Questionnaire de l’honorable Anne Louise Kirker

Document d'information

Selon le nouveau processus de demande de nomination à la magistrature institué par la ministre de la Justice le 20 octobre 2016, tout avocat ou juge canadien intéressé et ayant les qualifications requises peut poser sa candidature à la magistrature fédérale en remplissant un questionnaire à cet effet. Les questionnaires sont ensuite utilisés par les comités consultatifs à la magistrature à travers le Canada pour examiner les candidatures et soumettre à l’attention de la ministre de la Justice une liste de candidats « hautement recommandés » et « recommandés ». Les candidats sont avisés que certaines parties de leur questionnaire pourraient être rendues publiques, avec leur consentement, s’ils sont nommés à la magistrature. Les renseignements sont divulgués comme les candidats les ont fournis au moment de postuler, sous réserve des modifications apportées pour protéger leur vie privée.

Voici les parties 5, 6, 7 et 11 du questionnaire rempli par l’honorable Anne Louise Kirker.

Questionnaire en vue d’une nomination à la magistrature

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Partie 5 – Exigences linguistiques

Veuillez prendre note qu’en plus de vos réponses aux questions suivantes, votre connaissance fonctionnelle des deux langues pourrait être évaluée.

Sans formation supplémentaire, êtes-vous capable de lire ou de comprendre des documents de la cour :

  • En anglais : Oui
  • En français : Non

Sans formation supplémentaire, êtes-vous en mesure de discuter d’affaires juridiques avec vos collègues :

  • En anglais : Oui
  • En français : Non

Sans formation supplémentaire, êtes-vous capable de converser avec un avocat en cour :

  • En anglais : Oui
  • En français : Non

Sans formation supplémentaire, êtes-vous capable de comprendre les observations orales présentées en cour :

  • En anglais : Oui
  • En français : Non

Partie 6 – Études

Noms des établissements, années d’études, diplômes et années d’obtention :

  • Baccalauréat en sciences infirmières, Université de l’Alberta, 1987
  • Baccalauréat en droit, Université de Calgary, 1991

Formation continue :

J’ai assisté à plusieurs séminaires de formation juridique continue au fil des ans (je n’en ai pas tenu le compte). Plus récemment, j’ai suivi des formations à l’intention des arbitres offertes par le Barreau de l’Alberta, y compris :

  • « Prise de décisions et rédaction de décisions efficaces », Barreau de l’Alberta, Tribunal Office, juin 2016
  • « L’évaluation de la crédibilité et les scénarios de salles d’audience difficiles », Barreau de l’Alberta, Tribunal Office, octobre 2016
  • « Rédaction de décisions : les motifs », Foundation of Administrative Justice, septembre 2012

Distinctions académiques :

  • 2016 – Nommée membre de l’American College of Trial Lawyers
  • 2014 – Réseau des femmes exécutives : Palmarès des 100 femmes les plus influentes
  • 2012 – Nommée conseillère de la reine
  • De 2011 à 2017 – Best Lawyers in Canada (évaluation par les pairs) : Reconnue dans les domaines des appels (avocate de l’année, 2016), des litiges en droit commercial et en droit des sociétés (avocate de l’année, 2017), du droit des assurances (avocate de l’année, 2012), du droit de la responsabilité professionnelle des avocats (avocate de l’année, 2014), des litiges liés aux préjudices corporels et du droit de la responsabilité du fait des produits
  • De 2013 à 2017 – Canadian Legal Lexpert Directory (évaluation par les pairs) : Recommandée pour les litiges en matière d’assurance commerciale et de responsabilité professionnelle
  • 2004 – Retenue par la revue Lexpert comme l’une des meilleures avocates âgées de moins de 40 ans
  • Concours de plaidoirie en droit international Philip C. Jessup, première place pour les mémoires et quatrième place lors de la ronde canadienne du concours de plaidoirie, 1991
  • Concours de plaidoirie William McGillivray Shield, Université de Calgary, Faculté de droit, 1991
  • Concours de plaidoirie de la Coupe Gale, première place pour les mémoires et deuxième place au concours de plaidoirie, 1991
  • Discours de graduation, Université de l’Alberta, Faculté des sciences infirmières, 1987

Partie 7 – Antécédents professionnels

Veuillez indiquer, dans l’ordre chronologique et à partir du plus récent, les emplois que vous avez exercés et précisez pour chacun la durée d’emploi et le nom de l’employeur. En ce qui concerne les emplois dans le domaine juridique, veuillez inscrire les secteurs de travail ou les spécialisations, ainsi que les années correspondantes. Au besoin, indiquez si les secteurs de travail ont changé.

