Questionnaire soumis par l’honorable Sally A. Gomery
Document d'information
Selon le nouveau processus de nomination des juges introduit par la ministre de la Justice le 20 octobre 2016, tout avocat ou juge canadien intéressé et ayant les qualifications requises peut poser sa candidature en remplissant un questionnaire à cet effet. Les questionnaires sont ensuite utilisés par les comités consultatifs à la magistrature à travers le Canada pour examiner les candidatures et soumettre à l’attention de la ministre de la Justice une liste de candidats « hautement recommandés » et « recommandés ». Les candidats sont avisés que certaines parties de leur questionnaire peuvent être rendues publiques, avec leur consentement, s’ils sont nommés à la magistrature.
Ci-dessous, les parties 5, 6, 7, et 11 du questionnaire rempli par l’honorable Sally A. Gomery.
Questionnaire relatif au processus de nomination à la magistrature
[...]
PARTIE 5 – EXIGENCES LINGUISTIQUES
Veuillez noter qu’en plus de vos réponses aux questions énoncées ci-après, vous serez peut-être évalué sur votre connaissance fonctionnelle des deux langues.
Sans formation supplémentaire, êtes-vous capable de lire ou de comprendre des documents de la cour :
- en anglais : oui
- en français : oui
Sans formation supplémentaire, êtes-vous en mesure de discuter d’affaires juridiques avec vos collègues :
- en anglais : oui
- en français : oui
Sans formation supplémentaire, êtes-vous capable de converser avec un avocat en cour :
- en anglais : oui
- en français : oui
Sans formation supplémentaire, êtes-vous capable de comprendre les observations orales présentées en cour :
- en anglais : oui
- en français : oui
PARTIE 6 – ÉTUDES
Noms des établissements, années d’études, diplôme et années d’obtention du diplôme :
- Université McGill, de 1986 à 1990, B.C.L. et LL.B. acquis en 1990
- Université de Toronto (Collège Trinity), de 1983 à 1986, B.A. (spécialisé) acquis en 1986
- Collège régional d’enseignement général et professionnel Champlain, Lennoxville, diplôme d’études collégiales, 1983
Formation continue :
- Je n’ai pas fait d’autres études universitaires après avoir obtenu mes diplômes en droit. J’ai pris part à la formation juridique permanente requise pour demeurer en règle avec le Barreau du Haut-Canada (12 heures par année) et le Barreau du Québec (30 heures tous les 2 ans). J’ai ainsi participé à ce qui suit :
- des conférences sur divers sujets offertes par le Barreau du Québec, l’Association du Barreau canadien, l’Association du Barreau du Comté de Carleton, etc.;
- des formations offertes par Ogilvy Renault LLP et Norton Rose Fulbright Canada LLP, y compris de la formation sur les préjugés inconscients et des séminaires sur des sujets comme la gestion efficace du temps, la délégation et la supervision de jeunes avocats et les bonnes techniques d’entrevue.
- Malheureusement, je ne peux fournir de détails au sujet de cette formation juridique permanente puisque je n’ai gardé aucun document à ce sujet.
Distinctions académiques :
- J’ai reçu le Prix Pelletier, Poirier, Leroux et Kimmel, qui reconnaît le civisme et le rendement scolaire, en 1990, décerné par la faculté de droit de l’Université McGill.
- J’ai été élue rédactrice en chef adjointe de la Revue de droit de McGill, de 1989 à 1990.
- J’ai reçu le Prix du procès fictif du Barreau de Montréal et le Prix du Barreau du Québec décerné par l’Université McGill en avril 1989.
- J’ai été nommée boursière de la faculté par l’Université McGill, de 1987 à 1988.
- J’ai reçu la bourse du Collège Trinity et j’ai été nommée boursière de la faculté en 1985.
- J’ai été invitée par l’association des anciens étudiants de l’Université de Toronto à parler au nom des étudiants de premier cycle à « Katedra at V » à l’occasion du cinquième anniversaire de l’établissement de la chaire d’études ukrainiennes.
- J’ai été élue présidente de la société des relations internationales de l’Université de Toronto, de 1984 à 1985.
PARTIE 7 – ANTÉCÉDENTS PROFESSIONNELS
Veuillez indiquer dans l’ordre chronologique et à partir du plus récent les emplois que vous avez exercés, et préciser pour chacun la durée applicable et le nom de l’employeur. Concernant les emplois dans le domaine juridique, veuillez inscrire les secteurs de travail ou les spécialisations, ainsi que les années correspondantes. Au besoin, indiquez si les secteurs de travail ont changé.
Expérience de travail dans le domaine juridique :
- Associée au sein du cabinet Norton Rose Fulbright Canada LLP (anciennement Ogilvy Renault LLP), de 2000 jusqu’à aujourd’hui. J’ai pratiqué le droit au sein du Groupe des litiges au bureau d’Ottawa. Actuellement, environ les deux tiers de mon temps sont consacrés aux poursuites civiles (particulièrement dans les domaines de la responsabilité professionnelle, du droit de la santé et des recours collectifs), et le reste à des travaux de conformité (y compris des enquêtes internes au sujet d’allégations d’inconduites ou de corruption). Pendant un certain temps, j’ai défendu un nombre considérable de clients dans des affaires d’assurances, mais cela a diminué avec le temps. Depuis 2000, je continue à représenter des clients devant les tribunaux du Québec et à donner des conseils sur des questions de droit civil. Là encore, cette partie de ma pratique a diminué avec le temps.
- En 2014, j’ai été élue membre du comité des associés, l’organe de gouvernance interne de Norton Rose Fulbright Canada LLP. De 2003 à 2008, j’étais présidente du Groupe des litiges de notre bureau à Ottawa.
