Questionnaire de l’honorable Charlene M. Richmond

Document d'information

Selon le nouveau processus de demande de nomination à la magistrature institué par la ministre de la Justice le 20 octobre 2016, tout avocat ou juge canadien intéressé et ayant les qualifications requises peut poser sa candidature à la magistrature fédérale en remplissant un questionnaire à cet effet. Les questionnaires sont ensuite utilisés par les comités consultatifs à la magistrature à travers le Canada pour examiner les candidatures et soumettre à l’attention de la ministre de la Justice une liste de candidats « hautement recommandés » et « recommandés ». Les candidats sont avisés que certaines parties de leur questionnaire pourraient être rendues publiques, avec leur consentement, s’ils sont nommés à la magistrature. Les renseignements sont divulgués comme les candidats les ont fournis au moment de postuler, sous réserve des modifications apportées pour protéger leur vie privée.

Voici les parties 5, 6, 7 et 11 du questionnaire rempli par l’honorable Charlene M. Richmond.

Questionnaire en vue d’une nomination à la magistrature

[...]

Partie 5 – Exigences linguistiques

Veuillez prendre note qu’en plus de vos réponses aux questions suivantes, votre connaissance fonctionnelle des deux langues pourrait être évaluée.

Sans formation supplémentaire, êtes-vous capable de lire ou de comprendre des documents de la cour :

  • En anglais : Oui
  • En français : Oui

Sans formation supplémentaire, êtes-vous en mesure de discuter d’affaires juridiques avec vos collègues : 

  • En anglais : Oui
  • En français : Oui

Sans formation supplémentaire, êtes-vous capable de converser avec un avocat en cour : 

  • En anglais : Oui
  • En français : Oui

Sans formation supplémentaire, êtes-vous capable de comprendre les observations orales présentées en cour : 

  • En anglais : Oui
  • En français : Oui

Partie 6 – Études

Noms des établissements, années d’études, diplômes et années d’obtention : 

  • Université McGill 1981-1982
  • Université de la Saskatchewan, baccalauréat ès arts et sciences 1982-1986, (B.A. avec distinction)
  • Université de la Saskatchewan, baccalauréat en droit 1986-1988 (L.L.B. avec distinction)

Formation continue :

Au fil des ans, j’ai participé à un certain nombre de séminaires et de cours. Dernièrement, ces formations ont principalement porté sur le droit de la famille, mais j’ai également participé à des cours en droit collaboratif et en médiation.

Distinctions académiques :

  • Prix commémoratif Gabe Burkhart, soulignant l’excellence en droit criminel (1988)
  • Prix de la plaidoirie en première instance, soulignant les compétences exceptionnelles en plaidoirie (1988)
  • Prix Tory, Tory pour avoir présenté une équipe entièrement bilingue au Concours national de plaidoirie Laskin (1988)
  • Bourse d’étude pour réussite scolaire (1987)
  • Médaille du jubilé de diamant de la Reine Elizabeth II (2012)

Partie 7 – Antécédents professionnels

Veuillez indiquer, dans l’ordre chronologique et à partir du plus récent, les emplois que vous avez exercés et précisez pour chacun la durée d’emploi et le nom de l’employeur. En ce qui concerne les emplois dans le domaine juridique, veuillez inscrire les secteurs de travail ou les spécialisations, ainsi que les années correspondantes. Au besoin, indiquez si les secteurs de travail ont changé.

Expérience de travail dans le domaine juridique :

Richmond Nychuk, 100-2255, rue Albert, Regina (Saskatchewan), S4P 2V5 (de juillet 1991 à aujourd'hui)

  • J'ai entrepris ma pratique actuelle en 1991. Au départ, le cabinet portait le nom de Richmond Struthers et, pendant quelques années, il s’est appelé Richmond Nychuk & Carle. Il porte le nom actuel depuis environ 1996. Au cours des premières années, j’ai exercé comme avocate généraliste, mais j’ai travaillé surtout en droit de la famille, en droit des débiteurs/créanciers et en droit criminel. Au fil des années, j’ai abandonné la pratique du droit criminel et je me suis concentrée principalement sur les deux autres domaines de ma pratique, bien que je me sois occupée également de transactions commerciales, d’immobilier, de testaments et de successions. Au cours des dernières années, j’ai travaillé presque exclusivement dans le domaine du droit de la famille.

