Dommages causés par une température et une humidité relative contre-indiquées
Les dommages qu'entraînent la température et l'humidité relative contre-indiquées se classent en trois catégories générales :
Dommages biologiques
C'est la formation de moisissures qui constitue le danger biologique directement associé à l'humidité relative. La moisissure est toujours à éviter dans une collection, puisqu'elle entraîne des dommages irréversibles et souvent catastrophiques.
Les spores de moisissure sont naturellement présentes dans l'air ambiant, et il est impossible de les éliminer. Ce n'est toutefois qu'en présence d'une quantité suffisante de nutriments, de temps et d'humidité qu'elles se transforment en moisissures destructrices. Comme il y a des nutriments présents dans tous les milieux ambiants, la meilleure façon de lutter contre les moisissures est de réguler l'humidité. En l'absence d'humidité, les spores de moisissure ne peuvent croître.
La valeur seuil d'humidité relative que l'on préconise généralement pour éviter la croissance de moisissures est de 65 %. En dessous de cette valeur, aucune moisissure ne peut se former, quelle que soit la température. En revanche, l'apparition de moisissures est très probable lorsque l'humidité relative est élevée. Par exemple, si le taux d'HR est de 85 %, il y aura probablement croissance de moisissure en moins d'une semaine. Il est plus difficile de savoir ce qui se passe en présence de conditions limites (humidité relative entre 60 % et 70 % à différentes températures). Pour des diagrammes qui fournissent des réponses plus précises à ces questions, consulter le chapitre du manuel susmentionné de l' ASHRAE et le Bulletin technique nº 23, intitulé Directives concernant l'humidité et la température dans les archives du Canada.
Il est relativement facile de conserver des valeurs d'HR et de température ambiantes qui empêchent la formation de moisissures. Le danger, souvent indécelable, est associé aux microclimats que l'on crée par inadvertance dans un bâtiment.
De nombreuses salles ont des gradients de température, et les zones plus froides présentent une humidité relative plus élevée que les zones moins froides. À titre d'exemple, par temps froid, les murs ou les planchers donnant sur l'extérieur peuvent se refroidir beaucoup plus que le reste de la pièce, créant ainsi des zones d'humidité élevée, voire de condensation. Les outils servant à la climatisation peuvent également créer des problèmes : près de la sortie des humidificateurs, l'HR est trop élevée, et près des déshumidificateurs, il y a des risques de fuites d'eau. Toute tentative d'emballer les objets dans une enveloppe protectrice peut avoir un effet contraire. Prenons l'exemple d'un objet emballé entreposé à un endroit où la température est inégale (un bout de l'emballage touche un mur froid). Le taux d'humidité relative à l'extrémité froide sera bien plus élevé que celui de l'extrémité chaude, ce qui entraînera la formation de moisissures. Pour résumer, l'emballage protecteur présente de nombreux avantages, les humidificateurs et déshumidificateurs sont importants, et la plupart des réserves sont plus bénéfiques pour les collections que l'absence de réserves. Néanmoins, il faut mettre en œuvre ces mesures protectrices avec prudence afin d'éviter la création de nouvelles sources d'humidité excessive et de moisissures.
Dommages chimiques
Ce sont des réactions chimiques dans un matériau qui entraînent les dommages chimiques. Les principales réactions en cause sont l'hydrolyse et l'oxydation, qui sont à l'origine de la majorité des processus de vieillissement naturel.
On entend par « hydrolyse » une réaction entre une substance et l'eau, laquelle entraîne la détérioration chimique de la substance originale, et la formation d'une ou de plusieurs nouvelles substances.
On entend par « oxydation » une réaction entre une substance et l'oxygène, laquelle entraîne souvent la détérioration physique de la substance.
- la chaleur accélère les réactions chimiques (en règle générale, pour chaque augmentation de température de 5°C, la vitesse de réaction atteint environ le double);
- l'humidité relative joue un rôle significatif, car certaines réactions ne peuvent se produire qu'en présence d'humidité.
