Appelée à servir : Célébrer le 80e anniversaire du Service féminin de la Marine royale du Canada

« La vie militaire était une nouveauté pour les Canadiennes, mais elles ont prouvé qu’elles étaient capables non seulement de l’accepter, mais aussi de lui faire honneur. En retour, elles en ont immensément profité. Peu d’entre nous quitteront le service sans avoir élargi nos horizons grâce à l’entraînement, aux voyages, à la camaraderie et au travail d’équipe dont nous avons bénéficié pendant ces trois années de vie navale. » [traduction]

Capitaine Adelaide Sinclaire, directrice du Service féminin de la Marine royale du Canada, 1945Note de bas de page 1

Les femmes sont appelées à servir

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Membres du Service féminin de la Marine royale du Canada, du Service féminin de l’Armée canadienne et du Corps féminin de l’Aviation royale du Canada sur la Colline du Parlement, à Ottawa, en juillet 1943.

Lorsqu’il a fallu servir son pays pendant la période sombre de la Seconde Guerre mondiale, les Canadiennes ont répondu à l’appel du devoir. Le 31 juillet 2022 marque le 80e anniversaire de la création du Service féminin de la Marine royale du Canada (WRCNS).

Depuis sa création jusqu’à sa dissolution en août 1946, près de 7 000 Canadiennes, communément appelées « Wrens », ont servi leur pays. Elles ont également « posé la quille » d’une égalité accrue entre les sexes dans l’ensemble de la société canadienne et pour les générations suivantes de femmes désireuses de servir dans les Forces armées canadiennes.

La nécessité de recruter des femmes dans les forces armées découlait des pénuries de personnel en temps de guerre dans les trois services. Lorsque le Canada s’est engagé dans la Seconde Guerre mondiale en septembre 1939, les Canadiens ont été appelés à se mobiliser pour l’effort de guerre. Des milliers d’hommes se sont portés volontaires pour le service, mais à mesure que les hostilités se prolongeaient, le rythme des enrôlements ne permettait pas de répondre aux besoins croissants en effectifs.

Les trois services ont d’abord rejeté l’idée de permettre aux femmes de servir. L’Aviation royale du Canada (ARC) et l’Armée canadienne ont fini par changer de cap avec la création du Corps féminin de l’ARC et du Service féminin de l’Armée canadienne (CWAC) en 1941. Un an plus tard, la Marine royale canadienne (MRC) a fait de même et a créé un service distinct pour les femmes.

Recrutement et instruction

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À gauche : Le NCSM Conestoga, l’établissement de l’instruction de base pour le WRCNS situé à Galt, en Ontario. À droite : Le commandant Isabel MacNeil, O.B.E., commandant du NCSM Conestoga.

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Personnel du WRCNS qui s’embarque pour le Royaume-Uni, février 1944. (BAC PA-108181)

Le 31 juillet 1942, le WRCNS est créé pour que les femmes militaires puissent occuper les postes à terre, libérant ainsi les hommes pour le service actif en mer. Avec l’aide de leurs homologues britanniques du Women’s Royal Naval Service, le WRCNS a commencé à « recruter des femmes âgées de 18 à 45 ans, à l’exception de celles qui ont des personnes à charge ou des enfants de moins de 16 ans », avec une rémunération progressive « commençant à 90 cents par jour pendant la période d’instruction de base, [et] des indemnités quotidiennes supplémentaires étant accordées en fonction de la capacité de la Wren dans sa Direction particulière. »  Note de bas de page 2

Pour faciliter la transition de la vie civile à la vie militaire, les Wrens nouvellement recrutées ont suivi leur instruction de base au NCSM Conestoga à Galt, en Ontario. Le capitaine de corvette Isabel MacNeil a assuré le commandement du centre d’instruction.

« En tant que capitaine d’un navire de la MRC, rapporte le journal The Tiddley Times, un produit par et pour les Wrens, Isabel MacNeill est la seule femme, en dehors de la famille royale britannique à être accueillie à bord d’un navire au son de la cornemuse ou lorsqu’elle descend à terre. Toutes les Wrens canadiennes sont fières d’elle. »  Note de bas de page 3

On s’attendait à ce que ces nouvelles recrues effectuent un large éventail de tâches de soutien et de travail de bureau non liées au combat pendant la durée des hostilités. Les Wrens ont poursuivi leur formation professionnelle dans d’autres établissements d’instruction, à savoir le NCSM Cornwallis à Deep Brook (N.-É.) et le NCSM St. Hyacinthe à Saint-Hyacinthe (Québec). Ils ont reçu une formation de télégraphistes sans fil, de cuisinières, de traceurs, de conductrices de véhicules motorisés, de codeurs, d’adjointes à l’approvisionnement, de commis des postes, de commis payeurs, de confectionneurs de voiles à bateau, etc.

Les Wrens ont exercé divers métiers à terre non liés au combat, dans des bases et des unités partout au Canada ainsi qu’à l’étranger. Un peu plus de 1 000 Wrens canadiens ont servi à l’étranger aux États-Unis, notamment à Washington, D.C. et à New York, en Grande‑Bretagne et à Terre-Neuve, qui était alors un dominion britannique distinct et qui était donc considéré comme une affectation à l’étranger.

