Questionnaire de l’honorable Jessica Kimmel

Document d'information

Selon le nouveau processus de demande de nomination à la magistrature institué par la ministre de la Justice le 20 octobre 2016, tout avocat ou juge canadien intéressé et ayant les qualifications requises peut poser sa candidature à la magistrature fédérale en remplissant un questionnaire à cet effet. Les questionnaires sont ensuite utilisés par les comités consultatifs à la magistrature à travers le Canada pour examiner les candidatures et soumettre à l’attention de la ministre de la Justice une liste de candidats « hautement recommandés » et « recommandés ». Les candidats sont avisés que certaines parties de leur questionnaire pourraient être rendues publiques, avec leur consentement, s’ils sont nommés à la magistrature. Les renseignements sont divulgués comme les candidats les ont fournis au moment de postuler, sous réserve des modifications apportées pour protéger leur vie privée.

Voici les parties 5, 6, 7 et 11 du questionnaire rempli par l’honorable Jessica Kimmel.

Questionnaire en vue d’une nomination à la magistrature

[...]

Partie 5 – Exigences linguistiques

Veuillez prendre note qu’en plus de vos réponses aux questions suivantes, votre connaissance fonctionnelle des deux langues pourrait être évaluée.

Sans formation supplémentaire, êtes-vous capable de lire ou de comprendre des documents de la cour :

  • En anglais : Oui
  • En français : Non

Sans formation supplémentaire, êtes-vous en mesure de discuter d’affaires juridiques avec vos collègues : 

  • En anglais : Oui
  • En français : Non

Sans formation supplémentaire, êtes-vous capable de converser avec un avocat en cour : 

  • En anglais : Oui
  • En français : Non

Sans formation supplémentaire, êtes-vous capable de comprendre les observations orales présentées en cour : 

  • En anglais : Oui
  • En français : Non

Partie 6 – Études

Noms des établissements, années d’études, diplômes et années d’obtention : 

  • Osgoode Hall Law School, de 1986 à 1989 : baccalauréat en droit (aujourd’hui Juris Doctor) en 1989 (sous le nom de Jessica Growe)
  • Université de Toronto, de 1983 à 1986 : baccalauréat ès sciences en 1986 (distinction) avec domaines de concentration en neuropsychologie et criminologie (sous le nom de Jessica Growe)

Formation continue :

  • Voir la Partie 7 – Enseignement et formation continue.

Distinctions académiques :

  • Récipiendaire du prix du centenaire de la County of York Law Association pour la recherche et la présentation d’un article final dans le cadre du séminaire médico‑légal sur le droit d’accès à des médicaments expérimentaux (1989).
  • Récipiendaire du prix Helen Kinnear en procédure pénale (1989).
  • Reconnaissance par les pairs (honneurs) :
    • Canadian Legal Lexpert Directory : recommandée dans les domaines des litiges en valeurs mobilières, des recours collectifs, des litiges corporatifs/commerciaux et des litiges en responsabilité des administrateurs et dirigeants, et à titre d’éminente plaideuse dans le Lexpert Guide to the Leading U.S./Canada Cross-border Litigation Lawyers in Canada ainsi que dans le Lexpert Special Edition on Litigation dans le Report on Business Magazine du Globe & Mail.
    • Chambers Canada : recommandée dans les domaines des règlements des différends et des recours collectifs.
    • Best Lawyers in Canada : qualifiée d’éminente plaideuse dans les domaines des modes alternatifs de résolution des conflits, des recours collectifs, des litiges corporatifs/commerciaux, de la responsabilité des administrateurs et des dirigeants, de la responsabilité associée aux produits et des litiges en valeurs mobilières.
    • Benchmark Canada : qualifiée à l’échelle nationale d’étoile dans les domaines des litiges en valeurs mobilières et en Ontario dans les domaines des recours collectifs, des litiges commerciaux et des valeurs mobilières, et classée parmi les 25 meilleures avocates au Canada.

Partie 7 – Antécédents professionnels

Veuillez indiquer, dans l’ordre chronologique et à partir du plus récent, les emplois que vous avez exercés et précisez pour chacun la durée d’emploi et le nom de l’employeur. En ce qui concerne les emplois dans le domaine juridique, veuillez inscrire les secteurs de travail ou les spécialisations, ainsi que les années correspondantes. Au besoin, indiquez si les secteurs de travail ont changé.

Expérience de travail dans le domaine juridique :

  • Goodmans LLP (anciennement Goodman, Phillips et Vineberg) :
    • Associée (ancienne avocate en contentieux) spécialisée dans les litiges civils, de mars 1991 à aujourd’hui (associée de 1997 à aujourd’hui).
  • Goodman & Goodman (aujourd’hui Goodmans LLP). Appelée à travailler dans différents domaines de pratique :
    • Stagiaire, de juin 1989 à juin 1990;
    • Emploi d’été comme étudiante, de juin 1988 à août 1988.
  • AIRD & BERLIS. Appelée à travailler dans différents domaines de pratique :
    • Emploi d’été comme étudiante, de mai 1987 à août 1987.

Expérience de travail dans un domaine non juridique :

Pendant mes études secondaires et postsecondaires (de 1980 à 1989), j’ai occupé divers emplois à temps partiel à Vancouver et à Toronto dans les secteurs des services alimentaires et de la vente au détail durant l’année scolaire, et à titre de monitrice dans divers camps d’été, dont un camp de formation en leadership, durant les étés.

Autres expériences professionnelles :

Inscrivez toutes les associations du barreau ou comités d’affaires juridiques dont vous êtes ou avez été membre, et tous les titres des postes que vous avez occupés au sein de ces groupes, ainsi que les dates correspondantes.

