Guide de la détermination de l'admissibilité Chapitre 7 - Section 3

7.3.0 Inconduite liée aux actions ou aux omissions

En plus d’énoncer les principes qui sous-tendent l’établissement d’une inconduite, la jurisprudence a également précisé certaines conduites qui relèvent de l’inconduite. Les sections suivantes traitent de circonstances particulières dont on considère qu’elles relèvent de l’inconduite.

Les actions ou omissions dont on traite plus bas font référence à des aspects fondamentaux du lien employeur-employé. Le paiement des prestations repose sur le fait que c’est à l’employé qu’incombe ou non la responsabilité d’avoir contrevenu à l’un ou l’autre de ces aspects. Il est important de noter que tant l’employeur que l’employé peut être à l’origine de la rupture du lien d’emploi. La Loi n’offre pas aux employés victimes d’un congédiement injustifié quelque forme de recours que ce soit; son objectif n’est pas non plus de rendre un jugement à l’égard des gestes posés par l’employeur. Les employés ont d’autres recours pour obtenir de l’aide dans les cas où ils sont victimes d’un congédiement injustifié. La responsabilité de la Commission consiste à déterminer si les employés qui demandent des prestations ont perdu leur emploi du fait de gestes qui relevaient de leur contrôle et d’établir s’ils peuvent recevoir des prestations régulières.

Les dispositions législatives n’offrent aucune définition du terme « inconduite ». C’est plutôt la jurisprudence, qui au fil des années, a nuancé l'interprétation de ce terme, dans le contexte législatif. Il en est de même des actions ou omissions particulières visées par cette interprétation. Ces actions ou omissions qui n'apparaissent pas comme telles dans les dispositions législatives ont également été précisées par la jurisprudence.

Comme nous l’avons déjà indiqué, l'une des deux questions auxquelles l'agent de la Commission doit répondre consiste justement à déterminer si la personne qui demande des prestations a commis des actions ou omissions visées par l'interprétation donnée au terme « inconduite » dans la jurisprudence. Les prochaines rubriques sont consacrées aux actions ou omissions les plus fréquentes où l'on retrouve les éléments caractéristiques de l'inconduite.

7.3.1 Les absences du travail

Tout employeur a le droit de s'attendre à ce qu'un employé se présente à son travail de façon assidue et y demeure en poste jusqu'à la fin de son horaire de travail. L'assiduité au travail constitue indiscutablement un facteur déterminant de la productivité d'une entreprise. Cependant, il est nécessaire pour tout employé qui désire ou prévoit s'absenter d’en informer l'employeur au préalable et lui demande la permission de le faire.

Certaines absences ne sont guère prévisibles, lorsque survient un événement incontrôlable de dernière minute ou encore une urgence contraignant un employé à quitter son lieu de travail de façon précipitée ou l'empêchant de s'y rendre. Un employé a le devoir d’informer l'employeur avant de quitter son lieu de travail, ou selon la situation, lui faire savoir le plus rapidement possible, qu'il ne peut demeurer ou se présenter à son travail.

Par absence du travail, on entend toute situation dans laquelle l’employé devrait être présent à son travail et ne l’est pas. Parmi ces situations figurent celles qui consistent à omettre de se présenter au travail, à s’y présenter en retard ou à quitter avant la fin d’un quart (CUB 66381A, CUB 74804), à prendre des pauses en-dehors des moments prévus pour celles-ci, à prendre sa pause plus tôt que prévu ou à mettre fin à celle-ci plus tard que prévu.

Tout employé doit prendre les dispositions nécessaires pour s’assurer d’être au travail au moment convenu. Si l’absence est prévisible, on s’attend de l’employé qu’il informe l’employeur et qu’il lui explique la situation.

Si une personne n’est pas en mesure de se présenter au travail en raison d’un problème de dépendance et qu’elle est pour cette raison congédiée, on considère que la personne a perdu le travail en raison de son inconduite (A-85-06, A-582-98, A-570-00, A-255-03, A-315-05). L’absence du travail est le résultat d’un comportement volontaire ou délibéré ou qui résultait d'une insouciance telle qu'il frôlait le caractère délibéré de la part de la personne concernée, bien qu’elle savait ou qu’elle aurait dû savoir qu’en agissant de la sorte, elle serait congédiée.

7.3.1.1 Les retards

Il y a des emplois pour lesquels le fait de se présenter au travail à temps est encore plus important qu’il ne le soit pour d’autres. À titre d’exemple, un retard pourrait décaler l’horaire d’une chaîne de production jusqu’à ce que l’employé absent se présente au travail ou puisse être remplacé. En résulterait donc une perte de temps et de revenu. Par contre, pour d’autres emplois, les retards peuvent être moins graves et l’employeur peut faire preuve de plus de souplesse sur le plan de ses attentes. La recherche des faits établira les attentes de l’employeur et la compréhension qu’avait l’employé de la nature de ses horaires de travail.

Le fait d'être constamment en retard au travail constitue de l'inconduite. Il en est de même du fait de prolonger au-delà du temps autorisé, la pause-café et les périodes de repas. Il va de soi qu'une personne doit prendre des mesures nécessaires pour être à son poste de travail à l'heure convenue, surtout si elle a été sérieusement mise en garde au sujet de son manque de ponctualité ou si elle a reçu des avis verbaux et écrits à l'effet qu'elle serait congédiée s'il n'y avait pas amélioration (A-558-12).

L'on s'attend généralement de la personne qui est en retard ou prévoit être en retard qu'elle en informe l'employeur, lui en fournisse la raison et lui demande la permission en ce sens; à défaut de ce faire, son comportement peut être qualifié d'inconduite.

7.3.1.2 Les absences sans avis

L'omission d'informer l'employeur en temps opportun peut constituer un manquement pouvant s'avérer de l'inconduite même si l'absence est motivée par des événements hors du contrôle d'une personne. Il revient à cette personne de démontrer qu'il ne lui était pas possible d'informer l'employeur dans un délai raisonnable.

Il est préférable que ce soit la principale intéressée, c'est-à-dire la personne employée, qui informe elle-même l'employeur de son absence. Si elle ne peut le faire, le conjoint ou une personne autorisée ou de confiance pourrait le faire pour elle. Il revient à la personne employée d'utiliser tous les moyens raisonnables à sa disposition pour avertir l'employeur et non à ce dernier de s'enquérir des motifs de son absence.

Lorsque les déclarations de l'employeur et de la personne employée sont contradictoires, il est essentiel d'obtenir des détails complets de l'une et l'autre des parties; la décision devra alors être rendue d'après la crédibilité des déclarations et la prépondérance de la preuve.

Dans certaines situations, omettre d’informer son employeur de son absence pourrait ne pas être considéré comme de l’inconduite. Il peut survenir des situations dans lesquelles on peut raisonnablement croire que l’employé avait de bonnes raisons d’omettre de signaler son absence. Selon la nature des faits obtenus sur la question de la notification et de la justification, une absence non autorisée pourra ou non constituer de l’inconduite.

7.3.1.3 Les absences non motivées

Il ne suffit pas que l'employeur soit prévenu de l'absence; il lui revient de droit d'en connaître les raisons. Ainsi l'absence non motivée peut constituer en soi de l'inconduite.

S'absenter pour un motif peu sérieux, en utilisant un prétexte ou une excuse, ou refuser de divulguer la raison de l'absence s'avère de l'inconduite. Celle-ci est encore plus manifeste s'il ne s'agit pas d'une première infraction.

Lorsque la permission de s'absenter n'a pas été accordée par l'employeur et que la personne employée allègue qu'elle ne pouvait faire autrement que de s'absenter, le motif de l'absence devient de première importance (A-440-10); il s'agit dans ce cas de se demander si l'absence était nécessaire et inévitable.

