles dans les métiers de la constructionNote de bas de page 32. » L'ampleur du défi consistant à parvenir à une représentation équitable fondée sur le sexe, comme l'exige la loiNote de bas de page 33, dans une industrie reconnue comme étant presque entièrement masculine a été analysée par la Commission elle-mêmeNote de bas de page 34.

Compte tenu des dispositions d'approvisionnement existantes qui comportent des revers, notamment pour les Premières Nations, les Métis et les Inuits, le gouvernement fédéral a déjà de l'expérience pour ce qui est d'amener les sous-traitants à s'engager contractuellement à déclarer les données démographiques pertinentes au soumissionnaire. Des procédures de vérification sont déjà en place. La taille de ces contrats est importante dans les métiers déjà fortement réglementés où des lacunes en matière d'inclusion ont déjà été relevées dans le passé. La possibilité de faire bouger les choses pour atteindre et maintenir l'équité en matière d'emploi dans ce secteur ne devrait pas être sous-estimée.

Recommandation 7.19 : Les entrepreneurs de l'industrie de la construction qui satisfont aux exigences minimales devraient être inclus dans le Programme de contrats fédéraux.

Recommandation 7.20 : Le seuil du nombre d'employés devrait être évalué en combinant le nombre total de travailleurs du soumissionnaire principal et de ses sous-traitants, en tenant compte des variations prévues au cours du cycle de vie du contrat.

Soutenir les groupes visés par l'équité en tant qu'employeurs dans les marchés publics et préserver la marge de manœuvre dans les accords commerciaux

De nombreux intervenants des groupes visés par l'équité en matière d'emploi ont mentionné, directement ou indirectement, un aspect connexe à l'approvisionnement : au-delà de leur inclusion en tant que travailleurs dans les programmes d'équité en matière d'emploi, beaucoup d'entre eux souhaiteraient voir de plus grandes occasions d'entrepreneuriat qui soutiennent les membres des groupes visés par l'équité en matière d'emploi.

Le droit international en matière de droits de la personne l'exigeNote de bas de page 35.

C'est aussi une caractéristique des efforts déployés par les États-Unis pour promouvoir les [Traduction] « entreprises commerciales diversifiées » (ECD) qui ont dû s'appuyer sur des objectifs de participation, liés à la valeur du contrat, plutôt que sur d'autres mesures incitatives. Notre groupe de travail a été informé de nombreuses limites et différences familières.

À l'heure actuelle, un programme obligatoire de marchés réservés est en place pour les approvisionnements visant une région, une collectivité ou un groupe où les Premières Nations, les Métis ou les Inuits constituent au moins 51 % de la population et où les populations autochtones sont bénéficiaires des biens, des services ou des services de construction. Le soumissionnaire doit attester qu'au moins 33 % de la valeur du travail prévu par le contrat sera accompli par une entreprise autochtone. Les sous-traitants sont tenus de fournir les renseignements requis pour confirmer la conformité. Une exigence précédemment appliquée, voulant que les entreprises autochtones comptent au moins 33 % d'employés des Premières Nations, métis ou inuits, ne s'applique plus à ces entreprises en vertu des critères d'admissibilité de 2021.

Comme il en a été question au chapitre 3, les politiques d'approvisionnement offrent une occasion importante d'aller au-delà du cadre plus limité actuellement prévu à l'article 7 de la Loi sur l'équité en matière d'emploi et de mieux tenir compte des principes d'autodétermination des Autochtones reflétés dans la Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones ainsi que de l'engagement du Canada envers la vérité et la réconciliation.

De façon plus générale, Services publics et Approvisionnement Canada a reconnu l'importance de la diversité des fournisseurs et a admis que les entrepreneurs issus des groupes visés par l'équité sont, depuis toujours, sous‑représentés dans l'approvisionnement fédéral. Bien qu'il soit indiqué que « Soutien en approvisionnement Canada déploie des efforts considérables pour réduire les obstacles et offrir un soutien ciblé aux entreprises dirigées par des femmes, des Autochtones, des personnes noires ou racisées, des personnes en situation de handicap et des membres de la communauté lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, queers ou bispirituelles (LGBTQ2+)Note de bas de page 36 », les initiatives semblent liées à des sommets et à des initiatives comparables visant à encourager les demandes.