Expérience de travail dans le domaine juridique :

  • Depuis 1998 – Norton Rose Fulbright Canada s.r.l. (anciennement Macleod Dixon), avocate et associée en litiges
  • De 1991 à 1998 – MacKimmie Matthews, stagiaire et avocate en litiges

Expérience de travail dans un domaine non juridique :

  • De 1987 à 1990 – Hôpital pour enfants de Calgary, infirmière pédiatrique (à temps plein avant d’entrer à la faculté de droit et pendant les étés de mes 1re et 2e années d’études; à temps partiel durant l’année scolaire)

Autres expériences professionnelles :

Inscrivez toutes les associations du barreau ou comités d’affaires juridiques dont vous êtes ou avez été membre, et tous les titres des postes que vous avez occupés au sein de ces groupes, ainsi que les dates correspondantes.

  • Alberta Law Reform Institute, membre du conseil d’administration (2010-aujourd’hui) – voir la partie 8 ci-dessous pour la liste des rapports de l’Institut auxquels j’ai participé.
  • Alberta Lawyers Insurance Exchange, membre du conseil consultatif (2014-2017)
  • American College of Trial Lawyers, membre (2016-aujourd’hui)
  • Association du Barreau canadien (1992-aujourd’hui), présidente de la division de l’Alberta, section du sud du droit des assurances
  • Association d’assurance des juristes Canadiens, représentante du Barreau de l’Alberta (2012-2014)
  • Barreau de l’Alberta, membre bénévole du comité, conseillère et présidente (1998-2017)
    • Présidente (2016-2017)
    • Présidente désignée (2015-2016)
    • Comité directeur sur l’accès aux services juridiques (2016)
    • Comité des appels (2012-2016), présidente (2015)
    • Conseillère et bénévole pour le Groupe de travail sur l’éducation (2013-2013), présidente (2014)
    • Comité du budget et des affaires financières, vice-présidente (2014)
    • Comité des revendications (2005-2014), présidente (2014-aujourd’hui)
    • Comité de déontologie (2006-2008), vice-présidente (2013-2014), présidente (2014‑2015)
    • Comité de la vérification des titres de compétence et de l’éducation (2009-2014)
    • Comité exécutif (2014-2017)
    • Comité des finances (Décisions concernant le Fonds d’assurance) (2012-2017)
    • Comité sur le genre, l’égalité et l’équité (1998-2001)
    • Comité de la gouvernance (2015-2017)
    • Groupe de travail sur l’innovation en matière de réglementation (anciennement le Groupe de travail sur les structures opérationnelles de rechange) (2015-2016)
    • Comité des assurances (2003-2005), présidente (2012-2014)
    • Comité consultatif à la magistrature (tribunal provincial) (2016-2017)
    • Groupe de travail et Comité de sélection des arbitres non conseillers, présidente (2014-2016)
    • Comité d’orientation (création en 2016), présidente (2016-2017)
    • Comité d’examen des pratiques (2002-2003, 2011-2012)
    • Groupe de travail sur la planification stratégique (2016)
    • Comité sur la sécurité des comptes en fiducie (2012-2014)
    • Comité de sélection des bourses Viscount Bennet (2015-2016)
  • Litigation Counsel of America, membre (2013-aujourd’hui)

Activités pro bono :

En plus de soutenir l’organisme sans but lucratif Pro Bono Alberta dans le cadre de mon travail avec le Barreau de l’Alberta, je participe à titre de mentor bénévole depuis de nombreuses années au programme de mentors du Barreau. Le programme permet aux avocats moins expérimentés d’obtenir l’aide d’avocats chevronnés afin de garantir au public des services juridiques de qualité. J’ai également travaillé bénévolement pour un certain nombre de personnes au cours de ma carrière.