Il s'agit dans bien des cas d'une question de crédibilité. L'on ne s'attend pas par exemple à ce qu'une personne bénéficiant d'un congé de maladie demeure totalement oisive durant cette période; suivant la nature de son incapacité, elle peut occuper son temps à des loisirs ou à des tâches domestiques compatibles avec son état de santé. Encore faut-il que sa maladie soit authentique et non pas un prétexte pour vaquer à d'autres occupations, et qu'elle demeure crédible compte tenu du genre d'activités poursuivies.

Les situations de harcèlement, d’abus ou de violence à l’égard d’un employé peuvent amener celui-ci à s'absenter de son emploi sans dire expressément le véritable motif de l’absence à son employeur. Le congédiement dans des circonstances où l'absence est reliée au harcèlement et à la violence dont souffre le prestataire ne constitue pas une inconduite au sens de la loi.

Il peut en être de même lorsqu'une personne est congédiée à cause d'un rendement insatisfaisant ou d'un comportement préjudiciable à la poursuite de son emploi - comme par exemple de l’absentéisme ou des relations non harmonieuses au travail - lorsque reliés aux traumatismes ou aux événements consécutifs au harcèlement ou à la violence dont un prestataire est victime de la part d'un époux ou d'un autre individu.

7.3.1.4 Les absences sans permission

S'absenter sans en demander ou sans avoir la permission peut constituer de l'inconduite surtout si le motif de l'absence n'est pas sérieux ou s'il ne s'agit pas d'une première infraction (A-198-11).

Le fait de s'absenter alors que l'autorisation de l'employeur a été refusée est généralement matière à inconduite, en particulier si une personne a été formellement avisée par son employeur du risque lié au fait de défier les directives. Il faut voir en ce cas quelles étaient les circonstances en cause et s'il existait pour cette personne d'autres solutions raisonnables.

L'omission de demander la permission ne doit pas être retenue si l'absence est inévitable, comme par exemple si elle est due à la maladie, à la condition que l'employeur en ait été informé et que les attestations demandées lui aient été fournies.

Par permission, on entend que l’employeur est au courant de l’absence et autorise celle-ci. Les organisations d’envergure se sont généralement dotées d’un processus officiel par lequel un congé est demandé et autorisé. Les employeurs de moindre importance peuvent se montrer plus souples et accorder des absences après une entente de vive voix. Si survient un congédiement du fait d’une absence sans permission, la Commission doit obtenir une preuve du fait que l’employeur n’a pas donné cette permission et que l’employé a bien compris que celle-ci lui a été refusée.

7.3.1.5 Absence/retards et mesures disciplinaires progressives

L’absence non autorisée et injustifiée du travail est une conduite qui fait fréquemment l’objet de l’application de mesures disciplinaires progressives (A-416-08, A-440-10). Il s’agit également de l’une des situations que peut évoquer l’employeur pour justifier un congédiement même dans les cas où est prévu un processus officiel de mesures disciplinaires progressives. Un employeur peut également être fondé à mettre fin à un emploi lorsque l’employé a pour habitude d’être en retard au travail. Cependant, si l’employeur a toléré les retards/absences sans aucune preuve d'un dernier avertissement, il se peut que l’employé n’ait pas réalisé qu'un incident final de retard / absence est considérée une action pour laquelle l'employeur peut appliquer une sanction disciplinaire (section 7.2.5.2 du Guide).

7.3.2 L’insubordination

L'insubordination peut se définir en termes de refus ou de désobéissance d'une personne employée quant à l'exécution d'un ordre, d’une directive, d’un règlement ou de toute autre forme d'expression d'autorité ayant cours chez un employeur.

Il n'y a pas inconduite si le refus ou la désobéissance s'explique du fait d'un malentendu sérieux et authentique sans qu'il y ait mauvaise volonté de l'une ou l'autre des parties (A-440-83). Il en est de même s'il apparaît qu'un conflit de personnalité entre la personne employée et son employeur est la source du congédiement et que la raison donnée par l'employeur n'est qu'un prétexte.

Il se peut que, selon sa conscience, une personne ne puisse suivre la politique que lui dicte son employeur. Il faut considérer en ce cas la situation en cause, dans quelle mesure la politique applicable apparaît raisonnable et s'il existait, dans les circonstances, d'autres solutions raisonnables qui auraient pu permettre de régler la situation.

7.3.2.1 Le refus d’accomplir certaines tâches

Lorsqu'une personne oppose un refus à son employeur d'accomplir des tâches qui font habituellement partie de ses fonctions, il peut s'agir d'une inconduite à moins qu'elle ne puisse justifier son refus. Si cette personne estime que la requête de l'employeur contrevient à certaines dispositions d'une loi ou de la convention collective, elle doit avant de refuser d'accomplir ces tâches spécifiques, prendre les mesures requises pour que la loi soit appliquée ou que les clauses de la convention collective soient respectées en ayant recours par exemple aux procédures de griefs. En d'autres termes, elle doit chercher à éviter que son refus provoque son renvoi (A-200-09).

Certaines législations sur la santé et la sécurité du travail reconnaissent le droit spécifique de refus si une personne a des motifs raisonnables de croire qu'il y a danger pour sa santé ou sa sécurité ou pour celle d'autres personnes; ce droit de refus est généralement accordé jusqu'à ce que les paliers d'intervention désignés par ces lois aient rendu une décision exécutoire sur la reprise du travail. Une personne ne peut toutefois refuser d'accomplir certaines tâches si un tel refus a pour effet immédiat de mettre en péril une autre personne ou si les conditions d'exécution du travail sont normales, compte tenu du genre d'occupation.

Lorsque le refus a trait à l'exécution de tâches additionnelles qui n'entrent pas dans l'état de ses fonctions, la décision repose sur le caractère légitime et raisonnable de la requête de l'employeur. Il y a lieu en outre de considérer s'il y a une contrepartie monétaire offerte pour ces tâches additionnelles ou encore s'il s'agit d'une requête exceptionnelle de l'employeur visant une situation d'urgence ou imprévue. Le refus constitue, à première vue, de l'inconduite à moins que l'écart entre les tâches demandées et celles qu'une personne accomplit habituellement ne soit important. Il revient à cette personne d'expliquer son refus et de le justifier.

Si un danger est associé aux tâches additionnelles, on ne peut s’attendre de l’employé qu’il obéisse aveuglément. Le prestataire doit offrir une explication raisonnable pour justifier son refus. Par conséquent, lorsque les tâches additionnelles requises présentent un danger réel, on ne va pas conclure qu’il y a inconduite si le refus de l’employé d’effectuer ces tâches additionnelles était fondé sur une réelle crainte pour sa santé, son intégrité physique ou sa vie, par opposition à un simple entêtement ou à un manque de désir.

7.3.2.2 Le refus d'exécuter un ordre ou de suivre une directive

Le refus d'obéir ou d'obtempérer à un ordre ou à une directive légitime et raisonnable de l'employeur peut constituer de l'inconduite.

L’agent doit tenter de déterminer si l’ordre ou la directive était raisonnable et s’il contrevenait à une loi ou à une convention collective. Il est à propos de se demander si la personne a pu se prévaloir de dispositions prévues dans sa convention collective par exemple pour exprimer son désaccord au lieu de s'exposer, par un refus catégorique, à un renvoi.

Si l'ordre ou la directive revêt un caractère sensé, rationnel, on peut conclure à l'inconduite, d'autant plus si la personne a été avisée verbalement ou par écrit d'obéir aux ordres de son supérieur hiérarchique. Si la personne prétend que l'ordre ou la directive était déraisonnable, il lui revient d'expliquer en quoi l'ordre ou la directive était déraisonnable et démontrer pourquoi elle n'a pas utilisé d'autres mesures pour exprimer son désaccord (CUB 71069).

7.3.2.3 Le refus de travailler en temps supplémentaire

Le temps supplémentaire constitue une pratique courante dans le monde du travail. Le rythme des affaires fluctue et il ne serait pas avisé d’augmenter l’effectif pour répondre aux besoins des périodes les plus occupées. Les vacances annuelles et les congés de maladie peuvent également créer la nécessité d’effectuer du temps supplémentaire, au travail.

