Questionnaire de l’honorable Sharon Matthews

Document d'information

Selon le nouveau processus de demande de nomination à la magistrature institué par la ministre de la Justice le 20 octobre 2016, tout avocat ou juge canadien intéressé et ayant les qualifications requises peut poser sa candidature à la magistrature fédérale en remplissant un questionnaire à cet effet. Les questionnaires sont ensuite utilisés par les comités consultatifs à la magistrature à travers le Canada pour examiner les candidatures et soumettre à l’attention de la ministre de la Justice une liste de candidats « hautement recommandés » et « recommandés ». Les candidats sont avisés que certaines parties de leur questionnaire pourraient être rendues publiques, avec leur consentement, s’ils sont nommés à la magistrature. Les renseignements sont divulgués comme les candidats les ont fournis au moment de postuler, sous réserve des modifications apportées pour protéger leur vie privée.

Voici les parties 5, 6, 7 et 11 du questionnaire rempli par l’honorable Sharon Matthews.

Questionnaire en vue d’une nomination à la magistrature

[...]

Partie 5 – Exigences linguistiques

Veuillez prendre note qu’en plus de vos réponses aux questions suivantes, votre connaissance fonctionnelle des deux langues pourrait être évaluée.

Sans formation supplémentaire, êtes-vous capable de lire ou de comprendre des documents de la cour :

  • En anglais : Oui
  • En français : Non

Sans formation supplémentaire, êtes-vous en mesure de discuter d’affaires juridiques avec vos collègues : 

  • En anglais : Oui
  • En français : Non

Sans formation supplémentaire, êtes-vous capable de converser avec un avocat en cour : 

  • En anglais : Oui
  • En français : Non

Sans formation supplémentaire, êtes-vous capable de comprendre les observations orales présentées en cour : 

  • En anglais : Oui
  • En français : Non

Partie 6 – Études

Noms des établissements, années d’études, diplômes et années d’obtention :  

  • École primaire Irwin Park, 1972-1980, maternelle à la 7e année, 1980
  • École secondaire Hillside, 1980-1985, diplôme d’études secondaires – diplôme Dogwood, 1985
  • Université de la Colombie-Britannique, 1985-1992, B. Com. (avec distinction), baccalauréat en droit, 1992

Formation continue :

Non juridique :

  • Cours de photographie, 1994
  • Art Institute of Vancouver - Arts culinaires - Cours de la Wines Foundation, Wine Spirits Education Trust, Niveau 1, 2002
  • Cours de vélo tout-terrain, vers 2001
  • Cours de ski de bosses, vers 2004
  • Divers cours de cuisine, 2012, 2013 et 2014

Distinctions académiques :

  • École primaire Irwin Park, Concours d’art oratoire, premier prix, septième année, 1988
  • École secondaire Hillside, tableau d’honneur, cours Law 11, 1985
  • Épinglette en or de l’école secondaire Hillside, tableau d’honneur pendant cinq ans, 1985
  • Bourses d’études de la province de la Colombie-Britannique, 1985
  • Bourse d’études commémorative David House, 1988
  • Bourse d’admission de la Fondation UBC Law School, 1989
  • Association du Barreau canadien, division de la Colombie-Britannique, Médaille du président, 2003
  • Association des diplômés en droit de l’Université de la Colombie-Britannique, Prix des jeunes diplômés exceptionnels, 2006
  • Association du Barreau canadien, division de la Colombie-Britannique, Médaille du président, 2010
  • Association du Barreau canadien, division de la Colombie-Britannique, Médaille du président, 2012
  • Nommée conseillère de la Reine en 2012

Partie 7 – Antécédents professionnels

Veuillez indiquer, dans l’ordre chronologique et à partir du plus récent, les emplois que vous avez exercés et précisez pour chacun la durée d’emploi et le nom de l’employeur. En ce qui concerne les emplois dans le domaine juridique, veuillez inscrire les secteurs de travail ou les spécialisations, ainsi que les années correspondantes. Au besoin, indiquez si les secteurs de travail ont changé.

Expérience de travail dans le domaine juridique :

  • Depuis janvier 2001 - Associée, Camp Fiorante Matthews Mogerman LLP - associée par l’entremise de mon cabinet d’avocats, Sharon Matthews Law Corporation
    • Les domaines de travail et de spécialisation ont été les litiges en matière de responsabilité des produits, les litiges en matière d’aviation et les recours collectifs, ainsi que le droit constitutionnel et le droit public
  • Août 1993 à décembre 2000 – Stagiaire en droit, associée et partenaire (par l’entremise de Sharon Matthews Law Corporation - Camp Church & Associates)
    • Les domaines de travail qui sont devenus des domaines de spécialisation comprennent le droit de la responsabilité des produits et le droit de l’aviation, puis le domaine des recours collectifs lorsque la Loi sur les recours collectifs a été adoptée en 1996.
  • Août 1992 à juillet 1993 - Stagiaire en droit, Russell & DuMoulin,
  • Mai 1991 à août 1992 - Stagiaire en droit, temps partiel, Russell & DuMoulin

Expérience de travail dans un domaine non juridique :

  • Gardiennage d’enfants à l’adolescence
  • Arbitre au soccer à l’adolescence
  • Serveuse, Big Scoop Restaurant, 1983-1984
  • Préposée à la caisse, Shoppers Drug Mart, 1984-1992
  • Caissière, Banque de Montréal, 1986-1991

Autres expériences professionnelles :

Inscrivez toutes les associations du barreau ou comités d’affaires juridiques dont vous êtes ou avez été membre, et tous les titres des postes que vous avez occupés au sein de ces groupes, ainsi que les dates correspondantes.