Merchant Law Group, 2401 Saskatchewan Dr., Regina (Saskatchewan), S4P 4H8 (mai 1989 - août 1991)

  • Mon travail d’avocate a porté principalement sur le droit de la famille et le droit criminel, bien que je me sois occupée aussi un peu de litiges civils.

Ministère de la Justice de la Saskatchewan, Regina (Saskatchewan), (stages) (juin 1988 - mai 1989)

  • Au cours de mes stages au sein du ministère de la Justice, j’ai été appelée à travailler à tour de rôle à la Direction du droit civil, à la Direction du droit criminel et à la Direction du droit constitutionnel. De plus, le gouvernement m'a affectée pour une période d’un mois auprès d’un grand cabinet de Régina, Balfour Moss (maintenant Miller Thompson).

Expérience de travail dans un domaine non juridique :

Avant de terminer mes études en droit, j’ai occupé pendant l’été, à Parcs Canada, un poste saisonnier permanent de représentante bilingue des services aux visiteurs (quatre ans) et, chez Emploi et Immigration Canada, un poste d’agente de placement étudiant (un an). En outre, j’ai travaillé à temps partiel pendant mes études universitaires comme monitrice de langue française dans les écoles d’immersion française (deux ans) et aussi à titre de réceptionniste au département de radiographie de l’Hôpital universitaire Royal (trois ans).

Autres expériences professionnelles :

Inscrivez toutes les associations du barreau ou comités d’affaires juridiques dont vous êtes ou avez été membre, et tous les titres des postes que vous avez occupés au sein de ces groupes, ainsi que les dates correspondantes.

  • Association du Barreau canadien
  • International Society of Family Law
  • Saskatchewan Trial Lawyers Association
  • ADR Institute of Canada
  • Association des juristes d'expression française
  • Collaborative Lawyers of Saskatchewan
  • Membre du comité du projet Justicia de la Saskatchewan

Activités Pro Bono :

J’ai fait du mentorat auprès d’avocats juniors tant dans mon propre cabinet que dans d’autres cabinets. J’ai encouragé les avocats juniors à travailler pro bono et j’ai fourni bénévolement des conseils dans de tels dossiers. J’ai offert et je continue d’offrir des services gratuits ou à un coût réduit aux clients dans le besoin.

Enseignement et formation continue :

Indiquez toutes les organisations et activités de formation judiciaire ou juridique auxquelles vous avez pris part (p. ex., enseignement dans une faculté de droit, à l’Institut national de la magistrature, à l’Institut canadien d’administration de la justice, etc.)

  • Présentatrice au CPLED 2016
  • Juge au « Concours de Débats », Journée fransaskoise du droit
  • Diverses allocutions sur le droit de la famille et le droit de l’agriculture tout au long de ma carrière
  • Juge du tribunal-école Laskin
  • Présentatrice pour la SKLESI sur des questions familiales
  • Présentatrice régulière, par le passé, sur les dettes agricoles, les testaments et les successions et les questions de droit de la famille, à la demande de diverses organisations agricoles

Activités communautaires et civiques :

Indiquez toutes les organisations dont vous êtes membre ou tout poste que vous avez occupé, ainsi que les dates correspondantes.

[...]

  • YWCA (membre du conseil d’administration et présidente) 2004 - 2009
  • Collège Mathieu (membre du conseil d’administration, 2014 à aujourd’hui)
  • Membre du comité directeur chargé d’établir la communauté de Deer Valley comme hameau (2014 - 2016)
  • Conseillère dans la division 2 de la municipalité rurale de Lumsden (décembre 2016 à aujourd’hui)
  • Consule honoraire du Royaume du Maroc (juillet 2010 - décembre 2017)

En outre, en tant que mère de quatre enfants actifs, aujourd'hui adultes, j'ai participé à des comités de financement, à des conseils scolaires et à des activités scolaires liées aux sports et à l'école des enfants qui sont trop nombreux pour les mentionner.

Partie 11 – Le rôle de la fonction judiciaire dans le système juridique canadien

Le gouvernement du Canada souhaite nommer des juges ayant une connaissance approfondie de la fonction judiciaire au Canada. Afin de fournir une base solide à leur évaluation, on demande aux candidats de donner leur opinion sur des sujets généraux liés à la fonction judiciaire et au système juridique au Canada. Pour chacune des questions ci-dessous, veuillez fournir une réponse de 750 à 1 000 mots.