Il n’est cependant pas raisonnable de s’attendre, d’un employé, qu’il fasse trop de temps supplémentaire, tout particulièrement lorsque celui-ci devient une pratique courante. Il n’est également pas raisonnable, pour l’employeur, de s’attendre à ce que ses employés fassent le travail additionnel sans être rémunéré. Manifestement, chaque employé peut effectuer une certaine quantité de temps supplémentaire et il convient également de tenir compte de cet aspect. En effet, une personne qui présente des problèmes de santé ou un travailleur plus âgé pourrait ne pas être en mesure d’effectuer autant d’heures supplémentaires que ne le serait un employé plus jeune ou en santé. Dans de telles situations, il suffirait d’avoir un billet d’un médecin affirmant que l’employé n’est pas en mesure d’effectuer énormément d’heures supplémentaires pour déterminer que le refus de travailler en temps supplémentaire ne constituait pas une inconduite et pour autoriser le versement de prestations.

L’employeur doit aussi tenter, si possible, de prévenir ses employés lorsqu’ils sont tenus de faire du temps supplémentaire, de sorte que ceux ayant des engagements en dehors du travail, puissent prendre les dispositions nécessaires pour demeurer plus tard ou travailler la fin de semaine.

En principe, un employé n’a pas le droit de refuser d’acquiescer à une demande raisonnable de l’employeur, à moins que la convention collective ou que le contrat d’emploi ne prévoit que le consentement de l’employé est nécessaire dans de telles situations.

Si le prestataire prétend que la demande de l’employeur contrevenait aux dispositions de la convention collective parce que le préavis prévu n’a pas été donné, ou s’il estime qu’il était impossible d’accepter de faire le temps supplémentaire en question, il est tenu d’établir la validité de ses allégations et de fournir les motifs du refus (CUB 72118).

Lorsqu’un prestataire choisit de démissionner plutôt que d’attendre d’être congédié pour avoir refusé d’accepter, il faut examiner le dossier dans le contexte d’un départ volontaire et rendre une décision selon les dispositions du chapitre 6 du Guide.

7.3.3 Le comportement hostile

Si un prestataire a été congédié en raison d’un comportement hostile, tous les faits concernant l’incident doivent être obtenus afin de déterminer si les actions du prestataire ayant mené à son congédiement constituaient de l’inconduite.

Dans la mesure du possible, il convient de veiller à ce que l’employeur, les employés et les clients entretiennent des rapports sains et harmonieux. Pour éviter toute perturbation et désorganisation sur les lieux du travail, il y a lieu de préciser clairement les rôles spécifiques de chaque personne.

Tous les échanges professionnels doivent être empreints de respect, qu’ils concernent l’employeur, les collègues, les clients ou la population en général. La conduite de chacun ne doit offenser ou provoquer quiconque, non plus que relever du harcèlement.

7.3.3.1 La conduite irrespectueuse

Chacun a sa conception de ce qui constitue une conduite respectueuse ou irrespectueuse. En effet, une personne pourrait estimer qu’une conduite en particulier est irrespectueuse, pour une autre, ce comportement représenterait une insulte, tandis qu’une autre ne serait en rien dérangée par cette attitude ou ce comportement. Lorsqu’il s’agit de prendre une décision à cet égard, il est important d’être sensible à la complexité des relations humaines, tout particulièrement dans le contexte de notre société multiculturelle. En effet, différentes cultures peuvent percevoir un même comportement d’un œil différent. Dans chaque cas, il est important de mettre en perspective les faits et les avis exprimés par les personnes en cause.

Le manque de respect peut prendre des formes variées. L’insolence, l’impertinence, l’impolitesse, le manque de tact, les insultes et les menaces peuvent avoir des effets différents selon l’attitude adoptée ou les termes employés. Les actions ou les gestes posés peuvent blesser, provoquer ou constituer une menace pour l’employeur, un collègue ou un client.

L'on peut affirmer de façon générale que des attitudes, comportements ou paroles ayant pour effet d'offenser peuvent s'avérer de l'inconduite. Cependant, avant d’en venir à une telle conclusion, il faut tenir compte des circonstances qui ont mené aux gestes en question et comment ceux-ci peuvent être perçus par l’autre personne en cause. Ces actions ou ces gestes constituaient-ils une authentique infraction ou offense incompatible avec l’exécution des tâches pour lesquelles la personne a été embauchée? Est-ce que les actions ont comme résultat que l’employé ne rencontre plus une condition d’emploi? L’incident revêtait-il un caractère volontaire et une intention de se montrer irrespectueux était-elle présente? S’agissait-il d’un commentaire relativement courant mais qui pourrait être perçu comme constituant une insulte du fait des différences culturelles entre les personnes en cause?

7.3.3.2 Les voies de faits

Avant de conclure qu’il y a eu inconduite, il convient de se pencher sur la cause des voies de fait qui surviennent en milieu de travail ou en dehors de celui-ci. Le fait que de tels gestes soient posés ne signifie pas toujours pour autant qu’il faille conclure qu’il y a eu inconduite.

Parmi les détails qu’il convient d’examiner dans les situations dans lesquelles des voies de fait mènent au congédiement figurent les suivants :

  • Y a-t-il eu blessure physique? Si tel est le cas, quel en a été la cause?
  • Des remarques menaçantes ont-elles été formulées?
  • La réaction de violence est-elle imputable à un comportement agressif, hostile ou menaçant?
  • Des biens ont-ils été intentionnellement endommagés?
  • Des armes étaient-elles en cause?
  • La violence constituait-elle une forme de représailles pour des gestes commis contre la personne?

Comme toujours, un agent déterminera si toutes les autres solutions raisonnables ont été envisagées. S’il s’agissait d’un problème de longue date, le prestataire en a-t-il parlé à son superviseur/employeur/représentant syndical? Les faits recueillis doivent expliquer le fondement du comportement. Ils devraient expliquer pourquoi le prestataire estimait que la violence constituait la seule solution qui s’offrait à lui.

Les voies de faits peuvent constituer une réaction à un climat de mésentente entre des personnes et se caractérisent par des actes de violence physique contre d'autres personnes (A-33-13, A-184-13).

Les voies de faits peuvent constituer de l'inconduite. Une conclusion d’inconduite doit être appuyée par un examen minutieux. À titre d’exemple, après avoir demandé de la protection à son employeur, une personne peut avoir été provoquée et contrainte de se défendre.

Lorsque des voies de fait ont été commises en dehors du milieu de travail, il faut aussi en évaluer la cause et l’objet. On estimera qu’il y a eu inconduite lorsque l’infraction mène au non-respect d’une condition d’emploi et au congédiement (A-1342-92). Le fait que le prestataire puisse regretter les gestes qu’il a posés et présenter ses excuses par la suite n’intervient en rien dans la décision consistant à établir s’il s’agissait ou non d’une inconduite (A-592-06).

7.3.4 La dérogation aux règlements

Un employeur a le droit de fixer les règles qui circonscrivent le lien d’emploi, pour autant qu’il respecte les exigences définies par la loi (par exemple les lois du travail ou d’immigration provinciales et fédérales) et celles qui relèvent de la convention collective.

Il se peut qu’un employeur estime que le comportement de l’un de ses employés est répréhensible et qu’il considère que celui-ci constitue de l’inconduite. La Commission devra examiner la valeur intrinsèque de la règle, son importance au sein du milieu de travail, en plus de déterminer en quoi le fait de contrevenir à cette règle a eu une incidence négative sur l’employeur. La Commission déterminera si le comportement pour lequel le prestataire a été congédié a irrémédiablement altéré le lien d’emploi. Une telle décision repose sur une analyse objective des faits.