Enseignement et formation continue :

Indiquez toutes les organisations et activités de formation judiciaire ou juridique auxquelles vous avez pris part (p. ex., enseignement dans une faculté de droit, à l’Institut national de la magistrature, à l’Institut canadien d’administration de la justice, etc.)

  • Instructrice, Legal Education Society of Alberta, cours intensifs de plaidoirie, 2011, 2012, 2017
  • Instructrice, Legal Education Society of Alberta, pratique professionnelle et déontologie (cour d’admission au Barreau), 2010, 2012, 2014
  • Instructrice, « Mener son premier interrogatoire », Legal Education Society of Alberta, 2014
  • Instructrice, « Les règles de pratique interprétées – recours collectifs, amendements, mesures transitoires, outrages et abus de pouvoir », Legal Education Society of Alberta, 2011
  • Instructrice, série de cours sur les techniques de plaidoirie dans les litiges civils – requêtes, Legal Education Society of Alberta, 2010
  • Instructrice, série de cours sur les techniques de plaidoirie dans les litiges civils – conclusions finales, Legal Education Society of Alberta, 2010
  • Présidente, « Communication électronique et preuve électronique dans le cadre d’un litige », Legal Education Society of Alberta, 2009
  • Présidente, « Camp de formation – Formation de base pour les nouveaux avocats de la défense », Canadian Defence Lawyers, 2007
  • Panéliste, « Éthique de la négociation et pratiques exemplaires dans les litiges civils », Association du Barreau canadien, assemblée de la mi-hiver de l’Alberta et de la Saskatchewan, 2007
  • Présentation, « Tiraillements éthiques : la relation tripartite entre l’assuré, l’assureur et l’avocat de la défense », camp de formation de Canadian Defence Lawyers, 2007
  • Instructrice, « Développements et tendances en matière de dommages – Évaluation des dommages résultant d’accidents mortels : les répercussions de la décision de la Cour d’appel de l’Alberta dans l’affaire Ferraiuolo c. Olson », Legal Education Society of Alberta, 2006
  • Chargée de cours à temps partiel en droit et médecine, Université de Calgary, Faculté de droit, 2001-2005
  • Instructrice et mentor dans le cadre des programmes de perfectionnement professionnel, de diversité et d’inclusion de Norton Rose Fulbright Canada s.r.l.

Activités communautaires et civiques :

Indiquez toutes les organisations dont vous êtes membre ou tout poste que vous avez occupé, ainsi que les dates correspondantes.

  • Membre du conseil d’administration et vice-présidente du Conseil de santé de l’Armée du Salut, qui agissait comme organe directeur de l’hospice Agapé et comme conseil consultatif auprès de la région sanitaire de Calgary en ce qui a trait à l’administration de l’ancien centre de santé Grace Women’s Health Centre (de 1997 à 2004 environ).
  • Bénévole pour l’association communautaire de Lakeview (chef au sein des Brownies)

[...]

Partie 11 – Le rôle de la fonction judiciaire dans le système juridique canadien

Le gouvernement du Canada souhaite nommer des juges ayant une connaissance approfondie de la fonction judiciaire au Canada. Afin de fournir une base solide à leur évaluation, on demande aux candidats de donner leur opinion sur des sujets généraux liés à la fonction judiciaire et au système juridique au Canada. Pour chacune des questions ci-dessous, veuillez fournir une réponse de 750 à 1 000 mots.

1. Selon vous, quelle est votre plus grande contribution au droit et à la quête de la justice au Canada?

Lorsque j’ai entrepris mes études de droit, je ne connaissais aucun avocat et je ne comprenais pas tout à fait le rôle important que jouent les avocats et les tribunaux dans notre société. J’étais infirmière pédiatrique à l’Hôpital pour enfants de Calgary. Pendant la grève illégale des infirmières en 1988, j’avais continué à travailler parce que j’avais l’impression que mes obligations professionnelles m’empêchaient d’enfreindre la loi et exigeaient plutôt que je continue à prendre soin de mes patients et de leurs familles malgré la position du syndicat dans le conflit du travail. Je comprenais et respectais le point de vue différent de mes collègues, et la plupart de ceux-ci comprenaient et respectaient le mien. Nous reconnaissions tous qu’aucun des enjeux, à quelque niveau que ce soit, n’était facile à résoudre.