De plus, des progrès ont été accomplis dans les accords commerciaux, avec l'inclusion de réserves et d'exceptions propres aux chapitres portant sur les peuples et les entreprises autochtones. L'Accord Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM) comprend une exception générale qui confirme clairement que le gouvernement canadien peut adopter ou maintenir les mesures qu'il juge nécessaires pour remplir ses obligations légales envers les peuples autochtones. La disposition fait expressément référence aux droits des autochtones reconnus et confirmés par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, ainsi qu'à ceux énoncés dans les ententes sur l'autonomie gouvernementale.

La dimension commerciale est importante de façon plus générale, compte tenu de son incidence sur les personnes qu'elle est susceptible d'avoir exclues du fonctionnement du PCF. Par exemple, UNIFOR a noté que le secteur de l'automobile était largement couvert par le PCF avant que celui-ci ne soit révisé. Il couvrait les employeurs qui embauchaient des employés à l'étranger. UNIFOR a rappelé l'importante relation entre les accords commerciaux et l'équité en matière d'emploiNote de bas de page 37.

Nous constatons que certains nouveaux accords commerciaux du Canada comprennent des dispositions sur le respect des principes et droits fondamentaux au travail définis par l'Organisation internationale du travail, notamment au chapitre 23 de l'ACEUM et au chapitre 23 de l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne (AECG). Certains récents accords commerciaux englobent les droits à l'égalité, en plus de prêter attention à l'adoption et au maintien de mesures visant « l'élimination de la discrimination en matière d'emploi et de profession » et de sanctionner l'incapacité « soutenue ou récurrente » d'appliquer les normes de travail. Par exemple, l'article 23.4 de l'ACEUM comprend une disposition de non-dérogation, qui :

L'article 23.4 de l'ACEUM propose une exigence semblable visant à maintenir les niveaux de protection.

Ces dispositions constituent un pas important vers la reconnaissance du point de liaison entre les normes relatives au commerce, au travail et aux droits de la personne. Elles soulignent un message qui a été renforcé tout au long de ce rapport : le cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi doit être appliqué.

Les politiques d'approvisionnement devraient être interprétées conformément à ces dispositions. Ces dispositions peuvent également être comprises de manière à assurer la marge de manœuvre nécessaire - du moins avec les partenaires commerciaux dans les accords visés - pour ajouter aux accords d'approvisionnement des dispositions qui appuient les objectifs d'équité en matière d'emploi.

Comparaison des programmes de contrats

États-Unis

Le mécanisme d'équité en matière d'emploi qui a le plus influencé le PCF du Canada est celui des États-Unis. Le décret 11246 du 24 septembre 1965 sur l'égalité des chances devant l'emploi est au cœur des mesures d'action positive des États-Unis. Il s'agit d'un programme de contrats fédéraux. Sa couverture est vaste, englobant notamment l'industrie de la construction. Les entrepreneurs fédéraux sont tenus de prendre des mesures d'action positive pour assurer la non‑discrimination dans l'emploi fondée sur la race, la couleur, l'origine nationale, la religion, le sexe et l'orientation sexuelle ainsi que l'identité de genre, et de tenir des registres sur leurs pratiques d'embauche et d'emploi s'ils ont des contrats de 10 000 $ ou plus. Les employeurs comptant 50 employés ou plus et des contrats d'une valeur de plus de 50 000 $ doivent préparer un plan écrit. En cas d'invalidité, les mesures doivent s'appliquer, et un plan est requis lorsqu'il y a 50 employés et des contrats de 15 000 $; on parle de 50 employés et de contrats de 150 000 $ dans le cas des vétéransNote de bas de page 38.

Aux États-Unis, l'Office of Federal Contract Compliance Programs (OFCCP) est responsable de l'administration et de l'application de la loi. Pour les contrats importants de plus de 10 millions de dollars, il effectue des examens préalables à l'attribution du contrat, au moyen d'une liste d'entrepreneurs fédéraux [Traduction] « conformes » rendue disponible dans un registre préalable à l'attributionNote de bas de page 39. Ce registre permet aux organismes fédéraux qui passent des contrats de demander une autorisation préalable à l'attribution du contrat à l'OFCCP.