La décision de la Commission relativement au fait qu’il y a eu ou non inconduite n’est pas reliée au droit qu’a l’employeur de gérer son entreprise. Bien que l’employeur peut avoir été fondé à mettre un terme à l’emploi de l’un de ses employés, il se peut que la Commission n’estime pas, pour sa part, qu’il y ait eu inconduite. La Loi exige tout simplement que la Commission examine la conduite de l’employé afin de déterminer si celui-ci était conscient des risques pour son emploi, lorsque la présumée inconduite est survenue.

Par dérogation, on entend une violation ou une infraction, le fait de ne pas respecter les conditions, de ne pas s’acquitter des exigences d’une promesse ou d’un contrat, de rompre des liens d’amitié, un désaccord, le fait de ne pas s’acquitter d’une obligation et d’autres situations similaires.

Le non-respect des normes de travail établies, des instructions, des règles ou des règlements de l’employeur ou de la convention collective peut constituer une inconduite. Certaines des règles ou certains des règlements peuvent être énoncés dans un document écrit tout comme ils peuvent prendre la forme de consignes exprimées de vive voix ou être tout simplement des attentes raisonnables de l’employeur. En cas de dérogation menant à une cessation d’emploi, il incombe au prestataire de justifier sa conduite ou de démontrer que l’exigence n’était pas raisonnable.

Le fait de ne pas signaler l’inconduite d’un collègue, en milieu de travail, peut être considéré comme un non-respect des règles ou du code de conduite et mener éventuellement à un congédiement pour inconduite (A-138-01).

Une infraction commise en dehors des lieux du travail peut constituer de l’inconduite et mener à un congédiement lorsque celle-ci fait en sorte que l’employé ne respecte plus les conditions d’emploi.

À moins que ce ne soit de façon délibérée ou par mauvaise volonté, il n'y a pas inconduite du fait d'une erreur attribuable à une grande pression au travail ou à l'inexpérience.

À moins qu'il n'y ait clairement négligence ou malhonnêteté, l'on ne peut dire qu'une erreur de jugement dans les décisions rendues ou les gestes posés dans le cadre d'un emploi représente de l'inconduite.

7.3.4.1 L'habillement et l'apparence

La façon dont une personne s’habille pour travailler peut varier, notamment selon le type d’établissement et de travail qu’elle fait. Si le port de l’uniforme est nécessaire, l’employé est tenu de se présenter au travail convenablement vêtu. Si des directives prévoient que l’uniforme ne doit pas être porté en dehors des lieux du travail, l’employé doit respecter cette pratique et revêtir son uniforme en arrivant au travail, avant de l’enlever une fois son travail terminé.

Des employeurs peuvent avoir des attentes en rapport avec la longueur de la chevelure ou le port d’une barbe, tout particulièrement, à titre d’exemple, lorsque le travail est réalisé au vu et au su de la clientèle ou lorsqu’il convient de tenir compte de considérations liées à l’hygiène, à la sécurité ou à l’image de l’entreprise.

Si l’on s’en réfère au sens commun, un employé représente l’employeur, dans le cadre de l’exécution de ses fonctions. Si un employé est en contact avec la clientèle, on pourrait estimer comme inacceptables des vêtements sur lesquels figureraient, à titre d’exemple, des logos, des expressions ou des images controversées, des vêtements souillés, usés ou déchirés, osés ou encore trop chics. En général, on considère que les vêtements conçus pour la pratique des sports, aller à la plage ou assister à des fêtes particulières peuvent ne pas convenir au travail. Dans les cas de congédiement d’un prestataire pour port de tels vêtements au travail, pour conclure qu’il y a eu inconduite, un agent recueillera des faits ayant pour objectif de déterminer si le prestataire savait que les vêtements qu’il portait ne convenaient pas, ou s’il avait été préalablement invité à cesser de porter des vêtements similaires, etc.

En règle générale, le fait de déroger à des politiques, règles ou exigences raisonnables en usage chez l'employeur concernant l'habillement et l'apparence peut constituer de l'inconduite, sauf s'il est établi que ces politiques, règles ou exigences contreviennent spécifiquement à des principes moraux ou vont à l'encontre des droits et libertés individuels insérés dans les diverses législations sur les droits de la personne.

La personne qui allègue que ces règles ou exigences étaient déraisonnables doit être en mesure de le démontrer, ce qui peut être d'autant plus difficile si ces conditions de travail lui étaient connues au moment de l'embauche et qu'elle les avait acceptées. Dans le but de déterminer l’admissibilité aux prestations, l'on s'attend à ce qu'un prestataire accepte toute requête ou exigence raisonnable de la part de l'employeur de préférence au renvoi.

7.3.4.2 Les règles sur la sécurité

À plusieurs secteurs du marché du travail correspondent des règles spécifiques en matière de sécurité. Ces règles peuvent être instaurées par l’employeur, des lois provinciales ou fédérales en matière de sécurité. Elles peuvent être très spécifiques et concerner, à titre d’exemple, le port de lunettes ou de bottes de sécurité, l’interdiction de l’usage de certains produits ou matériaux dangereux, voire l’établissement de lignes directrices régissant le transport de certains types de matières dangereuses.

Ces règles qui visent à protéger les vies humaines et à limiter les dommages à la propriété sont d'autant plus strictes dans les sphères d'activités à hauts risques en ce qui a trait notamment à la navigation aérienne ou maritime, à la circulation ferroviaire ou aux opérations dans les usines d'armement ou dans les centrales nucléaires.

Le fait qu'il y ait eu un manquement aux règles de sécurité et qu'il en soit résulté un accident ne signifie pas qu'il y a nécessairement eu inconduite. L'inconduite est manifeste si dans le cas d'une personne, la dérogation aux règles de sécurité est délibérée ou survient après avertissement ou encore lorsque des erreurs dues à une négligence ou à un manque d'attention de sa part sont en cause (CUB 53681, CUB 73893). Il peut ne pas y avoir inconduite si le manquement était négligeable, inhabituel et s'il n'y avait vraiment aucun danger.

Lorsqu’une responsabilité spécifique nécessitant une attention particulière a été confiée à un employé, cette personne doit veiller à ce qu’elle soit assumée et non simplement tenir pour acquis qu’elle le sera. La dérogation aux règles pourrait être imputable à un manque d’attention. C’est au prestataire qu’incombe la responsabilité de fournir des explications quant à la négligence ou au manque d’attention démontré.

Dans certaines sphères d'activités comme dans le domaine ferroviaire, il se peut que toute une équipe de travail soit tenue responsable d'un manquement aux règles de sécurité ou pour des incidents qui ont mis en danger des personnes ou occasionné des dommages matériels, et ce, même si certains membres de l'équipe n'aient que peu ou même rien à se reprocher. Aux fins de l’AE, il y a inconduite uniquement lorsqu’un prestataire s’est rendu personnellement coupable du manquement aux règles ou des incidents qui sont survenus.

Dans les secteurs d'activités à hauts risques (trafic aérien, centrale nucléaire, etc.), il s'ensuit souvent une enquête par un comité chargé d'étudier les circonstances qui ont entouré la violation d'un règlement touchant la sécurité. Les constatations du comité n’affectent pas la décision de la Commission. Il faut analyser soigneusement tous les renseignements pertinents afin de déterminer si les actions ou omissions attribuées à cette personne constituent de l'inconduite au sens où l'entend la législation sur l'AE.

Enfin, il peut ne pas y avoir d’inconduite si une personne soucieuse des règles sur la sécurité refuse de conduire un véhicule ou de se servir d'une machinerie qui présente de réels ou présumés grands risques pour la santé ou la sécurité. Si le refus reposait sur un motif sérieux, ne tenait pas d'un simple affrontement avec l’employeur ou d'un caprice et qu'il n'existait pas dans les circonstances d'autres solutions raisonnables, il n’y aurait alors peut-être pas une conclusion d’inconduite.