- Avocate au sein du cabinet Ogilvy Renault LLP, à Ottawa (Ontario), de 1997 à 1999. J’ai pratiqué le droit au sein du Groupe des litiges du bureau d’Ottawa d’Ogilvy Renault de 1997 à 2000, avant de devenir associée. Mes activités au cours de cette période étaient axées sur les assurances, la responsabilité professionnelle et les litiges concernant les contrats et la construction en Ontario et au Québec.
- Avocate au sein du cabinet Gowlings LLP, de 1995 à 1997. De 1995 à 1997, j’ai été membre du groupe des avocats généraux de l’Association canadienne de protection médicale au bureau d’Ottawa de Gowlings.
- Avocate au sein du cabinet McCarthy Tetrault LLP, de 1992 à 1995. Je me suis jointe au bureau de McCarthy Tetrault à Montréal comme avocate après avoir terminé ma convention de stage à la Cour suprême du Canada. Environ 50 % de mon temps était consacré à la défense en cas de fautes professionnelles médicales. Le reste de mes activités concernait les litiges civils et commerciaux.
- Auxiliaire juridique à la Cour suprême du Canada, de 1990 à 1991. J’ai effectué un stage de 12 mois sous la supervision de la juge Claire L’Heureux-Dubé. Avant cela, j’ai travaillé trois mois sous la supervision du juge Frank Iacobucci.
- Étudiante au sein du cabinet McCarthy Tetrault LLP, à Québec et à Montréal, de 1988 à 1990.
- Adjointe à la recherche du professeur Paul-André Crépeau à la faculté de droit de l’Université McGill, de 1987 à 1988.
Expérience de travail dans un domaine non juridique :
- J’ai occupé des emplois d’été tout au long de mes études secondaires, de mes études de premier cycle et de mes études en droit, mais rien qui ne soit digne d’intérêt pour la présente demande.
Autres expériences professionnelles :
Inscrivez toutes les associations du barreau ou comités d’affaires juridiques dont vous êtes ou avez été membre, et tous les titres des postes que vous avez occupés au sein de ces groupes, ainsi que les dates correspondantes.
- Membre de l’Advocates’ Society
- Membre de l’Association du Barreau du Comté de Carleton
- Membre de l’Association des juristes d’expression française de l’Ontario
- Membre du comité éditorial du Class Action Journal de l’Institut canadien
- Membre du Barreau du Québec, de l’Association du Barreau de l’Ontario et de l’Association du Barreau canadien
Activités pro bono :
- À titre de vice-chancelière du diocèse anglican d’Ottawa, j’ai régulièrement fourni des services juridiques aux églises du diocèse de façon bénévole.
- Au cours des trois dernières années, j’ai représenté Henk Tepper, un producteur de pommes de terre du Nouveau‑Brunswick qui a été détenu au Liban durant 13 mois et qui sollicite des dommages-intérêts au gouvernement du Canada pour diverses violations de ses droits garantis par la Charte canadienne des droits et libertés.
- J’ai également offert des conseils juridiques à deux organisations sans but lucratif à Ottawa, soit le Centre 454 et l’Académie des Orchestres des jeunes d’Ottawa, de façon bénévole. Plus particulièrement, ces activités consistaient notamment à examiner des contrats et à offrir des conseils en matière d’emploi.
Enseignement et formation continue :
Indiquez toutes les organisations et activités de formation judiciaire ou juridique auxquelles vous avez pris part (par exemple, enseignement dans une faculté de droit, à l’Institut national de la magistrature, à l’Institut canadien d’administration de la justice).
- « Mastering Winning Discovery Techniques », formatrice pour l’Advocates’ Society, Civil Litigation Skills Certificate Program, 31 octobre 2016.
- « Conflicts of Interest of Interest to In-House Counsel », exposé présenté au groupe de juristes de TELUS, 7 avril 2016.
- « Discovery Skills Win at Trial », coprésentatrice et panéliste à la « 2016 Courthouse Series » de l’Advocates’ Society, Ottawa, 1er mars 2016.
- « Le rôle du correspondant à la Cour suprême du Canada », conférence pour avocats généraux intitulé « La Cour suprême du Canada et le monde des affaires : ce que tout avocat en entreprise devrait savoir », Norton Rose Fulbright Canada LLP, Montréal, 23 septembre 2015.
- Juge, exposés sur la lutte contre la corruption présentés par les étudiants au MBA de l’école de gestion Telfer, Ottawa, 28 février 2015 et 15 octobre 2014.
- « Travaux en cours! Analyse comparée des amendements au Code de procédure civile à la lumière de l’obligation de l’expert en Ontario », séminaire pour l’Association du Barreau canadien, section des assurances et des litiges civils, Montréal, 7 octobre 2014.
- « Something to consider when you sign the next mediation agreement: Union Carbide Canada Inc. v. Bombardier Inc., 2014 SCC 35 », séminaire de 12 minutes pour les avocats plaidants, Barreau du Haut-Canada, Toronto, septembre 2014.
- « Skills for Cross-Examination », formatrice pour la « 2014 Courthouse Series » de l’Advocates’ Society, Ottawa, 31 janvier 2014.
- Juge, Nelligan O’Brien Payne (procès fictif), Faculté de droit de l’Université d’Ottawa, 9 novembre 2013.
- « Train the Trainers Seminar », formation auprès de l’Advocates’ Society, Toronto, 6 septembre 2013.
- « Effective pre-trial conference briefs », séminaire de l’Association du Barreau du Comté de Carleton, Ottawa, juin 2012.
- « Expert Evidence: How has the Landscape Changed for Counsel, Experts and Courts? », Conférence sur les éléments de preuve avancés de l’Institut Canadien, Ottawa, 23 juin 2010.
- Juge, procès fictif d’avocats stagiaires, Programme de common law en français de l’Université d’Ottawa, 18 novembre 2010.