  • En tant que présidente fondatrice au sein de mon cabinet du Comité des normes professionnelles et des conflits, j’ai consacré beaucoup de temps à l’administration et à l’élaboration de politiques ainsi qu’à l’organisation et à la présentation de programmes de formation à l’intention des avocats de mon cabinet et de l’extérieur de celui‑ci sur des sujets liés aux conflits, à la responsabilité professionnelle et au perfectionnement professionnel.
  • American College of Trial Lawyers, de 2014 à aujourd’hui : J’ai reçu le titre de Fellow de l’American College en septembre 2014, et je siège au Comité ontarien depuis 2015 et au Comité Canada-États-Unis depuis 2016.
  • Toronto Lawyers’ Association (anciennement la Metropolitan Toronto Lawyers’ Association), de 2001 à 2010 : J’ai assuré la présidence de la TLA en 2009 et, avant cela, j’ai été membre active de l’exécutif de son conseil d’administration pendant près de 10 ans. La TLA représente les avocats qui exercent dans la ville de Toronto dans le cadre d’activités juridiques et, plus généralement, d’activités communautaires. En plus d’offrir des services à ses membres, la TLA assure la liaison avec d’autres associations d’avocats sur des questions d’intérêt commun, comme la County and District Law Presidents' Association, le Barreau du Haut‑Canada, l’Association du Barreau de l’Ontario et l’Advocates’ Society, ainsi qu’avec les associations nombreuses et diverses représentant des avocats de différents horizons (comme l’association des avocats de race noire, l’association des avocats de langue française et l’association des avocats de l’Asie du Sud).
  • Advocates’ Society
    • Membre du conseil d’administration de divers comités de juin 2005 à juin 2008 et du Sous-comité sur les MARC [« mesures alternatives de résolution des conflits »] de mars 1997 à décembre 1999.
  • Rédactrice et collaboratrice à la rédaction du Commercial Litigation Journal de 1997 à 2015 (Federated Press). 
  • Practical Law Canada
    • Membre du comité consultatif sur les litiges (corporatifs et commerciaux) de 2016 à aujourd’hui. Il s’agit d’un nouveau produit en ligne qui fournit des ressources et des précédents dans des domaines de pratique distincts et qui rend compte de l’évolution du droit qui pourrait avoir une incidence sur ces ressources et ces précédents.
  • Comité consultatif sur les valeurs mobilières (CCVM)
    • Sélectionnée comme membre de ce comité consultatif de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario, ayant pour mandat de fournir des renseignements et de la rétroaction afin d’améliorer les initiatives stratégiques et procédurales du Tribunal des valeurs mobilières de l’Ontario, depuis février 2017.

Activités bénévoles :

J’ai commencé à effectuer du travail bénévole au sein du Service d’aide juridique lorsque j’étais à la faculté de droit. À titre d’avocate, j’ai eu l’occasion de contribuer à des mémoires à titre d’intervenante désintéressée pour le tribunal. J’ai été demandé de fournir des conseils au milieu d’un procès à quelques plaideurs qui avaient perdu leur premier avocat principal. Dans un autre dossier, j’ai été demandé de comparaître en tant qu’intervenante désintéressée et de présenter des observations sur les questions juridiques qui avaient été soulevées dans le cadre d’une procédure de faillite, concernant les droits et les priorités de certains créanciers qui découleraient de l’octroi par le tribunal de la libération demandée.

J’estime que les nombreuses heures que j’ai consacrées à des comités du barreau et aux activités décrites dans d’autres sections de la présente demande sont bénévoles, car elles m’ont amenée à consacrer mon temps et mon expertise à diverses causes généralement destinées à accroître l’efficience du système judiciaire.

Enseignement et formation continue :

Indiquez toutes les organisations et activités de formation judiciaire ou juridique auxquelles vous avez pris part (p. ex., enseignement dans une faculté de droit, à l’Institut national de la magistrature, à l’Institut canadien d’administration de la justice, etc.)

Au cours de ma carrière juridique, j’ai fait des présentations dans le cadre de nombreux programmes et conférences de formation juridique continue organisés par divers organismes juridiques, fournisseurs de conférences et mon cabinet, dont les suivants :