7.3.4.3 Baisse de la vigilance et toxicomanie

Il se peut que surviennent des situations dans lesquelles le prestataire et/ou l’employeur précise que l’incident ayant mené au congédiement était imputable aux problèmes qu’éprouvait le prestataire au chapitre de la consommation d’alcool, de la toxicomanie ou du jeu. Si l’on convient du fait que de telles dépendances constituent une maladie, la jurisprudence a établi qu’elles n’en soustraient pas pour autant le prestataire à leurs obligations professionnelles, tout comme elles ne permettent pas non plus de justifier les gestes qui ont contrevenu au contrat d’emploi.

À la limite, seule une preuve d’expert établissant clairement et de manière non équivoque que le prestataire n’était pas conscient de ces gestes pourra être acceptée à titre d’excuse. Cette preuve devra être extrêmement solide et démontrer que la consommation d’alcool a empêché le prestataire d’être conscient du caractère délibéré de ces gestes. On ne disposera d’une telle preuve que dans de rares situations.

Il se peut que l’employeur n’ait d’autre solution que de congédier l’employé. Si le prestataire a perdu son emploi parce qu’il ne s’est pas présenté au travail en raison de son problème de dépendance, il aura indiscutablement perdu l’emploi en raison de son inconduite (A-255-03).

L’établissement d’une dépendance ne nie pas en soi l’aspect du caractère volontaire et ne peut servir de justification pour exonérer le prestataire d’une inconduite éventuelle. C’est la conséquence de ce comportement et l’effet qu’a eu celui-ci sur le contrat d’emploi qu’il convient d’évaluer et d’examiner afin d’établir s’il y a eu inconduite.

Plusieurs incidents peuvent survenir dans le contexte de la consommation excessive d’alcool ou découler de problèmes imputables à une dépendance, qui ont des répercussions sur les rapports qu’entretient une personne au travail (A-85-06). Il convient d’examiner l’infraction en question (c.-à-d. l’absence du travail, l’insubordination, le comportement hostile ou le non-respect des règles) comme on le fait pour tout autre prestataire.

Si les prestataires disposent de droits en vertu de la Loi, ils ont également des obligations. On appliquera les consignes que l’on retrouve dans les sections pertinentes du présent chapitre, qui concernent notamment l’absence du travail (A-315-05), l’insubordination, le comportement hostile et le non-respect des règles.

7.3.4.3.1 Alcool

L'on peut affirmer de façon générale que tout contrat de travail renferme l'interdiction tacite de consommer de l’alcool pendant les heures de travail, sauf pour certains types d'emploi comme, à titre d’exemple, celui de dégustateur de vins ou dans des circonstances particulières, comme le fait de représenter l'entreprise à un repas d'affaires où des boissons alcoolisées sont servies.

Ainsi, de façon générale, que l’entreprise se soit ou non dotée d’un règlement formel, il y a inconduite pour quiconque enfreint cette interdiction. Cet aspect est particulièrement pertinent si la nature de l’emploi est telle que toute consommation d’alcool est interdite ou jugée non appropriée, comme dans le cas d’une personne qui conduit un véhicule public, d’un agent de police ou d’un chauffeur de camion.

Il se peut que la consommation d’alcool n’ait pas lieu sur les lieux du travail mais qu’elle ait néanmoins des répercussions sur la capacité d’effectuer des tâches au travail. Le fait qu'une personne se présente à son poste de travail en état d'ébriété et ne puisse remplir adéquatement ses fonctions peut constituer de l'inconduite.

L’alcoolisme ne peut constituer, pour un prestataire, une excuse justifiant des gestes relevant de l’inconduite et menant à son congédiement. Le fait que l’alcoolisme constitue une dépendence ou que l’employeur ait dû prendre des mesures particulières pour répondre aux besoins du prestataire n’a aucune importance (A-213-09).

À titre d’exemple, dans un cas où le prestataire a été congédié pour absentéisme, il a été établi qu’à défaut de preuve de l’absence du caractère volontaire, l’omission répétée de se présenter au travail du fait de la consommation d’alcool constituait un comportement volontaire adopté délibérément, les effets et les conséquences qu’aurait celle-ci sur l’emploi étant connus.

7.3.4.3.2 Drogues

De plus en plus d’entreprises se dotent de politiques de dépistage de la consommation de drogues pour des raisons de sécurité visant leurs employés, leurs clients ou la population en général. Ces politiques prévoient souvent que les employés dont les tests démontrent qu’ils consomment des drogues illicites soient congédiés. Le niveau de drogue détecté chez l’employé n’est souvent pas un facteur déterminant puisque les politiques de plusieurs entreprises ne prévoient aucune tolérance. Ces tests sont généralement administrés à titre de condition d’emploi, durant la période de probation ou sur une base aléatoire, dans le cadre de l’emploi. Le fait que la consommation de drogues puisse être survenue avant la date de l’entrée en fonction n’a aucune importance. La perte d’un « emploi quelconque » du fait de l’inconduite, qui ne se limite pas à l’emploi détenu au moment de l’inconduite, demeure une inconduite au sens de la Loi (A-239-06, A-875-96).

Le fait que certaines personnes consomment des substances comme des drogues illicites ou que certaines autres personnes fassent un usage inapproprié de médicaments prescrits n’est pas nouveau. La conscience que la consommation abusive de telles substances puisse avoir une incidence sur le milieu de travail tout comme l’inverse peut également être vrai semble prendre de l’importance. En effet, plusieurs aspects des milieux de travail d’aujourd’hui nécessitent, de la part des employés, qu’ils demeurent alertes, précis et que leurs réflexes soient aiguisés. Un employeur pourra congédier un employé du fait que la consommation de telles drogues altère ces qualités ce qui peut causer des accidents graves et altérer le niveau d’exactitude de son travail ainsi que son efficacité. Ce n’est pas tant le fait de consommer des drogues qui constitue le motif du congédiement mais ce sont les effets de consommer des drogues sur les capacités à remplir les conditions d’emploi qui constituent les raisons du congédiement et la détermination d’inconduite.

Il est important de procéder à une recherche exhaustive des faits et de présenter les documents pertinents dans les décisions d’inconduite, pour s’assurer que notre fardeau de preuve à l’effet que le prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduite a été rencontré (A-135-01, A-72-02).

7.3.4.3.3 Jeu

Les effets d’un problème de jeu peuvent se faire sentir dans le milieu de travail, se traduisant principalement par des pertes de temps et de productivité et, en situation désespérée, le joueur pourrait aller jusqu’à commettre un vol.

Les personnes qui ont un problème de jeu peuvent devenir complètement obsédées par cet aspect de leur vie. Leur journée de travail pourra être consacrée à jouer, à planifier leur prochaine séance de jeu ou à élaborer des plans pour obtenir de l’argent afin de le consacrer au jeu. N’importe laquelle de ces activités peut constituer une contravention au contrat de travail.

Le niveau de productivité d’une entreprise fait fréquemment les frais du temps perdu. Il se peut que l’on ne puisse plus se fier sur le joueur, qu’il ne respecte pas les échéances du projet, qu’il omette de se présenter à des réunions importantes et produise du travail de qualité moindre. Les employés qui souffrent de graves problèmes de jeu peuvent commettre des vols, des fraudes, voire des détournements de fonds (CUB 54535). Lorsqu’un prestataire est congédié à cause d’un problème de jeu, l’employeur disposera probablement de tous les faits et les éléments nécessaires pour appuyer sa décision. Encore une fois, ce n’est pas tant le problème de jeu en soi qui mène au congédiement puisque de nombreuses personnes jouent et que cela n’a aucune répercussion sur leur travail. C’est plutôt le résultat de cette dépendance au jeu, sur le milieu de travail, qui mène au congédiement qui doit considérer lorsque l’on rend une décision d’inconduite.