1. Selon vous, quelle est votre plus grande contribution au droit et à la quête de la justice au Canada?

En songeant à la réponse que je donnerais à cette question, je me suis sentie obligée de revenir sur mes 30 années de pratique et sur ce que j’ai accompli au fil des ans. Bien qu’il y ait eu des dossiers importants au cours de ma carrière, je ne considérerais aucun d’entre eux comme étant révolutionnaire, et je ne me souviens d’aucun dossier dont j’ai été chargée, ayant eu pour effet de modifier sensiblement le droit. Bien que j’aie fait de nombreuses présentations sur le droit à l’intention du public au fil des ans et parfois à l’intention de mes collègues, je n’ai pas non plus apporté d’importantes contributions au domaine pédagogique. Dans le cadre de ma réflexion sur cette question, j’ai pensé que je devrais peut-être être découragée par ce que certains pourraient considérer comme étant l’absence de réalisations notables, mais je me rends compte que ce n’est pas le cas. Je retire beaucoup de satisfaction professionnelle et je peux affirmer avec fierté que, depuis près de 30 ans, je m’efforce de travailler dans un esprit d’ouverture et de servir mes clients au meilleur de mes capacités, avec passion et compassion, avec respect et en conformité avec le droit.

Étant donné que j’ai travaillé principalement dans le domaine du droit de la famille, mes clients sont souvent des plus vulnérables sur le plan émotionnel. Je m’efforce de faire en sorte qu’ils reçoivent toute l’aide qu’ils peuvent obtenir, ce qui signifie souvent un aiguillage vers des ressources externes. Je ne crois pas que mon aide doive se limiter à fournir des conseils juridiques; je travaille plutôt de façon plus holistique et j’essaie de veiller à ce que mes clients prennent des décisions judicieuses et éclairées, et ce, dans un bon état d’esprit. Il n’est donc pas rare que je les dirige vers des comptables, des conseillers financiers et, le plus souvent, des thérapeutes. Le droit de la famille présente un risque élevé de conflit. L’avocat en droit de la famille est souvent appelé à maintenir un équilibre délicat entre l’obligation de faire en sorte que les intérêts d’un client soient protégés sans accroître inutilement l’animosité qui règne. La médiation et le droit axé sur la collaboration font toujours partie des options qui sont offertes, par opposition à un litige en cour, mais, pour de nombreuses raisons, une telle avenue n’est peut-être pas possible. Toutefois, même dans le cadre d’un litige, en ma qualité de médiatrice chevronnée et d’avocate ayant recours à la collaboration, j’ai souvent en tête la règle fondamentale de la médiation : « ne causer aucun préjudice ». Il faut parfois adopter une approche agressive pour bien représenter un client, mais il faut aussi absolument connaître son client et ses besoins et être en mesure d’évaluer la preuve de la partie opposée pour éviter qu’une situation difficile ne s’envenime. Un collègue de mon cabinet et moi‑même disons souvent que nous faisons notre meilleur travail en partie à l’extérieur de la salle d’audience. En sensibilisant les clients et en leur donnant des conseils directs et honnêtes, plutôt que de leur dire ce qu’ils veulent entendre, et en écoutant leurs besoins, l’on évite souvent une comparution en cour. Abraham Lincoln a fait le même commentaire, mais avec plus d'éloquence :

« Découragez les litiges. Amenez vos voisins à faire des compromis chaque fois que vous le pouvez. En tant que conciliateur, l’avocat a l’occasion sacrée d’être un homme bon. Il y aura toujours assez d’affaires. » [TRADUCTION]

En fin de compte, c’est le client que je sers, et je m’efforce de le faire au mieux de ma capacité, compte tenu de mes fonctions d’officier de la justice. En résumé, ma contribution au droit et à la quête de la justice au Canada n’a pas été auréolée de gloire, mais elle a plutôt consisté en un engagement ferme et quotidien d’agir avec honnêteté, intégrité et compassion à l’égard de ceux que je sers.

Au fil des ans, j’ai fait du mentorat auprès de plusieurs avocats juniors, dont un bon nombre fait encore partie du personnel de notre cabinet aujourd’hui. En offrant ce mentorat, j’estime avoir contribué davantage au droit et à la quête de la justice en veillant à ce qu’une nouvelle génération comprenne l’obligation inhérente de l’avocat envers les clients et le tribunal. Je communique à mes nouveaux collègues un principe élémentaire, mais fondamental : vous devez vous soucier de vos clients. Si vous le faites, vous ferez automatiquement du bon travail et preuve de diligence.