Mon désir de comprendre comment il était possible de résoudre des questions difficiles telles que celles au cœur de ce conflit, en évitant que le professionnalisme et le respect pour la loi ne se dégradent, m’a amenée à présenter une demande d’admission à la faculté de droit. À la fin de mes études, j’ai commencé à comprendre l’importance fondamentale de notre système de justice en tant que fondement de notre démocratie, des droits et des libertés des citoyens et de l’environnement dans lequel nous faisons des affaires et du commerce. Après mon année de stage, je suis demeurée dans le secteur privé, et mon intérêt soutenu envers le règlement des différends, la pratique professionnelle et la déontologie, ainsi que la primauté du droit, a contribué à façonner ma carrière et m’a amenée à me faire du bénévolat à divers titres, y compris auprès du Barreau de l’Alberta, où j’ai eu le privilège de bien réfléchir à l’intérêt public et de me consacrer à celui-ci.

Bien que j’aie apporté ce que j’espère être des contributions importantes à l’évolution du droit dans le cadre de ma pratique, et en tant que membre de l’Alberta Law Reform Institute, j’estime que c’est en tant que conseillère du Barreau que j’ai le plus contribué à la quête de la justice au Canada. À ce titre, j’ai appris à connaître les forces du changement qui influent sur l’administration de la justice et j’ai eu l’occasion de contribuer à façonner la profession pour y faire face. Sans diminuer l’importance du travail effectué par ceux qui m’ont précédé ni de celui que mes successeurs devront réaliser, je suis très fière de ce que les conseillers et le personnel professionnel du Barreau ont accompli pendant mon mandat, y compris de notre travail visant à :

  • promouvoir la diversité et l'équité au sein de la profession juridique;
  • répondre aux appels à l’action de la Commission de vérité et de réconciliation de manière réfléchie et collaborative afin de renforcer les relations de la profession avec les communautés autochtones de l’Alberta;
  • aider les avocats à respecter les normes établies par le Barreau et à agir de manière proactive afin d’éviter les plaintes en intervenant et en réglant rapidement les problèmes dans les situations où une intervention réglementaire formelle n'est pas nécessaire pour remédier aux problèmes et protéger le public;
  • aider le gouvernement provincial à examiner le système d’aide juridique en Alberta et contribuer à élaborer les principes directeurs que doit promouvoir le Barreau et qui serviront à orienter l’examen du système d’aide juridique, notamment : protéger l’indépendance des avocats, défendre leur compétence en ce qui a trait à la prestation des services juridiques, promouvoir l’évolution de la jurisprudence, en particulier en ce qui concerne les plus vulnérables, et favoriser l'accès à la justice de manière plus générale;
  • accroître le niveau d’engagement des membres de la profession face aux problèmes de notre temps.

La justice dépend du rôle unique que jouent les avocats dans notre société, de même que du rôle important des tribunaux. Mon travail comme conseillère visait à protéger l’indépendance de la profession juridique et à maintenir la confiance du public dans la profession. Ces valeurs sont la pierre angulaire de la confiance que les particuliers et le public doivent avoir envers la profession, afin que les avocats puissent continuer à assumer leur rôle fondamental dans l’administration de la justice.

2. Comment votre expérience vous a-t-elle permis de saisir la variété et la diversité des Canadiens et des Canadiennes et leurs perspectives spécifiques?

Mon père a émigré d’une petite ville industrielle du nord de l’Angleterre pour s’installer au Canada. Il n’avait rien d’autre que son éducation. Il a trouvé un emploi dans le secteur minier à Red Lake, en Ontario, et peu de temps après, ma mère l’a rejoint. Ils n'ont pas eu à surmonter les barrières linguistiques auxquelles de nombreux immigrants sont confrontés, mais ils ont dû surmonter des obstacles culturels et financiers pour construire une vie ici pour notre famille. J’ai toujours admiré leur courage et leur persévérance. Ils m'ont inculqué la conviction que le privilège d’être citoyen canadien s'accompagne d'une grande responsabilité, c’est-à-dire de travailler et de respecter et d'aider les autres.

