Rapport final du Conseil consultatif sur l'action pour le climat : section 3

L’Environnement bâti

Contexte

Le parc immobilier du Canada est diversifié. Il n’existe pas d’approche unique pour la réduction des émissions provenant des habitations unifamiliales, des immeubles résidentiels à logements multiples et des immeubles commerciaux et institutionnels construits selon des normes en constante évolution depuis de nombreuses décennies et adaptés aux différents climats et conditions climatiques à travers le pays.

L’une des meilleures solutions à long terme pour créer un secteur de la construction à faibles émissions de carbone consiste à s’assurer que les nouveaux bâtiments sont construits selon des normes élevées. Les codes de construction ambitieux sont le principal outil politique pour y parvenir. Conformément aux dispositions du Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques, le gouvernement fédéral élabore actuellement une série de nouveaux codes modèles pour le bâtiment, dans le but de créer un système « prêt à la consommation énergétique nette zéro »Footnote 3  qui sera prêt à être adopté par les provinces et les territoires d’ici 2030. Bien que le gouvernement fédéral puisse fournir de l’information, des outils et un soutien (codes de construction modèles et financement pour la recherche et le développement, par exemple), l’adaptation et l’adoption des codes du bâtiment sont de compétence provinciale ou territoriale. Une analyse récente du Conseil du bâtiment durable du Canada montre qu’il est possible et économique de construire maintenant des bâtiments à zéro carbone, en se basant sur un cycle de vie utile de 25 ans. Il y a tout lieu de veiller à ce que les nouveaux bâtiments soient conformes aux objectifs à long terme du Canada en matière de changements climatiques, afin d’éviter des rénovations coûteuses à l’avenir.

Le code Energy Step de la Colombie-Britannique définit des objectifs de rendement pour les nouvelles constructions qui sont plus ambitieux que le code du bâtiment actuel. Les collectivités locales peuvent choisir d’exiger ou d’encourager une mesure donnée. D’ici 2032, le code du bâtiment de la Colombie-Britannique passera au minimum aux étapes supérieures du code de l’énergie de la Colombie-Britannique. Cette approche permettra à l’industrie du bâtiment d’améliorer progressivement son rendement au fil du temps, à mesure que les nouvelles techniques et technologies deviennent plus accessibles et rentables.

Les bâtiments qui existent aujourd’hui représenteront environ 75 % du parc immobilier du Canada en 2030. Cela signifie que la modernisation effectuée pour rendre les bâtiments existants plus efficaces et plus résistants devra figurer au cœur de toute stratégie de transition vers un secteur du bâtiment à faible émission de carbone. Moins de 10 % des bâtiments du Canada sont en rénovation au cours d’une année donnée, et les rénovations qui permettent de réaliser d’importantes économies d’énergie ne visent qu’environ 1 % de la surface de plancher des bâtiments canadiens par année. Une étude récente de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) a révélé que les bâtiments représentent le plus grand potentiel inexploité en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, au-delà de tout autre secteur au Canada, y compris ceux des transports et de l’industrie. Les travaux de rénovation de bâtiments produisent des avantages économiques et environnementaux évidents, dans la mesure où ils contribuent à la création d’emplois et à la réduction des dépenses en énergie. Une étude réalisée par Dunsky Energy Consulting pour Énergie propre Canada a révélé que la mise en œuvre de toutes les mesures d'efficacité énergétique du Cadre pancanadien créerait 118 000 emplois et augmenterait le PIB de 1 %, en grande partie grâce aux économies réalisées par les ménages et les entreprises sur leur facture énergétique.

Si l’amélioration de l’efficacité énergétique présente des avantages aussi évidents, pourquoi le taux de participation est-il si faible? Nos recommandations dans les sections qui suivent portent sur les moyens à prendre pour favoriser le marché de la modernisation des bâtiments, notamment grâce à une meilleure information et à des mesures de soutien ciblées. Dans certains cas, notamment dans le secteur résidentiel, plusieurs technologies et techniques de construction nécessitent encore des investissements initiaux et s’accompagnent d’échéances d’amortissement sous forme d’économies d’énergie par rapport aux économies souhaitables pour la plupart des propriétaires de bâtiments. Cependant, il existe de nombreuses possibilités, notamment dans les grands bâtiments, où les investissements dans l’efficacité énergétique pourraient être amortis en quelques années et générer des économies continues tout au long de la vie du bâtiment.

