3. Description des critères

Les critères représentent en fait les questions clés qu'on doit se poser pour déterminer si une substance ou un mélange donné est un déchet, une matière recyclable ou un produit. Les critères de chaque catégorie sont décrits ici. Afin de faciliter la description, on a fait appel à des indicateurs qui permettent de déterminer quels éléments doivent être présents pour qu'une matière réponde à chacun des critères.

Cette catégorie compte un seul critère :

Si les énoncés suivants se vérifient, on a une bonne indication que la substance ou le mélange n'est pas un déchet ou une matière recyclable mais un produit.

Par définition, une substance ou un mélange produit délibérément en vue d'un usage final préétabli est un produit. De façon similaire, une matière destinée à être éliminée est considérée logiquement comme un déchet.

Par contre, si la substance ou le mélange est un sous-produit inévitable et qu'il ou ses éléments doivent subir une transformation pour être utilisés de nouveau dans le même procédé ou dans un autre procédé, il s'agit d'un déchet ou d'une matière recyclable.

Ces distinctions peuvent cependant dépendre d'autres facteurs. Par exemple, une substance ou un mélange qui a été produit délibérément mais qui a atteint la fin de sa vie utile (p. ex. un accumulateur au plomb usagé) ou un produit hors normes (p. ex. un pesticide chimique hors normes) sont plutôt des déchets ou des matières recyclables que des produits. Par ailleurs, une matière recyclable qui était à l'origine un sous-produit, mais qui a été par la suite transformée à un point tel qu'elle peut être utilisée dans un procédé au même titre qu'une matière vierge, peut ne plus être considérée comme une matière recyclable mais plutôt est un produit. Si ce même sous-produit est destiné pour une opération d'élimination tel que l'enfouissement, l'incinération ou le traitement préalable à l'enfouissement ou l'incinération, il serait considéré comme un déchet.

Pour déterminer si une substance ou un mélange est un déchet, une matière recyclable ou un produit, il faut tenir compte de l'historique de son utilisation. On peut arriver à trouver des usages pratiques et avantageux à une substance ou un mélange qui était à l'origine un déchet. Même si le simple fait de trouver un usage à une substance ou un mélange n'en fait pas automatiquement un produit, cette substance ou ce mélange peut devenir à la longue un produit bien établi dont la production est justifiée principalement par des avantages financiers. Certaines substances et certains mélanges qui étaient à l'origine des déchets ont finalement trouvé des débouchés lucratifs et sont devenus des produits d'une aussi grande valeur que le produit principal.

Les quatre autres catégories de critères sont destinées à être utilisées pour établir ces distinctions ainsi que d'autres.

Cette catégorie compte un seul critère :

Si l'énoncé suivant se vérifie, on a une bonne indication que la substance ou mélange est un produit.

Même si, d'après son origine, son utilisation et sa destination, une substance ou un mélange provient d'une activité de production de déchets ou de matières recyclables, il peut arriver qu'il soit plus juste dans certains cas de la considérer comme un produit. Par exemple, si la substance ou le mélange peut être vendu directement en tant que produit, ou s'il peut être utilisé sans autre transformation dans un procédé permettant d'obtenir un produit vendable, on doit plutôt le considérer comme un produit.

Il est souvent difficile de déterminer si une matière recyclée ne tombant plus sous le coup de la réglementation visant les déchets et les matières recyclables nécessitant une transformation supplémentaire pour être utilisée. Par exemple, des solvants traités ou des accumulateurs rechargés peuvent être vendus et utilisés directement. Une fois qu'ils ont été traités, ces matières recyclables deviennent des matières recyclées et ainsi des produits. De la même manière, une matière recyclable qui a été transformée à un point tel qu'elle peut être utilisée dans un autre procédé, et qui est plus ou moins comparable à une matière vierge qui aurait pu être utilisée dans le même procédé, pourrait ne plus être considéré comme un déchet ou une matière recyclable.

Dans certains cas, le degré de transformation requis peut être un facteur déterminant. Par exemple, si elle ne doit faire l'objet que de remballage avant d'être expédiée, la matière est considérée comme un produit puisque la transformation requise est négligeable. Par contre, une matière recyclable qui nécessite un traitement chimique avant d'être utilisée dans un procédé ne peut être un produit.