- « Fat Boy v. Mr. Hairpiece: The Ontario Court weighs in on conduct at discovery », Conférence annuelle du contentieux des affaires civiles de l’Association du Barreau du Comté de Carleton, Montebello, Québec, novembre 2010.
- « Defending Toxic Tort Claims » (avec Jamie Macdonald), Faculté de droit, Université d’Ottawa, Ottawa, 25 mars 2010.
- « Defending Toxic Tort Claims », Faculté de droit, Université d’Ottawa, Ottawa, 23 mars 2009.
- « The Civil Litigation Process in Québec », Ontario Masters Conference, Ottawa, 18 septembre 2008.
- « L’Affaire Double N Earthmovers : Perspectives civilistes et de la common law » (avec Claudia Dery), Section du droit de la construction de l’Association du Barreau canadien, Montréal, 10 octobre 2007.
- « Enforcement of Quebec Judgments in Ontario », Association du Barreau du Comté de Carleton, novembre 2000, Montebello, Québec.
- J’ai pris part à d’autres activités d’enseignement et de formation continue avant novembre 2000, mais je n’ai pas conservé de dossiers à cet égard.
Activités communautaires et civiques
Indiquez toutes les organisations dont vous êtes membre ou tout poste que vous avez occupé, ainsi que les dates correspondantes.
- Vice-chancelière du diocèse anglican d’Ottawa, de 2012 à aujourd’hui. À ce titre, j’ai conseillé le diocèse au sujet d’un large éventail de questions juridiques, y compris la gestion du risque, les problèmes liés à l’emploi et les réclamations.
- Membre du Cathedral Refugee Sponsorship Steering Committee et présidente du sous-comité de collecte de fonds, de 2015 à aujourd’hui. Le groupe directeur, en collaboration avec deux clubs « Rotary » à Ottawa, a parrainé une famille de réfugiés syriens qui s’est réinstallée au Canada et a également présenté d’autres demandes de parrainage.
- Membre du conseil d’administration et responsable du sous-comité de la gouvernance de SenseAbility Canada, de 2015 à aujourd’hui. SenseAbility est un groupe sans but lucratif mené par des entreprises, qui fait la promotion de l’embauche de personnes handicapées.
- Membres du conseil d’administration du Centre 454, de 2012 à 2015. Le Centre 454 est une organisation sans but lucratif qui offre du soutien aux personnes itinérantes et à risque de le devenir.
- Présidente de la campagne GIFT de la cathédrale Christ Church d’Ottawa en 2012. La campagne GIFT a permis d’amasser des fonds pour soutenir divers ministères du diocèse anglican d’Ottawa, y compris des refuges pour femmes et des centres de soutien aux itinérants.
- Membre du conseil d’administration de l’Académie des Orchestres des jeunes d’Ottawa, de 2008 à 2010. L’AOJO est une organisation sans but lucratif qui offre une formation musicale à des enfants et à des jeunes dans la région de la capitale nationale.
- Acclamée par Centraide Canada pour service méritoire pour ma participation à la Campagne conjointe de la Division du service fédéral en 1991.
[…]
PARTIE 11 – LE RÔLE DE LA FONCTION JUDICIAIRE DANS LE SYSTÈME JURIDIQUE CANADIEN
Le gouvernement du Canada souhaite nommer des juges ayant une connaissance approfondie de la fonction judiciaire au Canada. Afin de fournir une base solide à leur évaluation, on demande aux candidats de donner leur opinion sur des sujets généraux liés à la fonction judiciaire et au système juridique au Canada. Pour chacune des questions ci-dessous, veuillez fournir une réponse de 750 à 1000 mots.
1. Que considérez-vous comme votre plus grande contribution au droit et à la poursuite de la justice au Canada?
- Tout au long de ma carrière, j’ai participé à la réalisation d’importants progrès dans le domaine du droit canadien. Par exemple :
- J’ai été l’avocate principale de la Société canadienne du sang dans l’affaire SCS c. Freeman, 2010 ONSC 4885, une contestation des politiques s’appliquant aux donneurs de sang fondée sur l’article 15 de la Charte des droits et libertés de la personne. J’ai réussi à faire valoir que les garanties prévues à l’article 15 ne s’appliquaient pas aux politiques en matière de collecte de la SCS, d’une part parce que la SCS n’est pas une entité gouvernementale et ne met pas en œuvre de programme gouvernemental et, d’autre part, parce que le don de sang n’est pas un avantage conféré par la loi ni une obligation imposée par la loi. Ces arguments ont fait progresser l’analyse juridique de ces questions et, par extension, de la Charte.
- Dans une série d’affaires portées devant l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario et la Commission d’appel et de révision des professions de la santé qui ont abouti à l’affaire WA c. JB, 2016 CanLII 11579, j’ai fait valoir que le Collège avait tenté d’imposer aux médecins des exigences en matière de production de rapports qui n’étaient pas conformes à la loi. Même s’il semble s’agir d’une affaire à la portée très étroite, elle a une incidence importante non seulement sur les médecins, mais aussi sur les facultés de médecine partout en Ontario. La décision de la Commission sera examinée par la Cour divisionnaire de l’Ontario en 2017.
- Dans la décision Glaxo Wellcome PLC c. Ministre du Revenu national (1998) 228 NR 164, j’ai avancé l’argument qui a convaincu la Cour d’appel fédérale de reconnaître un nouveau recours connu comme l’interrogatoire préalable en equity (une mesure dont le seul but est d’obtenir des renseignements dont vous avez besoin pour vous prévaloir de vos droits contre une partie qui vous a lésé, mais dont l’identité est inconnue).
- J’ai dirigé l’équipe juridique du plaignant dans l’affaire Statham c. Société Radio-Canada, [2012] 2 RCF 421, qui a permis de préciser l’obligation des entités fédérales, comme la SRC, de répondre aux demandes d’accès à l’information.