  • Osgoode Professional Development, Successful Settlements 2017: Strategies and Tactics in Litigators, The Menu of Available Tools for Achieving Settlement (panéliste, 24 mars 2017)
  • The Advocates' Society Courthouse Series, Telling a Compelling Story (panéliste, 23 février 2017)
  • 2016 Warren Winkler Annual Conference on Mediation, The Unsettleable Case (présentatrice, 12 mai 2016)
  • The Advocates’ Society, Electronic Trials : « Practical Strategies for Presenting Evidence in an E-Trial With Demonstration: Witness In-Chief and Cross-Examinations Using Electronic Evidence and Demonstrative Slides (panéliste et démonstration, 17 juin 2015)
  • Time to Step up Your Game – Profile and Practice Building for Litigators (panéliste de Goodmans, mai 2015)
  • Advocacy – Counsel’s Perspective, U of T Advanced Advocacy, Written/Oral Advocacy (conférencière invitee, 17 novembre 2014)
  • Technology in Practice – Mediating E-Discovery Disputes: A Canadian Perspective (Commonwealth Legal) (présentatrice, du 5 au 7 novembre 2014)
  • TAS Program: Putting Theory into Practice – Exercising Professionalism and Civility (présentatrice, 21 octobre 2014)
  • « Build It » – Advocates’ Society Mentoring Dinner (22 mai 2014)
  • Cours du programme de maîtrise (Osgoode) sur les litiges en matière de valeurs mobilières (conférencière invitée, 2013)
  • Northwind Class Actions Invitational Forum (Steering Meeting Class Action Forum) (présentatrice/panéliste, du 19 au 21 juin 2013)
  • The Advocates’ Society 2013 Court House Series : Getting to the Point! (panéliste et démonstration en direct, 21 février 2013)
  • The Advocates’ Society, The Thunder Bay Law Association Fall CLE-Civil Litigation Program : « 21st Century Advocacy: Beyond Trial », « Civility Outside the Court Room » (présentatrice, 26 octobre 2012)
  • Barreau du Haut-Canada, The Twelve-Minute Civil Litigator 2012, « Litigation Arising out of Corporate Dealings/Common Interest Privilege » (présentatrice, 20 septembre 2012)
  • Goodmans LLP, « Avoiding the Professionalism Pitfalls of an In-House Practice » (modératrice, 27 juin 2012)
  • The Advocates’ Society, Spring Symposium : « The Practical Advocate: Achieving Excellence in Advocacy », « Is there a Deal Team
    Privilege? » (présentatrice, 4 mai 2012)
  • The Advocates’ Society, National Expert Witness Academy: « Cross-examination in the Court House » (commentatrice, du 26 au 28 avril 2012)
  • « Securities Litigation – Seeking the "Balance on Disclosure" », Barreau du Haut-Canada, Droit des valeurs mobilières (Mise à jour 2011), (présentatrice, 14 novembre 2011)
  • « Evidence-Evidentiary Issues in the Electronic World » – Examens et considerations liés au privilège, Cour supérieure de justice (Ontario), Séminaire éducatif de l’automne, (présentatrice, 2 novembre 2011)
  • Northwind Class Actions, Invitational Forum : « The Future of Class Actions in Canada – A Strategic Discussion among Leading
    Practitioners » (Comité directeur des conferences, du 20 au 22 juin 2011)
  • Advocates’ Society Civil Litigation Skills Certificate Program : « Leading your Case: Opening Statements and
    Examination-in-Chief » (présentatrice/panéliste, 2 mars 2011)
  • Insight Complex Litigation Conference (présentatrice, 28 février 2011)
  • Warren Winkler Lectures on Civil Justice Reform : « Procedure, Proportionality and Professionalism » (présentatrice/panéliste, 4 octobre 2010)
  • Conférence sur les femmes et le droit : « Définir une carrière réussie » (présentatrice/panéliste, 24 novembre 2009)
  • Advocates’ Society Advanced Trial Evidence : « Practical Problems, Real Solutions – Experts » (présentatrice/panéliste, mars 2009)
  • « Emerging Issues in Directors’ Liability 2009 – Advising Clients in Recessionary Times », Conférence du Barreau du Haut-Canada (présentatrice, février 2009)
  • « Successful Leading Your Case » : Opening Statement and Examinations-In-Chief (Civil Litigation Skills Certificate Program), (présentatrice/panéliste, décembre 2008)
  • « Timely Disclosure », Hot Topics in Cross-Border Securities Offerings (présentatrice, 2008)
  • The Advocates’ Society, « A Trial from A to Z » (coprésidente en 2008)
  • 7e Forum annuel spécialisé sur les litiges en matière de valeurs mobilières de l’Institut canadien des actuaires (coprésidente en 2007)
  • The Advocates’ Society, « Evidence for Litigators » (coprésidente 2007)
  • « The Trial Process Efficiency Equation – Is there a better formula? », The Advocates’ Society Policy Forum on Streamlining the Ontario Civil Justice System (présentatrice, Document 2006)
  • « Judicial Deference is Alive and Well When it Comes to Business Judgments » – Litiges commerciaux – Barreau du Haut-Canada (présentatrice, article 2006)
  • The Advocates’ Society, « The Art of Impeachment and Rehabilitation » (coprésidente, 2006)
  • Insight Securities Litigation Forum (présentatrice, 2006)
  • The Advocates’ Society Fall Forum (présentatrice, 2006)
  • Osgoode Professional Development and the Advocates’ Society Intensive Written Advocacy Course (enseignante, 2004, 2005, 2006 et 2008)
  • « Who’s Liable and What’s at Stake – Secondary Market Liability for Reporting Issuers and their Directors and Officers », Insight Securities Litigation Forum (présentatrice, 2005)
  • The Advocates’ Society, Rules Traps (coprésidente, 2005)
  • The Advocates’ Society, Examination in Chief (coprésidente, 2005)
  • Association du Barreau de l’Ontario, Démonstration sur les injonctions (présentatrice, 2005)
  • « Risky Business: The Trend Towards Increased Liability of Officers and Directors of Canadian Corporations », Canadian Institute Advanced Forum on Securities Litigation (présentatrice, Document 2004)
  • « Caught in the Cross-hairs – You can Run but you Can’t Hide Behind the Corporate Veil », Canadian Institute (présentatrice, Document 2004)
  • « How to effectively handle a Class Action Certification Motion », Canadian Institute (présentatrice, 2003)
  • OBA CLE Institute, Civil Litigation Program (« Hamlet’s Slander Trial ») (présentatrice/démonstration de compétences, 2003)
  • « Real Estate Class Actions: Case Studies and Perspectives », Barreau du Haut‑Canada, « Gravel to Gavel » (présentatrice, Document 2002)
  • « Good Faith Bargaining », Barreau du Haut-Canada, Six-Minute Business Lawyer (présentatrice, document 2002)
  • « Changes to Summary Judgment Rule: Considering the views of our Court of Appeal and their Effect », Six-Minute Litigation Lawyer (présentatrice, Document 2002)

Activités communautaires et civiques :

Indiquez toutes les organisations dont vous êtes membre ou tout poste que vous avez occupé, ainsi que les dates correspondantes.

[...]

À l’université, j’ai pris l’initiative de trouver des groupes communautaires auxquels je pouvais m’associer, et j’ai continué de le faire au fil des années, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la communauté juridique. En témoignent ma participation à des organisations professionnelles et ma participation intensive à la formation juridique continue (décrite dans d’autres parties de la présente demande), ainsi que ma participation à d’autres activités, notamment :

  • sollicitation et participation à la collecte de fonds et aux activités de sensibilisation pour diverses œuvres de bienfaisance de la collectivité;
  • participation à l’organisation et la planification de conférences et d’événements pour accroître la sensibilisation et récolter des fonds pour les organisations et les œuvres de bienfaisance dans la communauté juridique;
  • rédaction de la Directive de pratique de Toronto sur la nouvelle Initiative des pratiques exemplaires/de réduction de l’arriéré dans les dossiers civils de la région de Toronto – Gestion des cas (31 décembre 2004);
  • membre du comité directeur/d’évaluation du projet pilote de gestion des cas et nomination au comité des requêtes de la région de Toronto;
  • membre fondatrice de la Canadian Jewish Law Students’ Association (CJLSA) 1988-1989 et planification de la conférence inaugurale au printemps de 1989;
  • directrice, Women’s Athletic, University College Literary and Athletic Society (1982-1983);
  • membre du Comité des prix d’honneur, University College Council Board (1982-1983).

Partie 11 – Le rôle de la fonction judiciaire dans le système juridique canadien

Le gouvernement du Canada souhaite nommer des juges ayant une connaissance approfondie de la fonction judiciaire au Canada. Afin de fournir une base solide à leur évaluation, on demande aux candidats de donner leur opinion sur des sujets généraux liés à la fonction judiciaire et au système juridique au Canada. Pour chacune des questions ci-dessous, veuillez fournir une réponse de 750 à 1 000 mots.