L’une des principales façons d’obtenir des économies d’énergie consiste à communiquer l’information pertinente aux destinataires appropriés. Par exemple, les prêteurs et les institutions financières doivent pouvoir compter sur les renseignements concernant les économies d’énergie prévues, afin d’apprécier avec justesse les possibilités et de structurer adéquatement les produits financiers. De même, les propriétaires d’immeubles doivent évaluer le rendement des investissements dans l’efficacité énergétique afin de les comparer à d’autres investissements possibles, et avoir l’assurance que leurs investissements donneront un rendement dans les délais prévus. Avoir accès à de l’information de qualité est également une première étape pour trouver des solutions aux obstacles structurels du secteur de la construction, comme les incitatifs fractionnés, par exemple lorsqu’un locataire paie les frais de services publics alors que le propriétaire est responsable des investissements en capital qui influencent ces frais.

L’information et les outils sont les principaux leviers dont dispose le gouvernement fédéral dans le secteur de l’environnement bâti. Il est impératif que le gouvernement fédéral élargisse ses engagements actuels afin de donner l’exemple, notamment en modernisant les immeubles qu’il possède ou loue. Dans certains domaines, un soutien financier et des investissements de la part du gouvernement fédéral pourraient s’avérer nécessaires pour encourager le développement des marchés et réduire les risques. Ces marchés devront toutefois être ciblés avec soin afin d’assurer qu’ils encouragent plutôt les investissements du secteur privé au lieu de les repousser.

Information

Une information claire et crédible est un passage obligé pour justifier les investissements dans l’efficacité énergétique. La première étape consiste à connaître la quantité d’énergie utilisée par un bâtiment et à en comprendre les raisons afin de concevoir des mesures qui permettront de réduire la consommation d’énergie et de faire le suivi de l’efficacité de ces mesures au fil du temps. Les coûts d’exploitation, notamment la consommation d’énergie, sont également des considérations pertinentes dans les décisions de vente et de location.

L’analyse comparative énergétique est l’examen et la comparaison continus de la consommation d’énergie d’un bâtiment afin de déterminer son niveau de rendement.

Une étiquette énergétique indique le rendement d’un bâtiment par rapport à d’autres bâtiments similaires. Les étiquettes sont basées sur un processus d’évaluation normalisé, comme la cote ENERGY STAR.

La divulgation comprend la communication du rendement énergétique aux gouvernements ou au public.

Fournir de l’information aux propriétaires d’immeubles, aux locataires et au public est un moyen efficace et éprouvé qui peut aider à réduire la consommation d’énergie, orienter les données requises pour les transactions immobilières et contribuer à l’élaboration de politiques et de mesures de soutien bien conçues.

Analyse comparative, étiquetage et divulgation : exemples d’autres administrations

L’Union européenne a imposé pour la première fois en 2002 des exigences d’étiquetage pour les grands bâtiments publics et a étendu et renforcé cette politique au fil du temps. Bien que certains aspects de conception des certificats de performance énergétique des bâtiments (PEB) soient laissés à l’appréciation des États membres, des exigences générales visent à fournir aux acheteurs ou aux locataires potentiels des renseignements sur le rendement énergétique d’un bâtiment et à inclure des recommandations concernant les améliorations pouvant être apportées à un coût raisonnable. Jusqu’à présent, les évaluations ont généralement révélé que les certificats PEB s’avèrent efficaces pour encourager les consommateurs à acheter ou à louer des bâtiments plus écoénergétiques. Certaines administrations ont adopté des exigences plus strictes. Par exemple, une cote minimale de rendement énergétique est maintenant exigée avant de pouvoir louer ou vendre une propriété au Royaume-Uni.

La ville de New York exige la conduite d’une analyse comparative pour les grands bâtiments depuis 2009, et a étendu cette exigence aux bâtiments de taille moyenne en 2016. Ces bâtiments doivent afficher les scores d’efficacité énergétique aux entrées accessibles au public. Entre 2010 et 2015, 4 229 bâtiments régulièrement évalués ont réduit leur consommation d’énergie de plus de 10 % et leurs émissions totales de gaz à effet de serre de près de 14 %. Ces programmes sont appuyés par des ressources de sensibilisation et de formation et par une entité de financement afin d’aider les propriétaires de bâtiments à se conformer. L’information est mise à la disposition du public grâce à la New York City Energy and Water Performance Map et aux rapports de divulgation des données publiés sur le site Web de l’administration de la ville de New York.