  • Barreau de la Colombie-Britannique :
    • Membre depuis 1993
    • Conseillère depuis 2014
  • Association du Barreau canadien :
    • Membre depuis 1993
    • Présidente sortante, ABC, division de la C.-B., 2012-2013
    • Présidente, ABC, division de la C.-B., 2011-2012
    • Vice-présidente, ABC, division de la C.-B., 2010-2011
    • Secrétaire-trésorière, ABC, division de la C.-B., 2009-2010
    • Membre du comité exécutif, ABC, division de la C.-B., 2003-2005
    • Présidence de comités, ABC, division de la C.-B. : Comité de vérification, Comité des relations gouvernementales, Comité des résolutions et des règlements, Comité des services aux membres et Comité des sections, 2002-2011
    • Membre élue du conseil, division de la C.-B., comté de Vancouver, 2009-2012 et 2001-2007
    • Membre du Conseil national de l’ABC, 2001-2007
    • Secrétaire, puis coprésidente, secteur des recours collectifs, division de la C.-B., 2000-2003
  • Advocates Club, 1998-2003 (Présidente en 2003)
    • Membre, Trial Lawyers Association of BC
  • The Advocates Society, membre et membre du comité consultatif de la Colombie-Britannique (depuis 2016)
  • Conseil de la magistrature de la Colombie-Britannique, représentante de la division de la C.-B. de l’ABC, 2012

Activités pro bono :

  • Représenté un certain nombre de clients qui sont venus me voir régulièrement et sans frais au fil des ans (j’estime à trois le nombre de cas de personnes qui ne sont pas apparentées à moi et à quatre le nombre de cas de membres de la famille)
  • Agi bénévolement pour l’Association des libertés civiles en cherchant à intervenir dans une affaire relative aux frais de transcription pour les appels de la Cour provinciale à la Cour suprême de la Colombie-Britannique
  • Agi sur la base d’honoraires réduits, puis bénévolement pour l’Association du Barreau canadien dans le cadre de l’affaire de l’aide juridique - Association du Barreau canadien c. Colombie-Britannique au niveau de première instance, 2006, BCSC 1342; la Cour d’appel de la Colombie-Britannique 2008 BCCA 346; et demandé l’autorisation de la Cour suprême du Canada d’en appeler, la demande d’autorisation d’appel a été rejetée
  • Agi bénévolement pour le compte de l’ABC, division de la C.-B. dans l’affaire Vilardell c. Dutton/Trial Lawyers Association of BC c. Colombie-Britannique en première instance, 2012 BCSC 748, en appel, 2013 BCCA 65 et devant la Cour suprême du Canada, 2014 CSC 59
  • Participation à l’initiative « Access Pro Bono Roster Lawyer »
  • Clinique de protection des consommateurs, Access Pro Bono - ma première participation aura lieu en mai 2017

Enseignement et formation continue :

Indiquez toutes les organisations et activités de formation judiciaire ou juridique auxquelles vous avez pris part (p. ex., enseignement dans une faculté de droit, à l’Institut national de la magistrature, à l’Institut canadien d’administration de la justice, etc.).

  • Advocates Club – Dissertations, 1998 et 2001
  • Institut canadien - Conférence nationale sur les recours collectifs, conférencière et présentatrice, 2002
  • ABC, division de la C.-B., Section des recours collectifs, conférencière et présentatrice, 2002 et 2017
  • CLEBC - Conférencière et présentatrice lors de Conférence sur les recours collectifs, 2005
  • Séminaire sur l’aviation du Nord-Ouest, conférencière et présentatrice, 2005
  • Colloques annuels de perfectionnement professionnel Osgoode sur les recours collectifs, 2007 et 2008
  • ABC, division de la C.-B., conférencière et présentatrice à la conférence annuelle de la division de la C.-B., 2009 et 2011
  • TLABC - Conférencière et présentatrice, Chronic Pain On Trial, 2009
  • UBC Law - Séminaire sur les recours collectifs et les délits de masse, conférencière invitée, 2010
  • TLABC - Conférencière et présentatrice, Techniques de pointe pour le tribunal, 2010
  • Worksafe BC, journée de perfectionnement professionnel, conférencière et présentatrice, 2011
  • CLEBC, Les recours des actionnaires 2011, conférencière et présentatrice, 2011
  • ABC, division de la C.-B., et l’Association du Barreau de North Share, L’éthique en action, enseignante, 2012
  • ABC, division de la C.-B., Perfectionnement professionnel, 2013
  • CLEBC - Conférence sur les recours collectifs dans l’Ouest canadien, 2013
  • UBC Law, cours sur l’éthique et le professionnalisme, conférencière invitée, 2013
  • ABC, Sommet sur l’accès à la justice - Débat sur l’aide juridique universelle financée par l’État
  • CLE, coprésidente et présentatrice, Conférence sur le contentieux des affaires civiles, 2014
  • Camp Fiorante Matthews, dîners-conférences, 2013 à 2016
  • The Advocates Society, enseignante « Civil Trial Advocacy College » et « Evidence that Wins », 2015
  • The Law Society, PLTC Ethics, conférencière invitée, 2015
  • CLEBC - Maîtriser les preuves civiles, enseignante, 2016
  • Barreau du Québec, Conférence nationale sur les recours collectifs, Enseignante et présentatrice, 2017
  • TRU - Conférencière invitée - les recours collectifs, 2017

Activités communautaires et civiques :

Indiquez toutes les organisations dont vous êtes membre ou tout poste que vous avez occupé, ainsi que les dates correspondantes.