L'OFCCP effectue également des vérifications de conformité et des enquêtes sur les plaintes en vertu de l'article 206 du décret. En 2021, 1 125 vérifications de conformité ont été réalisées, ce qui a donné lieu à 135 accords de conciliation et de règlement. L'OFCCP reçoit également des plaintes [Traduction] « de la part des employés ou des employés éventuels d'un entrepreneur ou d'un sous-traitant du gouvernement qui allèguent une discrimination contraire aux dispositions contractuelles énoncées à l'article 202 de l'ordonnance »; il a reçu 1 531 plaintes en 2021 seulement. Cependant, il n'en a examiné et réglé que 114, car il renvoie la plupart des plaintes à l'Equal Employment Opportunity Commission (EEOC) à des fins d'enquête et de résolution dès qu'il a des raisons de croire que les pratiques enfreignent le titre VI ou le titre VII de la Civil Rights Act de 1964Note de bas de page 40. La professeure Stacy Hawkins signale également que la possibilité de radier les entrepreneurs fédéraux en situation de non-conformité grave ou continue est un outil rarement utiliséNote de bas de page 41.

Union européenne

En revanche, la Directive de l'UE de 2014 sur la passation des marchés publics préserve un espace considérable pour que les membres de l'UE déterminent ce qui sera visé par l'accord, et permet des conditions d'exécution du marché qui visent à favoriser la mise en œuvre de mesures destinées à promouvoir l'égalité des hommes et des femmes au travail, une plus grande participation des femmes au marché du travail et la conciliation de la vie professionnelle et de la vie privée, ainsi qu'à assurer le respect « pour l'essentiel » des conventions fondamentales de l'Organisation internationale du travail (OIT). La directive permet aussi de « recruter davantage de personnes défavorisées que ne l'exige la législation nationaleNote de bas de page 42. » Pour la mise en œuvre de cette directive, l'Espagne demande aux soumissionnaires de démontrer que le milieu de travail répond déjà à un objectif de représentation afin de bénéficier de la préférence. De façon créative, l'Espagne prévoit que, pour décider à qui attribuer le contrat en fonction d'une pluralité de considérations qui vont au-delà de la dimension des prix, elle pourrait demander des rapports à des syndicats et à des organisations de défense des droits de la personne (et à d'autres organisations liées à certaines des autres questions de justice sociale, y compris les questions de justice environnementale) afin de vérifier les considérations sociales et environnementalesNote de bas de page 43.

Il convient toutefois de garder à l'esprit une observation importante faite au début de la recherche. Le professeur Christopher McCrudden note que certains États adoptent des lois, mais prennent peu de mesures pour lier concrètement l'approvisionnement à l'égalité. D'autres États utilisent la latitude politique dont ils disposent pour agir et lier concrètement l'égalité à l'approvisionnement, sans trop de fanfare législativeNote de bas de page 44.

Afrique du Sud

Le programme général d'émancipation économique des Noirs de l'Afrique du Sud s'appuie sur le mandat constitutionnel d'action positive d'après l'apartheid afin de remédier aux effets de l'exclusion et de la ségrégation raciales. La Broad-based Black Economic Empowerment Act, comme modifiée en 2014Note de bas de page 45, inclut un large éventail de mesures, y compris l'équité en matière d'emploi en général et, à ces fins, l'approvisionnement préférentiel auprès des entreprises détenues et gérées par des Noirs. En Afrique du Sud, le terme « Noirs » est un terme générique regroupant [Traduction] « les Africains, les gens de couleur et les Indiens » qui avaient la citoyenneté avant le 27 avril 1994 ou qui auraient été admissibles à la citoyenneté avant cette date. Les modifications apportées à la South African Employment Equity Amendment Act, 2022 (loi de 2022 sur l'équité en matière d'emploi en Afrique du Sud), qui ont été promulguées le 14 avril 2023 et sont entrées en vigueur le 1er septembre 2023, établissent un lien explicite entre l'admissibilité aux marchés publics et le respect des exigences d'équité en matière d'emploi et de non-discrimination.

Compte tenu de l'importance des accords commerciaux et de la nécessité d'assurer la marge de manœuvre nécessaire pour inclure l'égalité dans l'approvisionnement, ainsi que de l'importance des exemples comparatifs, nous formulons les recommandations suivantes.

Recommandation 7.21 : Des dispositions précises devraient être prises dans le cadre des négociations futures afin d'assurer une marge de manœuvre pour les revers au nom des groupes visés par l'équité en matière d'emploi en vertu de la Loi sur l'équité en matière d'emploi.