Le fait que mon mari et moi ayons élevé deux enfants merveilleux, qui sont maintenant de jeunes adultes et qui trouvent leurs propres moyens de contribuer, a également influé sur ma façon de voir les choses. Étant donné que j’ai passé ma carrière dans un environnement professionnel à prédominance masculine, je suis parfaitement consciente des défis que pourraient rencontrer ma fille et d’autres femmes en raison de leur sexe. Je sais que des progrès importants ont été accomplis dans ce domaine. Cependant, la véritable égalité des sexes n’est pas encore une réalité. Je me suis également familiarisée avec certains des défis uniques auxquels la communauté LGBTQ est confrontée et j’ai acquis une meilleure compréhension de ce que signifie être marginalisé, parce que mon fils est gai.

Outre ces expériences personnelles, mon expérience professionnelle en tant qu’infirmière et avocate m’a permis de mieux comprendre la diversité des Canadiens, leurs perspectives spécifiques et les défis uniques auxquels bon nombre d’entre eux font face.

En tant qu’infirmière, je m’occupais d’enfants et de familles d’origines très diverses. J’ai pu constater comment la race, les croyances religieuses, la situation familiale, le sexe, les handicaps physiques et mentaux, les capacités et barrières linguistiques, ainsi que les facteurs socioéconomiques, peuvent tous avoir des répercussions profondes sur le bien-être des membres de notre société.

Au cours de ma carrière juridique, j’ai eu d’autres occasions de rencontrer et d’apprendre de nombreuses personnes engagées relativement aux questions d’équité et d’accès dans le secteur de la justice. Par exemple, j'ai participé au projet Justicia du Barreau de l’Alberta, y compris à une récente séance de formation avec Caren Ulrich Stacy, fondatrice de Legal Talent Lab et de OnRamp Fellowship, qui a mis en lumière certains des défis persistants au chapitre du maintien en poste et du réengagement qui entravent la juste représentation des deux sexes dans la profession juridique.

J'ai participé à des conférences et à des ateliers organisés par la Fédération des ordres professionnels de juristes afin de mieux comprendre les difficultés rencontrées par les personnes qui, faute de moyens, n’ont pas accès à notre système de justice, et par les personnes qui ne s’y retrouvent pas. Dans le cadre de ce travail, j’ai eu l’occasion de rencontrer des employés et des bénévoles d’organisations communautaires d’ici et d’autres régions du pays qui aident les personnes vulnérables à régler des problèmes juridiques. J’ai aussi eu la chance de participer à une activité de simulation de la pauvreté organisée par Centraide qui m’a permis de mieux saisir de façon très concrète la mesure dans laquelle la pauvreté empêche ceux qu’elle frappe d’avoir accès à des services juridiques et à d’autres services.

J’ai également eu l’occasion d’en apprendre davantage sur les points de vue des peuples autochtones du Canada. J’ai participé à la séance plénière du Barreau de l’Alberta dans le cadre de la Conférence sur le droit de l’Alberta 2016 en réponse aux appels à l’action de la Commission de vérité et de réconciliation. À la suite de cette séance, les conseillers du Barreau de l’Alberta ont eu la chance d’assister à une séance de formation avec le chef Wilton Littlechild, c.r. L’année dernière, j’ai assisté à la retraite des conseillers du Barreau de la Colombie-Britannique, qui était axée sur les recommandations de la Commission de vérité et de réconciliation. Nous avons eu l'occasion d'entendre un certain nombre d'avocats autochtones discuter de leurs points de vue. La juge Marion Buller a également présenté un exposé informatif sur les tribunaux des Premières nations, en insistant sur la nécessité d'améliorer les facteurs qu’il faut prendre en compte dans la détermination de la peine dans le cas des Autochtones et la possibilité d'étendre les principes des arrêts R. c. Gladue, [1999] 1 R.C.S. 688 et R. c. Ipeelee, 2012 CSC 13 aux causes touchant le bien-être des enfants autochtones.

Enfin, j’ai eu l’honneur de participer à une cérémonie de citoyenneté canadienne. Parler à de nouveaux Canadiens de partout dans le monde de leurs origines et de leurs espoirs pour l’avenir du Canada était à la fois éclairant et inspirant.