Comme dans tous les cas d’inconduite, la Commission doit examiner les explications avancées par le prestataire, pour les gestes qu’il a posés. À titre d’exemple, si le prestataire avait pour habitude de quitter plus tôt que prévu les lieux de son travail pour jouer, on aborderait cette situation de la même façon qu’on le ferait pour un autre employé qui s’absenterait du travail sans permission.

Certains aspects liés au manque de fiabilité et à l’inaptitude se retrouvent à la section traitant des manquements professionnels.

Dans chaque cas, les faits doivent appuyer la conclusion selon laquelle il s’agit d’un cas d’inconduite et que le prestataire aurait dû être au fait des répercussions qu’aurait son comportement sur son emploi (A-381-85, A-1342-92).

Comme c’est le cas de toute autre dépendance, le jeu ne doit pas servir d’excuse pour éviter de conclure qu’il y a eu inconduite. Il est fort probable qu’une personne qui perd son emploi en raison d’un comportement associé à une dépendance pourrait ne pas être admissible au bénéfice de prestations régulières d’AE (A-255-03).

7.3.4.4 Les manquements professionnels

De manière générale, on peut considérer qu’un contrat d’emploi est une entente conclue entre un employeur et un employé qui prévoit qu’en échange de services, celui-ci est payé et profite d’avantages sociaux. Il sous-entend le respect des règles de conduite convenues par les parties et reconnues en vertu des normes d’éthique professionnelle, du sens commun, de l’usage ou des coutumes.

De multiples actions ou omissions peuvent se voir attribuer le qualificatif d'inconduite dans le sens où ces agissements s'avèrent incompatibles avec les visées d'un contrat de travail, entrent en conflit d'intérêt avec les activités de l'employeur ou portent atteinte à la relation de confiance entre les parties. Il en est de même d'une violation de la loi, d'un règlement ou d'une règle de déontologie et qui fait en sorte qu'une condition essentielle de l'emploi cesse d'être satisfaite et entraîne le congédiement.

Il pourrait s'agir par exemple de dormir au travail, d'appels interurbains personnels aux frais de l'employeur, de l'utilisation non autorisée de matériel à des fins personnelles, de la falsification d'un compte de dépenses ou de feuilles de temps de travail, de la vente non autorisée d'articles appartenant à l’employeur ou encore le fait de prendre sans autorisation de l'argent de la caisse de l'employeur, même avec l'intention de le remettre plus tard (CUB 76342).

À moins que ce ne soit de façon délibérée ou par mauvaise volonté de se conformer aux règles de l’employeur ou des procédures (A-337-07, A-64-06), il n'y a pas inconduite du seul fait de l'incompétence, d'un rendement insatisfaisant ou de l'inaptitude à exercer certaines fonctions ou encore du fait d'une erreur attribuable à une grande pression au travail ou à l'inexpérience. Le fait que d’autres employés pourraient être coupables de la même faute d’inconduite et ne pas être congédiés n’est pas pertinent.

De plus, à moins qu’il n’y ait négligence ou malhonnêteté, une erreur de jugement dans les décisions ou les actions prises durant l’emploi peut ne pas constituer de l’inconduite.

Selon la nature du mensonge, une fausse déclaration faite au moment où la personne a sollicité l’emploi ne peut généralement pas permettre de conclure que la perte de l’emploi était imputable à une inconduite. La Commission va déterminer si le prestataire aurait dû normalement croire qu’une telle fausse déclaration, dans la mesure où elle serait découverte, entraînerait la perte de son emploi. Le simple fait de ne pas indiquer honnêtement où il vivait au moment où il a sollicité l’emploi n’a pas d’incidence sur son rendement au travail alors que le fait de déclarer, alors que tel n’est pas le cas, qu’il possède le diplôme universitaire requis ou que son dossier de conducteur ne comporte aucun point d’inaptitude constitue une inconduite dans la mesure où le prestataire savait qu’il s’agissait là de conditions obligatoires pour le poste. La même fausse déclaration concernant les infractions qui figurent au dossier du conducteur pourrait ne pas constituer une inconduite si le prestataire demandait à travailler comme caissier et ne pouvait s’attendre à ce que ses antécédents à titre de conducteur aient des répercussions sur sa capacité d’effectuer ce travail, alors que son objectif était tout simplement de donner une bonne impression à son employeur.

7.3.4.5 Mauvais usage des ressources de l’entreprise

Un employeur s’attend, dans une certaine mesure, à ce que les employés se conduisent correctement, dans leur milieu de travail. On s’attend des employés à ce qu’ils fassent preuve de bon jugement dans l’usage des ressources de l’entreprise. Tout usage personnel des ressources de l’entreprise ne doit pas entraîner d’importants coûts additionnels, perturber les processus administratifs, engendrer une perte de rendement ou causer quelque autre forme d’inconvénient que ce soit à l’employeur. L’usage des ressources de l’entreprise à des fins personnelles n’est acceptable que lorsqu’il a été spécifiquement autorisé par l’employeur.

Les employés peuvent, sans le savoir, mettre en péril la sécurité et l’intégrité de l’employeur, en faisant un usage impropre de l’équipement de l’entreprise. Pour conclure qu’il y a eu inconduite, il faut que le prestataire ait eu connaissance qu’il faisait un usage impropre de l’équipement ou des ressources et qu’il ait malgré tout décidé d’agir en ce sens.

Le mauvais usage des ressources de l’entreprise peut prendre diverses formes. Il pourrait s’agir de faire des appels téléphoniques interurbains non autorisés (CUB 40938, CUB 27984), de se servir de l’équipement de l’entreprise à des fins personnelles ou de produire des relevés de dépenses inexacts (CUB 68295, CUB 75036). Le fait d’accepter des cadeaux des clients ou des fournisseurs en échange de l’utilisation de leurs services ou de l’achat de leurs équipements ou produits constitue également un mauvais usage des ressources de l’entreprise.

7.3.4.5.1 Ordinateur, Internet et courriel

Au travail, les employés doivent utiliser l’équipement de l’employeur aux seules fins de l’exécution des tâches de l’entreprise. L’usage qui est fait de cet équipement ne doit pas contrecarrer les performances de l’entreprise, les tâches affectées à l’employé et ne doit pas avoir une incidence négative sur le rendement de l’employé.

Le système de courrier électronique ou de courriel de l’employeur ne doit pas servir à diffuser des messages à l’externe, à faire des envois de chaînes de lettre, à envoyer des messages de nature politique ou religieuse ou des messages dont la formulation ou le contenu serait obscène, injurieux ou autrement blessant (CUB 75946, CUB 71685). Les employés peuvent se servir du système de courrier électronique pour transmettre des messages à caractère syndical uniquement avec l’approbation de la direction.

L’équipement, tel que les ordinateurs et les machines à photocopier, est fourni uniquement aux fins de l’exécution des activités de l’entreprise. Il se peut que les frais exigés de l’entreprise varient avec le niveau d’utilisation de ces équipements. L’usage personnel d’un système ou du réseau d’une entreprise pour quelque fin qu’elle soit qui ne cadre pas avec les politiques et les procédures de l’entreprise peut constituer un motif de congédiement pour inconduite (CUB 70558). Si l’employé doit se servir de l’ordinateur pour exécuter des tâches à caractère personnel, il doit demander la permission de le faire à son employeur, avant d’agir. En outre, il ne doit se servir de cet équipement qu’en dehors de son horaire de travail.

7.3.4.5.2 Cartes de crédit

Plusieurs employeurs délivrent, à leurs employés, des cartes de crédit pour effectuer les activités quotidiennes.

La perte d’emploi en raison de l’usage impropre des cartes de crédit de l’entreprise peut constituer une inconduite. À titre d’exemple, on peut citer l’utilisation pour régler des dépenses personnelles, des comptes téléphoniques personnels incluant les services Internet, l’achat d’essence destiné à un véhicule personnel, des frais d’adhésion à une association professionnelle mais à titre personnel, le retrait d’espèces ou d’avances en espèces tiré des frais de déplacement lorsque le prestataire doit recevoir une indemnité quotidienne ou une avance spécifique pour son déplacement, mais qu’il utilise pour couvrir des dépenses personnelles.