1. Selon vous, quelle est votre plus grande contribution au droit et à la quête de la justice au Canada?

Les revendications éthiques et les conseils responsables aux clients aident à déterminer les questions factuelles et (ou) juridiques qui sont portées devant les tribunaux. En tant que plaideuse, j’ai fait ma plus grande contribution au droit et à la quête de la justice au Canada dans le cadre de dossiers dans lesquels j’ai travaillé et qui ont contribué à façonner le droit dans les domaines de la responsabilité des administrateurs et des dirigeants, du droit des valeurs mobilières et des recours collectifs, ainsi que dans le cadre de mes écrits et de mes exposés, qui permettent d’en élargir l’impact potentiel.

a.    Le paysage changeant de la responsabilité des administrateurs et des dirigeants au Canada

L’on peut dire sans se tromper que toute affaire civile jugée digne de l’attention de la Cour suprême du Canada contribue à l’évolution du domaine du droit en cause dans l’appel. L’affaire Kerr c. Danier Leather Inc. ([2007] 3 RCS 331) n’y a pas fait exception. La Cour suprême du Canada s’est prononcée dans cette affaire à un moment où le paysage juridique se transformait en faveur d’une responsabilité accrue des administrateurs et des dirigeants. (J’ai relevé cette tendance dans deux articles présentés en 2004 au Canadian Institute : « Risky Business: The Trend Towards Increased Liability of Officers and Directors of Canadian Corporations » et « Caught in the Crosshairs – You can Run but you Can’t Hide Behind the Corporate Veil »)

Dans cette affaire, la Cour suprême a réexaminé la portée de la défense fondée sur l’appréciation commerciale. Elle a aussi précisé le sens de « fait important » et de « changement important » dans le contexte des renseignements à fournir sur les prévisions financières contenues dans pour ainsi dire tous les appels publics à l’épargne.

Dans une décision rendue en 2006, la Cour d’appel avait renversé la décision rendue en première instance et donné effet à l’appréciation commerciale du chef de la direction et dirigeant principal des finances de Danier Leather concernant la viabilité continue des prévisions. J’ai abordé cette importante confirmation de la défense fondée sur l’appréciation commerciale et d’autres aspects de l’affaire lors de conférences du Barreau du Haut-Canada : « Judicial Deference is Alive and Well When it Comes to Business Judgments » (2006); « Emerging Issues in Directors’ and Officers’ Liability » (2009); « Securities Litigation – Seeking the Balance on Disclosure » (2011). La retenue dont un tribunal fait preuve à l’égard des décisions commerciales est essentielle à la crédibilité de notre système juridique dans le milieu des affaires.

b.    Exigence relative à la meilleure procédure aux fins de la certification d’un recours collectif – Lorsqu’il y a déjà eu accès à la justice

En 2004, la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (« CVMO ») a soutiré un règlement à cinq sociétés de fonds communs de placement qui auraient permis à des « synchronisateurs du marché » d’effectuer des opérations légales mais à court terme dans leurs fonds mondiaux. Lorsque ce règlement a été exécuté et que les fonds ont été distribués aux investisseurs, le recours collectif dans l’affaire Fischer c. AGF Investments et al. a été institué. L’on a prétendu que les sommes versées n’étaient pas suffisantes. S’est posée la question de savoir si le recours collectif représentait le meilleur moyen de régler les revendications des membres du groupe, compte tenu des trois objectifs de la Loi sur les recours collectifs (Ontario), à savoir la modification d’un comportement, l’économie judiciaire et l’accès à la justice.

Le juge des requêtes a conclu (2010 O.J. No. 112) que les membres du groupe avaient eu accès à la justice et qu’il y avait eu modification d’un comportement dans le cadre de l’instance qui s’était déroulée devant la CVMO et du règlement alors intervenu, et que le recours collectif proposé ne représentait pas la meilleure procédure. La Cour divisionnaire (2011 ONSC 292 CanLII) et la Cour d’appel de l’Ontario (2012, ONCA 47 CanLII) n’étaient pas d’accord sur la question de l’accès à la justice.

Fait important, la Cour d’appel a reconnu qu’une autre procédure de règlement des demandes qui s’était déroulée avant le début d’un recours collectif pourrait être préférable à un recours collectif dans le bon dossier (mais pas dans ce cas‑ci en raison de la façon dont la Cour a défini l’objet des revendications collectives). La Cour suprême du Canada a refusé la permission d’en appeler. Cette affaire demeure un guide précieux pour les parties à des règlements sur des questions de réglementation parce que ceux‑ci précèdent souvent les revendications associées aux recours collectifs.

c.    Élaboration d’autres exigences aux fins de la certification d’un recours collectif

J’ai participé à la défense dans un certain nombre de recours collectifs qui ont contribué à définir les exigences relatives à la certification d’un recours collectif. L'affaire Bre-X (1999, 44 O.R. (3d) 173) est l’un des premiers cas dans lequel l’on a demandé la certification d’un recours collectif en Ontario concernant d’importantes revendications touchant des valeurs mobilières. Nous avons fait valoir (et notre argument a été retenu) qu’une cause d’action pour fausses déclarations négligentes comportant un élément inhérent – le fait que chaque membre s’était personnellement fié aux renseignements – ne convenait pas à la certification d’un recours collectif. J’ai rédigé deux articles qui ont été publiés dans la revue Commercial Litigation à propos de cet important domaine de droit émergent : « Quintessentially Individualistic Causes of Action as Class Actions » (1998) et « Bre-X: Denying Certification of Negligent Misrepresentation Claims » (1999). Cette décision a façonné la façon dont les recours collectifs comportant des allégations de fausses déclarations négligentes sont plaidés et présentés.