3. Décrivez le rôle que doit jouer un juge dans une démocratie constitutionnelle.

Dans un discours liminaire prononcé devant la Osgoode Hall Law School en 2000, la juge Rosalie Silberman Abella de la Cour d’appel de l’Ontario (tel était alors son titre) a entamé ses observations sur le rôle du juge dans une société démocratique par une description brève, mais convaincante, de ce qu’est une démocratie. Elle a fait remarquer que « ... les éléments constitutifs de la démocratie apparaissent avec le plus de clarté lorsqu’on compare celle-ci à son antonyme, le totalitarisme. Les sociétés démocratiques, au contraire des sociétés répressives, promeuvent les droits de leurs citoyens et leur participation à la prise de décisions concernant les règles qui les régiront. La démocratie favorise la liberté de choix, la parole et l’accès aux droits. Le totalitarisme ne favorise aucun de ces bienfaits ».

Je partage l’opinion de la juge Abella selon laquelle il s’agit d’un bon point de départ et je ne pourrais le dire d’une manière plus éloquente qu’elle.

Dans notre démocratie constitutionnelle, c'est la Constitution (la Loi constitutionnelle de 1982) qui définit les rôles de chacun des trois pouvoirs du gouvernement – législatif, exécutif et judiciaire – et qui protège les droits des citoyens canadiens. Elle consacre les valeurs essentielles sur lesquelles repose notre sentiment collectif de liberté et de sécurité : une gouvernance démocratique, le respect des droits fondamentaux et de la primauté du droit, et la prise en compte des différences (Cour suprême du Canada, « Mot de bienvenue du juge en chef du Canada  »).

À l’intérieur de ce cadre simple, il est à la fois facile de voir comment les rôles des pouvoirs législatif et exécutif du gouvernement et d’un pouvoir judiciaire indépendant se complètent pour renforcer les valeurs d’une société libre et démocratique, et difficile de comprendre pourquoi tant de pays luttent pour instaurer la paix dont nous jouissons. Certes, lorsque nous prenons le temps de réfléchir aux abus de pouvoir, à l’intolérance et à la dégradation du respect pour la primauté du droit dont nous sommes témoins quotidiennement dans les actualités internationales, il est difficile de sous-estimer le rôle important que jouent les juges dans notre pays.

Les juges sont chargés de résoudre les différends juridiques que les citoyens et l’État leur demandent de trancher. Ils sont appelés à appliquer le droit de manière impartiale en se fondant sur les faits tels qu'ils les constatent. Certaines affaires entendues par les tribunaux de première instance ont trait à des différends entre des parties privées au sujet de leurs droits et des obligations qu’elles ont l’une envers l’autre. D’autres sont liées à des conflits avec l’État. Certaines affaires exigent que les tribunaux appliquent la common law ou la fassent évoluer, selon les besoins. D’autres nécessitent une interprétation des lois qui reflète la volonté des législateurs. Dans tous les cas où les parties elles-mêmes sont incapables de résoudre un différend, les tribunaux permettent de le faire de façon pacifique.

En tranchant les questions qui leur sont soumises, les juges jouent un rôle essentiel de soutien à la primauté du droit – le principe selon lequel aucune personne ou institution n’est au-dessus des lois, mais qu’elles doivent plutôt être guidées par ces lois – et protègent les éléments essentiels de la gouvernance démocratique. Les juges sont appelés à interpréter la Constitution afin de définir le partage des pouvoirs entre les gouvernements fédéral et provinciaux. Ils exercent un rôle de supervision à l’égard des tribunaux administratifs créés par les législateurs et lorsque des personnes estiment qu'un gouvernement, ou que ceux qui agissent en son nom, ont porté atteinte à leurs droits aux termes de la Charte canadienne des droits et libertés (Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982), les tribunaux se prononcent sur la validité de la loi ou de l'action du gouvernement. En cas d’atteinte aux droits, les juges décident du recours approprié. En statuant sur ces demandes et en intervenant lorsque la conduite du gouvernement est illégale ou n’est pas raisonnable et justifiée de façon démontrable dans une société libre et démocratique, ou lorsque les droits d’un accusé ont été violés au cours d’une enquête de sorte que l’utilisation de la preuve serait susceptible de jeter le discrédit sur l’administration de la justice, les juges jouent un rôle important dans la définition de la portée et de la protection des droits constitutionnels des Canadiens et Canadiennes.