L’État de Washington a adopté en 2009 le projet de loi sénatorial « Efficiency First » (SB  854). Cette loi exigeait que les grands bâtiments publics fassent l’objet d’une évaluation comparative et d’une évaluation du rendement énergétique, et qu’ils divulguent ces renseignements. Les services publics sont également tenus de recueillir et de tenir à jour annuellement des données sur la consommation d’énergie de ces bâtiments et de les rendre accessibles au public sur le site Web Energy Star Portfolio Manager de l’Environmental Protection Agency. En 2018, l’État de Washington a évalué 99 % des organismes publics et 74 % des immeubles appartenant à l’État ou loués par lui, y compris les universités et les collèges communautaires. Le projet de loi 5854 du Sénat a également entraîné la création d’environ 3 800 nouveaux emplois dans cet État.

À la fin de 2016, les signataires du Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques se sont engagés à ce que les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux collaborent dans le but d’imposer l’étiquetage de la consommation d’énergie des bâtiments dès 2019. Ressources naturelles Canada collabore avec les provinces et les territoires pour mettre au point un mécanisme opérationnel d’évaluation énergétique et de communication de rapports au public pour les bâtiments canadiens. Ces rapports seront accessibles dans une base de données publique nationale.

Une évaluation de l’expérience de l’Union européenne en matière d’étiquetage des bâtiments a mis en évidence le manque d’uniformité entre les méthodes et relativement à la présentation de l’information, ce qui complique la comparaison du rendement des bâtiments d’un pays à l’autre. Cela souligne l’importance des investissements fédéraux dans les outils que les provinces et les territoires peuvent adapter facilement et de manière rentable, afin de fournir de l’information cohérente à l’échelle nationale sur le rendement des bâtiments.

De façon plus générale, la limitation de la charge administrative est un élément important à prendre en compte lors de la conception des règles d’étiquetage des bâtiments. Les méthodes normalisées constituent une forme de soutien à cette fin. Ce soutien pourrait être complété par des efforts de collaboration accrus avec les services publics concernant la communication des données. Dans sa dernière mise à jour de la directive sur le rendement énergétique des bâtiments, l’Union européenne a également pris acte du potentiel croissant de l’automatisation des bâtiments et de la surveillance électronique des systèmes techniques de bâtiments pour remplacer efficacement les inspections de vérification et de suivi du rendement des bâtiments.

Bien que la plupart des exigences directes en matière d’étiquetage des bâtiments ne relèvent pas de la compétence fédérale, le gouvernement du Canada pourrait faire preuve de leadership en s’engageant à divulguer publiquement les cotes attribuées aux bâtiments qu’il possède ou loue. L’étiquetage des bâtiments pourrait s’ajouter à d’autres initiatives de transparence sur l’impact environnemental des activités du gouvernement, notamment la déclaration de l’inventaire de GES du gouvernement du Canada.

Recommandations :

  • Le gouvernement du Canada devrait veiller à ce que les provinces et les territoires disposent d’outils à l’appui de l’étiquetage normalisé des bâtiments, et à ce que ces outils soient maintenus à jour.
  • Le gouvernement du Canada devrait donner l’exemple et divulguer publiquement les cotes de consommation d’énergie de tous les immeubles fédéraux.

Démonstration

La diffusion au public d’information sur l’efficacité énergétique des bâtiments que le gouvernement fédéral possède ou occupe est certes une bonne première étape, mais le gouvernement pourrait contribuer plus concrètement à stimuler la demande du marché des rénovations par le biais de projets de démonstration de ses actifs. Le gouvernement fédéral s’est fixé pour objectif de réduire les émissions de GES de ses installations et de ses parcs de véhicules de 40 % d’ici 2030 (ou avant) et de 80 % d’ici 2050 par rapport aux niveaux de 2005. Le gouvernement fédéral avance vers la réalisation de ces objectifs, mais il serait possible d’accélérer les mesures et d’améliorer les effets de démonstration de ces activités.

La modernisation des actifs gouvernementaux offre un potentiel considérable en ce qui concerne l’effet de démonstration du marché, compte tenu de l’envergure et de la variété de ces actifs. Le gouvernement du Canada possède un vaste portefeuille de biens immobiliers, qui comprend des immeubles à bureaux et des entrepôts, des laboratoires, des établissements correctionnels et des hangars d’aviation sur les bases militaires. La seule propriété du ministère de la Défense nationale représente environ 2,2 millions d’hectares de terres et 20 000 bâtiments. Le portefeuille de bâtiments commerciaux, institutionnels et résidentiels de l’ensemble du Canada qui appartiennent au gouvernement fédéral ou lui sont loués lui offre une ample possibilité de démontrer l’efficacité des différents types de projets de rénovation dans diverses conditions. Le gouvernement du Canada devrait chercher des partenaires pour mener à bien ces projets, à la fois pour démontrer de nouveaux modèles de réalisation et de financement de rénovations en profondeur et pour veiller à ce que les résultats puissent être reproduits sur le marché.