Recommandation 7.22 : Le gouvernement fédéral devrait utiliser sa marge de manœuvre pour inclure les revers au nom des groupes visés par l'équité en vertu de la Loi sur l'équité en matière d'emploi dans l'attribution des marchés publics afin de promouvoir l'inclusion équitable des entrepreneurs issus des groupes visés par l'équité dans l'attribution des contrats fédéraux. Des consultations intergouvernementales préalables devraient avoir lieu sur ces préoccupations avec les Premières Nations, les Métis et les Inuits.

Recommandation 7.23 : Les accords internationaux sur les marchés publics négociés par le gouvernement du Canada devraient clarifier explicitement que le Canada conserve la possibilité d'adopter un engagement ou de soutenir son engagement envers l'égalité réelle, y compris au moyen du cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi.

Il est temps d'inclure les employés du Parlement

À l'heure actuelle, les employés du Parlement ne sont pas visés par le cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, pour des raisons essentiellement historiques. En 2005, la Cour suprême du Canada a reconnu que la Loi canadienne sur les droits de la personne s'appliquait à ces employés :

Canada (Chambre des communes) c. Vaid, [2005] 1 R.C.S. 667, 2005 CSC 30 :

La composition du personnel de la Chambre des communes est fort différente en 2005 de ce qu'elle était en 1867. Au tout début, la Chambre des communes comptait seulement 66 employés permanents et 67 employés de session. À l'heure actuelle, selon la division des Ressources humaines de la Chambre des communes, celle-ci compte 2 377 employés. De nombreux services auxquels ils appartiennent n'existaient pas en 1867. La Bibliothèque du Parlement à elle seule emploie 298 personnes, soit plus du double du total des employés qui travaillaient pour la Chambre en 1867. Les services d'information de la Chambre des communes emploient aujourd'hui 573 personnes. La gamme des services offerts a beaucoup augmenté et ils n'ont pas tous un rapport direct avec les fonctions de la Chambre en tant qu'organe législatif et délibérant. Le Service de la cité parlementaire compte plus de 800 employés dont un serrurier, un designer d'intérieurs, divers conservateurs, cinq charpentiers, un massothérapeute, deux encadreurs de tableaux, un responsable du stationnement et deux agents de circulation. Parmi le personnel des services intégrés du Parlement, on compte plusieurs chefs des cuisines, des cuisiniers et des aide-cuisiniers, trois plongeurs/casseroliers et d'autres employés de soutien du service de la restauration. Certes, la Chambre des communes considère que tous ses employés sont utiles, mais il s'agit plutôt de savoir si, ainsi définie, l'étendue du privilège qu'elle revendique est trop vaste […]

Les appelants n'ayant pas établi l'existence du privilège étendu et englobant qu'ils revendiquent, les intimés ont droit à ce que le pourvoi soit tranché sur le fondement des lois ordinaires que le Parlement a édictées en matière de relations de travail et de droits de la personne pour les employés relevant de la compétence législative fédérale […]

Rien dans le libellé de l'art. 2 n'indique que la Loi canadienne sur les droits de la personne n'était pas censée s'appliquer aux employés du Parlement. Il n'existe aucune raison de croire que le Parlement avait « l'intention » d'imposer des obligations en matière de droits de la personne à tous les employeurs fédéraux, à l'exception de lui-même […]

Par conséquent, je conclus que la Loi canadienne sur les droits de la personne s'applique aux employés du Sénat et de la Chambre des communes.

À l'heure actuelle, la Chambre des communes a comptabilisé au budget 1 807 équivalents temps plein, comme l'indique le tableau ci-dessous, et la Bibliothèque du Parlement a comptabilité au budget 383,52 équivalents temps plein (les guides, les étudiants et étudiantes, et les stagiaires n'étant pas inclusNote de bas de page 46).