Comme la juge en chef Beverley McLachlin l’a exprimé plus succinctement, « ... [un] système judiciaire fort et indépendant garantit que les gouvernements agissent conformément à notre Constitution. Les juges appliquent nos lois et font en sorte que nos droits et nos devoirs en tant que Canadiens aient véritablement un sens. Les tribunaux constituent des lieux propices à la résolution pacifique des différends et à la discussion raisonnée et impartiale de nos enjeux sociaux les plus pressants. » (Cour suprême du Canada, précité).

4. À qui s’adressent les décisions de la cour à laquelle vous vous portez candidat(e)?

Le public à qui s’adresse une décision particulière dépend, dans une certaine mesure, de la nature des questions en litige et de l’importance de ces questions pour les parties à l’instance et les autres parties, y compris le public et le gouvernement.

Dans tous les cas, les parties à l’instance sont en droit de s'attendre à comprendre les motifs de la décision prise, en particulier la partie dont les arguments ont été rejetés. Dans bien des cas au niveau des tribunaux de première instance, les décisions ne s’adressent souvent qu’aux parties à l’instance, et parfois au tribunal d’appel, étant donné le rôle du juge de première instance, qui consiste à entendre la preuve, à tirer des conclusions de fait et à appliquer ensuite le droit établi aux faits tels qu’il les a constatés. Dans d'autres cas, les décisions du tribunal pendant l’audience, ainsi que la décision finale, peuvent susciter davantage d’intérêt et recevoir une attention plus soutenue.

En plus d’intéresser les autres juges et avocats, les décisions prises dans le cadre d’affaires civiles concernant, par exemple, l’interprétation d’un contrat, sont importantes pour les parties à l’instance et peuvent avoir des conséquences pour d’autres entreprises du même secteur. Une décision qui donne une interprétation d’une disposition législative peut avoir une incidence sur d’autres plaideurs et attirer l’attention du gouvernement. Certaines affaires ont des conséquences économiques, sociales ou politiques susceptibles d’intéresser un public plus large au sein de la communauté, y compris les chefs d’entreprise, les groupes de défense des droits et les médias.

Il en va de même pour les décisions dans le domaine du droit administratif. À l’une des extrémités du spectre se trouvent les décisions qui n’ont pas d’incidence significative au-delà des circonstances factuelles uniques de l’affaire. D’autres décisions, comme celle rendue par la Cour dans l’affaire Alberta (Information and Privacy Commissioner of Alberta) c. University of Calgary, 2013 ABQB 652, infirmée par la Cour d’appel de l’Alberta (2015 ABCA 118) et finalement entendue par la Cour suprême du Canada (2016 CSC 53), abordent des questions d’intérêt plus général, en particulier pour la profession juridique et les gouvernements. À l'autre extrémité du spectre se trouvent des décisions telles que celles rendues par les cours supérieures de la Colombie-Britannique, de l'Ontario et de la Nouvelle-Écosse portant sur l'accréditation de la nouvelle faculté de droit de l’Université Trinity Western et l’engagement des étudiants interdisant les relations sexuelles en dehors du mariage et les relations homosexuelles. Ces décisions sont importantes pour de nombreuses personnes partout au pays, notamment pour les membres de la communauté LGBTQ et les personnes qui ont des croyances religieuses différentes. Les avocats et les juges, les futurs étudiants, les organismes de réglementation juridique, les enseignants, les universitaires, les médias et le public en général suivent également de telles affaires avec beaucoup d’intérêt.

Les affaires pénales comportent aussi de multiples facettes et représentent l'un des aspects du travail des tribunaux les plus étroitement surveillés. Les motifs des décisions pénales doivent être compris par l'accusé et les personnes touchées par le crime, et présentent aussi souvent un intérêt pour les médias et le grand public. Dans ce domaine du droit, peut-être plus que dans d’autres, les procédures et les décisions judiciaires font l’objet de reportages médiatiques et de commentaires sur les médias sociaux, où des personnes font part de leurs réflexions et de leurs points de vue sur le processus judiciaire et ses résultats. Les médias sociaux ont révolutionné la manière dont les gens communiquent et comprennent le monde qui les entoure. Cette révolution s’accompagne d’un public de plus en plus vaste composé de personnes issues de tous les milieux qui tentent de comprendre ce que font les tribunaux dans le cadre de certaines affaires, et apporte une nouvelle dimension à la responsabilité du juge de se conduire d’une manière permettant de maintenir la confiance du public envers le système de justice.

