2.0 Historique

Le MTBE est un composé organique de synthèse oxygéné. Il peut être utilisé dans l'essence pour en augmenter l'indice d'octane ou réduire les émissions. (Aux États-Unis, les composés oxygénés sont obligatoires dans l'essence reformulée pour la seconde raison.) Le MTBE a une plus grande solubilité dans l'eau et un taux de dégradation plus faible que nombre des autres ingrédients de l'essence. De plus, il a des seuils de gustation et de perception olfactive bas. À cause de son fort goût de térébenthine, le MTBE peut rendre l'eau non potable à partir de concentrations de l'ordre de 15-20 parties par milliard (ppb).

Les rejets d'essence contenant du MTBE par des réservoirs de stockage ont contribué de façon importante aux problèmes de contamination de l'eau potable dans certaines instances au cours de la dernière décennie, particulièrement aux États-Unis. En 2001, l'U.S. Geological Survey (USGS) a signalé que du MTBE a été détecté dans environ 5 % des échantillons d'eaux souterraines aux États-Unis. Toutefois, moins d'un pour cent des échantillons dépassaient le seuil de l'avis au consommateur de l'EPA, qui est de 20 microgrammes par litre (environ 20 ppb). Du MTBE a également été détecté dans 9 % des aqueducs communautaires dans 12 États du Nord-Est et du Centre du littoral de l'Atlantique examinés par l'USGS. Ici également, moins de un pour cent des échantillons dépassaient le seuil de l'avis au consommateur de l'EPA3. Bien que la restauration de qualité de l'eau potable contaminée soit faisable, elle est souvent difficile et coûteuse.

Les effets du MTBE sur la santé et l'environnement ont été évalués par le gouvernement fédéral en vertu de la LCPE (1999) dans le cadre de l'évaluation des substances d'intérêt prioritaire. D'après le niveau d'utilisation de l'époque, le rapport d'évaluation de 1992 concluait que « les concentrations prévues de MTBE dans l'environnement au Canada ne constituent pas un danger pour l'environnement... ou la vie ou la santé humaine »4. Par conséquent, le MTBE a été déclaré non « toxique » aux termes de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.

D'autres organismes ont plus récemment examiné les risques pour la santé liés au MTBE :

La contamination des eaux souterraines par le MTBE est devenue un problème très préoccupant aux États-Unis, où l'utilisation du MTBE et d'autres composés oxygénés dans l'essence reformulée est obligatoire depuis 1993. Le MTBE était le composé oxygéné utilisé de préférence par des raffineurs américains et, en 1998, se retrouvait dans 87 % du stock américain d'essence reformulée, à des concentrations allant de 10 à 15 % en volume, ce qui correspond à une concentration moyenne en MTBE d'environ 3 % dans tout le stock d'essence des États-Unis.

L'un des exemples les plus connus de contamination de l'eau potable par le MTBE est celui de Santa Monica, en Californie. En 1996, sept puits de Santa Monica fournissant 50 % de l'eau potable de la ville étaient contaminés à des concentrations allant jusqu'à 600 ppb7. Les fuites d'essence de réservoirs de stockage souterrains en étaient la cause.

En mars 1999, le gouverneur de la Californie, Gray Davis, a annoncé que le MTBE serait éliminé complètement le plus tôt possible, et au plus tard le 31 décembre 2002. En décembre 1993, la Californie approuvait sa Phase 3 Gasoline Regulations, qui met fin à l'utilisation du MTBE d'ici la fin de 2002. Entre temps, la Californie exigeait un étiquetage bien en vue sur les pompes distribuant de l'essence contenant du MTBE, pour permettre aux consommateurs de faire un choix informé quant au type d'essence qu'ils achètent8. Le 15 mars 2002, le gouverneur de Davis annonçait qu'il avait été décidé de reporter l'interdiction au 1er janvier 2004, en raison de préoccupations quant aux pénuries d'essence qui pourraient en résulter.

Seize autres États prennent ou ont pris également des mesures pour interdire ou limiter l'utilisation du MTBE en 2003-2004 et plusieurs autres songent à prendre des mesures. Plusieurs États exigent l'étiquetage de l'essence contenant du MTBE. Le tableau B.1 de l'appendice B résume les mesures prises ou proposées par les États américains en ce qui concerne le MTBE.

Au Canada, la LCPE (1999) ne permet actuellement pas d'interdire le MTBE comme additif à l'essence car cette substance s'est révélée non toxique dans une évaluation d'Environnement Canada effectuée en 1992 et basée sur les niveaux d'utilisation d'avant 1992. Le gouvernement fédéral n'a qu'un pouvoir constitutionnel extrêmement limité pour exiger l'étiquetage à la pompe; bien que la LCPE (1999) lui accorde un pouvoir limité pour exiger l'étiquetage des carburants, celui-ci ne s'étend pas à l'étiquetage à la pompe.