Tableau 7.2 : Équivalents temps plein comptabilisés au budget
Bureaux de la Chambre des Communes Nombre d'employés (équivalents temps plein)
Bureau du greffier et secrétariat 62
Services de la procédure 329
Bureau du légiste et conseiller parlementaire 38
Bureau du sous-greffier, Administration 52
Opérations de la Cité parlementaire 470
Bureau du sergent d'armes et de la sécurité institutionnelle 68
Services numériques et Biens immobiliers 441
Services en ressources humaines 162
Services des finances 186
Total 1 807

Recommandation 7.24 : Les employés du Parlement devraient être inclus dans la portée de la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Cela pourrait se faire d'une manière analogue à l'inclusion des employés du Parlement dans le cadre de la Loi sur l'équité salariale, par des modifications à la Loi sur les relations de travail au Parlement.

Succession

Comme c'est le cas dans la plupart des négociations collectives, des normes d'emploi partout au Canada et des lois sur l'équité salariale au Québec et en Ontario, il serait prudent que la Loi sur l'équité en matière d'emploi prévoie que l'aliénation d'une entreprise ou la modification de sa structure juridique n'ait aucun effet sur les obligations de l'employeur en vertu de la Loi sur l'équité en matière d'emploi et les programmes visés. L'ajout d'une disposition de cette nature n'enlève rien à la prémisse selon laquelle les employés ont droit à un milieu de travail exempt de discrimination et de harcèlement systémiquesNote de bas de page 47.

Bien entendu, on ne s'attendrait pas à ce que ce genre de disposition confère une compétence en cas de perte de compétence fédérale. Toutefois, il pourrait être utile de clarifier - comme l'a été le Code canadien du travail après que le groupe de travail présidé par Andrew Sims, c.r., a recommandé d'examiner la partie 1 du Code canadien du travail - que les dispositions relatives à la succession s'appliquent aux entreprises passant d'une compétence provinciale à la compétence fédéraleNote de bas de page 48. Le groupe de travail présidé par la professeure Bilson a examiné cette recommandation et a formulé une recommandation analogue lorsqu'il a proposé une loi fédérale sur l'équité salariale en 2004, et il a veillé à ce que la conformité de tous les plans provinciaux existants puisse être évaluée par rapport aux exigences fédéralesNote de bas de page 49.

Recommandation 7.25 : La Loi sur l'équité en matière d'emploi devrait être modifiée afin d'indiquer que les dispositions relatives à la succession doivent s'appliquer aux entreprises qui passent de la compétence provinciale à la compétence fédérale, parallèlement aux dispositions transitoires du Règlement sur l'équité en matière d'emploi visant à répondre aux exigences en matière de rapports.

Autres propositions

De multiples façons, les intervenants ont dit à notre groupe de travail qu'il existe un désir de veiller à ce que l'équité en matière d'emploi soit reconnue comme avantageuse pour la société dans son ensemble. De nombreux intervenants cherchaient à s'assurer que sa portée était aussi exhaustive que possible. Les groupes visés par l'équité en matière d'emploi ainsi que certains employeurs et syndicats voulaient aller plus loin, pour réfléchir aux moyens de renforcer l'entrepreneuriat au sein des groupes visés par l'équité en matière d'emploi.

Bien que ce rapport n'ait pas pu tenir compte d'absolument tout, nous nous sommes efforcés d'examiner un bon nombre d'éléments et d'y répondre avec soin. Il contient les détails nécessaires, mais nous nous sommes concentrés sur le portrait global : le renforcement des trois piliers, soit la mise en œuvre par l'élimination des obstacles, les consultations significatives et la surveillance réglementaire. La couverture n'est pas une fin en soi, mais vise plutôt un régime de soutien durable qui encouragera l'inclusion équitable pour tous.

Nous avons été heureux de constater que les intervenants qui se sont présentés devant nous ne considéraient pas seulement l'équité en matière d'emploi comme une contrainte, mais aussi comme un avantage concurrentiel, pour les employeurs individuels, pour la croissance économique et pour la société canadienne dans son ensemble. Il est aussi question de la façon dont nous nous représentons dans le monde.

Les recommandations formulées dans ce chapitre visent à respecter ces aspirations sociétales plus larges. Le présent rapport cerne les domaines auxquels la couverture devrait et pourrait en toute logique être étendue. Nous prêtons attention aux seuils et cherchons à promouvoir les communautés d'apprentissage.

L'équité en matière d'emploi n'est pas et ne peut pas être la solution à tout pour tout le monde. Mais elle peut être fidèle à ses propres objectifs, et elle doit être considérée comme une partie importante de l'approche holistique du droit du travail et du droit en matière de droits de la personne.

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