Quoi qu’il en soit, j’estime qu’il incombe au juge de faire preuve d’écoute respectueuse et d’ouverture d’esprit, de poser les questions nécessaires pour aller au cœur des enjeux et comprendre les arguments, et de rendre des décisions réfléchies et éclairées, fondées sur des motifs clairs et convaincants, que les parties à l’instance et les autres parties intéressées peuvent comprendre.

5. Prière d’indiquer les qualités personnelles, les compétences et aptitudes professionnelles ainsi que l’expérience de vie qui, selon vous, vous rendent apte à exercer le rôle de juge.

Ma décision de poser ma candidature à une nomination à la magistrature s’inscrit dans le prolongement de mon souhait de continuer à apprendre et à contribuer au droit et à la quête de justice au Canada.

Je crois que j’ai gagné le respect de mes clients et de mes collègues grâce à mon éthique de travail, à mes capacités d’analyse et à mes compétences en tant qu’avocate, ainsi qu’à mon professionnalisme et à mon éthique. Ceux qui me connaissent bien diraient que je suis une personne curieuse et perspicace, empathique et réfléchie. Je suis patiente et courtoise, mais je peux être ferme et directe au besoin. J’ai une excellente écoute. Je suis ouverte d’esprit et je fais attention de ne pas porter de jugements hâtifs, mais je n’ai aucune difficulté à prendre des décisions, à les expliquer et à les maintenir. Je n’ai pas peur d’aborder des problèmes que je ne comprends pas immédiatement ou de reconnaître ce que j’ignore. Au contraire, je suis curieuse et j’ai confiance en ma capacité d’apprendre. Je prends mon travail au sérieux, mais je ne me prends pas au sérieux.

Je tiens beaucoup à ma famille et à mes amis. Je me soucie également du système de justice et des personnes qu’il sert, ce que je pense avoir démontré dans mon travail au nom de la profession et de l’intérêt public.

Je suis consciente qu’un certain degré d’isolement est inhérent au rôle de juge. Outre la charge de travail qui nécessite de longues heures de travail (ce à quoi je suis habituée), les juges doivent éviter toute activité ou association et tout commentaire public pouvant compromettre leur image d’impartialité ou l’exercice de leurs fonctions (Conseil canadien de la magistrature, « Principes de déontologie judiciaire »). Je suis déterminée à respecter les normes élevées de conduite attendues d’une juge, et je suis à l’aise de le faire.

La Cour suprême a statué que « les qualités personnelles, la conduite et l’image que le juge projette sont tributaires de celles de l’ensemble du système judiciaire et, par le fait même, de la confiance que le public place en celui-ci. Le maintien de cette confiance du public en son système de justice est garant de son efficacité et de son bon fonctionnement. Bien plus, la confiance du public assure le bien-être général et la paix sociale en maintenant un État de droit » (Therrien [Re], 2001 CSC 35, par. 110). Tous les plaideurs devraient quitter le tribunal avec la conviction qu’ils ont été entendus et traités de façon courtoise et équitable par un juge honorable, diligent et compétent. Si je devais être appelée à exercer le rôle de juge, je pense que j’ai toutes les qualités personnelles et professionnelles requises pour remplir mes obligations avec l’impartialité, l’intégrité, le courage et le talent que ce rôle exige, tout en manifestant une préoccupation et un respect appropriés pour les personnes qui en raison de leur parcours de vie se retrouvent devant la cour.

6. Compte tenu de l’objectif voulant que les Canadiens et Canadiennes se reconnaissent et reconnaissent leur expérience de vie dans les visages de la magistrature, vous pouvez, si vous le voulez, ajouter des renseignements sur vous-même dans la mesure où ils serviraient cet objectif.

Veuillez vous reporter à ma réponse à la question 2 ci-dessus, et je vous remercie de l’attention que vous porterez à ma candidature.   

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