L’État de Washington fournit un exemple d’administration dont les politiques avant-gardistes permettent de traduire l’information obtenue grâce à l’analyse comparative en leadership et en démonstration. En 2012, l’État de Washington a promulgué le décret exécutif 12-06, qui imposait des exigences en matière d’analyse comparative des bâtiments appartenant aux organismes publics afin de cerner les bâtiments ayant une consommation d’énergie supérieure à la moyenne. Ces bâtiments sont alors soumis à un protocole de vérification et d’amélioration. Ces mesures ont ensuite été renforcées par l’ajout d’exigences imposées à un groupe de ministères du gouvernement de l’État d’évaluer les progrès accomplis et de formuler des recommandations pour améliorer l’efficacité des bâtiments publics, en utilisant une analyse comparative pour déterminer les bâtiments inefficaces. Le gouvernement du Canada pourrait s’inspirer de ces pratiques exemplaires pour déterminer et hiérarchiser les améliorations apportées aux bâtiments à rendement inférieur à la moyenne qu’il possède ou occupe.

La transparence et la communication efficace des résultats devraient être des priorités clés afin de maximiser les effets de démonstration des investissements engagés dans la modernisation des actifs du fédéral. Conformément à son engagement plus général en faveur de données ouvertes et transparentes, le gouvernement du Canada pourrait fournir de l’information de source ouverte afin de partager son expérience de la modernisation de ses actifs. La base de données pourrait être élaborée en consultation avec les institutions financières et d’autres parties prenantes afin de garantir qu’elle inclue les données les plus pertinentes pour leurs intérêts et leurs besoins. Cela permettrait de fournir de l’information supplémentaire au marché et aux prêteurs, en particulier dans la mesure où le rendement lié à ces améliorations est surveillé et validé dans le temps. Bien que la norme applicable aux rénovations des biens du fédéral devrait être élevée, elle devrait également être accessible et reproductible par d’autres propriétaires de bâtiments. Par exemple, le gouvernement du Canada pourrait s’engager à atteindre un rendement énergétique net zéro ou un rendement carbone zéro dans ses projets de rénovation et s’engager à documenter les économies sur le cycle de vie. Un suivi attentif et des efforts actifs pour communiquer les réussites et les leçons apprises contribueraient à faire en sorte que ces projets soient reproductibles et fournissent des renseignements utiles aux participants du marché en général.

Des ressources supplémentaires seront nécessaires pour rénover les bâtiments appartenant au gouvernement fédéral et pour tirer parti des améliorations d’efficacité dans les espaces loués par le gouvernement fédéral, le cas échéant. L’affectation de ce budget devrait tenir compte à la fois des économies d’énergie directes réalisées par le gouvernement et des avantages de la démonstration pour le marché en général.

Recommandation :

  • Le gouvernement du Canada devrait accélérer la modernisation en profondeur de ses actifs et communiquer les résultats de ces projets, notamment au moyen d’une base de données ouverte contenant des renseignements sur le rendement des projets.

Normalisation et regroupement

Le gouvernement du Canada pourrait également jouer un rôle dans la création et la diffusion d’outils normalisant les meilleures pratiques pour la rénovation de bâtiments et dans le regroupement de plus petits projets afin que les investissements soient à leur échelle.

Par exemple, le Investor Confidence Project fournit une norme mondiale qui intègre les meilleures pratiques et une vérification indépendante pour renforcer la confiance à l’égard de la fiabilité des économies d’énergie, réduire le coût des transactions et atténuer les risques encourus par les investisseurs.

Le gouvernement du Canada pourrait adopter cette norme, ou un protocole similaire, pour les activités de modernisation dans le cadre de ses propres activités, et collaborer avec d’autres intervenants pour favoriser plus activement une approche cohérente en matière de normalisation. La Banque de l’infrastructure du Canada (BIC) pourrait, par exemple, collaborer avec les institutions financières pour établir une norme de souscription et une certification reconnues afin d’élaborer et de mesurer l’efficacité énergétique et la réduction des émissions de carbone dans les rénovations. L’adoption de cette norme pourrait être encouragée par des mécanismes financiers à la disposition de la BIC et d’autres institutions fédérales, par exemple en permettant aux projets qui satisfont à cette norme d’avoir un accès privilégié à des outils de rehaussement de crédits ou à des capitaux à moindre coût.