L'hydrolyse acide constitue une préoccupation de grande importance pour les musées et, surtout, pour les archives. Elle touche les matériaux à base de cellulose, notamment les négatifs, les pellicules cinématographiques, les supports magnétiques et le papier. Pour ce dernier, l'hydrolyse acide coupe les longues chaînes cellulosiques en segments, ce qui rend le papier moins flexible, plus cassant et plus susceptible de s'abîmer. Ce processus de décomposition se poursuit tant que l'acide est présent et, comme le processus lui-même produit de l'acide, la dégradation accélère à mesure qu'elle progresse.
La durée de vie du papier est très variable. Elle dépend de sa composition et, notamment, du type et de la longueur des fibres, de son raffinage, des produits chimiques utilisés dans sa fabrication, de son poids à la rame et de son épaisseur. Il est impossible de modifier ces facteurs, mais la température et l'humidité relative du milieu d'entreposage du papier peuvent avoir des répercussions sur sa permanence relative.
Les isopermes (coefficients multiplicateurs de la durée de vie d'un objet) fournissent une représentation graphique du rapport entre, d'une part, la durée de vie des matériaux qui se détériorent rapidement en raison de l'hydrolyse acide et, d'autre part, les conditions de température et d'humidité relative de leur milieu d'entreposage. Les isopermes peuvent servir à représenter sous forme graphique les modifications relatives à la durée de vie associées à des variations de température ou d'humidité relative. Pour des graphiques d'isopermes et des explications plus approfondies sur leur utilisation, consulter le chapitre du manuel de l' ASHRAE et le Bulletin technique nº 23 intitulé Directives concernant l'humidité et la température dans les archives du Canada.
Dommages mécaniques
Les conditions de température ou d'humidité relative extrêmes rendent de nombreux objets vulnérables aux dommages mécaniques. Par exemple, les matériaux qui deviennent raides ou cassants lorsqu'ils sont froids sont plus susceptibles de casser à basse température. Heureusement, il est normalement facile à éviter les extrêmes, sauf dans les rares cas de défaillance soudaine d'un système de régulation du milieu ambiant.
Ce sont les variations de température ou d'humidité relative qui causent le plus de dommages mécaniques. Malheureusement, elles sont difficiles à réguler et leur importance est souvent mal comprise.
Si les variations sont dangereuses, c'est en raison des propriétés mécaniques fondamentales des matériaux :
- les matériaux inorganiques et organiques (le métal, la pierre, la peinture et le bois) se dilatent sous l'action de la chaleur et se contractent sous l'action du froid;
- les matériaux organiques, qui sont hygroscopiques, se contractent (rétrécissent) sous l'action d'une baisse de l'humidité relative et se gonflent si le taux d'humidité relative augmente.
Ce ne sont pas les réactions elles-mêmes qui causent des dommages. Il peut toutefois en avoir lorsque des objets sont composés de matériaux qui réagissent différemment, car un matériau se trouve alors soumis à la contrainte d'un autre. Prenons en exemple un panneau de bois. S'il n'est soumis à aucune contrainte, il peut se dilater et se contracter dans des conditions variables, sans subir de dégâts. Toutefois, si ce même panneau fait partie d'une commode, d'une machine agricole ou d'un élément architectural et s'il est attaché à d'autres éléments qui restreignent son mouvement, il y aura probablement des dommages quand le bois tentera de bouger en réaction aux variations d'humidité relative. Un tableau constitue un exemple encore plus complexe. En effet, un tableau habituel est fait de plusieurs couches qui se dilatent et se contractent de différentes façons. Au fil du temps, les contraintes résiduelles ainsi causées peuvent entraîner la formation de cuvettes et de craquelures.
On connaît depuis longtemps la nature destructrice des importantes variations d'humidité relative et de température. D'ailleurs, selon les tout premiers paramètres concernant les variations acceptables dans les musées, même les variations les plus minimes entraîneraient certains dommages. On a donc établi des paramètres tels qu'une humidité relative de 50 ± 3 % et une température de 21 ± 1 °C. Depuis le début des années , les scientifiques et les restaurateurs possédant une vaste expérience des collections s'entendent pour affirmer qu'il existe une plage de valeurs à l'intérieur de laquelle les objets peuvent tolérer des variations sans subir de dommages. Actuellement, c'est dans le chapitre du manuel de l' ASHRAE où l'on trouve le meilleur exposé des enjeux et de la documentation à ce sujet.
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