- Je suis fière de ces contributions, mais j’ai le sentiment que de nombreux avocats plaidants qui exercent la profession depuis quelques décennies pourraient énumérer des affaires tout aussi importantes auxquelles ils ont pris part. Pour cette raison, je ne crois pas que cet ensemble de droit soit ma contribution la plus importante.
- Je suis également fière de la façon dont j’ai fait la promotion de pratiques d’entreprises éthiques au cours des 15 dernières années de ma carrière. J’ai d’abord fait valoir des pratiques exemplaires en matière d’approvisionnement auprès de grandes entreprises même si, à l’époque, on imposait peu de sanctions à l’égard des mauvais comportements. Lorsque les autorités canadiennes ont commencé à adopter des lois, des politiques et des pratiques qui prévoyaient des conséquences pour les actions illégales ou contraires à l’éthique en matière d’appel d’offres, j’ai mis sur pied un groupe d’éthique en entreprise et de lutte contre la corruption au sein de notre cabinet. Dans certains cas, nous avons réussi à avoir un effet important sur les pratiques de nos clients. J’ai donné de la formation sur les pratiques exemplaires aux membres de la direction et aux employés d’une entreprise nationale de télécommunications, d’une entreprise multinationale d’ingénierie et d’une société d’État. Récemment, j’ai dirigé une enquête pour Agrium sur les répercussions potentielles sur les droits de la personne qu’entraînent ses achats de phosphate auprès d’une entreprise au Maroc qui extrait la matière dans le Sahara occidental, un territoire contesté. Le rapport d’études d’impact sur les droits de la personne qui en a découlé a depuis été publié en ligne et est accessible à l’adresse suivante : https://www.agrium.com/sites/default/files/agrium_hrdd_summary_report.pdf [en anglais seulement]. Il s’agissait de l’une des premières fois où une entreprise canadienne s’investissait dans ce genre d’analyse de manière transparente.
- Là encore, même si je suis fière de mes réalisations dans ce domaine de pratique, je ne pense pas que cela représente ma contribution la plus importante à ce jour. Bien que des efforts visant l’atteinte de normes d’éthique élevées et la réalisation d’études d’impact sur les droits de la personne seront plus souvent déployés au Canada (et dans le monde) avec le temps, je reconnais que d’autres avocats ont consacré toute leur carrière à ces enjeux, alors que je n’y ai consacré qu’une partie de la mienne.
- Selon moi, ma plus importante contribution réside dans la façon dont je me suis conduite durant mes 25 années de carrière à titre d’avocate. J’ai prêché par l’exemple. Je n’ai pas compromis mon intégrité. Je pense que cela a eu une incidence considérable sur mes collègues, mes clients et d’autres personnes avec qui j’ai eu des échanges. J’ai encadré de nombreux associés et étudiants et je leur ai donné la possibilité de croître et de cheminer réellement sur le plan professionnel. J’ai soutenu des employés et j’ai écouté leurs inquiétudes. J’ai fait la promotion de la diversité et de l’inclusion, non pas seulement parce que je considérais que c’était une bonne idée, mais également parce que cela fait partie intégrante de l’ADN de mon cabinet et de ma profession. J’ai parlé ouvertement de mon engagement envers ma famille et de ma croyance selon laquelle, à titre d’avocate, le fait d’avoir une famille et le fait d’avoir une carrière ne s’excluent pas mutuellement. J’ai investi du temps et de l’énergie, de façon bénévole, dans des projets communautaires. Je pense que j’ai respecté les normes les plus élevées de ma profession en m’efforçant de faire de mon mieux du point de vue personnel.
- À mon avis, ce leadership a été ma plus importante contribution, car c’est celle qui m’a demandé le plus d’effort et qui a eu le plus d’incidence sur le plus grand nombre de personnes. Faire la bonne chose lorsqu’on est associée d’un grand cabinet d’avocat en droit des sociétés n’est pas toujours facile. Les changements sont progressifs. Il faut lutter contre le cynisme et la fatigue. Je pense que notre société penche vers les pratiques éthiques et progressistes, si on lui donne un petit coup de pouce. La meilleure façon de convaincre les autres de cette réalité est d’agir en fonction de ces valeurs.
2. Comment votre expérience vous a-t-elle permis de saisir la variété et la diversité des Canadiens et des Canadiennes et leurs perspectives spécifiques?
- Dès mon jeune âge, j’ai constaté la variété et la diversité qui caractérisent la culture canadienne, et les choix que j’ai faits sur le plan personnel et le plan professionnel ont contribué à cette perspective.
- Je suis née au Québec. Ma belle-mère est francophone. Mon père croit fermement en une identité canadienne ancrée dans le mariage des cultures anglophone et francophone. J’ai fréquenté l’école primaire francophone, et j’ai grandi en regardant tant Fanfreluche que The Friendly Giant et en lisant tant Molière que Shakespeare. Une fois à l’école de droit, j’ai étudié à la fois la common law et le droit civil, et j’ai mis les deux en pratique tout au long de ma carrière.
- Mon expérience m’a appris que des personnes raisonnables peuvent aborder un même problème de manières très différentes. Cette théorie a été renforcée par ma formation en droit civil et en common law. Le Code civil du Québec énonce un ensemble de principes détaillés qui régissent l’état, les obligations et les droits civils. La common law a évolué en fonction de précédents précis et peut sembler beaucoup plus ad hoc. S’ils sont saisis de problèmes semblables, le tribunal civil et le tribunal de common law arrivent souvent aux mêmes conclusions. Mais la façon dont les juges tranchent une question et la façon dont ils expliquent leur raisonnement peut différer considérablement.