La certification IREE (Investor Ready Energy EfficiencyTM) du Investor Confidence Project est une marque de qualité, tout comme Leadership in Energy and Environmental Design (LEED), mais pour les rénovations. Elle atteste qu’un projet a été planifié et exécuté selon des normes acceptables. Des efforts sont en cours au Canada pour mettre à l’essai cette certification.

Le gouvernement fédéral pourrait aussi avoir un rôle à jouer en fournissant des outils normalisés de mesure et de vérification, comme la modélisation des résultats de la réduction des émissions de carbone des projets de rénovation. Dans le cas des petits projets, en particulier, certains promoteurs n’ont pas la capacité de mesurer de façon fiable et uniforme les résultats attendus et réels en matière de rendement. Ce manque d’uniformité limite la comparabilité des projets, ce qui constitue un obstacle à la quantification et à l’évaluation des résultats des projets et au regroupement des projets en vue d’investissements à l’échelle.

Les projets qui suivent des approches normalisées et des pratiques exemplaires produisent des résultats plus fiables qui renforcent la confiance des investisseurs. Cela permet également de regrouper des projets de plus petite taille afin de générer des occasions d’investissement suffisamment importantes pour attirer des investisseurs institutionnels. Le gouvernement du Canada, par l’entremise de la Banque de l’infrastructure du Canada ou d’une autre institution, pourrait jouer un rôle dans le regroupement de projets de plus petite taille et servir d’intermédiaire pour fournir un degré de validation et d’assurance que les projets permettront de réaliser les économies prévues. Des séries de projets locaux pourraient être générées par des services publics ou d’autres entités (par exemple, l’Atmospheric Fund dispose d’un portefeuille de projets d’une valeur d’environ 12 millions $).

Il y a actuellement une conjoncture favorable, alors que la Banque de l’infrastructure du Canada est opérationnelle, pour s’assurer que cette nouvelle institution est pleinement engagée sur le marché de la modernisation des bâtiments. Nous encourageons le gouvernement du Canada à veiller à ce que la Banque de l’infrastructure du Canada dispose des outils, du mandat et de l’orientation nécessaires pour s’occuper de regrouper les projets et de servir de centre d’expertise.

Recommandation :

  • Le gouvernement du Canada devrait s’assurer que des outils et des approches normalisés pour mesurer le rendement prévu et réel des projets de rénovation sont accessibles au plus grand nombre. La Banque de l’infrastructure du Canada devrait être dotée de l’expertise nécessaire pour diffuser ces pratiques exemplaires et pour construire et regrouper les séries de projets locaux de modernisation.

Mesures incitatives ciblées

Le pouvoir d’achat du gouvernement devrait être utilisé judicieusement, mais il peut être justifié pour catalyser certains segments du marché du réaménagement énergétique. Il devrait y avoir un lien clair entre les mesures incitatives offertes et les objectifs généraux de développement du marché. Des mesures de soutien devraient être proportionnelles aux besoins.

Jusqu’à présent, certains programmes incitatifs ont mis l’accent sur des mesures de rénovation relativement peu exigeantes et peu coûteuses qui génèrent rapidement des économies d’énergie (p. ex. l’installation d’un éclairage plus efficace). Les rénovations majeures qui génèrent des économies d’énergie plus importantes constituent généralement un ensemble de mesures plus complexes, dont certaines prennent plus de temps que d’autres pour récupérer l’investissement initial. Si les mesures de récupération rapides et moins coûteuses ont déjà fait l’objet de mesures incitatives, les propriétaires pourraient hésiter à investir dans des rénovations complètes qui permettront de réaliser des économies d’énergie plus importantes à long terme. Cela peut pousser involontairement les propriétaires vers des rénovations superficielles et moins coûteuses qui génèrent moins d’économies d’énergie.