2. Comment votre expérience vous a-t-elle permis de saisir la variété et la diversité des Canadiens et des Canadiennes et leurs perspectives spécifiques?

Je suis née et j’ai grandi à Gravelbourg, en Saskatchewan, où j’ai fréquenté l’école francophone et au primaire et au secondaire. Ayant grandi dans une communauté francophone dans une province largement anglophone, j’ai appris à apprécier à un jeune âge la diversité culturelle et linguistique et à honorer et respecter le français et l’anglais comme étant essentiels à l’identité de notre pays. Le système scolaire de Gravelbourg a été l’un des premiers de la province à enseigner principalement en français. La ville a toujours été fière de sa culture et de ses racines francophones et il a toujours été possible d’y explorer la culture, d’y parler la langue et d’y apprendre l’histoire. Née dans une famille protestante anglophone, vivant dans une communauté catholique francophone et fréquentant l’école catholique francophone, j’en suis venue à réaliser que l’ouverture d’esprit de mes parents, qui m’ont encouragée à adopter et à apprendre une autre langue et une autre culture, n’était pas nécessairement partagée par d’autres anglophones de la communauté. Il m’est aussi clairement apparu qu’en apprenant à apprécier, à respecter et à accepter nos différences, nous nous en portons tous mieux et nous demeurons fondamentalement les mêmes en tant qu’êtres humains.

Mon appréciation de la culture francophone s’est maintenue lorsque j’ai habité à Montréal, au Québec, pendant ma première année universitaire. J’étais fière de pouvoir vivre tout aussi confortablement dans une province où la langue officielle est le français, et j’ai été reconnaissante d’avoir eu une éducation francophone. Par ailleurs, en plus de m’exposer à une culture francophone, Montréal m’a appris à quel point notre pays est diversifié sur le plan culturel. J’ai fréquenté l’Université McGill, où les étudiants viennent de partout dans le monde. Pour une petite fille de la Saskatchewan, c’était une expérience formidable de rencontrer des immigrants et des réfugiés de tous les milieux. Montréal elle-même compte de solides collectivités culturelles diversifiées, que j’ai pris plaisir à explorer.

J’ai obtenu un diplôme de premier cycle en sociologie et en histoire, deux sujets axés sur l’identité et la diversité culturelles. Les droits des femmes et, en particulier, l’égalité, ont toujours suscité mon intérêt. Au fil des ans, j’ai pu observer moi-même les hauts et les bas de la lutte pour les droits des femmes et les défis auxquels les femmes continuent de faire face dans notre société. J’ai fait du bénévolat pour la société Elizabeth Fry et j’ai été témoin de certains des problèmes uniques auxquels font face les femmes dans le système carcéral. Cet enjeu est devenu un sujet important pour les documents que j’ai rédigés à l’université (au premier cycle et à la faculté de droit), car il m’est apparu évident que les femmes qui violaient la loi se heurtaient à des défis autres que ceux que devaient relever leurs homologues masculins. En tant que présidente et membre du conseil d’administration du YWCA de Régina, j’ai pu mieux comprendre les épreuves auxquelles font face de nombreuses femmes dans notre pays. En tant que présidente, j'ai assisté aux réunions nationales du YWCA. Le YWCA compte des établissements partout au Canada et, en dépit des problèmes régionaux auxquels sont confrontées les femmes dans ces endroits, il est rapidement devenu apparent que les femmes éprouvaient des difficultés qui étaient les mêmes partout au pays. Mon travail au sein du programme Justicia administré par le Barreau m’a permis de mieux comprendre les difficultés auxquelles font face les professionnelles et les avocates en particulier. La pratique du droit, et notamment la pratique privée, ne répond pas toujours aux besoins particuliers des femmes. Néanmoins, les femmes y apportent une perspective juridique qui profite à tous. Il reste à espérer que, grâce au programme Justicia, un plus grand nombre de femmes puissent être encouragées à demeurer en pratique privée.

Mon respect et mon appréciation de notre diversité se sont manifestés à l’égard d’autres cultures, car j’ai eu le plaisir de représenter les Premières Nations dans mes premières années de pratique et que, dans le cadre de ce travail, j’ai été invitée à participer à leurs événements culturels. La famille de mon mari est ukrainienne/métisse et, là encore, j'ai apprécié les expériences culturelles associées à ces deux groupes. C’est avec une certaine fierté que ma belle-mère a récemment acquis son statut de membre des Premières Nations, ce qui a donné lieu à d’autres recherches et études sur ses origines uniques.