Dans le recours collectif proposé dans l’affaire Philip Services a été d’une importance similaire pour ce qui est de façonner les exigences relatives à la certification, notamment en ce qui a trait à l’aptitude du demandeur proposé pour agir à titre de représentant. M. Menegon, le premier demandeur proposé pour la catégorie des souscripteurs aux termes du prospectus, a été jugé inadmissible parce qu’il n’avait effectué aucune acquisition aux termes du prospectus. Le tribunal des requêtes (2001, OJ No.5547), la Cour divisionnaire (2002, OJ No. 370) et la Cour d’appel (2003, OJ No. 8) ont tous affirmé que, pour convenir, le demandeur proposé pour agir à titre de représentant devait avoir une cause d’action dont certains éléments étaient communs à ceux des membres du groupe. M. Coulson a ensuite été proposé, mais sa revendication a été rejetée au motif qu’il s’était écoulé un délai trop long et qu’il y avait donc prescription (2010 OJ no 1109, OCA 2012 OJ no 717). Ces décisions posent des limites importantes aux recours collectifs afin d’obtenir l’équilibre que la Loi sur les recours collectifs a été conçue pour atteindre.

2. Comment votre expérience vous a-t-elle permis de saisir la variété et la diversité des Canadiens et des Canadiennes et leurs perspectives spécifiques?

Les Canadiens sont fiers de la « mosaïque » de cultures et traditions diverses qui composent notre société, qui est souvent comparée au « melting pot » de nos voisins du Sud. Cette « mosaïque » naît d’une conviction que le maintien de notre diversité culturelle nous rend plus forts, à mesure que nous apprenons à nous connaître les uns et les autres et à connaître nos traditions respectives. Je saisis la diversité des Canadiens et des Canadiennes et leurs perspectives spécifiques en premier lieu grâce aux expériences que j’ai vécues et aux rencontres que j’ai faites avec des personnes qui étaient disposées à partager leurs traditions culturelles. Ainsi, j’ai pu faire l’expérience des pratiques indiennes du yoga et de la méditation; en apprendre davantage sur les croyances chinoises dans les remèdes à base de plantes médicinales et dans la médecine douce; observer les « arts » israéliens du débat et de la danse; découvrir les traditions historiques des Anglais (du thé aux sports compétitifs); et connaître la tradition orale de récit des peuples autochtones de la Colombie‑Britannique, où j’ai grandi. Grâce à ces expériences (et à d’autres expériences), j’ai acquis des connaissances fondamentales sur l’existence de nombreuses perspectives spécifiques et diversifiées ainsi que la présence d’esprit d’avoir conscience de leur existence et de faire preuve de respect à leur égard.

C’est en outre en prenant connaissance des défis et des difficultés auxquels doivent faire face divers groupes de Canadiens et Canadiennes et en faisant preuve d’écoute à leur égard que l’on peut saisir leur diversité et leurs perspectives spécifiques. En novembre 2007, j’étais membre du conseil d’administration de l’Advocates’ Society. J’ai alors aidé à organiser la deuxième conférence biannuelle intitulée « Combating Hatred in the Twenty-First Century – Balancing Rights, Freedoms and Responsibilities », à laquelle j’ai également participé. Des représentants de divers groupes de Canadiens et Canadiennes ayant personnellement été victimes de haine et y ayant répondu ont participé à ce rassemblement et au dialogue, ainsi que des fonctionnaires et des membres de la communauté juridique qui ont souvent interagi avec des membres de ces groupes à la suite de leur expérience avec les forces policières et l’administration de la justice. Les récits de personnes invitées à participer et à raconter leurs histoires de stéréotypes et de profilage racial ont été un triste rappel que nous ne pouvons nous permettre d'être désensibilisés face à la haine, quelle que soit la façon dont elle se manifeste, et un rappel qu’il est important d'assurer un accès à la justice à ses victimes. Le dialogue qui s’est tenu lors de cette conférence a fait ressortir un problème auquel font face les nombreux immigrants au Canada qui ne jouissent pas de tous les droits ou d’un accès à notre système juridique en raison de leur statut incertain, des barrières linguistiques et des craintes culturelles à l’égard des forces policières. Cette conférence m’a permis de comprendre à quel point il est important de tenir un dialogue sur les différences et la diversité des Canadiens et Canadiennes et de nous extirper de notre propre quotidien et de nos routines pour jeter un regard sur la vie et les expériences d’autrui.

J’ai pu approfondir cette question lorsque j’ai siégé au conseil d’administration et assuré la présidence de la Toronto Lawyers’ Association. Nous nous sommes efforcés de communiquer de façon proactive avec les dirigeants de diverses organisations juridiques d’avocats qui étaient eux-mêmes des minorités visibles ou représentaient ces dernières. L’objectif était d’approfondir notre compréhension des enjeux uniques auxquels ils font face et qu’ils cherchent à mettre au premier plan au nom de leurs collectivités lorsqu’ils doivent composer avec notre système juridique. Nous avons appris qu’une grande partie de leur capacité à faire une différence pour les membres de leur collectivité découlait de la confiance née de leurs traditions communes et de leur sentiment d’appartenance.

Ces expériences m’ont non seulement donné un aperçu de perspectives en particulier, mais plus important encore, elles m’ont permis de comprendre que chaque personne a sa propre perspective, inspirée de son histoire, de ses traditions culturelles, de ses expériences et de sa communauté. La norme objective de la « personne raisonnable » à l’aulne de laquelle le droit canadien détermine parfois la culpabilité en droit doit tenir compte des perspectives des différents genres, sexes, orientations, capacités, couleurs, races, religions et croyances. Mes expériences m’ont préparée à chercher à obtenir cette reconnaissance. Notre système juridique est fortement influencé par les traditions de la common law, qui ne sont pas particulièrement diversifiées sur le plan culturel. Je crois qu’il faut faire une place à d’autres influences culturelles dans notre tradition de common law. Comprendre les perspectives uniques et diversifiées peut éclairer notre compréhension du comportement humain.

J’ai un profond respect pour la diversité des Canadiens et des Canadiennes. La nécessité de respecter et de comprendre comment les diverses traditions contribuent au comportement et aux actions de chaque personne est fondamentale. Elle est essentielle non seulement à notre capacité d’évaluer et de juger les comportements et les actions de chaque personne, mais aussi à la capacité et à la volonté de chaque personne de faire confiance à notre système juridique et de s’en remettre à celui‑ci.