On se référera au sens commun pour définir quels frais peuvent être légitimement réglés par carte de crédit. Si plusieurs entreprises sont dotées d’une politique écrite, des employeurs de moins grande envergure pourraient avoir une discussion concernant les usages de la carte de crédit qui sont approuvés. On ne considérera pas nécessairement que le fait qu’un prestataire se serve d’une carte de crédit pour régler, en toute bonne foi, des frais peu élevés (p. ex. des frais de nettoyage de ses vêtements, alors qu’il est en déplacement) constitue une cause de congédiement, malgré qu’il s’agisse indiscutablement d’une dépense à caractère personnel. Tous les détails de l’incident ayant mené au congédiement doivent être obtenus avant de déterminer qu’il y a eu inconduite.

7.3.4.6 Accusations et infractions criminelles

La jurisprudence a établi que lorsqu’une infraction criminelle constitue l’événement ayant mené à la rupture du lien d’emploi et que des accusations ont été déposées ou le seront, ceci ne suffit pas pour établir qu’il y a bel et bien inconduite (A-130-96, A-1342-92, A-517-91, A-42-13).

Dans les cas d’infraction criminelle, la recherche des faits pourrait s’avérer difficile lorsqu’il s’agit de rendre la décision.

La Commission n’a pas à attendre les résultats d’une enquête policière ou la décision des tribunaux avant de rendre une décision, tout comme elle n’est pas non plus tenue aux conclusions des services policiers ou des tribunaux.

Le fait que des accusations aient été portées, que le verdict ne soit pas prononcé ou qu'il y ait acquittement n'est pas nécessairement déterminant quant à la décision à rendre en matière d'inconduite. Il est fréquent dans ce type de causes que le délai soit important avant que les tribunaux procèdent à l'instruction. Aux fins de l'admissibilité aux prestations, on ne retardera pas la décision en de telles circonstances, à moins qu'il ne soit prévu que la cause soit entendue très prochainement.

La décision de la Commission repose sur l’information recueillie tant auprès du prestataire que de l’employeur. Une recherche raisonnable des faits pertinents sera effectuée; il n'est pas question toutefois de s'engager dans une enquête approfondie qui aurait pour but de démontrer hors de tout doute qu'une personne est coupable ou pas des infractions ou encore de mener un interrogatoire exhaustif. Ce rôle et ces fonctions n'appartiennent pas à la Commission, mais à la Couronne et aux tribunaux compétents en la matière.

Il convient, tant auprès du prestataire que de l’employeur :

  • de leur demander leur version de l’incident ayant mené au congédiement du prestataire;
  • de leur demander de décrire, de leur point de vue, les circonstances entourant l’incident ayant mené au congédiement, et préciser toute contradiction éventuelle;
  • de leur préciser que la décision de la Commission de verser des prestations ou non sera fondée sur l’information communiquée.

L'employeur peut montrer des réticences à divulguer les renseignements pertinents ou n'a en sa possession que peu de renseignements lorsque l'infraction est survenue hors du milieu de travail.

Ces renseignements concernant principalement les actions ou omissions d'une personne n'en demeurent pas moins essentiels aux fins de la prise de décision; pas plus qu’en cette matière qu'à l'égard d'autres genres d'infractions, l'on ne doit s'appuyer sur de vagues déclarations, des présomptions ou sur une hypothèse que l'employeur devait sûrement avoir de bonnes raisons pour la congédier.

Lorsque l’information s’avère insuffisante ou ambiguë, la décision sera rendue selon la prépondérance des probabilités, l’objectif étant de déterminer le scénario le plus vraisemblable, sur la foi de toute l’information digne de foi obtenue.

La décision de la Commission pourra être revue une fois que les tribunaux se seront prononcés, si le prestataire ou l’employeur demande que la décision soit réexaminée. Lorsque la Commission en sera venue à la conclusion qu’il « n’y avait pas d’inconduite », on tiendra compte des motifs avancés par les tribunaux pour justifier leur décision de culpabilité ou le plaidoyer en ce sens. Ces motifs pourront révéler de nouveaux faits qui n’auront pas été préalablement présentés à la Commission et qui pourraient résulter en la revue de la décision. Cependant, si la Commission disposait de l’ensemble des faits et si l’agent a, à l’origine, conclu qu’il n’y avait pas « d’inconduite », cette décision ne pourra tout simplement être modifiée du simple fait que le prestataire a été jugé coupable, sur la base de ces mêmes faits. Également, si l’on estime qu’il y a eu « inconduite » et que le prestataire est acquitté plutôt que d’être jugé coupable, on pourrait revoir la décision mais il n’y aura aucune obligation d’agir en ce sens.

Le retrait d'une accusation durant les procédures criminelles ne signifie souvent rien de plus que le fait que la Couronne ne possède pas suffisamment de preuves pour incriminer une personne hors de tout doute raisonnable. L'inconduite au sens de la Loi doit être établie selon la prépondérance de la preuve, ce qui s'avère beaucoup moins exigeant.

Le geste qui constitue une infraction ou un acte criminel et débouche sur une condamnation en vertu du Code criminel est une inconduite passible d'une exclusion au sens de la loi dans la mesure où il fait en sorte qu'une condition essentielle de l'emploi cesse d'être satisfaite et entraîne le congédiement.

Les prestataires qui sont incarcérés ou qui se voient imposer une sentence conditionnelle de détention à domicile (CUB 66756) et qui sont ultérieurement congédiés par l’employeur du fait qu’ils ne sont pas en mesure de fournir de services sont réputés avoir perdu leur emploi en raison de leur inconduite (A-1342-92).

Le fait d’avoir un casier judiciaire peut constituer un grave handicap pour les personnes qui souhaitent obtenir un emploi. En conséquence, il est relativement fréquent, pour les personnes concernées, de ne pas révéler qu’elles ont un tel casier, au moment de leur embauche. Si l’employeur apprend, ultérieurement, qu’existe un tel casier et qu’il décide de congédier l’employé uniquement pour cette raison, après examen, on pourrait considérer qu’il n’y a pas eu inconduite aux fins de l’AE.

7.3.5 Incarcération

Lorsqu’est en cause une incarcération et que l’agent ne sait pas précisément s’il convient d’envisager la situation dans le contexte de l’inconduite, du départ volontaire ou du congé autorisé, il convient de tenir compte des aspects suivants.

Si un employeur prend l’initiative de mettre fin au contrat d’un employé lorsque celui-ci se retrouve incarcéré du fait d’une conduite répréhensible, à cause de laquelle il n’est pas en mesure de se présenter au travail, la perte d’emploi qui en résulte est imputable à une inconduite. Le prestataire est seul responsable de la rupture du lien d’emploi puisque c’est du fait de ses propres actions qu’il n’est plus en mesure de se présenter au travail (A-338-03).

Si le prestataire cesse de se présenter au travail du fait d’une incarcération et que l’employeur ne prend aucune initiative, la perte d’emploi qui en résulte éventuellement est imputable à un départ volontaire non fondé. L’emprisonnement résulte de gestes délibérés posés par le prestataire, en conséquence de quoi celui-ci n’est plus en mesure de se présenter au travail. Cette situation ne constitue pas pour autant une justification de la perte de l’emploi.

Lorsque le prestataire cesse de se présenter au travail du fait d’une incarcération et qu’il prend, avec son employeur, des dispositions pour se retrouver en congé autorisé durant la période de son incarcération, il convient de traiter le dossier comme on le ferait de tout dossier de congé autorisé donnant lieu à l’imposition de l’inadmissibilité appropriée.