[...]

  • Membre et ensuite présidente du Strata Council for 3658 Banff Court, North Vancouver, 1998‑2002 
  • Membre, Hollyburn Country Club, depuis 2006

Partie 11 – Le rôle de la fonction judiciaire dans le système juridique canadien

Le gouvernement du Canada souhaite nommer des juges ayant une connaissance approfondie de la fonction judiciaire au Canada. Afin de fournir une base solide à leur évaluation, on demande aux candidats de donner leur opinion sur des sujets généraux liés à la fonction judiciaire et au système juridique au Canada. Pour chacune des questions ci-dessous, veuillez fournir une réponse de 750 à 1 000 mots.


1. Selon vous, quelle est votre plus grande contribution au droit et à la quête de la justice au Canada?

La contribution la plus importante que j’ai apportée au droit et à la poursuite de la justice a été une multitude d’efforts pour améliorer l’accès à la justice.

Aux alentours de 2000, j’ai entendu Dugald Christie parler du travail bénévole. Je travaillais déjà bénévolement, mais cette rencontre a renforcé en moi l’impératif de le faire en raison de la situation difficile de ceux qui ont besoin d’une représentation juridique, mais qui n’en ont pas les moyens.

En 2005, j’ai fait partie d’une équipe qui a été nommée pour donner suite au cas type de l’aide juridique de l’ABC. Elle a été présentée comme une affaire systémique affirmant que les principes constitutionnels écrits (art. 7 et 36(1) de la Charte) et les principes constitutionnels non écrits (accès à la justice et indépendance judiciaire) appuyaient le droit à l’aide juridique dans certaines circonstances. L’affaire a été présentée comme une affaire systémique parce que la plupart des personnes qui ont besoin d’aide juridique n’ont ni le temps ni les ressources nécessaires pour présenter une cause préliminaire au sujet du droit à un avocat avant de résoudre leur problème juridique sous-jacent.

L’affaire a été radiée à l’étape des actes de procédure, principalement au motif que la demande ne pouvait pas être présentée sur une base systémique avec l’ABC en tant que demandeur. L’appel a été rejeté et l’autorisation d’interjeter appeler auprès de la Cour suprême du Canada a été refusée. À l’époque, l’affaire Christie était également devant les tribunaux. Dans cette cause, la Cour suprême du Canada a affirmé, dans une remarque incidente, qu’il n’y avait pas de droit constitutionnel à l’assistance d’un avocat, un point qui a fait son chemin dans le raisonnement des tribunaux dans l’affaire de l’ABC.

En réfléchissant à cette lourde perte, un de mes collègues m’a dit que « parfois, l’impossible prend un peu plus de temps ».

La division de la Colombie-Britannique de l’Association du Barreau canadien (DCBABC) s’est regroupée en tendant la main à d’autres organismes de justice pour qu’ils travaillent ensemble. Lors d’une réunion, l’idée a été soulevée d’encourager le gouvernement de la Colombie-Britannique à mettre sur pied une commission d’enquête sur l’état de l’aide juridique. J’ai discuté de cette idée avec le Comité exécutif de la DCBABC. L’Association a décidé d’organiser une commission avec d’autres partenaires du système judiciaire : la Commission publique sur l’aide juridique en matière civile, dirigée par le commissaire Len Doust.

Au cours de la même période, la DCBABC a retenu mes services à titre d’avocate bénévole dans l’affaire Vilardell c. Dutton au sujet de la demande d’une partie se représentant elle-même d’être libérée des frais d’audience dans son différend en droit de la famille.

Mon co-avocat et moi-même avons trouvé un avocat bénévole pour la plaignante non représentée et avons travaillé avec lui et avec l’avocat de la Trial Lawyers Association of British Columbia sur la question de savoir si les frais d’audience étaient constitutionnels. Nous avons débattu des questions au procès, à la Cour d’appel de la Colombie-Britannique et à la Cour suprême du Canada.

Pendant que l’affaire des frais d’audience se poursuivait, Len Doust a commencé à tenir des audiences dans toute la province au sujet de l’aide juridique. Les arguments des utilisateurs du système juridique qui ont besoin d’aide juridique, ceux des avocats et d’autres personnes qui tentent de les aider étaient plus que convaincants. Le rapport de M. Doust, en particulier sa chronique des problèmes dans les collectivités rurales et éloignées et au sein de la population autochtone, a changé la donne et galvanisé davantage de la DCBABC dans le dossier de l’aide juridique. J’ai assisté à des réunions avec le commissaire Doust et des membres du ministère des Services juridiques et d’autres intervenants du système de justice pour discuter des mesures à prendre pour donner suite à ses recommandations.

La DCBABC a ensuite lancé une campagne de mobilisation du public pour appuyer la première recommandation de M. Doust, à savoir que l’aide juridique soit considérée comme un service public essentiel. J’ai parcouru la province pour rencontrer des organismes communautaires et donner des entrevues aux médias afin de sensibiliser le public à l’importance de l’aide juridique. Nous avons parlé des gens qui ont besoin d’aide juridique et nous avons présenté les arguments économiques et sociaux pour expliquer pourquoi c’était faisable et nécessaire. Cette année-là, il y a eu une légère augmentation du budget de l’aide juridique, mais plus importante encore, lors des élections générales provinciales de 2013, le Parti libéral et le Nouveau Parti démocratique ont inclus les questions d’accès à la justice dans leurs programmes; une première à ma connaissance.