Après ma nomination à titre de consule honoraire du Royaume du Maroc, j’ai eu le plaisir de connaître l’ambassadrice et son conjoint, mais j’ai aussi eu le plaisir de rencontrer plusieurs Marocains dans la province de la Saskatchewan. Je me suis rendue au Maroc et, avec l'aide de notre guide chevronné, j'en ai non seulement beaucoup appris sur le Maroc, mais j'en ai aussi appris sur la foi musulmane. Notre guide avait étudié et habité à Montréal pendant des années et ses expériences en tant qu’immigrant dans notre pays nous ont permis de mieux comprendre cette expérience.

J’ai eu le bonheur de grandir dans une collectivité rurale et j’ai habité dans des collectivités rurales à proximité de Régina. Pendant la majeure partie de ma carrière, j’ai représenté des familles d’agriculteurs. L’agriculture est plus qu’une carrière ou un emploi, c’est un mode de vie qui a sa propre identité. Les agriculteurs de la Saskatchewan s’identifient fièrement comme groupe, et encore une fois, ont leurs propres intérêts.

Je fais actuellement partie du conseil d’une municipalité rurale. À ce titre, j’ai l’occasion de répondre aux besoins des membres de ma collectivité. Encore une fois, ces intérêts sont diversifiés et parfois opposés. Notre municipalité et, en particulier, ma division, est composée de propriétaires fonciers, d’agriculteurs et d’habitants de zones rurales. Leurs intérêts sont diversifiés, et leurs moyens de subsistance sont tous différents. Néanmoins, ces intérêts sont propres au Canada et, à bien des égards, propres à la Saskatchewan. En tant que membres du conseil d’administration, nous sommes souvent appelés à prendre des décisions pour concilier ces intérêts. Il va sans dire que nous ne faisons pas toujours le bonheur de tous, mais nous nous efforçons d’atteindre un équilibre juste et raisonnable.

3. Décrivez le rôle que doit jouer un juge dans une démocratie constitutionnelle.

Le rôle d'un juge dans une démocratie constitutionnelle consiste à assurer le respect de la loi telle qu’elle est rédigée par nos politiciens dûment élus et à interpréter la loi en tenant compte des principes démocratiques et humains qui forment la base de notre constitution. En interprétant et en appliquant ainsi la loi, le juge doit faire preuve de respect et de compassion à l’égard des personnes qui comparaissent devant lui, mais il doit aussi tenir compte de la responsabilité qui lui incombe d’assurer le respect des lois de notre nation et leur application équitable à tous.

C’est ainsi que je résumerais ma perception du rôle d’un juge dans une démocratie constitutionnelle. Nous vivons dans une démocratie constitutionnelle. Notre constitution est le fondement de notre système juridique. Nos lois doivent respecter les principes établis par notre constitution, ou ces lois ne devraient pas exister à moins qu’elles ne puissent raisonnablement se justifier dans le cadre d’une société libre et démocratique.

Notre société est démocratique. Nous élisons notre gouvernement en fonction de sa plateforme électorale. Le gouvernement dirige et gouverne pendant la période prescrite et peut le faire ou non conformément à sa plateforme électorale. Pendant qu’il est au pouvoir, le gouvernement élu adopte des lois. Le juge est tenu de faire respecter ces lois, qu'il soit ou non en accord avec celles-ci, pourvu qu’elles soient conformes à notre constitution ou que leur justification puisse raisonnablement se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique. Le juge est un être humain et il a son propre vécu. Ce qui ne l’empêche pas de devoir mettre de côté son propre vécu et ses préférences et de faire respecter la loi à moins que cela ne viole notre constitution et qu'une telle violation ne puisse être justifiée.

Le juge est à la fois un juge des faits et un juge du droit. Les questions qui lui sont soumises ne sont pas toujours d’importance nationale, mais pour la personne qui comparaît devant le juge, elles pourraient tout aussi bien l’être. Lorsqu’une affaire est soumise au tribunal, c’est généralement parce qu’il n’était pas possible d’en arriver autrement à un règlement. Le juge représente notre démocratie constitutionnelle et il doit donc être respectueux, compatissant et juste envers ceux qui se présentent devant lui, tout en demeurant décisif. Ses décisions doivent être raisonnées et rationnelles. Pour reprendre les propos souvent cités de Lord Hewart dans R. v. Sussex [1924] 1KB256, « [n]on seulement justice doit-elle être rendue, mais elle doit aussi manifestement et sans aucun doute être perçue comme telle. » [TRADUCTION]

Le juge est un fonctionnaire; il est le visage de notre système judiciaire. Il assume ce rôle dans la salle d’audience et ailleurs, et doit en tout temps bien se conduire en public.