En novembre 1998, l'administrateur de l'EPA des États-Unis a demandé à un Blue Ribbon Panel on Oxygenates in Gasoline d'évaluer les problèmes de qualité de l'eau liés à la présence de composés oxygénés dans l'essence. En juillet 1999, ce groupe a recommandé que l'obligation actuelle d'utiliser des composés oxygénés dans l'essence reformulée soit éliminée... tout en réduisant rapidement l'utilisation du MTBE et en maintenant les avantages pour la qualité de l'air.

Comme suivi au rapport du Blue Ribbon Panel, en mars 2000, l'EPA a publié un Advance Notice of Proposed Rulemaking en vertu de l'article 6 de la Toxic Substances Control Act pour réglementer le MTBE dans l'essence. L'Advance Notice déclarait que le résultat de cette réglementation pourrait être l'interdiction totale d'utiliser le MTBE comme additif dans l'essence, ou une limitation empêchant l'utilisation du MTBE dans l'essence en concentrations supérieures à celles visant à augmenter l'indice d'octane9.

Un projet de loi sur l'énergie, déposé à la dernière session du Congrès américain, aurait interdit le MTBE dans les quatre ans suivant l'entrée en vigueur de la loi sur l'énergie. Cependant, il n'a pas été adopté. Il semble qu'une version révisée du projet de loi (comprenant des dispositions relatives à l'interdiction du MTBE) sera bientôt présentée au Sénat des États-Unis.

En mars 2001, une étude effectuée pour la Commission européenne et intitulée « MTBE and the Requirements for Underground Storage Tank Construction and Operation in Member States » indiquait que la contamination est peu probable si les normes régissant la construction et l'exploitation des réservoirs de stockage souterrains aux stations-services sont vigoureusement appliquées10. La Commission de l'Union européenne n'a proposé aucune restriction sur la teneur en MTBE dans l'essence11. De plus, le Danemark a examiné l'utilisation d'incitatifs fiscaux pour l'essence afin d'accélérer l'investissement visant à protéger le sol et les eaux souterraines contre les fuites de MTBE provenant des réservoirs souterrains.

En Australie, une réglementation a été adoptée pour limiter la concentration du MTBE dans l'essence à 1 % en volume (environ 0,18 % d'oxygène en volume) à partir du 1er janvier 200412.

Certaines instances ont élaboré des directives sur le MTBE pour la qualité de l'eau, basées sur le seuil de concentration auquel le goût du MTBE est décelable (niveau esthétique). D'autres ont établi des seuils auxquels le MTBE est une menace pour la vie aquatique. La Californie a de plus élaboré une directive visant les effets sur la santé. Dans certaines instances, ces directives servent de normes pour la restauration de la qualité des eaux souterraines.

En décembre 1997, l'EPA des É.-U. a émis un avis sur le MTBE dans l'eau potable. Celui-ci recommandait de réglementer les seuils d'acceptabilité pour le goût et l'odeur, seuils allant de 20 à 40 ppb, qui seraient également une protection contre les effets nuisibles possibles pour la santé. D'autres instances ont également élaboré des directives pour des concentrations acceptables de MTBE dans l'eau (voir le tableau 2.1).

Tableau 2.1 - Directives sur le MTBE pour la qualité de l'eau
Concentration (ppb)
Directive de la C.-B. (niveau esthétique) 20 ppb
Directive de C.-B (vie marine, estuarienne) 440 ppb
Directive de la C.-B. (vie aquatique) 3400 ppb
Directive de l'Î.-P.-É. (niveau esthétique) 15 ppb
Directive de l'EPA (niveau esthétique) 20-40 ppb
Directive de la Californie (niveau esthétique) 5 ppb
Directive de la Californie (santé) 13 ppb

Le MTBE a été utilisé au Canada depuis 1986, mais son utilisation a été beaucoup moins répandue qu'aux États-Unis, l'addition de composés oxygénés dans l'essence canadienne n'étant pas exigée. La Clean Air Act des États-Unis exige l'addition de composés oxygénés dans l'essence reformulée depuis 1993.

Les informations fournies par les producteurs et les importateurs d'essence aux termes du Règlement sur le benzène dans l'essence indiquent que la concentration moyenne de MTBE dans le stock d'essence canadien est tombé de 0,33 % à 0,14 % entre 1999 et 2000. Toutefois, étant donné que le Règlement n'exige pas de déclarer les composés oxygénés mélangés en aval des raffineries (sauf dans quelques cas particuliers exposés dans le Règlement), ces valeurs sous-estiment l'utilisation du MTBE. Par comparaison, la concentration moyenne du MTBE dans le stock d'essence américain était d'environ 3 % en 1998.

Avant la publication en 2001 d'un avis diffusé conformément à la LCPE (1999), Environnement Canada connaissait trois cas de contamination des eaux souterraines par le MTBE au Canada :


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