Dans le secteur résidentiel, les coûts initiaux demeurent un obstacle à l’amélioration de l’efficacité énergétique. Bien que le gouvernement du Canada ait investi dans l’efficacité énergétique résidentielle, plus récemment, par l’entremise du financement accordé à la Fédération canadienne des municipalités dans le budget de 2019, des efforts supplémentaires pourraient être nécessaires. Par exemple, la Société canadienne d’hypothèques et de logement pourrait élaborer des outils comme un cadre de sélection des risques pour des prêts de rénovation ou des garanties de prêts pour des programmes locaux qui permettraient à des propriétaires de rembourser les coûts initiaux d’améliorations énergétiques au fil du temps grâce à des économies d’énergie.

Le budget de 2019 a prévu 1,01 milliard $ à la Fédération canadienne des municipalités pour accroître l’efficacité énergétique dans les immeubles résidentiels, commerciaux et à logements multiples. Cet investissement appuiera des programmes dans trois domaines principaux :

  • L’Innovation en matière de logement abordable et durable pour des logements abordables neufs et existants
  • L’Accélération de l’écoefficacité des communautés, qui s’appuiera sur le succès d’initiatives comme Solar Cities de Halifax et donnera accès à du financement municipal pour des projets de rénovation énergétique résidentiels, notamment par l’utilisation du modèle Property Assessed Clean Energy (PACE) qui permet à des propriétaires de rembourser les coûts de rénovation par leurs impôts fonciers.
  • La Collaboration sur l’action communautaire en matière de lutte contre les changements climatiques, qui appuiera des projets pilotes et des projets de démonstration communautaires dans des municipalités partout au Canada. Dans sept (7) grands centres urbains, ce travail sera effectué par des réseaux établis grâce à l’initiative Ligue des communautés canadiennes sobre en carbone (L3C)

Dans les immeubles commerciaux de catégorie A – des immeubles plus récents et bien situés, gérés par des professionnels et dont les loyers sont les plus élevés – des outils d’information peuvent être suffisants pour accélérer le rythme des rénovations. Si des signaux plus puissants s’avèrent nécessaires, ces propriétaires sont généralement bien placés pour se conformer à une réglementation plus stricte. Bien que l’accès au capital ne soit généralement pas un obstacle principal pour les immeubles de catégorie A, il peut être difficile pour les immeubles de catégorie B ou de catégorie C, qui sont généralement plus vieux, non gérés par des professionnels et situés à l’extérieur des zones immobilières de choix. Une compréhension des circonstances particulières et des besoins locaux devrait être au cœur du soutien financier du gouvernement fédéral.

Le gouvernement fédéral devrait également examiner comment des mesures de soutien ciblées peuvent être utilisées pour promouvoir des objectifs plus larges visant à renforcer la confiance du marché grâce à des données transparentes et de grande qualité. Ainsi, des mesures incitatives financières pourraient être liées à des résultats de rendement vérifiables. En vertu d’une politique de déduction pour amortissement accéléré en vigueur depuis plus d’une décennie aux États-Unis, il fallait que les économies d’énergie produisent des résultats fondés sur le rendement pour être admissibles à des avantages fiscaux. Cette mesure serait plus efficace si elle était mise en place pour une période continue de plusieurs années, afin d’accorder suffisamment de temps pour planifier, exécuter et mesurer les résultats des projets. Des mesures de renforcement des capacités, comme une aide à l’embauche de gestionnaires de l’énergie ou la réalisation de vérifications énergétiques, pourraient également contribuer à promouvoir la compréhension de l’énergie et à établir l’analyse de rentabilisation des investissements dans les rénovations.

Enfin, il y a des domaines où des investissements dans la recherche, le développement et la démonstration ont plus d’impact que des mesures incitatives directes. Cela est particulièrement vrai lorsque des investissements dans la recherche peuvent se traduire de manière cohérente par des projets de démonstration qui justifient le relèvement du niveau d’ambition des normes réglementaires.

L’Atmospheric Fund a réalisé une série de projets de démonstration pour tester le rendement des chaudières dans des immeubles résidentiels à logements multiples et a été en mesure de démontrer, à partir des données recueillies, qu’une plus grande efficacité était à la fois possible et économique. Ces éléments probants ont contribué à l’élaboration de normes minimales de rendement énergétique plus rigoureuses.

Recommandation :

  • Le gouvernement du Canada devrait envisager de mettre en place une mesure incitative fondée sur le rendement pour des activités de rénovation, sous la forme d’une déduction pour amortissement accéléré, semblable à celle offerte aux États-Unis.
  • D’après une évaluation des besoins, le gouvernement du Canada devrait accroître les investissements dans des activités de renforcement des capacités, notamment pour promouvoir la compréhension de l’énergie et la démonstration technologique.

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