3. Contexte
Les BPC n'ont jamais été fabriqués au Canada; ils ont plutôt été importés des États-Unis depuis les années 1930, et étaient couramment utilisés dans l'équipement électrique et de nombreux autres produits jusqu'à la fin des années 1970, lorsque des recherches ont révélé un lien entre les BPC et le cancer, des problèmes de reproduction, des difformités à la naissance et d'autres problèmes de santé chez de nombreux animaux. On pensait alors (toutefois sans preuve tangible) que la gestion inadéquate des BPC pourrait entraîner des conséquences importantes sur la santé humaine, notamment par le cancer et les dysfonctions du système immunitaire.
L'utilisation des BPC à des fins commerciales et dans la fabrication et le traitement des produits a été réglementée en 1977 par le Règlement sur les biphényles chlorés, qui a à toutes fins pratiques mis un terme à la fabrication et à l'importation de produits contenant des BPC et au remplissage d'équipement existant avec des fluides contenant des BPC. À la fin des années 1980, des lois et des ententes formelles régissant la gestion des BPC étaient en place. Sous ce régime, les matériaux contenant des BPC étaient réglementés si les concentrations de BPC dépassaient 50 mg par kg (c'est-à-dire 50 parties par million ou ppm). Ce cadre juridique et réglementaire a notamment comporté le Règlement et la Loi sur le transport des marchandises dangereuses, l'Accord entre le Canada et les États-Unis concernant les déplacements transfrontaliers de déchets dangereux, le Règlement sur l'entreposage de déchets contenant des BPC, établi en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, et plusieurs lignes directrices du CCME relatives à la gestion des déchets contenant des BPC.
On a déjà cessé d'utiliser une quantité considérable de BPC, et les déchets correspondants contenant les BPC ont été éliminés. Il reste toutefois, au Canada et ailleurs, une quantité appréciable de BPC dans des équipements en service avant l'application de la loi et de grandes quantités de déchets contenant des BPC sont entreposés, en attente de traitement. Ces produits doivent être traités rapidement, et de façon écologiquement rationnelle.
Au Canada, les provinces et le gouvernement fédéral se partagent la juridiction sur la gestion des déchets et des matériaux recyclables. La responsabilité d'Ottawa à propos des déchets contenant des BPC est le contrôle de leur importation, de leur exportation, de leur libération dans l'environnement, de leur entreposage et de leurs mouvements transfrontaliers, tel que stipulé par la Loi canadienne sur la protection de l'environnement et la Loi sur le transport des marchandises dangereuses. Les gouvernements provinciaux et territoriaux contrôlent les mouvements de ces déchets entre les provinces, et établissent les règles qui régissent l'émission des permis aux transporteurs de déchets contenant des BPC et aux installations de traitement à l'intérieur de leur territoire.
Par l'entremise du Conseil canadien des ministres de l'environnement (CCME), le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux collaborent à l'élaboration de lignes directrices relatives à des substances et des technologies précises applicables à la gestion des BPC. Ces lignes directrices servent ensuite pour élaborer les lois, étudier les évaluations environnementales et donner des permis et des certificats d'approbation. Les lignes directrices pertinentes du CCME sont les suivantes :
- codes de pratiques relatifs à la gestion des huiles usées (1989)
- lignes directrices relatives à la gestion des déchets contenant des BPC (1989)
- lignes directrices relatives au traitement chimique des BPC (1990)
- destruction des BPC (incinération) (1990)
- lignes directrices relatives à l'enfouissement de déchets dangereux (1991)
- lignes directrices relatives aux incinérateurs de déchets dangereux (1992)
- protocoles de décontamination des transformateurs contenant des BPC (1995)
- lignes directrices nationales relatives à l'utilisation des déchets dangereux et non dangereux comme combustible de substitution dans les fours à ciment (1996)
Compte tenu de la complexité de ce régime réglementaire, la coopération et la coordination entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux et les premières nations est cruciale à l'élaboration et l'application d'un système canadien adéquat de gestion des BPC.
Neuf installations canadiennes sont actuellement approuvées pour le traitement des déchets contenant des BPC : deux en Alberta,2 deux au Québec et cinq en Ontario. Plusieurs autres entreprises participent au transport, à l'entreposage, au transfert et au prétraitement des déchets contenant des BPC.
En vertu du Règlement sur l'exportation de déchets contenant des BPC (REDCBPC) de 1990, créé en conformité avec la LCPE, 1988, le Canada ne permet l'exportation de déchets contenant des BPC que vers les États-Unis, et uniquement pour leur destruction. À cette époque, les États-Unis avaient déjà interdit toute importation de BPC depuis 1980. Les seules exportations de BPC du Canada vers les États-Unis permises au début des années 1990 ont été pour des déchets contenant des BPC qui étaient la propriété du gouvernement américain et qui étaient retournés au pays pour élimination.