4. À qui s’adressent les décisions de la cour à laquelle vous vous portez candidat(e)?

Les décisions s’adressent aux citoyens de notre pays. Notre système judiciaire est un système public et, à ce titre, toutes les décisions sont mises à la disposition de quiconque souhaite prendre le temps de les lire, et le tribunal est ouvert à quiconque souhaite assister à l’audience à titre d’observateur. L’un des fondements de notre système juridique est qu’il est public. En maintenant un système public, nous préservons la transparence et en préservant la transparence, nous maintenons la responsabilisation, en théorie. Il est admis qu’il est possible dans certaines circonstances particulières d’exclure des personnes de la salle d’audience, mais dans la plupart des cas, le système public est respecté. Le système judiciaire public est depuis longtemps reconnu comme étant un élément essentiel de notre système, mais cela a été confirmé aussi récemment qu’en 2011 par notre Cour suprême dans Société Radio‑Canada c. Canada (Procureur général) 2011 CSC 2 : « Le principe de la publicité des débats judiciaires revêt une importance cruciale dans une société démocratique. Il garantit aux citoyens l’accès aux tribunaux, leur permettant ainsi de commenter le fonctionnement de ces institutions et les procédures qui s’y déroulent. L'accès du public aux tribunaux assure également l’intégrité des procédures judiciaires en ce que la transparence qu’il génère garantit que justice est rendue non pas de manière arbitraire, mais bien conformément à la primauté du droit. » La Cour suprême s'est également penchée sur la question de l'ouverture au public dans l'affaire A.G. (Nova Scotia) c. MacIntyre, [1982]1 RCS 175, et a cité le philosophe Jeremy Bentham : « Dans l'ombre du secret, de sombres visées et des maux de toutes formes ont libre cours. Les freins à l'injustice judiciaire sont intimement liés à la publicité. Là où il n'y a pas de publicité, il n'y a pas de justice. La publicité est le souffle même de la justice. Elle est l'aiguillon acéré de l'effort et la meilleure sauvegarde contre la malhonnêteté. Elle fait en sorte que celui qui juge est lui‑même un jugement. »

En plus de s’adresser au grand public, les décisions de la Cour s’adressent aussi aux autres tribunaux. Il est donc essentiel qu’elles soient claires, concises et respectueuses des décisions semblables rendues par d’autres tribunaux, bien que ces décisions puissent ne pas être exécutoires selon le palier du tribunal en cause. Quoi qu’il en soit, lorsque le juge s’écarte d’une décision semblable, il est tenu d’expliquer pourquoi, car il est toujours possible que sa décision s’adresse à la Cour d’appel ou à la Cour suprême.

5. Prière d’indiquer les qualités personnelles, les compétences et aptitudes professionnelles ainsi que l’expérience de vie qui, selon vous, vous rendent apte à exercer le rôle de juge.

Les qualités personnelles qui, à mon avis, me permettront d'assumer le rôle de juge sont ma justesse d'esprit, ma compassion et ma capacité d'empathie. En outre, je suis pragmatique.

Les compétences et aptitudes professionnelles qui, à mon avis, m’aideront à assumer le rôle de juge, sont notamment la vaste expérience que je possède en matière de litiges à tous les paliers de tribunaux ainsi que la formation et l’expérience approfondies que j’ai acquises en médiation et en droit collaboratif. Comme j’ai travaillé dans un cabinet de petite taille, j’ai été exposée à la plupart des domaines de pratique au fil des ans même si, au cours des dernières années, j’ai travaillé principalement dans le domaine du droit de la famille.

Cette pratique en droit de la famille m’a permis de comprendre les gens lorsqu’ils vivent les moments les plus douloureux et les plus difficiles de leur vie. La capacité de demeurer objective, tout en faisant preuve de compassion, est une compétence nécessaire dans le cadre de l’exercice de la profession dans ce domaine et qui pourrait m’aider à jouer le rôle de juge.

Enfin, mon expérience de vie en tant que conjointe, mère de quatre enfants, professionnelle et membre active de ma communauté m’a appris à prioriser ma charge de travail afin de viser la réussite dans tous les aspects de ma vie. 

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