Les travaux d’un comité mis sur pied par la juge en chef McLachlin sur l’accès à la justice et un comité distinct sur l’accès à la justice mis sur pied par l’ABC étaient également en cours. J’étais l’une des 100 personnes intéressées par l’accès à la justice qui ont été invitées au colloque national de la juge en chef McLachlin sur l’accès à la justice en matière civile et familiale tenu en janvier 2014. Après ce colloque, les participants de la Colombie-Britannique se sont réunis pour travailler à l’établissement d’un organisme provincial chargé de coordonner et d’encourager les efforts sur l’accès à la justice. J’ai participé à la création de la Commission d’accès à la justice de la Colombie-Britannique, dirigée par le juge en chef Bauman.

À la fin de 2014, la Cour suprême du Canada a rendu son jugement dans l’affaire des frais d’audience : Trial Lawyers Association of British Columbia c. Colombie-Britannique, [2014] 3 RCS 31. Elle a statué que le pouvoir de percevoir des droits en vertu du paragraphe 92(14) de la Loi constitutionnelle de 1867 doit être interprété en harmonie avec l’article 96 de la Loi constitutionnelle de 1867. L’accès aux tribunaux en vertu de l’article 96 fait partie de la compétence fondamentale ou inhérente des tribunaux et ne peut être abrogé par aucun ordre de gouvernement. Le principe de l’accès aux tribunaux trouve également son appui dans une interprétation harmonieuse de l’art. 96 avec les principes de la primauté du droit, qui assure un certain degré de protection constitutionnelle pour l’accès à la justice.

Le raisonnement de la Cour concernant la place de l’accès à la justice dans l’interprétation des principes constitutionnels écrits et non écrits constituent un grand pas en avant. Le passage du jugement qui m’a le plus réjoui a été celui où la Cour a déclaré que la capacité des particuliers de se présenter devant les tribunaux pour faire régler leurs différends constituait « le cœur même de l’objectif des tribunaux » [au paragraphe 32]. À mon avis, l’égalité d’accès à la justice pour tous, quelle que soit leur situation de marginalisation, est l’essence même de la primauté du droit. Il s’agit d’une notion simple, mais sa reconnaissance m’a permis d’atteindre un objectif auquel je travaillais depuis un certain temps.


2. Comment votre expérience vous a-t-elle permis de saisir la variété et la diversité des Canadiens et des Canadiennes et leurs perspectives spécifiques?

Je suis une femme d’origine essentiellement britannique, élevée dans les croyances de l’Église anglicane. Mon éducation a été homogène, à quelques exceptions près pendant mes années d’étude. Mon expérience de la variété et de la diversité des Canadiens n’était pas abondante jusqu’à ce que je commence à pratiquer le droit. À ce moment-là, mon exposition à des personnes aux capacités physiques et mentales diverses, et aux origines raciales, ethniques, religieuses et sexuelles variées a considérablement augmenté.

Ma première amie dans la vie était une fille du même âge que moi qui vivait à deux portes de chez moi. Elle est née au Canada de parents d’origine chinoise. Nous avons fréquenté tous les niveaux de l’école ensemble, mais ce n’est qu’après avoir commencé l’université où il y avait beaucoup d’autres personnes d’origine chinoise que j’ai réalisé qu’elle était l’une des rares personnes non blanches pendant notre enfance. À l’université, mon cercle d’amis comprenait beaucoup plus de personnes d’origines ethniques diverses, y compris des personnes d’origine chinoise. Un soir, j’étais avec des amis, y compris ma première amie, et une personne a dit à la blague que j’étais « la seule personne blanche ». Cela m’a fait réfléchir à la raison pour laquelle je ne me sentais pas minoritaire même si je faisais partie de ce groupe. En même temps, je me doutais que ce n’était pas ce que mon amie chinoise ressentait tout au long de notre enfance. Je me suis aussi rendue compte que les gens d’origines étrangères m’attiraient en tant qu’amis, en partie parce que je trouvais intéressantes les différences entre leurs héritages et le mien. C’était le début d’une prise de conscience que les différences enrichissent les relations et que la discrimination est surtout une question d’ignorance et de peur des différences.

La faculté de droit a été ma première véritable rencontre avec les Autochtones. Ma partenaire de première année appartenait à la bande Musqueam. J’étais une étudiante en droit très assidue. Elle m’a clairement indiqué que son but était de terminer la tâche (le critère réussite ou échec) et qu’il pourrait donc y avoir quelques différences dans les approches que nous allions adopter. C’était une excellente partenaire. Entre autres choses, elle était mature et intelligente, elle avait des expériences de vie et elle était une bonne communicatrice. Malheureusement, je n’en ai pas profité pour en apprendre davantage de ses origines autochtones. Ce n’était pas quelque chose avec laquelle j’étais à l’aise. En rétrospective, c’était une manifestation personnelle de la façon dont nous dévalorisons les peuples autochtones du Canada.

Au cours de ma pratique, j’ai eu l’occasion de rencontrer des gens d’horizons et de perspectives différents. Un peu plus tôt, j’ai décrit une enquête du coroner tenue à Klemtu, en Colombie-Britannique, une communauté autochtone qui, à l’époque, souffrait d’un taux élevé de décès chez les jeunes. Les membres de cette communauté étaient des êtres humains accueillants et charmants. Mais leur souffrance était réelle et m’a fait prendre conscience des questions d’humanité dans la souffrance humaine que j’avais jusque-là ignorées en constatant cette souffrance dans les médias.