- J’ai maintenant une meilleure compréhension de la façon dont la perspective peut influer sur le raisonnement juridique. Les différences de point de vue tiennent non seulement à l’existence de systèmes juridiques concurrents, mais aussi à la distinction entre les cultures et même les attentes individuelles. Cela constitue à la fois un défi et une possibilité. Le défi découle de la nature humaine qui nous amène à penser que la meilleure façon de faire est celle que nous connaissons et à résister aux nouvelles idées. Mais différentes approches constituent aussi une possibilité, car elles peuvent offrir des solutions qui n’avaient pas été envisagées par le passé.
- Dans cette optique, j’ai passé ma carrière à chercher la diversité des idées et des expériences, et à tenter d’en tirer des leçons.
- Au sein de mon cabinet, et en tant qu’avocate de façon plus générale, j’ai participé activement à des initiatives sur la diversité et l’inclusion. Cela m’a amenée à être exposée à un large éventail de points de vue. L’une des récentes initiatives les plus excitantes auxquelles j’ai pris part consistait à soutenir la nouvelle faculté de droit Bora Laskin à l’Université Lakehead. J’ai plaidé en faveur de son soutien au sein de mon cabinet parce qu’il s’agit de la seule faculté de droit au Canada qui cherche à recruter des étudiants autochtones et des étudiants dont les parents n’ont pas fréquenté l’université, des groupes démographiques cruellement sous-représentés dans la profession d’avocat au Canada. En outre, Lakehead offre un programme intégré travail-études, le premier dans son genre au Canada, qui permet aux étudiants en droit de satisfaire aux exigences de stage en Ontario grâce à la réalisation de stages pendant leurs études à la faculté de droit. Ainsi, Lakehead permet à des étudiants qui, autrement, n’auraient pas pu étudier le droit et qui sont prêts à le faire, d’exercer la profession dès la fin de leurs études. Ces diplômés vont fort probablement apporter de nouvelles perspectives et de nouvelles idées à la pratique du droit.
- J’ai également eu la chance de mieux connaître la diversité de la société canadienne dans le cadre de mon travail auprès de SenseAbility, une organisation sans but lucratif qui favorise l’emploi de personnes handicapées. Grâce à SenseAbility, je comprends mieux les difficultés auxquelles font face de nombreux Canadiens qui sont manifestement prêts et aptes à travailler, mais qui subissent un préjudice et qui sont aux prises avec des obstacles physiques qui les empêchent de trouver un emploi.
- Ma collaboration avec des organismes communautaires m’a également permis de prendre conscience d’expériences de vie très différentes de la mienne. Durant quatre ans, j’ai siégé au conseil de gestion du Centre 454, un centre de soutien pour les personnes itinérantes et à risque de le devenir. Grâce à cette expérience, j’ai appris de quelle façon la pauvreté mine tous les autres droits de la personne et crée des situations qui font que les gens ont presque inévitablement une mauvaise impression de notre système juridique. Récemment, j’ai pris part à des efforts de parrainage de réfugiés par l’intermédiaire du diocèse anglican de ma région. Encore une fois, cela m’a sensibilisée aux différents points de vue que peuvent avoir les gens au Canada et à la nécessité de surmonter les préjugés du passé pour tenir de vraies conversations au sujet des droits et des obligations.
- Enfin, certains travaux précis que j’ai effectués m’ont permis d’en apprendre davantage. En 2015, l’Université Dalhousie a retenu mes services pour intervenir dans le cadre d’une crise qui a éclaté quand l’université a appris que des étudiants du programme de médecine dentaire avaient affiché des commentaires misogynes et racistes sur leur page Facebook. La situation a soulevé un certain nombre de questions juridiques et éthiques et a suscité un grand intérêt chez les médias locaux. La directrice des affaires juridiques de l’université a proposé un processus de justice réparatrice pour tenter de régler les plaintes liées aux commentaires affichés sur Facebook.
- Au début, j’étais sceptique et je me demandais si cela pouvait fonctionner, compte tenu des intérêts divergents des personnes impliquées et de la pression exercée par la communauté dans son ensemble qui réclamait un processus plus conventionnel. Toutefois, le processus de justice réparatrice a été un grand succès. Cela me rappelle l’importance de faire preuve d’ouverture à l’égard de nouvelles approches.
- J’ai également appris à adopter différents points de vue en travaillant pour des entités comme la Société de logement communautaire d’Ottawa, EDC et l’Université d’Ottawa. Au moment de déterminer ce qu’il faut faire, ces organisations doivent tenir compte non seulement de la loi, mais aussi des intérêts des groupes qu’elles servent, qu’il s’agisse de personnes touchant de l’aide sociale, de petites entreprises ou d’étudiants.
3. Décrivez le rôle que doit jouer un juge dans une démocratie constitutionnelle.
- Au niveau le plus élémentaire, un juge arbitre des litiges. Les juges et les tribunaux nous permettent de fonctionner d’une manière civilisée. Les gens ont affaire à notre système juridique au cours des périodes les plus éprouvantes de leur vie : durant des conflits familiaux, lorsqu’ils font face à des accusations criminelles et lorsqu’ils sont aux prises avec des litiges commerciaux ou personnels. Au moment de régler ces questions, les juges doivent agir avec autorité, dignité et compassion et respecter toutes les personnes concernées. Les assemblées législatives adoptent des lois, l’organe exécutif ordonne leur application, et les juges doivent comprendre de quelle façon elles fonctionnent réellement. Les décisions judiciaires sont rarement parfaites; presque par définition, l’une des parties est plus satisfaite de la décision que l’autre. Nous éprouvons également d’énormes problèmes avec l’accès à notre système juridique au Canada; il manque de ressources et il est si dispendieux qu’il est inaccessible pour de nombreuses personnes. Malgré ces restrictions, les juges jouent un rôle crucial en assurant la résolution de toutes sortes de problèmes immédiats et, ce faisant, ils permettent aux personnes de passer à autre chose et de tourner la page.