7.3.6 Perte du permis de conduire

Dans les situations où le permis de conduire d’un employé appelé à se servir d’un véhicule automobile dans le cadre de ses fonctions est suspendu du fait d’accusations de conduite en état d’ébriété, en vertu du Code criminel du Canada, l’employé ne peut plus s’acquitter de ses responsabilités professionnelles. Si l’employeur n’a d’autre affectation à lui confier, il n’aura d’autre choix que de le congédier. On est alors en présence d’un cas d’inconduite puisque le prestataire savait pertinemment qu’il avait besoin d’un permis de conduire pour faire son travail. Dans une telle situation, il serait considéré que:

  • la décision de conduire en état d’ébriété présentait un caractère délibéré;
  • la décision de conduire, sachant que ce faisant on pourrait contrevenir aux dispositions de la Loi était délibérée ou dangereuse au point de présenter un caractère volontaire;
  • l’inconduite a mené à la perte du permis de conduire;
  • en perdant son permis de conduire, l’employé a contrevenu à une obligation explicite de son contrat de travail;
  • cette rupture a mené à la perte de l’emploi;
  • il existe un lien de cause à effet entre l’inconduite et le congédiement.

C’est bel et bien le geste (c.-à-d. le fait de conduire en état d’ébriété, conduite dangereuse) qui constitue l’inconduite et non le fait que la personne concernée ait été reconnue coupable d’une infraction reliée à la conduite.

La Commission peut s’acquitter du fardeau de la preuve en fournissant les éléments probants appropriés. Il ne suffit pas cependant de démontrer que le permis de conduire de la personne en question était suspendu. Cette situation doit s’appuyer sur les dispositions pertinentes des lois provinciales ou territoriales. Les éléments de preuve recueillis devraient démontrer (A-444-02) que :

  • le prestataire a commis des actes qui constituent une infraction en vertu d’une loi provinciale ou territoriale;
  • les conditions de la suspension du permis de conduire étaient remplies, les actes commis constituant donc une inconduite;
  • le prestataire a perdu son permis du fait de l’inconduite (conduire en état d’ébriété, etc.);
  • le prestataire ne peut plus respecter une condition essentielle de son emploi puisqu’il n’est plus détenteur d’un permis de conduire valide;
  • ces faits ont mené à la perte de l’emploi.

Une copie des dispositions pertinentes du code de la route concernant la suspension du permis de conduire doit être jointe au dossier, en même temps qu’une copie de l’avis de suspension ou d’un relevé de l’action en justice. Le prestataire est en mesure de fournir ces éléments d’information du fait qu’en vertu des dispositions législatives provinciales, les services policiers sont tenus de remettre un document approprié au conducteur au moment de la suspension de son permis. Si le prestataire refuse de fournir l’information demandée du fait qu’il estime que ce geste pourrait lui porter préjudice, l’agent peut infliger une inadmissibilité pour avoir omis de fournir l’information demandée par la Commission.

Si une personne perd son permis de conduire pour avoir conduit en état d’ébriété, la perte du permis résulte de l’infraction commise (A-444-02, A-126-03).

Si une personne perd son permis de conduire pour avoir omis de payer ses contraventions, la perte du permis de conduire ne résulte pas de l’infraction ayant donné lieu aux contraventions mais plutôt de la situation de non-conformité dans laquelle s’est placée cette personne. Le fait d’omettre de régler ses contraventions et tout particulièrement l’accumulation de contraventions non réglées ou l’omission de se conformer à une ordonnance du tribunal témoigne du caractère délibéré, dangereux ou négligent du prestataire. La perte de l’emploi est imputable au fait que la situation de l’employé ne lui permet désormais plus de respecter les conditions du contrat d’emploi (A-720-01, A-72-04).

Si une personne perd son permis de conduire pour avoir négligé de payer sa pension alimentaire, la perte du permis ne résulte pas d’une infraction mais plutôt du non-respect d’une ordonnance d’un tribunal (A-666-02, A-78-04).

Si la perte du permis est imputable au non-respect d’une ordonnance de la cour, une personne peut démontrer qu’elle était fondée à agir en ce sens en établissant qu’elle a eu recours à tous les mécanismes d’aide qui étaient à sa portée, qu’elle n’a fait preuve ni de négligence ni de comportement dangereux à l’égard de ses obligations et qu’elle n’a pas défié les autorités judiciaires. Tous les facteurs doivent être considérés avant de déterminer s’il y a inconduite.

Dans certaines situations, un employeur peut décider de suspendre un employé pour la perte de son permis de conduire afin de lui permettre de disposer du temps nécessaire pour se renseigner quant à la marche à suivre pour le réacquérir. Au moment de la suspension, selon les faits au dossier, on pourrait en venir à une conclusion de suspension pour inconduite. Si tel est le cas, une inadmissibilité est imposée.

Si l’employé est congédié par l’employeur en raison de la perte de son permis de conduire après avoir retrouvé son permis et avoir effectué un retour au travail, on ne peut conclure à de l’inconduite (A-90-07). Tel qu’indiqué précédemment, la Commission ne peut conclure à de l’inconduite si l’employeur a, au départ imposé une sanction moins sévère pour ensuite décider de procéder au congédiement de l’employé pour la même infraction.

La Commission devra recueillir, du prestataire, des renseignements sur les raisons pour lesquelles il a omis de se conformer à l’ordonnance du tribunal et quelles solutions de rechange s’offraient à lui. Des mesures d’aide étaient-elles offertes aux personnes qui ne pouvaient régler une amende ou s’acquitter d’une obligation en raison de difficultés financières? Si le prestataire fait état de difficultés financières pour justifier le non-respect des obligations auxquelles il était tenu, la recherche des faits doit non seulement porter sur la situation financière de celui-ci, mais aussi sur les mesures ou dispositions qu’aurait pu prendre ou qu’a pris le prestataire afin d’obtenir plus de temps pour effectuer le paiement, empêchant ainsi la perte du permis de conduire. Si le prestataire avait pu conclure une entente ou prendre des dispositions, sa situation financière seule ne pourra servir à faire la preuve qu’il y a eu inconduite (A-72-04).

7.3.7 Les activités syndicales non licites

Les diverses législations du travail consacrent le droit pour toute personne d'appartenir à une association, organisation ou syndicat de travailleurs ou de travailleuses de son choix et de participer à leur formation, à leurs activités licites et à leur administration. La perte d'emploi liée à l'exercice de ce droit n’est pas assimilée à de l'inconduite.

Les activités licites correspondent généralement aux activités permises par les différentes lois provinciales ou fédérales dans le domaine des relations de travail ou par l'existence d'une entente à ce sujet entre employeur et syndicat dans le cadre d'une convention collective ou d'un contrat de travail.

Le fait d'être représentante syndicale ne libère pas une personne de ses obligations d'employée; elle n'en doit pas moins, comme toutes les autres, se conformer aux directives de l'employeur en ce qui concerne la réalisation du travail (A-683-86).

Il est relativement fréquent qu'une personne attribue un congédiement au fait de son appartenance ou de ses activités syndicales, particulièrement en période de formation d'une première unité syndicale ou de conflit collectif de travail. S'il ne s'agissait pas là d'une activité illicite, il y a fort à parier que l'employeur a invoqué un motif différent pour expliquer le renvoi (CUB 76348).

La recherche des faits en ces cas se heurte à des versions possiblement contradictoires et la crédibilité des déclarations n'est pas chose facile à établir. L'on devra s'assurer qu'il y a en l'occurrence une relation causale entre l'inconduite et le congédiement. Si l'inconduite ne serve que de simple excuse ou de prétexte pour le renvoi pour une autre raison, aucune exclusion ne sera imposée. L’inconduite doit être la cause de la perte d'emploi afin de mener à une exclusion.

Il faut se rappeler enfin que la participation à une grève illégale constitue de l'inconduite pour le prestataire impliqué, même si les faits et gestes d'une personne impliquent plusieurs employés; il n'en reste pas moins que l'inconduite dont chacune se rend coupable demeure sa propre inconduite aux fins du texte de loi.

[ Août 2023 ]

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