C’est ainsi que ma compréhension des diverses perspectives qui composent le Canada s’est développée au cours des 24 années qui se sont écoulées depuis le début de mes stages.

Outre les ethnies et les religions, ma pratique et mes expériences personnelles m’ont exposée à un certain nombre de personnes souffrant de maladies ou d’incapacités physiques et mentales. Je crois que la maladie mentale commence à peine à être considérée pour ce qu’elle est vraiment.

Un exemple de la richesse des expériences que j’ai vécues dans la pratique est celui des questions touchant les conjoints de même sexe. J’ai agi à titre de co-avocate dans le cadre d’un groupe de recours collectifs portant sur les prestations versées aux conjoints de même sexe en vertu du Régime de pensions du Canada. Le cas en Colombie-Britannique a finalement été intégré au cas national de l’Ontario. J’ai été co-avocate au procès, à la Cour d’appel de l’Ontario et à la Cour suprême du Canada. En travaillant sur ce dossier et en interagissant avec nos clients et les membres du groupe de partout au Canada, y compris George Hislop, un important militant ontarien des droits des gais, j’ai beaucoup appris sur la profondeur de la discrimination à l’égard des gais, particulièrement ceux qui sont infectés par le VIH.

Dans l’affaire sur les questions d’accès à la justice et les frais d’audience (décrite dans la première dissertation), nous avons retenu les services d’un économiste pour déterminer comment les personnes de divers milieux se situent sur le plan de la sécurité financière et de l’interaction avec le système de justice. Nous avons appris que les personnes vivant en dessous ou juste au-dessus du seuil de la pauvreté sont beaucoup plus susceptibles d’être des immigrants, des analphabètes, des Autochtones ou des femmes issues de mariages brisés. Ils sont également plus susceptibles d’avoir besoin d’avoir accès aux tribunaux pour résoudre des questions juridiques. Ce genre de preuve est ressorti dans de nombreuses études sur les besoins en matière d’accès à la justice que j’ai effectuées au fil des ans.

La plupart des expériences que j’ai vécues avec les Autochtones sont le fruit de mon travail bénévole au sein de la communauté juridique, où les avocats autochtones s’organisent activement pour s’entraider et se faire entendre, pour notre bien à tous. Un événement du Aboriginal Lawyers Forum a mis en vedette un poète qui a récité de la poésie slam au sujet de ses expériences en tant qu’Autochtone ayant subi des mauvais traitements chez lui et de ses propres luttes contre la toxicomanie. Ce fut l’une des performances les plus puissantes et les plus impressionnantes que j’aie jamais vues. Cela m’a donné un aperçu des expériences très humaines de la maltraitance et de toxicomanie. J’ai compris qu’en tant que collectivité, lorsque nous ne nous attaquons pas de façon significative à la situation des personnes marginalisées, nous ne faisons pas ce que la collectivité devrait faire et nous nous privons de ce que ces personnes pourraient nous apporter.

Je suis actuellement conseillère auprès du Barreau de la Colombie-Britannique. Lors de la publication du Rapport de la Commission de vérité et réconciliation, le Barreau s’est penché sur les recommandations, y compris la formation sur les compétences culturelles. Même si je connaissais l’héritage des pensionnats indiens, le caractère insidieux des pensionnats et le génocide culturel qui s’est produit m’ont frappé à la lecture du rapport de la Commission de vérité et réconciliation (le résumé). Je vois et j’écoute les choses différemment maintenant. Lors de la retraite des conseillers du barreau en 2016, des avocats et des dirigeants autochtones nous ont parlé. Certains d’entre eux intégraient des histoires et des enseignements indigènes traditionnels avec lesquels ils ont grandi. Quelle méthode puissante pour communiquer! Le lendemain, mon conjoint et moi avons fait une promenade dans la nature avec des Autochtones de la région. Nous avons marché, nous nous sommes assis et nous les avons écoutés parler de leur relation avec la nature, de l’utilisation qu’ils faisaient des plantes naturelles, de la durabilité de leurs pratiques et de leur frustration devant le non-respect de ces traditions importantes par le développement moderne.

Il y a certaines perspectives auxquelles je n’ai pas été suffisamment exposée, notamment les peuples autochtones et les questions d’identité de genre. J’apprends encore et je m’attends à ce que cela ne s’arrête jamais.


3. Décrivez le rôle que doit jouer un juge dans une démocratie constitutionnelle.

Les juges nommés par le gouvernement fédéral tranchent de façon pacifique et impartiale les différends entre les citoyens, entre les citoyens et l’État, et entre les États au sein du fédéralisme canadien.

Une démocratie constitutionnelle exige que des arbitres impartiaux interprètent et appliquent la Constitution et règlent les différends privés pour assurer l’égalité des chances grâce à la primauté du droit. Dans un fédéralisme comme celui du Canada, la Constitution est l’ensemble des règles que les citoyens ont établies pour régir leurs relations avec les gouvernements fédéral et provinciaux et entre les gouvernements au sein du fédéralisme.

La primauté du droit et la notion de constitution reposent toutes deux sur le précepte que personne, y compris le gouvernement, n’est au-dessus des lois. La réalisation de ce précepte repose à son tour sur l’existence de juges dignes de confiance, impartiaux et indépendants pour exercer un contrôle sur le pouvoir de l’État et pour entendre et trancher de manière impartiale les litiges privés et publics.