- Bien sûr, le rôle d’un juge est beaucoup plus large que cela. Par leurs décisions, les juges façonnent le droit et, par extension, la société elle-même. Les juges assument nécessairement ce rôle pour diverses raisons. Même les lois et les règlements les plus clairs requièrent généralement une certaine interprétation. On peut appliquer des lois pour régler des problèmes qui n’avaient pas été envisagés au moment de leur rédaction. De plus, de nombreux principes qui sont fondamentaux pour notre système juridique ne figurent nulle part. Par exemple, les principes d’équité et de franc jeu sont profondément enchâssés dans les traditions de la common law du Canada, même s’ils ne sont pas inscrits dans la loi.
- Au cours des dernières décennies, nous avons vu d’excellents exemples de l’importance du rôle d’interprète et d’artisan du droit rationnel et prévenant que doit jouer le juge. Dans l’arrêt Egan c. Canada, [1995] 2 R.C.S. 513, rendu en 1995, la Cour suprême du Canada a reconnu l’orientation sexuelle comme motif analogue de discrimination, faisant du Canada un chef de file mondial au chapitre des droits des LGBT qui ont depuis été largement reconnus. Dans l’arrêt La Reine c. Ron Engineering, [1981] 1 R.C.S. 111, la Cour a appliqué une analyse créative de la dimension contractuelle des appels d’offres. L’analyse a favorisé l’application de règles du jeu équitables dans le domaine de la passation de marchés dans les secteurs public et privé au Canada, ce qui ne se retrouve pas dans la jurisprudence applicable aux approvisionnements de la plupart des autres administrations. Plus récemment, dans l’arrêt Bhasin c. Hrynew, [2014] 3 R.C.S. 494, la Cour a reconnu l’obligation d’agir de bonne foi dans le cadre d’opérations commerciales. Même si l’obligation d’agir de bonne foi est établie dans le droit civil depuis longtemps, sa reconnaissance en common law représente une vraie évolution de la relation juridique entre les parties à un contrat et aura une profonde incidence sur de nombreux Canadiens.
- · Le rôle interprétatif d’un juge requiert une profonde compréhension non seulement du droit, mais également de l’influence réciproque des lois et des principes juridiques. Il exige également une conscience permanente de l’effet des décisions judiciaires sur les personnes. Les décisions ne se prennent jamais en vase clos. Les juges doivent tenir compte des personnes qui sont directement et indirectement touchées par celles-ci. Cela n’empêche pas les juges de prendre des décisions difficiles, mais ils doivent le faire de façon consciente et avec compassion.
- Les juges doivent aussi communiquer leurs décisions de manière persuasive. Il ne s’agit pas d’une banalité, mais plutôt d’une réelle exigence de l’emploi. Les décisions judiciaires ne sont efficaces que dans la mesure où elles sont comprises et respectées par les personnes qu’elles touchent. Il est difficile de convaincre des plaideurs qu’ils ont été traités équitablement si les écrits ou les actions d’un juge dans une salle d’audience reflètent une expérience ou un point de vue limités.
- Certaines personnes s’opposeraient à la description que j’ai fournie du rôle des juges au motif que celle-ci donne à des personnes nommées à un poste un pouvoir inacceptable dans le contexte d’une démocratie. Je ne suis pas d’accord. La nomination des juges est conforme aux valeurs démocratiques si deux conditions fondamentales sont satisfaites.
- En premier lieu, le processus de nomination doit être apolitique, réfléchi et judicieux. Les juges nommés ne doivent pas seulement être intelligents, indépendants et vaillants, ils doivent aussi être d’excellents communicateurs. Ils doivent être au courant de la diversité de l’expérience canadienne, respectueux et prêts à écouter et à apprendre.
- En deuxième lieu, les juges doivent comprendre qu’ils sont jugés en tout temps par ceux qui se présentent devant eux et par ceux qui lisent leurs décisions. L’institution est aussi forte que les personnes qui s’y trouvent. Le meilleur argument en faveur d’une magistrature nommée est l’efficacité des juges nommés.
- Le rôle que jouent les juges au sein de notre démocratie constitutionnelle est crucial. Les Canadiens doivent faire confiance aux juges, et les juges doivent se montrer à la hauteur de cette confiance en s’acquittant de l’immense responsabilité qui leur incombe au sein de notre société.
4. À qui s’adressent les décisions de la cour à laquelle vous vous portez candidat(e)?
- Les décisions de la cour s’adressent en premier lieu aux parties directement concernées par l’affaire. Ce ne sont peut-être pas les seules personnes touchées par un jugement en particulier, mais elles sont, pour les besoins immédiats, les plus importantes. Les juges doivent rédiger des décisions qui résument clairement les éléments de preuve, qui énoncent les principes juridiques applicables et qui expliquent les motifs de leur décision. Les décisions ne devraient pas comporter de jargon inutile qui donne un sentiment d’intelligence aux juges et avocats, mais qui perd les lecteurs ordinaires. Même lorsque des termes juridiques sont nécessaires (comme c’est parfois le cas), les juges devraient avoir recours, dans la mesure du possible, à un langage qu’un non-juriste peut comprendre. Les parties ne peuvent avoir confiance dans le système judiciaire si elles ne comprennent pas les motifs de l’issue. Elles ne peuvent prendre de décision quant à la marche à suivre si elles ne comprennent pas leurs droits ni leurs obligations. Un juge a le devoir de communiquer aux parties qui se présentent devant lui la décision de la cour d’une manière qui leur permet d’agir en conséquence.
- Une rédaction claire est particulièrement importante lorsque les parties se représentent elles-mêmes. Toutefois, j’ajouterais que c’est important dans chaque affaire, parce qu’en fin de compte, une personne qui est directement touchée par une décision doit savoir pour quelle raison la décision a été prise, qu’il s’agisse d’une personne qui divorce, d’un plaignant qui engage des poursuites pour préjudice personnel ou d’un investisseur en situation de conflit entre actionnaires. L’avocat des parties peut les aider en ce qui a trait aux nuances et aux points de détail, mais le raisonnement fondamental devrait être évident.