De plus, la substance ou le mélange pourrait être tellement contaminé ou les coûts de traitement tellement élevés qu'il serait destiné à l'élimination même si le recyclage est possible. Dans ce cas, quoique la substance ou le mélange est théoriquement recyclable, il serait considéré comme un déchet.

Les cas ci-dessous illustrent comment les critères peuvent être appliqués pour déterminer si une matière est un déchet, une matière recyclable ou un produit.

Premier cas : Un procédé est utilisé pour extraire l'isotope 6Li de l'hydroxyde de lithium monohydraté. Après recristallisation, le LiOH.H2O restant a une teneur en 7Li plus élevée et est d'une plus grande pureté. Le but du procédé est d'obtenir un produit vendable qui ne nécessite aucune autre transformation pour être utilisé ou vendu. En conséquence, la matière ainsi obtenue serait considérée comme un produit.

Deuxième cas : On fait subir à de la cendre contenant une concentration dangereuse de vanadium une certaine transformation afin de faciliter la récupération de ce dernier. Cependant, comme la substance transformée est toujours de la cendre et doit faire l'objet d'une transformation supplémentaire pour devenir un article commercialisable (vanadium), elle n'est pas devenue un produit.

Cette catégorie compte deux critères :

Si les énoncés suivants se vérifient, on a une bonne indication que la substance ou le mélange peut être considéré comme un produit et qu'il n'est pas visé par la réglementation sur les déchets dangereux et matières recyclables dangereuses.

C1 L'utilisation ou la réutilisation de la substance ou le mélange ne produit pas plus de déchets nécessitant un traitement supplémentaire que n'en produirait l'utilisation de matières vierges.

C2 La substance ou le mélange contient pas une contamination appréciable qui le rendrait plus dangereux.

Le REIDD vise fondamentalement à protéger l'environnement et la santé humaine des rejets de déchets dangereux. C'est pourquoi on doit avoir l'assurance qu'en traitant une matière comme un produit plutôt que comme un déchet ou d'une matière recyclable, on ne court aucun risque de danger à l'environnement ou à la santé humaine.

Environnement Canada veut donc que l'on s'assure que les matières recyclables qui ont été transformées puis vendues ou utilisées dans un procédé ne présentent pas plus de risques pour l'environnement que les autres matières qui auraient pu être utilisées dans ce procédé.

Une solution caustique est utilisée comme agent de lavage dans un procédé d'hydrocraquage. Au cours du procédé, elle se charge d'acide organique et de phénols (substances dangereuses). Une fois que les matières organiques ont atteint une concentration 10 à 40 %, la solution n'est plus utilisable. On propose que la solution usée soit envoyée à une installation de traitement, située dans une autre zone de compétence, où on récupérera les matières organiques (acide organique et phénols). La matière est une matière recyclable dangereuse parce qu'on doit lui faire subir un traitement pour pouvoir l'utiliser à nouveau et qu'elle contient des substances ayant un pouvoir contaminant important.

Cette catégorie compte quatre critères :

Si les énoncés suivants se vérifient, on a une bonne indication que la matière peut être considérée comme un produit.

D1 La production fait l'objet d'un contrôle de la qualité et respecte des normes nationales ou internationales, y compris des dispositions visant la protection de l'environnement.

D2 La substance ou le mélange est utilisé d'une façon qui permet de réduire au minimum les pertes.

D3 L'installation de production tient un registre des achats, de la production et des ventes.

D4 La substance ou le mélange peut être utilisé comme ingrédient dans l'industrie dans diverses circonstances.

Si la substance ou le mélange répond à des normes nationales ou internationales reconnues, ainsi que tous règlements fédéraux, provinciaux, territoriaux ou de gouvernements autochtones applicables, et que ces normes comportent des dispositions relatives à la protection de l'environnement, on peut en tirer deux conclusions : la matière est traitée comme un produit, et le niveau de risque environnemental associé à cet état de choses est acceptable.

Dans le même ordre d'idées, la façon dont une substance ou un mélange est utilisé et réglementé constitue un indicateur important pour déterminer s'il s'agit d'un produit, d'une matière recyclable ou d'un déchet. Si la substance ou le mélange est assujetti à des critères réglementaires ou industriels stricts (visant le contrôle de la qualité, la réduction des pertes, etc.), on peut en conclure qu'il est traité (à l'intérieur ou à l'extérieur de l'installation) comme un produit plutôt que comme un déchet ou d'une matière recyclable.