En 1995, les États-Unis ont ouvert leurs frontières à une plus vaste gamme de déchets contenant des BPC en provenance du Canada. Afin d'évaluer si les déchets ainsi exportés seraient traités de façon écologiquement rationnelle, la Canada a obtenu en 1995 une ordonnance provisoire afin d'interdire temporairement toute exportation de déchets contenant des BPC du Canada vers les États-Unis.
En février 1997, après une étude du PCB Waste Import Rule américain de 1996, le règlement REDCBPC révisé a été adopté au Canada et les frontières canadiennes ont à nouveau été ouvertes à l'exportation de déchets contenant des BPC. Ce règlement ne permet l'exportation de déchets contenant des BPC aux États-Unis que pour élimination dans une installation approuvée qui n'est pas un site d'enfouissement. Cette prohibition sur l'enfouissement est conforme aux les lignes directrices techniques de la Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux.
Le REDCBPC comporte d'autres restrictions à l'exportation des déchets contenant des BPC, mais comme l'importation de déchets ayant des concentrations de BPC de plus de 2 ppm a été interdite en juillet 1997 par un jugement de cour américain, à la suite d'une contestation du Sierra Legal Defense Fund à propos du règlement américain sur les BPC établi par la EPA, en vertu de la Toxic Substances Control Act (TSCA), ces règlements sont actuellement sans objet.
Comme signalé dans la section 2, ci-dessus, l'autorité qui contrôle l'exportation et l'importation de déchets dangereux, notamment les déchets contenant des BPC, est actuellement la LCPE, 1999. Comme nous l'avons déjà expliqué, le REDCBPC a été établi en vertu de la LCPE, 1988, et renouvelée dans la LCPE, 1999 afin de réglementer l'exportation de déchets contenant des BPC en concentrations de plus de 50 ppm. L'importation de déchets contenant des BPC est réglementée depuis 1992 par les clauses générales du REIDD.
Le REIDD et le REDCBPC établissent les conditions qui régissent l'exportation et l'importation de déchets contenant des BPC en concentrations de plus de 50 ppm à travers les frontières canadiennes. Ces règlements assurent que le pays ou la province qui reçoit les BPC par envoi transfrontalier les accepte avant l'envoi afin de respecter le droit souverain des états d'établir ce qui peut entrer et sortir de leurs frontières. En outre, elles assurent aussi qu'Environnement Canada, avec l'aide de diverses autres agences et organismes gouvernementaux, puisse assurer le suivi et le contrôle des déchets contenant des BPC qui entrent au Canada, qui en sortent ou qui le traversent. Le suivi des livraisons est crucial pour assurer que les déchets contenant des BPC atteignent bien la destination prévue et qu'ils y sont traités de façon convenable.
Le REIDD et le REDCBPC sont fondés sur la volonté du Canada de protéger son environnement et son engagement à respecter ses engagements auprès des autres nations, en vertu de la Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination, et de l'Accord entre le Canada et les États-Unis concernant les déplacements transfrontaliers de déchets dangereux. 3
Assurer la gestion écologiquement rationnelles de tous les déchets dangereux et produits dangereux recyclables, tant domestiques qu'importés, est une obligation commune à ces deux ententes.
L'élaboration d'une nouvelle réglementation sur l'importation et l'exportation des BPC contribuera à respecter cette obligation et à raffermir les contrôles actuellement en place sur l'importation des BPC.
Aucune importation n'a eu lieu jusqu'à maintenant en vertu du REIDD, mais ce domaine a connu récemment un intérêt croissant. En décembre 1999, l'Alberta a permis l'importation de l'extérieur du Canada pour alimenter le centre de traitement de Swan Hills, et d'autres entreprises canadiennes sont de plus en plus intéressées à l'importation de déchets contenant des BPC, particulièrement en provenance de pays en voie de développement qui n'ont pas la possibilité de gérer leurs déchets de façon écologiquement rationnelle.
Certaines questions ont toutefois été soulevées en même temps sur l'augmentation des importations de déchets dangereux en Ontario et au Québec, particulièrement au sujet de l'enfouissement sans traitement, mais comme nous l'avons montré plus tôt, l'élimination des déchets contenant des BPC est fortement réglementée au Canada. Notons aussi que la loi canadienne interdit l'enfouissement ou le recyclage des déchets importés contenant des BPC, et que tous ces déchets doivent être détruits. (La section 4.3 traitera plus en détails des contrôles sur la gestion écologiquement rationnelle des déchets contenant des BPC.)
L'annexe A donne un survol chronologique des mouvements transfrontaliers de BPC au Canada.
- 2 Le gouvernement de l'Alberta a récemment annoncé une entente intérimaire pour poursuivre l'exploitation des installations de Swan Hills, à la suite de la décision de la compagnie qui exploitait ces installations d'en cesser l'exploitation à la fin de décembre 2000.
- 3 Les restrictions canadiennes sur l'exportation et l'importation de produits dangereux recyclables sont aussi basés sur la décision C(92)39 du Conseil de l'OCDE sur les déchets destinés à la récupération. Cependant, comme les déchets contenant des BPC ne peuvent être déplacés que pour être éliminés, cet accord international ne touche pas directement les mouvements transfrontaliers de BPC.