Vie militaire

Lorsque les femmes ont été introduites dans une marine auparavant exclusivement masculine, un uniforme féminin adapté était nécessaire. L’uniforme a évolué au cours de la guerre, et les Wrens ont reçu une grande variété de tenues. Dans le cadre d’un assouplissement des normes sociales strictes relatives à la tenue des femmes, le pantalon – autrefois considéré comme une tenue masculine – a été autorisé pour les Wrens de la Direction générale des communications.Note de bas de page 4

L’uniforme s’est avéré être une source de fierté pour les femmes militaires.

« D’une certaine manière, le port de l’uniforme (même la blouse de travail) semblait nous changer », explique la Wren Rosamond « Fiddy » Greer. « Nous étions transformées en une similitude qui affectait de forts sentiments de camaraderie et d’unité. Nous étions des Wrens […] et nous en étions très fières.”Note de bas de page 5

Les sports et les activités physiques de toutes sortes constituaient une partie importante de la vie militaire des Wrens, favorisant la forme physique, la camaraderie et l’esprit de corps.

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Une Wren et un marin, tous les deux des signaleurs, comparent leurs pantalons à pattes d’éléphant.

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Sailor Albert Kerr and Wren Doris Elizabeth MacLean made RCN history as the first ratings to be married.

(The Crow’s Nest, May 1943, p. 6)

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Wrens of the HMCS Cornwallis basketball team. (The Crow’s Nest, February 1945, p. 11)

Tout comme leurs homologues masculins de la MRC, de nombreuses Wrens ont choisi de se marier pendant leur service. Un numéro de mai 1943 du journal The Crow’s Nest annonçait que le mariage de la Wren Doris Elizabeth MacLean et du marin Albert Kerr était entré dans l’histoire. Le couple est devenu les premiers matelots (militaires du rang) de l’histoire de la MRC à s’unir par les liens du mariage au cours d’une cérémonie dans la chapelle du NCSM Kings à Halifax.Note de bas de page 6

Les Wrens ont célébré ensemble les événements marquants de la vie, tout comme elles ont porté le deuil ensemble. Bien qu’aucune Wren n’ait été tuée au combat, 11 membres du WRCNS ont perdu la vie en raison d’une maladie ou d’un accident.

« Encore une fois, nous pleurons la mort d’une autre Wren », a annoncé le Tiddley Times au sujet du décès de la Wren Ruth Floyd à l’Hôpital militaire Sainte-Anne à Montréal. Elle a été enterrée au Champ d’honneur, au cimetière Mont-Royal.Note de bas de page 7

Démobilisation

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Un défilé de mode à Wallis House, à Ottawa, a montré aux Wrens comment leurs uniformes pouvaient être transformés en vêtements civils après la guerre, en utilisant un peu de ruban de taffetas à carreaux.

(The Tiddley Times, mars-avril 1945, p. 34)

Alors qu’il devenait évident que la fin de la guerre approchait en Europe, les Wrens, tout comme les autres membres du service, se préparaient à faire la transition vers la vie civile. Une présentation donnée à un groupe de Wrens à Ottawa portait sur la façon de « tirer le maximum du minimum » avec l’allocation vestimentaire de 100 $ qui serait donnée aux femmes militaires lors de la démobilisation. « Le clou de l’a présentation », selon un article sur le « défilé de mode » paru dans le Tiddley Times, « était le magnifique costume bleu marine et le béret assorti, confectionnés à partir d’un uniforme Wren et d’une coiffe de gréement ronde. »Note de bas de page 8 Il était nécessaire d’économiser même après la fin de la guerre, car le rationnement et les pénuries se poursuivaient.

Le jour de la Victoire en Europe est survenue le 8 mai 1945, et avec elle, la fin de la guerre dans l’Ouest. Le WRCNS a été dissous en août de l’année suivante, mettant fin à un chapitre de l’histoire navale canadienne. On a reconnu le service des Wrens et leur énorme contribution à la Marine.

« Elles se sont enrôlées parce que leur pays avait besoin d’elles », a déclaré le capitaine de frégate William Strange, directeur de l’information navale, dans un discours prononcé en août 1946 à la radio de la CBC pour marquer la fin du WRCNS. « Il se peut que ce soit parce qu’un frère était déjà dans le service, ou simplement parce qu’elles espéraient avoir un aperçu de l’eau bleue, ou peut-être simplement parce qu’elles aimaient l’idée d’être dans la Marine. Quelle que soit la raison de leur engagement, elles étaient prêtes à aller n’importe où ou à faire tout ce que le service naval pouvait exiger d’elles.Note de bas de page9

Les femmes ont réintégré le service naval dans les années 1950, d’abord comme membres de la Marine royale du Canada (Réserve) à partir de 1951. Quelques années plus tard, les femmes ont été autorisées à s’enrôler dans la Force régulière, et non plus dans un service distinct.

Cependant, leur service pendant la Seconde Guerre mondiale a changé la société canadienne à jamais. Pendant que les hommes étaient en mer, les femmes ont travaillé dans tous les secteurs de l’économie et dans tous les domaines du service national, jetant ainsi les bases de la lutte pour l’égalité des femmes au cours des décennies qui ont suivi.

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