La constance et l'homogénéité dans la production d'une substance ou d'un mélange sont également des facteurs à considérer. La substance ou le mélange ne peut répondre à une norme que s'il satisfait à des spécifications suffisamment précises. De façon similaire, une substance ou un mélange ne peut répondre aux exigences en matière de protection de l'environnement que s'il a des propriétés physiques et chimiques bien définies. En conséquence, il est important de savoir si une substance ou un mélange fait l'objet d'un contrôle de la qualité pour déterminer s'il s'agit d'un déchet, une matière recyclable ou un produit.

Si une substance ou un mélange ne répond pas vraiment aux normes (dans le temps) et n'est pas homogène (dans sa nature), il peut ne constituer un ingrédient pour l'industrie que dans certaines circonstances. Par exemple, si l'usine à laquelle la substance ou le mélange est destiné n'accepte que des substances ou des mélanges ayant des caractéristiques physiques ou chimiques bien définies et que celles de la substance ou du mélange produit sont beaucoup plus variables, celui-ci ne pourrait être accepté que sur une base opportuniste. Dans ce cas, la substance ou le mélange ne peut pas être considéré comme un produit.

En bref, le respect règlements fédéraux, provinciaux, territoriaux ou de gouvernements autochtones applicables et de normes ainsi que la mise en œuvre de mesures de contrôle de la qualité sont des critères correspondant au principe de constance.

Les cas ci-dessous illustrent comment déterminer si une substance ou un mélange peut être considéré comme un déchet, une matière recyclable ou un produit.

Étudions le cas du traitement que l'on fait subir à de la cendre contenant du vanadium afin de faciliter la récupération de ce dernier, qui est un élément dangereux, n'est conforme à aucune norme nationale, internationale ou industrielle reconnue, ce qui constitue un motif supplémentaire de considérer cette matière comme un matière recyclable.

Dans un autre cas, un procédé de désulfuration des gaz de combustion donne lieu à la production d'un ingrédient (sulfate de calcium) permettant d'obtenir du gypse. Avec le temps, le procédé a été suffisamment amélioré pour qu'on puisse produire du gypse de la même qualité que les matières vierges utilisées aux mêmes fins. Les sous-produits et les matières vierges sont évalués d'après la même norme. En conséquence, le gypse obtenu comme sous-produit de la désulfuration des gaz de combustion est produit conformément à une norme reconnue et peut légitimement être considéré comme un produit.

Si les énoncés suivants se vérifient, on a une bonne indication que la substance ou le mélange peut être considéré comme un produit.

E1 La substance ou le mélange a une valeur économique positive.

E2 La substance ou le mélange a un marché défini, mesurable et généralement viable.

La valeur économique de la substance ou du mélange et sa viabilité commerciale sont liées aux raisons fondamentales de sa production et de sa destination éventuelle. Si une substance ou un mélange a une valeur appréciable et stable et un marché bien établi, on peut en déduire qu'il été produit pour être commercialisable et qu'il s'agit d'un produit.

Par contre, si sa valeur est inférieure à celle des matières premières ou vierges qui auraient été utilisées aux mêmes fins, sa destination et/ou son utilisation pourraient manquer de constance ou est de qualité inférieure. À certaines périodes, la matière pourrait être utilisée comme matière première et à d'autres, envoyée au rebut, ce qui pourrait se traduire par un manque de constance dans le contrôle de la qualité et dans l'homogénéité de la matière produite, et par un risque de danger pour l'environnement et la santé humaine. Dans de tels cas, il serait plus approprié de la traiter comme un déchet ou une matière recyclable.

Un sous-produit des activités normales d'une fonderie de plomb est un alliage contenant 96 % d'argent. L'argent est produit par la même méthode de production industrielle que celle pour la production première de cet alliage. On propose que cet alliage soit vendu et utilisé comme matière première dans un procédé industriel. On note que la matière est produite délibérément, qu'elle a une valeur économique établie et qu'elle est produite pour satisfaire à une demande du marché. Elle répond aux spécifications reconnues de l'industrie du métal, et il a été démontré qu'elle ne présente pas de risques accrus pour l'environnement ou la santé humaine. Il ressort de tout ce qui précède que l'alliage est un produit.

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