3. Décrivez le rôle que doit jouer un juge dans une démocratie constitutionnelle.

La démocratie constitutionnelle est un système de gouvernement dans lequel les autorités politiques doivent obtenir l’approbation de la majorité pour être élues et portées au pouvoir, mais qui, quels que soient le soutien ou l’opinion publics, doivent exercer des pouvoirs limités par la constitution. Les politiciens élus rendent des comptes aux électeurs, qui ont le pouvoir de les écarter à l’élection suivante. Ce sont les politiciens élus qui rédigent, modifient ou abrogent les lois conformément à leur conception du mandat que le public leur a confié. Les limites imposées au pouvoir politique du gouvernement sont énoncées dans la constitution, et ce sont les juges qui se prononcent sur la constitutionnalité des lois adoptées par les politiciens.

Les juges ne déterminent pas ce que devraient être les lois; ils se chargent plutôt d’interpréter et d’appliquer les lois adoptées par les législateurs. Les juges donnent un sens aux lois qui manquent de clarté ou sont susceptibles de plus d’une interprétation. Ils tentent d’harmoniser ou de concilier des lois contradictoires. Ils élaborent et font évoluer la common law, qui est le domaine du droit établi par les juges pour régir les solutions là où les législateurs n’ont adopté aucune loi. Pour s’acquitter du rôle qui leur est confié de maintenir la Constitution et la Charte des droits et libertés, les juges doivent être indépendants des organes législatifs et exécutifs du gouvernement et rendre des comptes ni à l’un ni à l’autre. C’est pourquoi les juges doivent agir sur le fondement de principes et faire preuve d’impartialité et d’indépendance à l’égard des influences politiques dans leur application et leur interprétation de loi, et être perçus comme tels.

La constitutionnalité d’une loi contestée peut dépendre de la question de savoir si le législateur qui a adopté la loi détenait le pouvoir de l’adopter. Elle peut également dépendre de la question de savoir si la loi en question peut être interprétée de manière à s’inscrire dans les limites de ces pouvoirs (et ainsi être jugée constitutionnelle, même dans les cas où elle pourrait être susceptible d’une autre interprétation qui, elle, ne l’est pas). La constitutionnalité d’une loi dépend également de son respect des droits et libertés fondamentaux protégés par la Charte.

Au Canada, la magistrature est chargée d’examiner les actions du gouvernement pour s’assurer que celles‑ci sont exécutées conformément à la Charte et, si elles ne l’ont pas été, pour déterminer si l’atteinte par ces actions aux droits garantis par la Charte est justifiée. Voilà qui constitue peut-être le rôle le plus fondamental et le plus distinct de la magistrature, c’est-à-dire se prononcer dans des dossiers où l’on allègue une atteinte injustifiée aux droits garantis par la Charte, et où le rôle du gouvernement (dans sa fonction législative ou dans sa fonction décisionnelle) fait l’objet d’un examen.

Les affaires fondées sur la Charte sont souvent assorties d’implications sociétales plus générales et imprégnées de nuances religieuses, et suscitent nombre d’opinions publiques. Ce phénomène a été observé dans les premières affaires fondées sur la Charte, notamment : a) la contestation de la loi interdisant l’avortement dans R. c. Morgentaler ([1988] 1 R.C.S. 30), qui a opposé les droits à la vie, à la liberté et à la sécurité de la femme en vertu de l’article 7 de la Charte à certaines croyances religieuses à l’égard du droit à la vie des enfants à naître; et b) les contestations de la loi interdisant le magasinage le dimanche, opposant la liberté de religion aux croyances à l’égard de certaines fêtes religieuses (comme dans R. c. Big M Drug Mart Ltd. [1985] 1 R.C.S. 295, et le commerçant de fourrures Paul Magder, dont les magasins sont demeurés ouverts les dimanches). Ces contestations ont franchi les diverses étapes judiciaires (jusqu’à la Cour suprême du Canada), et ont nécessité au bout du compte des modifications législatives. Les affaires fondées sur la Charte continuent, depuis plus de 30 ans, de susciter la controverse dans les sondages d’opinion publique et de nécessiter la prise de mesures législatives. En 2013, la Cour suprême du Canada a invalidé les lois interdisant l’exploitation d’une maison de débauche au motif qu’elles étaient contraires aux droits, garantis à l’article 7 de la Charte, à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne, parce qu’elles contraignaient les prostituées à travailler dans la rue dans des conditions potentiellement dangereuses [Canada (PG) c. Bedford [2013] 3 RCS 1101) et, en 2015, la Cour suprême du Canada a infirmé les dispositions du Code criminel interdisant l’aide médicale à mourir au motif qu’elles contrevenaient aux droits garantis par l’article 7 de la Charte, [ [2015] 1 RCS 331], renversant ainsi la décision qu’elle avait rendue précédemment et dans laquelle elle avait maintenu les mêmes dispositions (dans Rodriguez c. C.‑B.). Dans ces affaires ultérieures portant sur les sujets polarisants de la prostitution et de l’aide médicale à mourir, la Cour suprême a accordé un délai précis dans lequel les lois pouvaient être réécrites pour se conformer à la Charte.

Les pouvoirs des juges, surtout en ce qui concerne la Charte, sont importants et feront l’objet d’un examen public. Le fait que les tribunaux sont ouverts au public, que les juges sont tenus de fournir des motifs et de suivre les précédents, que les décisions des juges sont susceptibles d’un appel et que les interprétations judiciaires peuvent (sauf dans les cas où la Charte est en cause) être renversées par une loi, constitue dans tous les cas une limite importante aux pouvoirs de la magistrature et un contrôle à leur égard. C’est ainsi que, dans une démocratie constitutionnelle, la magistrature rend des comptes, mais elle ne rend pas de compte à l’opinion publique.

4. À qui s’adressent les décisions de la cour à laquelle vous vous portez candidat(e)?

Les décisions rendues par la Cour supérieure de justice de l’Ontario et la Cour d’appel de l’Ontario s’adressent principalement aux parties à une affaire. La nature des questions en litige déterminera toutefois à qui s’adressent ces décisions en plus des parties. Il en est ainsi et pour les affaires civiles et pour les affaires pénales, mais je vais commencer par en fournir l’illustration au moyen d’exemples tirés d’affaires civiles, puisque c’est dans ce domaine que j’ai exercé.