C’est Lord Bingham qui le dit le mieux dans « The Rule of Law » :

« En l’absence d’un pouvoir judiciaire indépendant et impartial pour statuer pacifiquement sur les différends, la sécurité et l’égalité sont menacées. La sécurité est menacée parce que les gens se chargeront eux-mêmes du règlement des différends si une institution solide, indépendante et impartiale de règlement des différends ne fait pas partie des arrangements institutionnels d’une société. L’égalité est menacée parce que les personnes sans pouvoir et sans ressources seront désavantagées si les lois ne sont pas mises en application par des arbitres désintéressés. » (Tom Bingham, The Rule of Law (Londres, Royaume-Uni : Penguin Books, 2010).

Récemment, en particulier dans le contexte du droit de la famille, des outils de règlement rapide des différends et des initiatives d’intervention précoce ont été mis au point pour aider et persuader les parties à régler leurs différends avant d’engager du temps et de l’argent dans les litiges. Dans certains ressorts, dans les affaires civiles, la date du procès ne peut être fixée à moins que les parties n’aient d’abord tenté la médiation. Si l’avocat d’une partie l’a informée des risques et des coûts d’un procès, le règlement est un moyen par lequel la partie peut contrôler les risques tout en obtenant un résultat acceptable. Mon expérience en tant que conseillère juridique m’a appris que ce processus peut être habilitant pour les parties à un litige. Pour créer le contexte d’un règlement équitable, il est essentiel que les parties sachent qu’un arbitre impartial est prêt à prendre une décision si elles ne sont pas en mesure de régler la question. Dans certains cas, il n’est pas possible de parvenir à un règlement équitable, surtout en cas de déséquilibre des pouvoirs ou des ressources. À ce moment-là, il est crucial qu’un arbitre impartial soit disponible pour régler les questions de façon définitive et équitable.

Il existe des différences entre les juges et d’autres décideurs impartiaux comme les arbitres privés. L’une des principales différences est l’indépendance constitutionnelle. Un autre aspect qui ne reçoit pas autant d’attention est le rôle des juges dans l’interprétation du droit, la création et le maintien du droit d’une manière qui respecte la Constitution et qui évolue pour refléter les valeurs de la société dans laquelle nous vivons. La durabilité et la souplesse sont des qualités importantes dans un ensemble de lois.

Ces différences expliquent pourquoi l’institution de la magistrature fédérale est essentielle à l’existence d’une démocratie constitutionnelle et à la réalisation de ses objectifs.


4. À qui s’adressent les décisions de la cour à laquelle vous vous portez candidate?

L’auditoire visé par la décision d’un juge de la Cour suprême de la Colombie-Britannique comprend les parties, les témoins, la victime de l’acte criminel présumé dans les affaires pénales, le public, toute cour d’appel qui peut réviser la décision et le système judiciaire dans son ensemble.

Tous les membres de l’auditoire potentiel doivent être en mesure de discerner, à partir de la décision, que le tribunal a entendue et tranché l’affaire de façon équitable, c’est-à-dire qu’il s’est concentré sur les faits, les arguments et les questions en litige et les a tranchés de façon impartiale et indépendante : voir Cojocaru c. British Columbia Women’s Hospital and Health Care Centre, 2013 CSC 30, au paragraphe 13.

Dans de nombreux cas, un juge de la Cour suprême de la Colombie-Britannique donne les motifs écrits (ou oraux) du jugement après les avoir soupesés et pris en considération. Les commentaires qui suivent portent principalement sur les motifs du jugement plutôt que sur le jugement (l’ordonnance) lui-même.

Les parties ont des intérêts en jeu. Les motifs doivent leur démontrer qu’ils ont été entendus et que leur point de vue a été pris en considération. Certains disent que la personne la plus importante dans l’auditoire est la partie qui perd parce que pour conserver la confiance de cette personne dans le système de justice, elle doit croire qu’elle a obtenu une audience équitable. Je conviens qu’il est très important que le perdant comprenne, d’après les motifs, que la preuve et les arguments qu’il a présentés ont été examinés de façon juste et impartiale par le juge. À mon avis, si les motifs sont importants à cet égard, il en va de même de l’attitude du juge pendant l’audience. Je ne crois pas qu’un juge devrait rédiger ses motifs en pensant uniquement au perdant ou même principalement à lui. Si le juge se conduit d’une manière qui est perçue comme impartiale et indépendante, et qu’il écrit de cette façon, en faisant tout son possible pour s’assurer que la partie perdante perçoive cette réalité, cela risque de créer un décalage entre l’impartialité avec laquelle l’affaire a été entendue et tranchée et les motifs qui ont été rédigés.

Les témoins qui se présentent devant le tribunal ont une expérience intime avec le système judiciaire. Ils ont peut-être été cités à comparaître. Il est possible qu’ils doivent s’absenter du travail ou de leurs responsabilités familiales. Les motifs devraient aborder leur preuve suffisamment et équitablement pour qu’ils comprennent le rôle que la preuve a joué dans le résultat.

Les victimes de crimes sont particulièrement sensibles et leur situation est difficile. Sur le plan de la pertinence, leur rôle est analogue à celui des témoins. Toutefois, le système de justice pénale compte sur les victimes pour qu’elles se manifestent et participent. Elles sont vulnérables d’une manière différente des autres témoins. On a beaucoup écrit récemment sur leur situation et leurs expériences, surtout dans les procès pour agression sexuelle. Encore une fois, la façon dont le juge traite les motifs du jugement est importante, mais il en va de même de la façon dont le procès se déroule. La présomption d’innocence, le fardeau de la preuve, l’impartialité et l’indépendance exigent une attitude d’indifférence (faute d’un meilleur terme) qui est très difficile à concilier avec le mouvement naturel de sympathie que nous avons envers les victimes de crimes. Je ne prétends pas avoir la solution au dilemme du rôle et du traitement appropriés des victimes dans les procès criminels. Ce sera l’un de mes nombreux défis d’apprentissage si je suis nommée.