- Les décisions de la Cour supérieure s’adressent en deuxième lieu aux avocats. Ceux‑ci doivent expliquer la décision à leurs clients et formuler des recommandations dans ce contexte. De plus, les juristes en général doivent comprendre le raisonnement de la cour afin d’en tenir compte dans d’autres affaires. Les décisions mal rédigées ne font pas que nuire aux parties, elles font activement obstacle à l’évolution du droit.
- D’autres tribunaux ont également intérêt à comprendre les décisions rendues par la Cour supérieure. Bien que les décisions de la Cour supérieure ne soient pas contraignantes dans la plupart des cas, elles peuvent avoir une importante valeur persuasive pour d’autres tribunaux, y compris les cours d’appel, si elles sont bien étayées et rédigées.
- Par ailleurs, les décisions de la cour peuvent également s’adresser aux législateurs. Le droit évolue en fonction d’un dialogue entre les tribunaux et le Parlement. Il ne peut pas y avoir de dialogues constructifs si les tribunaux chargés d’interpréter la loi ne sont pas en mesure d’expliquer pourquoi une loi en particulier est invalide, n’est pas applicable ou a une incidence imprévue.
- Enfin, les décisions de la Cour supérieure s’adressent également à l’ensemble de la société. Ce ne sont pas toutes les décisions qui établissent un précédent général ou nouveau ou qui mettent en cause des personnes ou des circonstances qui attirent l’attention du public. De façon générale, je crois que les avocats tendent à surévaluer l’intérêt qu’ont les non-juristes à l’égard des jugements, même ceux qui sont bien rédigés. Mais à l’occasion, les tribunaux vont aborder une question dont les répercussions sont vastes ou qui suscite un grand intérêt pour d’autres raisons. Ainsi, je crois fermement que les décisions devraient être rédigées dans un langage accessible. Les jugements qui communiquent clairement et de manière convaincante les motifs d’une décision permettent d’accroître la confiance du public dans le système judiciaire.
5. Prière d’indiquer les qualités personnelles, les compétences et l’expérience professionnelles ainsi que l’expérience de vie qui, selon vous, vous rendent apte à exercer le rôle de juge.
- J’aborderais mon rôle de juge comme j’ai abordé mon rôle d’avocate, c’est‑à‑dire avec intelligence; une bonne connaissance du droit et un engagement permanent à l’améliorer; des compétences en rédaction supérieures; une excellente capacité d’analyse; un jugement éclairé; et une excellente éthique de travail. J’apporterais également des qualités personnelles qui, selon mon expérience, sont essentielles à un bon juriste, soit notamment la volonté d’écouter, la compassion, le sens de l’humour et le dévouement à l’égard du public.
- Mon père a été avocat, puis juge. Il a été et est toujours une inspiration pour moi. À ses yeux, l’exercice du droit est une vocation au même titre qu’une profession. Les avocats et les juges sont au service de la loi et des gens qui s’en remettent à celle‑ci pour obtenir de l’aide. Mais mon père m’a aussi enseigné qu’être juge était un emploi. Il faut travailler dur et ne jamais tomber dans le piège de croire qu’on est au-dessus des affaires qu’on doit juger. Les juges enfilent leurs pantalons une jambe à la fois comme tout le monde.
- Ma belle-mère a aussi été avocate, puis juge, mais elle a adopté une approche différente de celle de mon père à bien des égards. Ma belle-mère est un modèle pour moi. Sa carrière a été une énorme partie de son identité et continue de l’être. Elle m’a appris que je pouvais avoir une profession et une famille.
- Ma mère était infirmière. Grâce à elle, j’ai pris conscience du profond scepticisme qu’éprouvent de nombreuses personnes au sujet de l’équité du système juridique et j’ai appris que l’application des règles devrait être empreinte de compassion.
- Après avoir terminé le cégep, j’ai fait un diplôme de premier cycle à l’Université de Toronto en langue et en histoire russes. En 1986, j’ai étudié quatre mois à l’Université de Moscou. À ce moment‑là, je croyais que j’allais obtenir un doctorat et que j’allais enseigner. Mon père m’a convaincue de m’inscrire à l’école de droit et m’a promis qu’il paierait pour mes études de troisième cycle si je détestais cela et que je laissais tomber les cours. C’était très malin de sa part, puisque je me suis rendu compte peu de temps après avoir commencé les cours à la faculté de droit que j’aimais cela et que j’étais naturellement douée en droit des litiges.
- J’ai obtenu des diplômes tant en droit civil qu’en common law à l’Université McGill parce que je voulais comprendre les deux systèmes et étudier en français et en anglais. En début de carrière, j’ai exercé ma profession à Montréal, mais plus tard, j’ai déménagé à Ottawa parce que mon mari y travaillait. Même si la plupart de mes dossiers de litige sont maintenant devant les tribunaux de l’Ontario, je continue de m’occuper de poursuites au Québec également. Cela m’a obligée à garder l’esprit vif.
- Ma pratique m’a amenée à faire preuve de vivacité intellectuelle d’autres façons. Grâce à des efforts conscients, à la chance et à un emplacement privilégié, j’ai été en mesure de résister à l’hyperspécialisation. Je suis avocate dans le cadre de recours collectifs et de toutes sortes de causes civiles, mais je m’occupe aussi des causes relatives à la Charte, de litiges commerciaux/contractuels et d’audiences devant les tribunaux administratifs. Environ le tiers de mes activités actuelles consiste à donner des conseils à des clients pour régler des problèmes d’approvisionnement et de lutte contre la corruption. La diversité de ma pratique m’a empêchée de devenir complaisante et m’a forcée à acquérir des connaissances au sujet d’un large éventail de questions juridiques.