Dans le contexte des affaires civiles, le principe de la stare decisis de la common law peut transformer une décision concernant un délit civil ou un contrat donné entre des parties en un précédent pour les affaires qui seront tranchées à l’avenir en common law. Bien qu’il existe de nombreux exemples modernes, les décisions classiques – dont l’impact subsiste – comme Donoghue v. Stevenson [1932] UKHL 100 – l’escargot dans la caisse de bière de gingembre – qui a établi l’obligation fondamentale de diligence en droit de la responsabilité délictuelle, et Hong Kong Fir Shipping Co. v. Kawasaki Kisen Kaisha Ltd. [1961] EWCA Civ 7, qui a établi la distinction entre les garanties et conditions contractuelles d’une part et le concept du manquement fondamental d’autre part, en sont des exemples intemporels.

Les décisions rendues dans des affaires civiles peuvent aussi façonner les conseils offerts à des personnes qui, dans des situations futures, pourraient vouloir éviter de se retrouver devant les tribunaux, ainsi que le comportement adopté par ces personnes. Ce fut le cas, par exemple, lorsque le juge Campbell a décidé dans Barrick Gold Corp. v. Goldcorp Inc. [2011] O.J. No. 3530, qu’un privilège peut s’appliquer à l’égard des communications entre les avocats des parties et les conseillers tiers ayant fait partie de l’équipe de négociation dans le cadre d’une transaction commerciale (et que la participation de ces conseillers n’a pas emporté renonciation à ce privilège). Ce « privilège de l’équipe de négociation » au Canada a servi à orienter la création d’« équipes de négociation » et les paramètres s’y rapportant dans les transactions commerciales où des conseils juridiques sont fournis sachant qu’ils seront protégés contre toute divulgation future en raison du privilège.

Les décisions peuvent aussi façonner la façon dont les causes futures sont instruites. L’affaire Moore c. Getahun, qui portait sur une faute médicale et dans laquelle la juge de première instance a rendu une décision sur ce qu’elle considérait comme étant un examen inapproprié par l’avocat de la défense des rapports provisoires d’un expert, en est un exemple récent. L’Advocates’ Society et d’autres groupes d’intérêts ont demandé et obtenu l’autorisation d’intervenir devant la Cour d’appel en raison des répercussions possibles de la décision rendue en première instance sur toutes les communications entre les avocats et les experts. La décision rendue en première instance a été annulée. Cette affaire a mené à l’élaboration des « Principles Governing Communications with Testifying Experts » de l’Advocate’s Society, auxquels a souscrit la Cour d’appel et qui peuvent maintenant être invoqués comme directives dans toute affaire mettant en cause des témoins experts.

Dans les affaires criminelles, même une décision procédurale peut avoir des conséquences de grande portée qui vont au‑delà des parties. Voici deux exemples : (i) R. c. Askov, [1990] 2 R.C.S. 1199, qui a énoncé les facteurs à appliquer pour déterminer si le retard dans le procès d’un accusé était déraisonnable eu égard au droit de l’accusé, garanti par l’al. 11b) de la Charte, d’être jugé dans un délai raisonnable; et (ii) plus récemment, R. c. Jordan, [2016] 1 R.C.S. 631, qui a fixé de façon anticipée à 18 mois le délai maximum dans lequel les causes devaient être entendues par la Cour provinciale et à 30 mois pour les causes entendues par la Cour supérieure. Ces deux affaires ont entraîné le rejet d’accusations en raison du délai écoulé. En outre, les exigences relatives à la tenue plus rapide de procès dans le cas d’accusations criminelles ont à leur tour entraîné de plus longs délais dans les affaires civiles, ce qui a eu une incidence sur tous les utilisateurs du système de justice, à qui s’adressent les décisions en bout de ligne.

Il y a certaines causes qui, au départ, sont désignées comme ayant des répercussions plus vastes sur l’intérêt public et la société et dont le public ne se limite pas aux parties et à d’autres justiciables. Il s’agit souvent, mais pas toujours, d’affaires qui portent sur l’examen d’éventuelles atteintes par le gouvernement à des droits garantis par la Charte dans les cas où des lois sont contestées, par exemple les causes qui concernent les mariages homosexuels, le magasinage le dimanche, l’avortement et le financement public des écoles privées.

D’autres tribunaux du Commonwealth peuvent appliquer une décision ou tenter d’établir une distinction d’avec celle‑ci. Les tribunaux peuvent être appelés à se pencher sur les décisions de tribunaux administratifs, tandis que les cours d’appel sont appelées à se pencher sur les décisions des tribunaux d’instance inférieure. À ce titre, les autres tribunaux font donc également partie du public élargi des décisions rendues.

Il importe donc, quelle que soit l’étendue des publics potentiels d’une affaire donnée, que le tribunal ne perde pas de vue les circonstances et les faits particuliers des parties et que ceux‑ci ne soient pas éclipsés par les intérêts ou les objectifs de ces autres publics.

5. Prière d’indiquer les qualités personnelles, les compétences et aptitudes professionnelles ainsi que l’expérience de vie qui, selon vous, vous rendent apte à exercer le rôle de juge.

L’on s’attend d’un juge qu’il fasse preuve d’impartialité, d’empathie et de sagesse. Pour être impartial, le juge doit être objectif, juste et neutre. Et pour faire preuve d’empathie, il doit être en mesure de comprendre les différents points de vue des parties et de s’identifier à ceux‑ci. Pour y arriver, il doit non seulement pouvoir entendre, mais aussi écouter la preuve et les arguments présentés et maintenir un minimum de curiosité. Quant à la sagesse, elle naît des connaissances et de la capacité d’exercer un bon jugement (une qualité présumée « judiciaire »). Fondamentalement, toutes ces qualités sont façonnées par l’expérience.

La véritable impartialité est une compétence acquise. Nous sommes naturellement plus à l’aise avec ce qui nous est familier et puisons dans nos propres expériences et relations. Ce que mes diverses expériences m’ont permis de comprendre, c’est que l’ouverture d’esprit ressortit à une discipline qui est nécessaire pour éviter les préjugés et demeurer neutre. Il faut tenir compte d’autres points de vue avant de porter des jugements. Dans ma vie professionnelle, j’ai eu à traiter avec des plaideurs de tous genres, ce qui m’a permis d’élargir ma zone de « familiarité », malgré mon expérience ayant porté principalement sur les litiges corporatifs et dans le domaine des valeurs mobilières. J'ai de l'expérience en tant que représentante des « David » et des « Goliath » auxquels ils sont opposés.