Le public dans son ensemble est un auditoire important pour ce qui est des motifs de décision. Bien que certaines affaires, comme les affaires constitutionnelles et les affaires pénales, aient une dimension plus publique que les litiges privés, toutes les affaires qui sont portées devant les tribunaux sont financées par le public et celui-ci a intérêt à ce que tous les citoyens aient les moyens de régler pacifiquement leurs différends devant un juge impartial et indépendant. L’ensemble du droit qui s’élabore à partir des motifs de jugement sert le public dans son ensemble. C’est une autre façon de dire que le système de justice dans toutes ses manifestations, y compris les motifs de jugement, est un bien public.

Les motifs jouent également un rôle fonctionnel en fournissant une explication de la décision aux fins de la révision en appel. À cet égard, l’auditoire est la cour d’appel et les exigences fonctionnelles consistent à démontrer si les conclusions de fait et l’application de la loi sont manifestement déraisonnables, raisonnables ou exactes, selon la norme de contrôle applicable.

Enfin, les motifs de jugement font partie de l’ensemble des lois interprétant la Constitution, le Code criminel du Canada, les lois fédérales, les lois provinciales et la common law. Tous les participants et futurs utilisateurs du système de justice constituent l’auditoire des décisions judiciaires.


5. Prière d’indiquer les qualités personnelles, les compétences et aptitudes professionnelles ainsi que l’expérience de vie qui, selon vous, vous rendent apte à exercer le rôle de juge.

J’aborderai cette question en décrivant les qualités que je crois posséder, la façon dont je les utilise professionnellement et la façon dont je les canaliserais dans le travail d’un juge.

Mes qualités sont : l’humilité, qui me permet d’apprendre à partir d’expériences réussies et non réussies; une solide éthique de travail; un intellect qui me permet d’apprendre relativement rapidement; de solides capacités de réflexion conceptuelle; la capacité d’empathie et de compréhension des dynamiques humaines qui sont en jeu.

Ces qualités ont été développées et affinées par mes clients. Une partie importante de ma pratique consiste à agir pour des personnes (ou les personnes à leur charge survivantes) qui ont été blessées ou tuées dans des accidents d’aviation ou des accidents donnant lieu à des réclamations en responsabilité du fait des produits. Mon rôle en tant que conseillère juridique auprès de ces personnes a été une leçon d’humilité. Ce que j’ai appris d’eux sur la façon dont la résolution de leurs problèmes juridiques s’inscrit dans leur vie, ainsi que ma nature d’empathie et d’authenticité m’a poussée à essayer d’utiliser la loi pour responsabiliser mes clients.

Souvent, retenir les services d’un avocat est quelque chose que mes clients « doivent faire » à la suite d’un accident grave. Quand ils me voient pour la première fois, ils veulent simplement cocher la case indiquant qu’ils ont retenu les services d’une avocate. J’ai appris qu’au début de mon mandat, je dois reconnaître l’espace dont mes clients ont besoin pour guérir de leurs blessures et de leurs pertes. Je travaille dur pour faire avancer l’affaire sans monopoliser leur temps. Lorsqu’ils sont prêts à s’engager, c’est le moment où je peux travailler avec eux pour qu’ils soient renforcés par leurs choix et leur participation dans le système judiciaire.

Les outils que j’utilise comprennent une écoute attentive de tout ce dont mes clients veulent parler. Indépendamment de la pertinence directe de la poursuite, il est toujours utile pour moi de comprendre leur situation et leurs motivations. J’explique également le point de vue des autres parties et pourquoi le tribunal va écouter les autres parties avec une oreille et un esprit ouverts. En effet, les clients ne doivent pas être surpris par le fait que leur point de vue n’est pas le seul qui soit pertinent pour un juge impartial.

Je m’imprègne également des aspects juridiques et techniques de leur dossier, y compris les aspects médicaux, scientifiques, techniques et économiques. Cela influe sur la confiance que mes clients, l’avocat de la partie adverse et le tribunal m’accordent. Cela signifie que je suis toujours en train d’apprendre et que je dois prendre le temps d’aborder des choses que je ne comprends pas quand je commence.

Je suis une ardente défenseure des objectifs de mes clients. En même temps, je prends soin de ne pas faire d’humour à mes clients en approuvant des objectifs qu’ils ne peuvent atteindre par le biais du système judiciaire ou en prenant des instructions pour adopter une position déraisonnable. J’y parviens en expliquant ce qui n’est pas réalisable tout en reconnaissant la validité extra-légale ou du moins les racines de leurs objectifs. D’ici là, j’espère avoir gagné leur confiance et développé une relation de confiance et de respect mutuel afin qu’ils puissent accepter ce qu’ils ne veulent pas entendre.

Enfin, d’ici à ce que le règlement soit négocié ou qu’un procès ait lieu, je donne à mes clients une opinion approfondie sur l’éventail raisonnable de résultats ventilés par question et incluant la preuve que je m’attends à recevoir de toutes les parties et la loi applicable. Au début des négociations, ils disposent déjà de l’information pour évaluer les offres de règlement. Cela donne aussi au client l’assurance que j’ai examiné tous les aspects de son cas, que j’ai écouté tout ce qu’il m’a dit et que je suis prête à aller en procès en l’espèce.