- Je ne serais pas parvenue à un tel succès professionnel sans de solides compétences en défense des droits. Je sais comment formuler efficacement un argument et une analyse, comme en témoigne clairement ma feuille de route devant les tribunaux et mes activités de résolution hors cour. La capacité de bien écrire et de le faire de manière convaincante est une habileté essentielle pour un juge. Une personne qui lit un jugement doit être en mesure de comprendre pourquoi la cour a tiré une telle conclusion et doit être convaincue du bien-fondé de la décision. En tant que juge, je travaillerais fort pour communiquer efficacement, parce qu’il est essentiel de conserver la confiance du public à l’égard de notre système juridique.
- Ma solide éthique de travail constitue le dernier aspect de mon profil professionnel. Tout en pratiquant le droit, j’ai élevé une famille sans cesser d’être active au sein de ma collectivité et de contribuer à la gestion de mon cabinet. Cela a exigé de l’autodiscipline et beaucoup d’énergie. Le fait que j’aime réellement ce que je fais m’aide, mais il demeure que j’y consacre beaucoup d’heures. Je ne verrais pas une nomination à la magistrature comme une façon de réduire ma charge de travail. Selon mes observations, les bons juges travaillent fort et, encore une fois, il s’agit d’un atout que je mettrais en valeur dans mon emploi.
6. Compte tenu de l’objectif voulant que les Canadiens et Canadiennes se reconnaissent et reconnaissent leurs expériences de vie au sein de la magistrature, vous pouvez, si vous le voulez, ajouter des renseignements sur vous-même que vous croyez être utiles aux fins de cet objectif.
- Je suis une femme d’âge moyen qui a élevé une famille. Cela a une incidence sur ce que je dis et ce que je fais. Je pense que c’est quelque chose auquel les gens pourraient s’identifier si j’étais juge.
- Mes expériences personnelles m’ont également fait prendre conscience de la nécessité de lutter contre les préjugés conscients et inconscients.
- Lorsque j’étais une apprentie avocate, un associé de sexe masculin (qui a ultérieurement été nommé juge) m’a dit que je ne devrais pas avoir d’enfants, parce qu’une femme ayant des enfants ne peut devenir associée. Lorsque j’étais avocate principale, un associé de sexe masculin m’a suggéré d’abandonner ma carrière en droit des litiges parce qu’« une salle d’audience n’est pas un endroit pour une femme ayant des enfants ». Lorsque je suis devenue associée, un collègue du groupe de droit des affaires m’a dit que les femmes n’avaient pas l’endurance nécessaire pour la pratique en entreprise. On m’a fait la remarque alors que j’étais sur le point de commencer un procès de quatre mois à titre d’avocate principale dans une affaire relative à la Charte ayant d’importantes répercussions liées à la situation juridique, aux opérations et à la réputation de notre client.
- Rien de cela ne m’a dissuadée de poursuivre mes objectifs professionnels et personnels. J’ai exercé le droit avec succès et mené une carrière fructueuse tout en élevant une famille formidable avec mon époux. Mes expériences personnelles m’ont motivée à me battre pour la diversité et l’inclusion au sein de mon cabinet et de la profession juridique de façon plus générale. En 2008, grâce à mes activités de défense des droits, mon cabinet a créé un programme officiel de diversité et d’inclusion. J’ai été chargée du programme et, plus tard, j’ai été nommée agente en chef de la diversité et de l’inclusion du cabinet au Canada. Dans l’exercice de ces fonctions, j’ai dirigé des initiatives relatives à la diversité et à l’inclusion du cabinet à l’échelle du Canada. Plus particulièrement, j’ai conseillé la direction du cabinet sur des politiques ayant une incidence sur les femmes et sur les membres d’autres groupes d’équité et j’ai dirigé des programmes faisant la promotion de la diversité et de l’inclusion au sein de la profession juridique et du milieu des affaires canadien dans son ensemble.
- Dans le cadre de mon rôle de leader, j’ai notamment :
- amorcé la collecte de renseignements démographiques au moyen de sondages sur les groupes d’affinité menés au sein du cabinet, afin que nous ayons des données de référence indiquant les domaines où nous pouvons nous améliorer;
- revu les politiques de la société concernant le congé de maternité et le congé parental et les systèmes de soutien pour les avocats qui reviennent de congé;
- fait la promotion avec succès de l’établissement d’un nombre minimal d’associées au sein du comité des associés, le conseil d’administration de notre cabinet;
- supervisé la création de Pride, le groupe d’affinités LGBT de notre cabinet, qui a depuis gagné des prix pour son rôle de leadership;
- mis en œuvre une formation sur les préjugés inconscients à l’intention de tous les avocats et de tous les principaux dirigeants du cabinet;
- pris part à des discussions au sein du cabinet, avec des clients et dans des facultés de droit au sujet des enjeux liés à la diversité et à l’inclusion;
- fait en sorte que le cabinet se joigne à SenseAbility, une organisation sans but lucratif qui fait la promotion de l’embauche de personnes handicapées et joué un rôle actif à titre de membre de son conseil de direction;
- coordonné le versement sur plusieurs années d’un important don à la nouvelle faculté de droit Bora Laskin à l’Université Lakehead, parce qu’elle cherche à recruter des étudiants autochtones ainsi que des étudiants dont les parents n’ont pas fait d’études postsecondaires;
- participé activement à l’initiative Diversité 50, mise en œuvre il y a quatre ans, qui favorise la nomination de femmes et de membres d’autres groupes sous-représentés à des postes de direction au sein de conseils publics.
- En résumé, je crois ardemment que la profession juridique devrait regrouper toute la gamme de points de vue et d’expériences possibles, et je lutte activement contre les préjugés inconscients et institutionnels chaque fois que j’y suis confrontée. Je continuerai de le faire en tant que juge.
Détails de la page
- Date de modification :