J’ai agi pour le compte de personnes (par exemple, des personnes qui ont subi des dommages corporels, des personnes qui ont dû faire face à des réclamations professionnelles ou des personnes se battant pour récupérer leurs économies) et de grandes et petites sociétés familiales. Je sais que les excuses et les dizaines de milliers de dollars en jeu pour un demandeur qui a subi une thrombose veineuse profonde lors d’une intervention chirurgicale en orthopédie étaient aussi importants pour lui que l’étaient pour les acheteurs concernés les 50 milliards de dollars en jeu dans l’affaire BCE. J’ai également travaillé dans des recours collectifs de grande envergure ainsi que dans des affaires d’insolvabilité et de restructuration (par exemple, la Croix-Rouge et Nortel) mettant en cause des revendications concurrentes à l’égard d’une réserve d’argent en baisse, où les perspectives en equity des employés individuels, des pensionnés et d’autres personnes aux prises avec des difficultés financières ont été jugées tout aussi importantes que les positions des grands créanciers commerciaux garantis et non garantis dans la pondération des intérêts.

Écouter autrui et faire preuve d’empathie est aussi une aptitude professionnelle et de vie. Il s’agit d’une compétence particulièrement bien maîtrisée par les plaideurs qui, comme moi, passent leurs journées à écouter les récits et les instructions des clients, à écouter les questions des juges, à écouter les réponses des témoins aux questions, à écouter comment les autres cherchent à qualifier leur preuve, et à écouter les arguments. Je ne me suis cependant pas contentée d’écouter. Je sais que les demandeurs doivent être entendus et avoir le sentiment que l’on comprend leur cause et que l’on y croit. Ils ont besoin d’une validation, et ils ont besoin de la sagesse et de l’expérience de leur avocat pour les aider à s’y retrouver dans le système judiciaire. En défense, les justiciables veulent être entendus et amenés à croire qu’ils sont justifiés dans leurs actions, mais eux aussi recherchent la sagesse et l’expérience de leur avocat pour les aider à s’y retrouver. Les divers visages de ces attentes et besoins fondamentaux valent pour toute la gamme des affaires civiles (allant des préjudices personnels à des affaires commerciales complexes transfrontalières et multinationales). J’ai également appris que les dossiers qui mettent en présence des « causes » dont les répercussions et les publics sont vastes nécessitent une forme particulière de patience pour l’écoute en raison de la diversité des intérêts représentés et des voix qui souhaitent être entendues.

La sagesse ne s’apprend pas, elle s’acquiert au moyen de connaissances et de l’expérience. J’ai acquis l’expérience quasi judiciaire d’un chercheur des faits, ce qui m’a donné une idée de l’importance de la sagesse expérientielle. J’ai contribué à mener des enquêtes internes confidentielles pour une importante organisation internationale et j’ai rapidement appris que la discrétion, l’impartialité et l’empathie étaient aussi cruciales pour le processus qu’elles l’étaient pour le résultat.

Les connaissances de la procédure et du droit civil que j’ai acquises dans le cadre de mes expériences dans de nombreuses affaires et qui ont été solidifiées par la multitude d’exposés, de conférences, de démonstrations, d’articles et de publications que j’ai donnés et (ou) rédigés au cours des 25 dernières années (des exemples détaillés sont fournis dans les réponses à la partie 7 de la Demande) constituent une base solide pour le travail que je devrai accomplir si je suis nommée juge. Mes expériences m’ont également permis de prendre pleinement conscience du coût des litiges et des obstacles que celui‑ci pose à l’accès à la justice. L’efficience accrue (qui devrait aussi entraîner une réduction des coûts et pour le système et pour les justiciables) a été le point de mire d’une grande partie du temps que j’ai consacré et du travail que j’ai accompli dans le cadre d’initiatives d’amélioration, comme la directive de pratique de Toronto sur la nouvelle gestion de cas et les documents que j’ai rédigés. J’espère qu’en tant que membre énergique, travaillante, novatrice et dévouée nouvellement nommée à la magistrature, je pourrai contribuer aux efforts continus visant à équilibrer l’efficience et l’équité du système judiciaire.

Je crois que mes interactions personnelles avec la famille – principalement pour ce qui est d’élever des enfants et de composer avec leurs besoins et leurs expériences – constituent une école de formation aussi précieuse pour ce qui est d’acquérir et de perfectionner les compétences nécessaires pour être juge.

Mes expériences personnelles et professionnelles font de moi une personne décisive et juste qui, non seulement écoutera, mais aussi entendra chaque partie, parce que je sais à quel point cela est important.

6. Compte tenu de l’objectif voulant que les Canadiens et Canadiennes se reconnaissent et reconnaissent leur expérience de vie dans les visages de la magistrature, vous pouvez, si vous le voulez, ajouter des renseignements sur vous-même dans la mesure où ils serviraient cet objectif.

Je suis une femme et j’ai travaillé fort pour être traitée comme une égale et reconnue comme apportant une précieuse contribution au sein de mon cabinet et de la profession juridique. Je suis également, voire davantage une mère, une épouse, une sœur, une fille, une propriétaire de chien, une employeuse, une consommatrice, une propriétaire de maison, une voisine, une navetteuse et une personne de tous les jours.

Mes expériences de vie au quotidien m’ont appris que les expériences façonnent les perspectives et que les perspectives influent sur les jugements. J’apporterai une sensibilité ouverte aux diverses expériences et perspectives d’autrui dans mes évaluations.

Il est possible d’améliorer la mise en place et le maintien d’un système judiciaire représentatif de la diversité de la société canadienne au moyen de la nomination de personnes qui, comme moi, font preuve de tolérance et d’empathie et sont déterminées à faire en sorte que tous soient traités équitablement et que notre société (et notre système judiciaire) accepte les nombreuses différences entre les gens, et face une place à celles‑ci.

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