Quand je lis ça, ça me semble évident. Cela n’a pas toujours été le cas; c’est plutôt le produit de nombreux faux pas et de dures leçons. Il n’est pas facile, dans une pratique bien remplie, de ralentir, d’écouter vraiment et de s’assurer que les attentes de chacun sont en phase et qu’elles sont respectées. Je sais qu’avec la plupart de mes clients, j’ai réussi à cet égard en raison de ce qu’ils me disent à la fin de leur dossier.

Une cliente victime d’un accident d’aviation, qui a subi des blessures graves dans le même accident qui a causé la mort d’un de ses enfants et de graves blessures à un autre, a dit détester la raison de notre rencontre, mais que comme elle devait rencontrer un avocat, elle était heureuse d’être tombée sur moi.

Une cliente pro bono qui s’était enlisée dans des questions de procédure en essayant de se représenter elle-même m’a dit que j’avais dissipé le brouillard dans lequel elle se trouvait.

Une cliente a amené ses enfants me rencontrer, parce qu’elle voulait qu’ils sachent qu’il y a des gens qui aident dans le monde.

Mes clients m’ont appris que la façon dont le système de justice les traite est aussi importante que le résultat. Chacun de mes clients a mis à l’épreuve ma capacité à exploiter efficacement mes qualités personnelles et chacun m’a appris quelque chose. La compétence la plus difficile que j’ai approfondie est l’écoute active. Je suis naturellement empathique, mais au début de ma carrière, j’en arrivais à des conclusions hâtives sur ce qui s’est avéré être une erreur. J’ai appris à ralentir et à écouter attentivement et plus longtemps que je ne le pensais nécessaire.

Si je suis nommée, je prendrai les leçons et les compétences apprises de mes clients et je les réorienterai pour m’assurer qu’en tant que juge, je traite les gens d’une manière qui inspire confiance dans le système judiciaire. Je crois que ma capacité de travailler fort, d’apprendre des domaines techniques difficiles, de comprendre la dynamique humaine d’une situation et d’écouter vraiment pour comprendre le point de vue des personnes qui comparaissent devant moi m’aidera à franchir la courbe d’apprentissage abrupte marquant le passage du rôle d’avocate à celui de juge.


6. Compte tenu de l’objectif voulant que les Canadiens et Canadiennes se reconnaissent et reconnaissent leur expérience de vie dans les visages de la magistrature, vous pouvez, si vous le voulez, ajouter des renseignements sur vous-même dans la mesure où ils serviraient cet objectif.

Franchement, je ne sais pas si mes expériences de vie se reflètent dans mon visage.

J’ai grandi dans un environnement d’amour et de soutien qui m’a inspiré confiance en moi. J’ai vécu des expériences de vie qui ont été stressantes, difficiles et effrayantes. En tant qu’avocate, j’ai également rencontré des cas de comportement décevant que j’attribue à du sexisme inconscient. En tant que membre de famille et comme amie, j’ai soutenu des êtres chers atteints de maladies physiques, de maladies mentales, de difficultés financières et d’autres difficultés. On me dit que mon comportement reflète la confiance. Si mon visage reflète l’ensemble de mes expériences de vie, le résultat sera beaucoup plus positif que négatif; beaucoup plus de privilèges que de privations.

Je serais déterminée à montrer à ceux qui comparaîtraient devant moi une juge empathique et préoccupée par les questions que les parties soumettent au tribunal ainsi que par l’application régulière de la loi qui encadre leur affaire. J’espère qu’ils verraient dans mon attitude et dans mon comportement une juge déterminée à traiter les usagers des tribunaux avec respect, dignité et sensibilité envers leur situation et qui travaille fort afin de trancher les questions portées devant elle. Je crois, et on me l’a dit tout au long de ma vie adulte, que ma nature empathique inspire les gens à se confier à moi et à demander conseil. Je souhaiterais démontrer à ceux qui comparaîtraient devant moi que j’écoute, que je les entends et que j’essaierai de tenir compte de l’ensemble de leur situation tout en appliquant la loi de façon impartiale et indépendante.

Je ne peux pas conclure cette question sans reconnaître ce que mon visage et mes expériences ne reflètent pas. Je suis dans la majorité raciale. Je n’ai jamais connu la brutale injustice du racisme. J’ai essayé de l’imaginer et je suis convaincue que je ne suis pas à la hauteur, mais ce que j’imagine, c’est une brutalité injuste et frustrante de me faire arnaquer sans raison valable. Je suis majoritaire en ce qui concerne l’orientation sexuelle et l’identité de genre et les mêmes commentaires s’appliquent. Je ne peux imaginer ce que c’est que d’être une personne autochtone dont la riche histoire, la culture, la langue et les traditions ont été systématiquement dévalorisées et détruites. Plus récemment, ma nouvelle et croissante éducation dans ce domaine me porte à croire que le Canada s’est rendu un mauvais service en privant le pays de la participation des riches perspectives communautaires et des modèles de gouvernance des peuples autochtones. Mais je sais que je défends ces points de vue sur un plan académique ou intellectuel. Je ne peux qu’essayer d’en apprendre davantage sur les expériences vécues par les Autochtones.

Si on m’offre un poste de juge, je m’efforcerai de m’assurer que ceux qui comparaissent devant moi voient et vivent l’expérience d’une juge qui fait de son mieux pour respecter la garantie ultime de la primauté du droit : que tous aient des chances égales dans la société canadienne de poursuivre leurs objectifs et de réaliser leurs rêves.

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